(CORNELIA) teammates

Sa place dans l'équipe nationale est déjà assurée. Cornelia le sait depuis quelques jours. Son coach s'en doute depuis la fin de la saison dernière mais c'est maintenant officiel. Elle fait parti de l'équipe qui représentera l'Allemagne aux mondiaux, considérant les bons résultats de sa saison précédente. Mais l'équipe nationale n'est pas encore complète et les sélections auront lieux sous peu. Des sélections que Liwia va passer. Des sélections pour lesquelles Cornelia l'aide à se préparer.

Elles sont amies, mais également rivale. Elle le sait, si Liwia est sélectionnée, cela veut dire qu'elles s'affronteront dans les plus hautes compétitions de la nation comme à l'international. Bien sûr, Liwia pourrait lui prendre quelques médailles d'or. Mais ce n'est pas pour autant que Cornelia la laisserai en arrière. Elle n'est pas comme ça point ambitieuse, sans aucun doute, mais pas du genre à mettre de bâton dans les roues de la concurrence. Elle ne l'a jamais fait, elle ne commencera pas aujourd'hui. Elle sera même contente de voir son amie réussir, quoique forcément un peu déçue pour elle.

"- Ouai... C'est un des éléments imposés ils veulent être sûrs que toute l'équipe sait au moins faire ses triples de tous les sauts."

Surtout avec, en face, la concurrence des supernovas Russes, qui sortent des quads à chaque programme. Ces mêmes quads que Corny sait encore sauter, parce qu'elle les travaille depuis longtemps et parce qu'elle est encore un poids plume aussi, mais dont elle a bien vu malgré tout que cela devient moins évident que lorsqu'elle avait seize ou dix-sept ans.

Se remettre sur les rails après une blessure ou après un événement traumatique n'est jamais simple et Cornelia en sait quelque chose, puisqu'elle est passée par là elle aussi. Il fut un temps où elle pensait qu'elle ne pourrait peut-être plus jamais patiner. Un moment de sa vie où elle désespérait, ne sachant pas si sa cheville pourrait tenir la route, les entraînements, l'exigence qui incombe à une patineuse professionnelle. Mais elle s'était remise, bien mieux qu'elle ne l'aurait cru - surtout bien moins blessée qu'elle ne l'avait redoutée - et elle avait pu retrouver la glace. À ce moment-là de sa vie, elle avait pu compter sur le soutien de sa famille, de son petit copain de l'époque et, bien sûr, de ses amis, dont Liwia faisait partie. À l'époque, la rouquine ne l'avait pas laissé tomber. Elle l'avait poussé dans ses retranchements dès lors qu'elle avait repris les entraînements, la poussant plus loin, persuadée que la brune pourrait retrouver son niveau d'avant blessure en un rien de temps. Elle avait eu raison d'y croire, puisque ça avait été le cas. Aujourd'hui, les places étaient échangées. C'était Liwia qui avait besoin de l'aide et de la foi de son amie, et Cornelia ne comptait pas lui donner moins que ce qu'elle avait reçu elle-même.

"- Bien sûr que si tu vas y arriver ! J'ai confiance en toi, je sais que tu en es capable ! Il faut que tu trouves en toi assez de force pour y croire toi aussi et ce triple ne sera plus qu'une formalité !" affirme la brune. "Je compte pas te laisser tomber Liwia, on reprendra ce triple aussi longtemps que tu auras besoin de le travailler !"

Elle y croit. Liwia doit y croire aussi pour réussir. Corny lui adresse un sourire encourageant avant de patiner elle-même, de sorte à ne pas laisser ses muscles refroidir, dès fois qu'elle aurait besoin d'intervenir pour sécuriser Liwia pendant l'exercice. Autant éviter de partir à froid et se blesser stupidement avant le début de la saison.

"- Je sais que c'est difficile quand on a pas patiné depuis longtemps, mais c'est surtout dans la tête, tu peux me croire !"

