tell the world i'm coming home - w/ justin

Les retrouvailles entre père et fils étaient toujours ma partie préférée quand Justin partait, que ce soit pour une semaine ou pour un mois, comme ça l’était dans le cas présent. C’était assez fou, en y pensant, comme je ne pouvais pas rester longtemps loin de lui, et je savais qu’il ressentait la même chose. Malgré tout le sang que nous n’avions pas en commun, la connexion entre lui et moi était cent fois meilleure que s’il avait été de ma chair, c’était une évidence. J’avais suivi ses exploits aux Jeux Olympiques avec attention, regardant par la même occasion les performances de ses adversaires pour me faire une idée. Je n’étais vraiment pas un pro du patinage artistique, mais à force de le voir évoluer dans ce milieu, je commençais à m’y connaître un peu. Et je deviens bien avouer, sans être chauvin, que mon fils se débrouillait vraiment bien.

Mais c’était fini pour un temps tout ce sport, et j’étais en route pour l’aéroport, pour le retrouver et passer du temps avec lui. Biscuit était sagement couché à mes côtés, au pied du siège passager, sa laisse accrochée à la ceinture pour le sécuriser. Le golden faisait semblant de dormir, comme à chaque fois qu’il était en voiture, mais je le soupçonnais de savoir ce que nous allions faire. Lui aussi souffrait de l’absence de son maître. Une fois le court trajet jusqu’à l’aéroport effectué, je pris le temps de faire sortir Biscuit et de le laisser se dégourdir les pattes avant d’avancer vers le hall d’entrée. Je n’avais aucune idée quant à savoir si je pouvais entrer avec un chien, aussi, je préférais donc rester à l’extérieur, et je m’installai près des voies de taxi, sachant pertinemment que Justin ne m’appellerait pas pour me prévenir qu’il était arrivé et qu’il prendrait aussitôt une voiture pour rentrer. A mes pieds, Biscuit piaffait. Il sentait que le dénouement était proche. Plusieurs fois, il me regarda d’un air envieux, glapissant à demi pour me montrer son impatience.

Après plusieurs faux espoirs en voyant les portes devant nous s’ouvrir sans que Justin ne soit derrière celles-ci, je vis enfin apparaître la tête de mon garçon, masquée en partie par des lunettes de soleil. Je lui fis un signe de main avant de voir son visage s’illuminer en nous voyant - surtout en voyant Biscuit, il fallait bien l’avouer. Je me rapprochai alors que le chien lui fit la fête à grands coups de léchouilles. « Salut fiston ! » J’attendis que le chien se calme avant de serrer mon fils dans mes bras, frottant affectivement son dos. « Bravo, tu as été brillant ! » Je me détachai de lui en souriant, caressant sa joue avec émotion. « Ta mère serait très fière de toi, tu sais ? » Je n’attendais pas de réponse en particulier, je savais que cette affirmation n’en attendait pas. Nous savions tous les deux combien Anja aurait été heureuse et fière de voir tout cela. « Je me suis dit que j’allais te faire la surprise de venir te chercher… et comme tu le vois, je ne suis pas venu seul… » Je désignai le golden en souriant, avant d’ébouriffer les poils sur la tête du chien. « Je crois qu’il n’aurait pas tenu un jour de plus sans te voir. » Il avait dormi tous les jours depuis quatre jour sur le lit de Justin, peu importait où j’étais dans la maison. L’absence s’était faite ressentir, et il allait falloir se ressourcer désormais… mais c’était en bonne voie.

Certaines personnes pensent que le meilleur moment d’un voyage était lorsque l’on retrouvait son chez soi. Peu importait l’endroit où ils se rendaient, rentrer chez soi était toujours quelque chose d’agréable, que l’on appréciait grandement. Des émotions fortes, Justin en avait vécu pendant ce mois en Chine. Autant négatives que positives, elles avaient été bien nombreuses mais rien de comparable à ce qu’il ressentait alors qu’il était descendu de l’avion, respirant le bon air de Hambourg. Un vrai bonheur pour lui. Il retrouvait son chez lui ou cela allait venir et à mesure que ses pas le menaient vers la sortie de l’aéroport son cœur ne faisait que s’accélérer, il ressentait une joie immense bien caractéristique.

