Les yeux d’Adria fatiguent. C’est fou à quel point elle a sommeil ces temps-ci, elle irait se coucher à vingt heures tous les soirs depuis plusieurs jours si elle s’écoutait, alors qu’elle a tendance à frôler les minuits, d’habitude. Sans doute un effet secondaire de ce début de grossesse, mais pas qu’elle dorme bien depuis un moment, de toute manière, comme elle est tracassée. D’une manière ou d’une autre, décide-t-elle, c’est la faute de ce petit embryon qui a pris place en elle. Axel est parti modérer le
live d’Adrian dans sa chambre, comme il vient de sortir un album de musique (à 18h tout juste) — oui oui, de musique, projet qui a longuement étonné Adria, mais il faut dire qu’au final, cet album (du moins, les deux chansons qu’elle a écoutées depuis que son frère est parti s’enfermer dans sa chambre) est plutôt bien. Surprenant, d’un sens, mais pas d’une mauvaise manière. C’est cool qu’il ait des projets qui sortent du
gaming, se dit-elle, car il est bien de sortir de sa zone de confort. Et sortir de sa zone de confort, c’est un truc que la plus jeune des Thomas adore faire, bien que ça soit davantage avec des sports qui fournissent une bonne dose d’adrénaline.
Elle
scroll sur Instagram sans but autre que de se changer les idées, peut-être aussi pour se donner un peu d’inspiration pour ses prochains posts à elle. Elle attend surtout qu’Adelia revienne, pour la saluer, lui annoncer qu’elle est là et qu’elle aimerait bien rester chez eux quelques temps. Combien de temps… Adria n’en sait rien. Pas qu’elle ne veuille abuser de leur hospitalité, non plus, bien qu’elle sache qu’ils ne la feront jamais sentir de trop. Mais… le temps qu’elle trouve le courage de leur annoncer ce qu’elle a sur le coeur, le temps qu’ils l’aident à prendre la meilleure décision pour la suite. Depuis toute petite, elle a toujours eu l’impression qu’étant ses aînés, ils avaient toutes les réponses dans leur sac imaginaire. Bon, elle réalise à présent que c’est peut-être un peu enfantin de penser ça, qu’ils ne peuvent certainement pas prendre une grosse décision comme celle-ci à sa place. Et que, surtout, ça serait horrible de leur demander ça pour qu’elle se sauve de ses propres responsabilités… non?
Adria ne s’est pas rendu compte qu’elle s’était endormie, néanmoins, jusqu’à ce qu’un bruit la réveille. Son téléphone repose dans le creux du canapé à présent, mais elle n’y porte guère attention. Ce qui l’intéresse, c’est le bruit d’une clé dans la serrure de la porte d’entrée, et ladite porte qui est en train de s’ouvrir. Aussitôt, ses pieds retrouvent le sol et la propulsent jusqu’à l’entrée. Sa grande soeur est en train de verrouiller de nouveau la serrure et Adria en profite pour la surprendre et la serrer dans ses bras, alors qu’elle lui tourne le dos.
« Adelitaaaa, surprise! » chantonne-t-elle. Il faut dire qu’elle est plutôt habile pour faire en sorte que ses tempêtes intérieures ne paraissent pas sur son visage. Elle se recule brièvement pour laisser son aînée respirer un peu.
« Tu rentres tard », remarque-t-elle, avant de se reprendre immédiatement:
« Ce n’est pas un reproche, hein! » Ce ne serait pas du tout sa place que ça le soit.
« J’avais juste vraiment très hâte de te voir », lui avoue-t-elle dans un sourire, s’emmitoufflant un peu plus dans sa veste, comme si ça pouvait cacher son ventre… certes, inexistant encore. Adria a fait promettre à leur frère de ne pas prévenir Addie par message qu’elle était à Hamburg. elle voulait la surprendre d’elle-même, tout comme elle l’avait fait avec Axel un peu plus tôt.