Si une chose est sûre et certaine, c'est que Cornelia ne laissera pas tomber son amie, sa coéquipière, sa rivale. Elle a confiance en elle et elle sait que la jeune femme peut y arriver. Elle sait qu'au bout du compte, elle arrivera parfaitement à maîtriser cet Axel. Elle y arrivait autrefois, il n'y a pas de raison qu'elle ne le puisse plus aujourd'hui. C'est vrai qu'elle manque un peu d'entraînement et que cela fait longtemps qu'elle n'a pas été sur la glace aussi sérieusement que ces derniers temps, mais cela ne veut pas dire pour autant qu'elle est destinée à échouer. Cornelia en sait quelque chose puisque elle aussi a vécu une interruption de pratique pendant un certain temps, lorsqu'elle s'est blessée à la cheville il y a plusieurs années de cela. À l'époque, elle pensait qu'elle ne retrouverait pas ses compétences d'avant mais l'expérience lui avait prouvé le contraire. Au fil des semaines, elle avait eu de plus en plus d'aisance et finalement, elle avait été en mesure de retrouver son niveau, de retourner à la compétition. Il en irait de même pour Liwia, c'était certain. Ses muscles manquent peut-être un peu de force aujourd'hui faute d'entraînement, faute de pratique, mais elle sait très bien que cela ne durera pas. Que des muscles cela se travaille, que cela se remuscle, tout simplement. Avec du temps et de la pratique, la rouquine sera parfaitement en mesure d'enchaîner les sauts de nouveau, comme autrefois.

Tout ça, c'est dans la tête. Cornelia le lui concède et le comprend, mais elle est là pour la motiver, pas pour la laisser s'apitoyer sur son sort, pas pour la laisser désespérer. Alors elle attaque, elle la motive et elle l'encourage, tel un capitaine remotiverait ses troupes entre deux tiers-temps.

"- Allez ! Montre moi ce que tu as dans le ventre !" commente Corny comme Liwia accepte de recommencer.

Rejoignant le bord de la glace, Cornelia observe Liwia tandis qu’elle reprend son entraînement, ayant conscience que tout ça est loin d’être simple. Elle aussi a eu du mal à reprendre quand elle est revenue de sa blessure à la cheville. Elle aussi se sentait faible et incapable de réussir certains triples ou quadruples sauts. Mais tout ça, c’était majoritairement dans la tête et Cornelia savait parfaitement que Liwia était capable de trouver en elle la force de réussir. Elle avait seulement besoin que quelqu’un croit en elle et la pousse en ce sens, ce que la brune faisait donc depuis le bord de la glace. Elle avait conscience que, sur le moment, Liwia devait lui en vouloir et la maudire intérieurement. Mais elle la remercierait plus tard, quand elle aurait retrouvé sa capacité à sauter un axel correct.

Liwia reprend donc sa performance depuis le début, enchaînant les sauts piqués avant de passer à ses sauts de carre. Jusqu’ici, tout va bien. La boucle est réussie, le salchow aussi, elles s’y attendaient. Mais le plus dur est à venir et, comme le moment du triple Axel arrive, Cornelia appréhende à l’idée de voir son amie échouer encore une fois, consciente du poids que cela fait peser tant sur ses épaules que sur son cœur et sa détermination.

Le regard aussi attentif qu’admiratif et anxieux, elle regarde Liwia s'élancer une fois de plus pour tenter son triple Axel. Manque de chance, le mouvement reste incertain, approximatif. La fatigue commence à sérieusement entrer en compte, Cornelia en a conscience. Elles pourraient peut-être faire une pause et reprendre le lendemain.

Avant qu’elle n’ait dit quoi que ce soit, Liwia se lève sur ses patins et recommence. Cette fois, les mouvements sont plus fluides, plus confiants, plus maîtrisés aussi et Cornelia retient sa respiration, sentant une montée d'excitation et d'anticipation l’envahir. Les lames de la patineuse décrivent un arc gracieux sur la glace et elle s'élève finalement au-dessus de celle-ci en une triple rotation. Cornelia dessine un grand sourire sur ses lèvres et applaudit avec enthousiasme.

"- Tu l'as fais !"

Cornelia s'approche rapidement de Liwia, courant presque sur la glace, ses patins aux pieds, le sourire aux lèvres et en arrivant devant elle, elle serre l'autre patineuse dans ses bras, le sourire victorieux.

