C’était une journée plutôt douce, où le soleil se cachait derrière des nuages bas aux multiples nuances de gris. Le temps maussade contrastait avec la veste d’un orange profond qu’avait enfilée la brune avant de quitter son appartement, triturant la fermeture de son casque avec une certaine impatience alors qu’elle s’approchait de la vieille moto qu’elle possédait depuis toujours.
Kate adorait parcourir la ville sur la vieille Honda rouge. Si elle ne prenait pas la peine de tresser ses cheveux, ils s’emmêlaient avec le vent, et chatouillaient le creux de son cou. Elle sentait l’odeur de l’humidité sur les pavés encore mouillés de la dernière averse. Elle sentait l’odeur verte des arbres qui arboraient quelques rues qu’elle empruntait. Elle sentait l’odeur gourmande du pain chaud et des viennoiseries, celle du bois verni et de la bière en passant devant quelques terrasses bondées, celle du tabac blond, celle du bitume fraîchement étalé sur un coin de ruelle en travaux, celle des gaz d’échappement, du métal chaud. Parcourir Hambourg était une véritable expérience des sens ; pour certains une épreuve, pour elle une énième occasion de s’émerveiller.
La route jusqu’au CSA, l’un des cafés qu’elle et Emeric avaient fini par définir comme un QG tout à fait digne de ce nom, n’était que de quelques maigres minutes, mais elle s’était sentie d’humeur à flâner le long du Norderelbe. Elle aimait voir les touristes se balader près de l’eau, et l’activité du port, au loin, avait quelque chose d’hypnotisant. La flottille de grues hydrauliques était semblable à d’immenses échassiers de métal, surveillant les abords du fleuve. Parfois, elle aimait venir les admirer. Enfant, elle pouvait cacher ses yeux avec ses longues tresses quand ils passaient sur cette même route en voiture, avec ses parents, tant ces engins pouvaient la terrifier. Elle craignait que tout à coup, l’une des grues s’enchante et se décide à arracher ses lourds pieds d’acier avant de traverser le fleuve et de venir saisir la vieille Volkswagen dans son bec grinçant et rouillé.
Fort heureusement, ce n’était jamais arrivé.
Quelques gouttes s’étaient écrasées mollement sur la visière de son casque ; pourtant, il n’allait pas pleuvoir, elle en était certaine. Elle reprenait la route du petit café, et bien vite, elle garait sa bécane à proximité. L’odeur tendre et fraîche des feuilles mouillées chatouilla ses narines. Les hauts arbres s’agitaient à peine de la légère brise qui venait faire frémir leurs hauts branchages. Ils étaient habitués, par ici, aux aléas du temps, et ne semblaient plus se préoccuper des timides souffles du vent.
- Hé, salut Leon ! Lança-t-elle joyeusement au cinquantenaire à la barbe impressionnante, qui se tenait derrière le zinc, absorbé dans une discussion visiblement prenante. Elle fila s’installer à sa table fétiche, celle miraculeusement libre, tout à droite, sous l’un des parasols multicolores. Le vieux jardin botanique dans lequel était niché le café avait quelque chose d’intemporel ; il offrait un moment hors du temps, hors de la ville, hors de tout, à vrai dire. Si elle ne traînait pas près du port, elle pouvait très souvent être retrouvée sur l’une des allées du parc, plongée dans un livre aux vieilles pages jaunies et à l’odeur presque sucrée.
Emeric était là, enfin, à quelques mètres de la terrasse surélevée. Elle lui faisait de grands signes, déjà, alors qu’avec sa veste orange et son immense sourire, il était presque impossible pour lui de la louper. Il l'était l'un de ceux qui rendaient la vie à Hambourg encore plus intéressante. Leur rencontre, bien des années plus tôt, avait été une véritable bouffée d'air frais, alors qu'elle devait encaisser le regard désapprobateur de ses parents, une fois qu'elle fut de retour en Allemagne, bien décidée à poursuivre sa carrière dans de pareilles sornettes. Poser le regard sur lui, c'était comme une petite flamme qui réchauffait le coeur. [/size]
♔ Soon I'll be 40 years old, will I think the world is cold ?
