Après le fiasco du dîner il y a quelques temps avec sa femme, Armin attendait impatiemment le jour où il verrait Jonas, un très bon ami. Aujourd'hui, le jour était venu et le brun allait prendre de quoi passer une bonne soirée : de l'argent à dépenser dans un pub. Le Paddy's Teig. Ils allaient boire. Enfin...Armin allait boire. Ca c'était certain. Mais Jonas était libre de boire ou de ne pas boire. Quand à son ami, il allait venir en taxi, parce qu'il n'allait pas rentrer en conduisant lui-même. Ce serait trop dangereux et, bien qu'il lui arrive d'avoir des pensées suicidaires, il ne voulait pas mourir.
Rentrant du boulot, tard, vers vingt-deux heures, Armin prit soin de laisser un mot à sa femme. Au cas où elle rentrerait ce soir pour se reposer. Sinon elle resterait au boulot. Il avait l'habitude de cette excuse. Et il avait pris l'habitude de ne pas poser trop de questions. Il prit le taxi qu'il avait commandé un peu plus tôt et arriva vers vingt-deux heures trente à l'endroit où les deux amis avaient prévus de se rencontrer. Il sortie du véhicule, paya, puis entra dans le pub, commandant tout de suite un whisky.
Puis il vit Jonas arriver. Il lui fit signe et le laissa s'installer avant de lui demander : "Alors, comment ça va ce soir ?". Bien sûr la réponse de Jonas sera sans doute différente de celle de Armin. Mais ce dernier ne voulait pas faire d'histoires et donner l'impression à son ami qu'il était au bout du rouleau. Même si, justement, il était au bout du rouleau. Le barmaid demanda à Jonas ce qu'il voulait et, sans le laisser répondre, le brun lui proposa de boire la même chose que lui et de payer pour ce premier verre.
Malgré les soucis que j'ai en ce moment , je ne peux pas m'empêcher de m'inquiéter pour Armin qui est un ami de très longue date. Quelqu'un de proche , à qui je tiens énormément. Malheureusement , la vie ne lui a pas fait de cadeaux , et je sais que je n'étais pas un excellent ami ces derniers temps , pas assez présent pour lui.
Ainsi , quand l'occasion s'est présentée de pouvoir se voir autour d'un verre , je n'ai pas hésté à accepter. Je ne suis pas un grand consommateur d'alcool , mais je sais qu'à deux , on peut facilement s'oublier , enchaîner les verres , et c'est pour cela que je reste prudent , préférant prévoir un taxi plutôt que ma voiture. Je prends la même décision que mon ami , sans le savoir.
Armin n'a pas une bonne mine. Je viens lui faire une accolade quand je le vois , avec sincérité.
"Je vais bien. Hormis le stress du boulot." , malgré le procès , Hannah et moi , avions passer une douce secrète soirée la veille , et ma bonne humeur n'était pas encore redescendue. Sans grande originalité , je commande une bière , et Armin suit. "D'accord , Armin. Mais , au prochain verre , c'est toi qui choisis. Et hors de question que tu paie toute la soirée. Alors...Est-ce que tu veux parler ? T'es pas obligé , tu sais. Si tu préfère qu'on boive , et racontes des blagues lourdes , je te suis ." , j'ajoute avec un sourire en coin.
Armin n'avait pas l'impression que Jonas était un mauvais ami. Au contraire. C'était même plutôt lui le mauvaise ami. Oui, il le pensait, parce qu'il était là pour tout le monde sauf Jonas, sauf ses amis. Enfin pas vraiment. C'est bizarre, dit comme ça, mais en fait, pour faire simple : il n'est là que pour lui, sa femme et sa fille. Sa famille, quoi. Sa famille qu'il veut récupérer à tout prix. Il a l'air d'être mieux avec Eleonora, pour le moment. Mais rien ne dit que cela va durer. Ce n'était pas comme s'ils s'étaient embrassés passionnément, comme si ils s'étaient dit des "je t'aime" tendres et pleins d'amour. Mais en tout cas ils avaient besoin l'un de l'autre et besoin de retrouver leur fille. Leur fille qui n'était plus un bébé à présent...C'était triste, mais ils avaient désormais une idée de ce à quoi elle ressemblait aujourd'hui.