"- Tu vois ? Je t'avais dis que tu y arriverais ! Je le savais !"

Réaliser des prouesses sur la glace après une longue coupure dans les entraînements n’est jamais évident et ce même si l’on a, pendant ce laps de temps, continué à patiner pour le plaisir. Cornelia ne peut pas vraiment se prononcer sur ce sujet, n’ayant pas pu mettre un pied sur la glace à l’époque, si elle ne voulait pas traumatiser davantage sa cheville blessée et réduire à néant ses chances de patiner de nouveau un jour, mais elle sait en revanche comme l’on perd rapidement, une fois que les entraînements ne sont plus suivis et comme il faut s’entêter, persévérer, quand on revient sur la glace, pour récupérer son niveau. C’est pour ça, dans le fond, qu’elle ne s’arrête jamais, à moins d’y être obligée et qu’elle s’entraîne pas moins de cinq à six jours par semaine. Des entraînements de plusieurs heures chaque jour, que ce soit sur la glace ou en dehors. Et pendant ses vacances, quand elle s’éloigne d’Hambourg, elle prend toujours soin d’aller pratiquer une heure ou deux. Ses proches savent comme c’est important pour elle, comme ses ambitions sont grandes et comme elle ne compte pas les abandonner.

"- Mais c’est toi qui l’a fait !" affirme Cornelia en lui rendant son étreinte, ne comprenant que trop bien le bonheur qui peut envahir sa coéquipière à ce moment-là.

Elle sait ce que c’est, la peur de ne jamais plus pouvoir faire de prouesses en patin. Elle sait ce que c’est, la trouille de ne plus jamais arriver à faire ses sauts, ce que ça fait de se sentir lourde et clouée au sol. Ce que ça provoque en soit, de voir que l’on a perdu son niveau, que l’on ne sait plus faire ses triples et ses quadruples.

"- Je pense qu’une pause est largement méritée maintenant." acquiesce la patineuse avant de lancer, pour plaisanter. "Je te laisse cinq minutes !"

Si Liwia la remercie chaleureusement pour l’aide que la demoiselle lui a apportée, il ne faut pas qu’elle oublie que ce n’est pas sa camarade qui a fait le saut, mais bien elle. C’est elle qui a réussi, certe avec un peu d’aide de la part de sa camarade, mais c’est elle qui y est arrivée, malgré tout. Elle qui a réussi son triple Axel. Elle qui est en train de le restaurer, petit à petit, comme c’est toujours nécessaire après une longue pause comme Liwia en a connu, comme Cornelia, elle aussi, il y a quelques années maintenant, en a connu.

Comme Liwia demande une petite pause, Cornelia la lui accorde. Cela fait un moment qu’elle s’entraîne et un peu de repos ne lui fera pas de mal, bien au contraire. Elle enchaîne les sauts depuis le matin et il ne faudrait pas blesser sa cheville déshabituée à travailler, à sauter et patiner. Mais elle ne résiste pas à l’envie de taquiner un peu son amie, affirmant qu’elle avait cinq minutes de repos. Celle-ci y croit un instant, prend peur, et le lui fait savoir. Cornelia laisse éclater un rire léger. C’était le but, justement. Que la patineuse y croit.

"- T’as déjà une idée d’où tu veux aller ?" demande la brune comme Liwia propose d’aller manger, l’invitant à venir avec elle.

Cornelia fait toujours très attention à ce qu’elle consomme, son régime alimentaire étant primordial dans le maintien de sa condition physique et de ses compétences. Parfois, cela posait quelques problèmes avec les volontés de ses amis, qui ne s’accordaient pas forcément avec ce fameux régime. Mais Liwia étant elle-même sportive, c’était une problématique qu’elle comprenait. Aussi Cornelia attend elle que cette dernière manifeste ses idées avant de répondre à son interrogation.

Cornelia observe Liwia comme cette dernière hausse les épaules et avance en direction des gradins sur lesquels elle récupère sa veste qu’elle enfile tout en répondant à la question que la brune lui a posé. Elles pourraient se rendre dans un petit bar à jus de fruits qui n’est pas très loin. Apparemment, la qualité des pancakes n’y est pas terrible mais les jus de fruits sont à tomber par terre. Tant mieux. Pour le bien de son régime, elle ne risque pas de grignoter. Mais un jus de fruit ou un smoothie ne lui fera pas vraiment de mal, elle peut se l’autoriser. Son regard se pose sur son amie, évaluant la proposition de celle-ci qui enfile déjà ses protège-lames.