Emily Wagner-Strauss
Age : 41 Né.e le : 08/07/1982 Messages : 80 Métier : Propriétaire de sa garderie canine depuis peu. C’est son nouveau projet qui commence doucement à se développer. Longueur de posts : En moyenne 500-600 mots A Hamburg depuis : Depuis toujours. Ton coeur y revient sans arrêt malgré tes quelques départs à l'étranger. Avatar : Sophia Bush Points : 606 Date d'inscription : 08/05/2023
Re: Coffee-therapy ☞ Kate & Emeric
Sam 12 Aoû 2023 - 17:22
Tu avais une confiance aveugle, presque totale en ton équipe, mais tu avais toujours un petit pincement au cœur lorsque tu quittais l’écurie en pleine journée. Pourtant, tu savais pertinemment qu’il n’y aurait aucun problème. Tu étais entouré de professionnels et si jamais quelque chose arrivait, on allait te téléphoner dans la seconde. Tu n’aurais pas de mauvaises surprises et tu pouvais aller prendre un café tranquille avec Kate au centre-ville. Café que tu avais toi-même proposé, car tu souhaitais discuter d’un sujet peut-être plus sensible avec ton amie de longue date. Rien de grave, bien sûr. Tu pouvais dire que tout allait bien de ton côté. C’était une bonne période malgré les circonstances tristes qui entouraient les derniers mois dans ta vie. Tu apportais tout ton amour à Lucy et tu tâchais de lui faire comprendre au mieux la situation. Ce n’était pas simple tous les jours. Sa mère lui manquait et tu ne pouvais pas lui en vouloir, elle te manquait aussi. Énormément. Cette femme incroyable avait été ta plus vieille amie. Vous vous connaissiez depuis l’enfance et tu l’avais perdu du jour au lendemain. Personne n'avait pu se préparer à cette perte et aujourd’hui, tout le monde la subissait. Plus particulièrement la jeune Lucy qui ne comprenait toujours pas pourquoi sa mère n’était plus là…
La journée à l’écurie s’annonçait tranquille. La température était incertaine et souvent, ça éloignait quelques clients qui avaient crainte de se faire surprendre par la pluie pendant leur balade. Ce n’était pas grave, il y avait toujours les réguliers qui se présentaient peu importe la température. Ton équipe serait occupée et c’était le plus important. Tu ne souhaitais pas les voir s’ennuyer et qu’ils finissent par se lasser de leur travail, car il n’y en avait pas assez.
Pour l’instant, tout était beau. Tout le monde savait ce qu’ils avaient à faire et toi, malgré ton pincement, tu pouvais quitter pour te rendre à ton rendez-vous. En voiture. Parfois, on se moquait un peu de toi, affirmant que tu faisais tes déplacements en chevaux ce qui était généralement faux. Tu possédais une voiture. Ce n’était pas la plus récente, mais elle faisait le boulot. Tu n’étais pas prêt à la changer, tu aimais bien ce vieux modèle et surtout, tu lui faisais encore confiance. C’est à son volant que tu arrivas à votre café habituel quelques minutes avant l’heure de votre rendez-vous. Tu t’installas à votre table fétiche et tu ne touchas pas le menu en attendant, tu prenais toujours la même chose. Tu te contentas d’observer les gens autour de toi, un sourire sur les lèvres. Ça te faisait toujours plaisir de venir ici de temps en temps. Tu passais toujours des bons moments et tu t’étais même familiarisé avec la plupart du personnel de la place.
Ton attention fut très captée par Kate qui fit une arrivée remarquée dans la place avec son veston orange et surtout les grands signes qu’elle adressait en ta direction. Sans hésitation, tu répondis avec un grand signe également avant de te lever pour aller l’accueillir. Tu aurais pu attendre qu’elle te rejoigne, mais tu avais trop hâte de la voir. Tu la pris dans tes bras. « Je suis tellement content de te voir. J’ai l’impression que ça fait des lustres. » Tu déposas un baiser sur sa joue avant de t’éloigner. Tu attrapas l’une des mains de Kate entre la tienne pour la guider vers votre table. Sa chaise tirée, tu l’invitas à s’installer. « Comment vas-tu ? J’espère qu’aujourd’hui on t’a dit à quel point tu es incroyable. » Tu souris largement en l’observant de haut en bas. Tu avais une amie magnifique et tu trouvais ça important de lui dire. Elle ne devait pas l’oublier ou en douter.
Ah ! Enfin, il était dans ses bras. Déjà, elle sentait cette énergie folle remonter en elle, de ses orteils jusqu’au sommet de son crâne. Il y avait des amis comme ça, parfois, que l’on pouvait compter sur les doigts d’une main, qui avaient le don de recharger vos batteries plutôt que de les épuiser. Des amis, elle n'en avait jamais franchement fait la collection. Mais Emeric, rencontré au détour d'une situation des plus cocaces - en tout cas, elle pouvait en rire aujourd'hui- faisait partie des quelques rares âmes auxquelles la jeune femme avait développé un immense attachement.
- Oh, toujours aussi charmant ! S’exclama-t-elle, arborant un sourire sincère tandis que son regard espiègle et enjoué croisant celui d’Emeric, alors qu’elle s’installait sur la chaise qu’il avait tiré exprès pour elle.
Elle se défit de sa veste, fit tinter la multitude de fins bracelets en or qui ornaient son poignet pour qu’ils se réalignent comme elle le souhaitait, et soupire d’aise en s’adossant dans le creux de la chaise.
- Il n’y a que tes compliments qui comptent, tu le sais ! Lança-t-elle, mutine, avant de secouer la tête.