"Parler ne serait pas de refus. En fait...je vais même te montrer quelque chose...". Il prit son téléphone et ouvrit une application. Une sorte d'application de reconnaissance faciale ou quelque chose dans le genre. Il ne savait pas comment appeler ça. En fait elle servait à vieillir un visage. Tout simplement. Mais de façon surprenante. Isadora se trouvait donc devant le nez de Jonas, sur le petit écran, vieillie de plusieurs années. C'est une jeune fille maintenant et elle ressemble tant à sa mère. Elle a les mêmes cheveux blonds et il pourrait presque voir son beau sourire. Avait-elle les dents un peu déformés comme Armin les avait plus jeune, quand il n'avait pas encore eu d'appareil dentaire.
Le père voyait bien que son ami semblait septique. Alors il lui dit simplement : "Il semblerait que ce soit Isadora."
à moi de m'excuser:
je suis désoléééée j'ai pris un temps fou, je m'étais pas rendu compte que je ne t'avais pas répondu et, en plus, je rp quasi plus ici. Mais je vais me rattraper, je vais revenir en force !
Armin est triste depuis des années , depuis qu'il a perdu sa fille et que je ne le connaissais pas encore très bien. Quel âge aurait-elle maintenant d'ailleurs ? Une vingtaine d'année ? Dieu , que le temps file !
Je pense ne pas connaître la femme d'Armin , pourtant c'est elle qui m'a soigné il n'y a pas si longtemps de ça , après un accident de voiture sans gravité , où je m'étais blessé à la tête. Les circonstances ne m'ont pas permises de faire le lien avec mon grand ami , quand bien même j'avais vu le nom de famille de la dîte docteur...Enfin , simple anecdote guère utile.
"Parlons alors ! Ah ?"
Je me penche en avant , curieux , quand il me dit vouloir me montrer quelque chose sur son téléphone. Ce n'est pas vraiment notre genre de partager de memes , ou des photos de vacances , lui avec son couple qui bat de l'aile , et moi avec ma petite amie "secrète" par la force des choses , nous sommes loin d'échanger des banalitées. Armin me montre la photo d'une jeune femme blonde , presque un air enfantin encore sur le visage. Je fronce les sourcils , d'abord , ne comprenant pas ce que je suis censé découvrir de spécial sur cette photo , avant qu'Armin ne m'éclaire.
"Oh." , je souffle d'abord , pris par surprise , avant de laisser un large sourire , lumineux , se répendre sur mon visage. Je prends mon ami par l'épaule. "Mais c'est formidable ! Enfin , je m'emballe peut-être un peu...Tu es sûr de toi ? Elle va bien ? Comment vous l'avez retrouvé ? Je croyais que le dossier avait été classé..." , j'hésite un peu lors des derniers mots , conscient que c'est loin d'être un sujet facile pour le père éploré.
Jonas semblait heureux de voir le visage d’Isadora, mais Armin n’en était que plus triste. C’était bizarre, en effet, mais il y avait une certaine façon de faire les choses. De dire les choses. De comprendre les choses. Et l’homme ne pouvait reprocher à son ami d’avoir plutôt mal compris la situation. Ils n’avaient pas retrouvé la jolie blonde sur la photo, cette jeune fille qui ressemblait tant à sa mère. Nous radotons un peu, là. Mais peu importe, il fallait qu’il prenne son courage à deux mains et qu’il explique, Armin.
« On ne l’a pas retrouvé… » il continua en expliquant qu’il avait eu l’idée d’utilisé une vieille photo sur une application de reconnaissance faciale. Maintenant ils savaient ce à quoi ressemblait la jeune fille. Mais ils ne savaient pas où elle était. Il expliqua également qu’il avait contacté beaucoup de pays pour savoir s’ils pouvaient mettre la photographie dans leur mairie ou tout autre endroit utile. Qu’il avait dû en payer certains parce qu’ils n’avaient pas la charité de le faire sans contrepartie.
« Voilà l’histoire. Maintenant, avec Eleonora, on attend des nouvelles. J’ai l’impression de ne servir à rien. Rien du tout. J’ai fait ce que je pouvais, mais maintenant que faire ? Aller dans chaque pays chercher partout ? Ce serait beaucoup trop long et abandonner ma femme. Chose que je ne ferais jamais. Quoi qu’il arrive. ». Abandonner Eleonora n’était en aucun cas une option. Jamais de la vie ça en serait une. Ils s’étaient mariés en s’aimant plus que tout et aujourd’hui, même s’ils se déchiraient petit à petit, toujours un peu plus, il ne l’abandonnerait pas. Quoi que…ils ne se déchiraient peut-être plus autant, ayant retrouvé espoir.