"- Ok, allons-y." accepte la brune en sortant de la glace à son tour pour attraper ses protèges-lames.

Elle enfile les protèges lames rapidement, prenant la direction du vestiaire dans lequel elle se change et enfile son épaisse doudoune, une écharpe, une paire de gants et des boots suffisamment fourrées pour ne pas attraper froid. Avec la baisse des températures qui commence, elle prend toutes les précautions possibles pour ne pas tomber malade, peu encline à manquer le début de la saison qui s’annonce.

Fin prête, Cornelia suit Liwia hors de la patinoire. L'air frais la saisit dès qu'elles franchissent les portes, contrastant avec la chaleur de l'intérieur, si bien qu’elles resserrent sa doudoune autour d’elle. Elles se mettent rapidement en route, marchant côte à côte vers le bar à jus de fruits, jusqu’à arriver devant un bâtiment dans lequel elles entrent, Cornelia se laissant guider par Liwia à l'intérieur, l'ambiance chaleureuse, les couleurs vives et les odeurs alléchantes l’assaillant immédiatement.

Dehors il fait plutôt frais et si Cornelia se contente de resserrer un peu sa veste autour de ses épaules, Liwia pour sa part se plaint immédiatement des températures, ne comprenant pas comment elles peuvent être plus fraîches dehors que sur la glace. La remarque fait rire la brunette. L’explication est pour le moins logique, quand on sait que les pièces de la patinoire sont chauffées pour la plupart, à l’exception de la salle principale bien entendu, qui reste toutefois coupée de l’extérieur par ses murs. Forcément, il y fait plus chaud et ce d’autant plus que le système de maintien de la glace à température est situé en dessous de celle-ci.

"- Sûrement parce que nous n’avons plus quatre murs autour de nous pour nous couper du petit vent." remarque la brune en riant légèrement.

Elles avancent d’autant plus vite qu’il fait froid donc, pressées de se mettre au chaud, atteignant bientôt la bâtisse dans laquelle elles entrent rapidement, Liwia ne manquant pas de partager son amour de ce lieu qu’elle adore. En le voyant de ses propres yeux, Cornelia comprend pourquoi. L’endroit est plutôt agréable, chaleureux. Elle n’a aucun mal à comprendre pourquoi l’autre patineuse l’apprécie, donc.

Commandant rapidement leurs jus, elles s’installent à une table libre, Liwia confirmant que cet endroit est un peu le repaire de certains de leurs acolytes. Il faut dire que si Cornelia sort relativement peu, se focalisant sur l’entraînement, le sport, les cours de danse, de stretching et autres, tous ne centrent pas forcément leur vie sur la pratique de leur sport et prennent le temps, alors, de profiter. L’endroit étant plutôt proche de la patinoire, il est normal que quelques patineurs soient des habitués.

"- Oui c’est vrai que c’est plutôt proche de la patinoire, j’imagine que les élèves doivent pas mal venir ici après les cours…"

Elle, elle est trop “casanière” pour ça. Ou juste trop focus. Pas qu’elle n’aime pas sortir, mais elle sacrifie tout au nom de son art.

Liwia proteste et Cornelia ne peut réprimer un léger rire face à la situation, comme son amie se comporte comme une enfant. Pourtant elle a raison, l’explication est aussi simple qu’elle est évidente et elles en ont toutes les deux parfaitement conscience, comme Liwia le remarque rapidement. L’absence de mur pour couper le vent, les exposant à celui-ci, joue forcément un rôle dans le ressentis des températures. Heureusement, elles ne trainent pas dehors trop longtemps comme elles entrent rapidement dans le Freshfusion.