Tony était du genre à la complimenter à longueur de journée, mais elle n’avait plus eu de nouvelles depuis quelques jours; elle chassait le tracas qui s’insinuait en elle ; elle savait qu’il pouvait être très souvent pris par le travail, au port. « C’est en rendant toutes mes ex-femmes malheureuses que j’ai fait fortune.. même toi ! » Trouvait-il drôle de dire, par moment, lui qui avait toujours privilégié le travail à la vie sentimentale et même familiale. Mais il avait changé, disait-il… Et elle, elle voulait à nouveau y croire. Alors bien vite, elle chassa ces quelques pensées vagabondes de son esprit, et concentra son entière attention sur Emeric.
- Alors, tout va bien à l’écurie ? Quelque chose semblait te préoccuper, quand tu m’as téléphoné l’autre jour, s’enquit Kate, bien plus soucieuse quand il s’agissait de la vie de son ami plutôt que de la sienne. Car Emeric avait traversé - et traversait toujours, pouvait-on le dire- des changements qui auraient fait fuir bon nombre d’hommes. Mais lui était resté comme un roc face à la tempête, et élevait à présent une petite bouille que Kate résistait difficilement à kidnapper.
Mais déjà, Léon arrivait, frottant sa barbe d’une main, et arquant les sourcils en esquissant ce petit sourire qui faisait revenir tous les hommes d’Hambourg.
- Toujours la même chose, hein Emeric ? Fit-il en tapotant déjà sa commande sur son petit boîtier, sans même attendre de réponse ce qui arracha un petit gloussement moqueur à Kate.
- Un matcha latte pour moi, s’il te plaît, demanda la brunette avant de reporter son attention sur Emeric, tandis que Léon s’éloignait en sifflotant l’air de la Marche Funèbre. Je disais… Tout va bien ? Tu me le dirais, hein, si quelque chose n'allait pas ?
♔ Soon I'll be 40 years old, will I think the world is cold ?
Emily Wagner-Strauss
Age : 41 Né.e le : 08/07/1982 Messages : 80 Métier : Propriétaire de sa garderie canine depuis peu. C’est son nouveau projet qui commence doucement à se développer. Longueur de posts : En moyenne 500-600 mots A Hamburg depuis : Depuis toujours. Ton coeur y revient sans arrêt malgré tes quelques départs à l'étranger. Avatar : Sophia Bush Points : 606 Date d'inscription : 08/05/2023
Re: Coffee-therapy ☞ Kate & Emeric
Sam 7 Oct 2023 - 3:21
Tu souris. Toi charmant ? Il était vrai que tu aimais bien complimenter les gens. Tu trouvais qu’on ne le faisait plus suffisamment. Dès que tu avais l’occasion, tu le faisais. La personne devant toi en étant souvent heureuse et ça te permettait d’avoir un petit baume au cœur de ton côté. Avec des gens comme Kate dans ton entourage, il était facile d’y aller de plusieurs compliments. Cette femme était tout bonnement incroyable et tu te sentais chanceux de l’avoir dans ton entourage. Même si vous vous étiez rencontré dans un contexte plus dramatique, tu étais heureux que la vie l’ait mise sur ta route. Tu n’allais plus la laisser partir. Vos chemins étaient liés à présent.
« Très bien dans ce cas. Je vais le dire pour dix personnes. Tu es incroyable. » Un large sourire naquit sur tes lèvres malgré la présence d’une lueur de taquinerie dans les yeux. Tu faisais toujours exprès d’en mettre un petit peu plus.
Kate et toi, vous essayiez de voir de façon régulière, mais ce n’était pas toujours simple avec vos horaires respectifs. Il était vrai que cette fois, tu avais un petit peu précipité les choses et ça n’avait pas manqué à l’attention de Kate. Tu étais, en effet, préoccupé lorsque tu lui avais téléphoné la semaine dernière. Rien d’urgent ou de terrible. Seulement des questions que tu te posais. Avant de n’avoir eu le d’en placer une, Léon arriva pour prendre votre commande. Encore une fois, tu n’eues pas besoin d’ouvrir la bouche ce qui t’arracha un petit rire. Tu confirmas d’un signe de la tête. « On ne change pas une combinaison gagnante. » Parfois tu aimais essayer de nouvelles choses, mais il y avait certains endroits où tu préférais rester sur tes classiques.
« Ne t’inquiète pas. Tout va bien. Je te le dirais si ce n’était pas le cas. » Un demi-sourire naquit sur tes lèvres alors que tu posais une main se voulant rassurante sur son poignet. « En fait… C’est Lulu qui m’inquiète un petit peu. Je te rassure tout de suite, elle va bien, c’est juste que… Elle me dit souvent ces temps-ci qu’elle parle à sa mère… Et… Comme c’est ton domaine, je me demandais si… Je ne sais pas, si c’est normal ? Si c’est dans sa tête, si elle peut voir son esprit ? Si c’est dangereux…? » Finalement, tu avais beaucoup de questions. C’était la première fois que tu les formulais à voix-haute. Heureusement que tu connaissais bien Kate sinon tu aurais l’impression de devenir complètement fou. Ta petite fille adoptive qui te disait parler avec sa mère décédée quelques temps plus tôt ? Ouais… C’était particulier.
Accueil 