Je me sens clairement con quand je saisis que j'ai tout compris de travers. Un peu l'envie de me cacher même. Je me doute que cette méprise ne va que rendre mon ami encore plus triste d'avoir perdu sa fille , de continuer à se sentir responsable de ce drame , que personne ne pourra jamais oublier. Malgré moi , je lui rappelle l'échec de leurs recherches , qui durent depuis des années. Vraiment , je suis un imbécile.
"Oh désolé. J'avais tout compris de travers. Excuse-moi."
Armin m'explique que cette photo devait simplement leur donner une idée d'à quoi pouvait ressembler Isadora aujourd'hui. Une manière de mieux centrer leurs efforts. Même si cela coûte. Que personne n'a assez de compassion pour l'aider volontairement, sans rien demander en contrepartie. C'est triste mais ainsi va le monde.
Après tout , en tant qu'avocat , je ne fais guère mieux, mes services ne sont pas donnés. Quand j'ai débuté , j'étais régulièrement nommé d'office pour certains clients , mais ça ne m'est plus arrivé depuis que je suis parvenu à monter les échelons.
"Tu ne sers pas à rien voyons Armin ! Beaucoup aurait déjà abandonné mais tu tiens bon. Ce que tu as fait va servir , j'en suis certain." , je souris les yeux un peu dans la vague quand il parle de sa femme. Forcément , je pense à Hannah et à notre histoire qui continue de se vivre dans l'ombre. Arlmin protège sa bien aimée, moi je la fuis et la fait souffrir. "C'est tout à ton honneur de prendre soin d'elle. Tu finiras par avoir une piste. Je ne peux malheureusement pas trop t'aider , ce n'est pas mon domaine , mais si je peux faire quelque chose...Tu n'hésites pas." , je réfléchis quelques instants. "Je connais une collègue dont le mari était flic près de Munich , mais qui a aussi opéré en France notamment. Je pourrais lui montrer la photo , peut être qu'il aurait des pistes...enfin c'est peu probable bien sûr, mais on peut essayer."
Bien sûr Armin n’en veut pas à son ami de ne pas avoir compris tout de suite. Il est vrai que cela pouvait porter à confusion, après réflexion. Mais tout va bien, finalement. Enfin non…pas vraiment. Mais c’est ok. Ce n’est pas grave de comprendre de travers, même si ça peut blesser parfois. Oh, Armin ne l’est pas, il est tellement absorbé par cette image de sa fille qu’il n’arrive pas à oublier. Maintenant qu’il l’a vu, qu’il l’a en face de lui, qu’il peut la voir quand il veut, il ne peut plus s’en passer. Comme si c’était une simple photographie de la jolie Isadora que ses parents avaient pris un peu plus tôt.
« T’inquiète pas, c’est pas grave. » dit-il et, pour appuyer ses propos, il esquissa un semblant de sourire.
Quand Jonas propose à Armin de parler d’Isadora à une collègue et de montrer sa photo, notamment, le père ne peut refuser. Il ferait tout pour retrouver sa fille et rendre heureuse sa femme. L’une mérite de retrouver ses parents, l’autre mérite de retrouver sa fille. Depuis tant d’années ils sont désespérés et maintenant qu’ils ont une mini piste, ils peuvent bien se permettre de laisser les autres s’en mêler. Enfin...pas n’importe qui. Leurs amis surtout. La police en elle-même a été inefficace et complètement nulle. L’homme aux cheveux grisonnant n’allait sans doute plus demander leur aide à moins que quelque chose de grave n'arrive. Ou alors que ce soit vraiment nécessaire. Alors, si jamais il y avait une petite guerre du côté des voisins, il n’appellerait pas la police mais tenterait d’arranger cela par lui-même. C’est important, aussi, de ne pas en arriver aux mains. Mais avec Armin…On ne peut pas trop le promettre, quelque part.
« Je veux bien…Si tu crois vraiment qu’ils peuvent aider…Pourquoi pas ? ». Il faut bien tenter sa chance. Même s’il y en a peu. Même si les chances sont infimes. En tout cas il sourit légèrement, Armin. Il essaie de ne pas trop montrer son chagrin et son désarroi. Il faut qu’il avance, mais sur l’enquête. Pas dans sa vie. Sur sa vie personnelle, oui, mais pas sur sa vie professionnelle. Par exemple.
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