Il n’est pas difficile d’imaginer que les sportifs se pressent dans les parages à la fin de leurs entraînements, le lieu étant situé à proximité de la patinoire et proposant, qui plus est, des boissons plutôt saines, même si leurs pancakes laissent à désirer, d’après son interlocutrice. Il n’est pas difficile de s’imaginer leurs camarades se presser ici après une grosse journée de travail, histoire de se détendre un peu, de passer un moment de convivialité. C’est presque étonnant qu’elle ne connaisse pas encore cet endroit elle-même. Bien sûr elle n’est pas celle qui sort le plus, dans la bande, elle est même sûrement celle qui fait le moins d’écart, mais depuis deux ans bientôt que la patinoire a ouvert… C’est plutôt curieux. Elle se souviendra d’y revenir, cependant.

"- C’est comme ça que tu as connu l’endroit ?" demande-t-elle pour Liwia comme son regard se promène encore sur la décoration avant de revenir sur la demoiselle lui faisant face.

Assise en face de Liwia, Cornelia, ne put s'empêcher de sourire en entendant les paroles de son amie. Elles étaient si différentes l’une de l’autre… Oui, elle la connait, et elle sait comme la jeune femme est bel et bien du genre à se faufiler partout, ne résistant jamais aux mouvements de foules et à sa curiosité. Cornelia était plus réservée, plus dans son coin. Non pas par timidité, en réalité. Plus par ambition. Le patinage, son désir de médailles, était sans conteste son moteur dans l’existence, ce à quoi elle concentrait tout son temps. Ce n’était pas toujours évident à comprendre pour tout le monde, pas toujours évident à vivre non plus. Liwia prenait la vie plus tranquillement, à l’image de quelques autres de leurs camarades, là où la vie de Cornelia se divisait entre les entraînements, la gymnastique, les masterclass, la préparation de spectacles…

"- Hé bien… Je crois que personne n’ignore que oui, tu as le don pour fourrer ton nez partout dès que tu en as l’occasion…"

Elle rit, prenant une gorgée de son propre jus tout en écoutant attentivement la suite de l'explication de Liwia. L’amour des jus de fruits proposés ici l’avait donc conduite à y revenir, si bien que c’était aujourd’hui devenu une habitude. Elle, elle ne connaissait pas vraiment ce genre de choses. Elle avait bien eu ses habitudes dans quelques endroits en ville mais… Cela tenait davantage à la personne avec qui elle était qu’aux endroits en eux-même. Si bien que, depuis qu’ils avaient rompu avec Aayden, elle n’avait jamais remis les pieds dans aucun de ces endroits. Non pas qu’elle veuille les fuir particulièrement, pourtant.

"- C'est vrai qu'ils sont bons." admet la brune. "Celui-ci, en tout cas."

Mais elle évitera d'y venir trop souvent malgré tout. La faute à un régime alimentaire plutôt strict et un poids qu'elle essaie de contrôler pour le bien de son art, de ses quads qu'elle commence doucement à maîtriser.

"- Pas sûr que le coach te félicite pour cette découverte, d'ailleurs !" plaisante-t-elle.

Si sa réputation la précède ? oui, indéniablement. Il est évident que ce ne sont pas les derniers mois qui ont pu changer ça. L’ancienne Liwia reste dans les esprits, même si elle traverse une période difficile. Même si en ce moment c’est difficile pour elle. Douloureux. il fut un temps où elle n’était pas si triste, pas si effacée. un temps qui n’est pas si ancien. C’était avant le décès de son père. Pas suffisamment vieux pour que Cornelia ne s’en souvienne pas, donc. Même si ces dernières semaines ont été compliquées, même si ces derniers mois l’ont été… Hé bien, cela n’efface pas la substance de ses souvenirs, ni de ce que Liwia a été. Elle esquisse un sourire.

"- Tu l’as soigneusement travaillée pendant toutes ces années…" remarque la brune, un sourire entendu affiché sur ses lèvres. "Ce n’est pas si vieux pour que nous ne nous en souvenions pas…" souffle-t-elle encore.