Parce que, en montant dans un taxi, il allait prendre la route pour le foyer qu’il partageait encore avec son père, bien qu’il ait la vingtaine bien avancée. Ce n’était pas l’endroit qui lui faisait ressentir tant de choses mais bien sa famille. Pour lui, rien n’était comparable au fait de retrouver les bras de son papa. Pouvait-il d’ailleurs y avoir meilleur endroit ? Peut-être dans les bras de Anja, sa maman, mais elle n’était malheureusement plus alors il préférait ne pas y penser. Retrouver son papa, c’était comme si elle était toujours là, avec le désormais cinquantenaire et c’était largement suffisant pour le patineur.

Comme chaque fois qu’il allait à une compétition, il s’était totalement donné, quitte à s’épuiser. Certes, cette fois, il y avait tout ce qui avait été prévu dans le village olympique pour divertir spectateurs comme athlètes. Il avait passé d’excellents moments de rigolade et de partage, des moments qu’il était bien décidé à partager avec Johannes si jamais il avait la chance de retourner aux Jeux Olympiques en 2026, à Milan. Il s’était amusé mais une fois qu’il était monté sur la glace, la rage de réussir à rendre fière celle qui l’avait élevé et qu’il considérait comme sa maman avait repris le dessus et cela lui avait presque donné des ailes pour réussir. C’était ce qu’il aimait imaginer lorsqu’il fermait les yeux, glissant sur la surface bien lisse. Sa maman qui, comme quand elle lui avait appris à faire ses premiers pas sur la glace, était là, juste derrière, à le tenir pour l’empêcher de tomber, le félicitant à la moindre petite réussite.

Anja, il ne pouvait pas la retrouver, plus la retrouver. Mais il comptait bien sur les quelques prochains jours, au moins, pour se reposer et se ressourcer auprès de la personne dont il était la plus proche. Son papa. Tous les deux avaient connu bien des hauts et des bas, ils étaient passé par toutes les émotions ou presque pour l’autre mais cela avait eu pour unique but de renforcer leur lien pour qu’il devienne toujours plus fort, quelque chose de franchement beau.

En sortant de l’aéroport, verres teintés posés sur le nez pour cacher les longues heures de voyage, il ne s’était pas posé de questions. Dans sa tête, le trajet était déjà prêt, il prendrait le taxi. Mais non, un chien en décida autrement. Baissant les yeux vers le magnifique animal, un très large sourire étira ses lèvres. Biscuit ! Comme tout bon maître qui se respecte, il lâcha totalement sa valise, se fichant de l’abandonner en plein milieu du passage. Son animal ! Il le caressa un bon moment, le laissant lui faire de grandes lapées sur le visage. Il pouvait bien, cela faisait tellement longtemps qu’ils ne s’étaient pas vus ! Ses yeux s’étaient doucement relevés vers la voix de son papa, qui eut pour effet de faire bondir son cœur dans sa poitrine. Il en était si heureux qu’il pouvait en pleurer ! Il attendit que le chien se calme au moins un minimum pour se relever. Il retira enfin ses lunettes de soleil et passa un bras sur son visage pour essuyer la salive de Biscuit à l’aide de sa manche. Puis il partit dans les bras de Johannes pour le serrer avec force, quelques secondes, murmurant un petit. « Salut p’pa ! » Il était toujours sous le coup de la surprise, cela lui faisait tellement plaisir, tellement de bien ! Alors il resta dans ses bras jusqu’à ce que le plus âgé décide de se détacher. « Merci… » Ce fut le seul mot qui passa la barrière de ses lèvres. Les yeux ancrés dans ceux de son papa, quelques larmes lui montèrent aux yeux. L’émotion d’entendre de tels mots, comme si c’était une confirmation. Parce que son papa connaissait si bien sa maman qu’il ne pouvait tout simplement pas mentir sur ce genre de choses. Pas dans la tête du patineur en tout cas. Le patinage, c’étaient des petits moments qu’ils avaient partagé entre mère et fils et voir le paternel affirmer cela, il ne pouvait qu’en être plus heureux encore. Il chassa les larmes avant que celles-ci ne tombent d’un simple battement de cils en souriant aux mots du plus âgé. « C’est parfait comme surprise, tu n’aurais pas pu me faire plus plaisir ! » dit-il en récupérant sa valise en voyant que quelqu’un manqua de la renverser en passant. Ses doigts passèrent également bientôt dans le pelage de l’animal pour le caresser. « Il va pouvoir arrêter de t’embêter, maintenant ! Et toi papa, comme tu vas ? ». Parce qu’un chien sans son maître, on pouvait comprendre le manque que les deux connaissaient mais un papa et son fils, cela pouvait dépendre de bien des choses. Bien évidemment, il ne s’attendait pas à entendre l’adulte déballer tous ses états d’âme depuis un mois complet mais tout de même ! Justin aurait sûrement du mal à dire à son père qu’il lui avait manqué mais il ne manquait pas de le lui montrer à travers des faits et gestes. Être loin de sa famille, c’était très compliqué. Tranquillement, il se mit à marcher vers le parking alors, suivant le père de famille, la laisse de son chien dans une maison, sa valise dans l’autre et surtout, ce sourire heureux posé sur les lèvres. « Il a du se passer pleins de trucs en mon absence, non ? »