Elle sait que le terrain est sensible. Pourtant elle le frôle. Elles peuvent restaurer les sauts, elles peuvent travailler d’arrache-pieds, elle sait que le problème est aussi dans la tête. Un blocage. Ce n’est pas seulement la technique qui pose problème, c’est aussi que l’esprit de Liwia n’est pas forcément totalement en paix. Pas encore. Une patineuse a besoin de stabilité, de pouvoir faire le vide dans son esprit pour se concentrer, se focus. Pour Liwia, c’est forcément un peu plus compliqué, un peu plus difficile, au vu des circonstances. Alors Cornelia frôle ce sujet, parce qu’elle sait qu’il y a peut-être, sûrement, des choses à dire. A désamorcer. Sans quoi tous les entraînements du monde ne serviront à rien.

"- TOUS !?" demande-t-elle, prenant un air inquiet quand Liwia évoque l’idée de faire goûter tous les jus.

Mine de rien, le coach risque de moins apprécier. C’est que la jeune femme fait très attention à ce qu’elle consomme au quotidien. Si elle veut continuer de sauter correctement ses triples et ses quadruples, elle a plutôt intérêt à bien gérer sa courbe de poids.

"- C’est vrai, t’étais pas là pour le cours sur les jus frais !" remarque-t-elle. "Il a dit que pour un verre de jus y’a énormément plus de fruits que si on mange le fruit lui-même et donc énormément plus de fructose, du sucre." explique la brune. "Pas qu’il soit à cheval sur le poids mais…" elle lui adresse un coup d'œil entendu.

Le fait est que Liwia mérite largement la réputation qui la précède, celle selon laquelle elle est douée pour mettre son nez un peu partout, comme une petite fouine. Ce n’est certainement pas la brune qui aurait une telle réputation, avec toutes les heures de gymnastique, patinage, yoga, danse, qu’elle peut s’enfiler chaque jour pour rester au top de sa forme, pour cultiver sa silhouette, cultiver sa grâce et son art. Liwia n’était pas connue pour être une fille tranquille scotchée à la glace, même si elle était rigoureuse dans son entraînement. Non, cette réputation-là, c’est incontestablement Cornelia qui l’avait. Et elle non plus ne l’avait pas volée, c’était certain.

"- Disons toujours là où ta curiosité te conduisait." remarque la patineuse, adressant à son interlocutrice un sourire compatissant. "On te le souhaite tous…"

Bien sûr, ils espèrent tous que la jeune femme pourra aller de l’avant après le drame qu’elle a vécut, mais tout le monde se doute que ce n’est pas si facile. Elle avait perdu un pilier de sa vie. L’une des personnes les plus importantes dans l’existence. Son père. Comment le vivrait-elle, elle-même, si Patrick venait à disparaître ? Mal. Evidemment. Elle ne sait pas dans quelle mesure, ne pouvant se l’imaginer, tout en sachant que c’est une douleur qui va au-delà des mots. Au-delà de tout ce qu’elle a connu jusqu’ici.

Changeant de sujet, revenant à l’instant présent et la découverte du bar à jus, la jeune femme reste coîte lorsque Liwia affirme qu’elle va lui faire goûter tous les jus de l’établissement. Même si elle exclut les choses que la brune n’aime pas et affirme qu’elles ne viendront pas forcément tous les jours, le regard de la jeune femme se porte sur la carte exhibée au mur derrière le comptoir, sur laquelle des dizaines de références s’étalent.

"- Tu sais qu’avec mon rythme de sorties extra-patinoire, il va nous falloir des années pour tout essayer ?"

Parce qu’elle a un rythme soutenu, la demoiselle. Intensif, diraient certains, auquel vient s’ajouter un plan alimentaire qu’elle suit sans trop d’écarts. Les jeux olympiques ne sont déjà plus si loin. Ce n’est pas le moment de baisser les bras. Pas le moment de faire n’importe quoi. Elle a trop sacrifié pour ces jeux, pour une médaille. Pour un titre olympique. Tout sacrifié. Jusqu’à l’amour. Le souvenir d’Aayden s’esquisse à son esprit un instant, avant qu’elle ne le dissipe. Oui, elle avait définitivement trop donné pour lâcher prise maintenant, pour amoindrir son rythme.

"- Il dit que c’est parce que ça revient à manger le sucre de 5-6 fruits au lieu du sucre d’un seul, donc surconsommation de glucide, même si c’est du fructose." affirme la brune. "Même si c’est nettement mieux que le jus industriel, plus vitaminé, aussi."