« Arrête, tu sais bien que ce chien ne m’embêtera jamais ! » répliquai-je en riant, toujours les yeux rivés sur le chien tout fou de retrouver son maître. Au contre, il me faisait une présence très bénéfique quand Justin n’était pas là et que je me retrouvais seul à la maison. Je ne le disais peut-être pas souvent, mais cet animal était solaire, toujours joyeux - sauf quand Justin était absent trop longtemps - et il était toujours celui qui allait me forcer à bouger pour sortir, ou rien que me lever de mon lit quand ça n’allait pas. En réalité, heureusement qu’il était là ! Je relevai les yeux vers mon fils en me souvenant qu’il m’avait demandé comment j’allais. C’était souvent une question à laquelle je ne savais pas trop répondre, pour ne pas heurter les gens qui m’entouraient. Mais cette fois, c’était plutôt clair. « Maintenant que tu es de retour, ça ne peut aller mieux ! » Et c’était la vérité, le retour de Justin était un rayon de soleil, mais les dernières semaines n’avaient pas été si difficiles que cela non plus. En fait, je suivais mes journées en voguant au gré des vents. Parfois, quand je sentais que j’allais trop travailler et que ce n’était pas une bonne idée, j’imaginais Justin me faire les gros yeux et me dire que je devais rentrer et faire autre chose que mon travail.. et ça fonctionnait plutôt bien, à vrai dire. Mais mes journées avaient été toutes bien remplies, et le temps était passé plutôt vite. « Tu sais, le boulot, en ce moment c’est une période d’examens alors j’ai eu quelques copies à corriger… J’en ai profité pour voir Grace aussi, bien sûr… La routine, quoi ! »

Il était vrai qu’en un mois, il ne s’était pas passé tant de choses que cela, en partie parce que je passais mes journées à l’université, et qu’un travail, quel qu’il soit, ne laissait pas grand place aux loisirs lorsqu’il était intense. Le soir, en rentrant, j’en profitais pour faire de belles balades avec Biscuit qui adorait se dégourdir les pattes, et la douleur du printemps rendait le tout très agréable. Et puis, il y avait ces cours du soir que j’avais commencé à donner, mais je n’allais potentiellement pas en parler à Justin, puisqu’il me poserait des questions, et probablement me réprimander pour travailler encore un peu plus que ce que je ne faisais déjà. « Il a dû se passer beaucoup plus de choses pour toi que pour moi en tout cas ! A moins qu’on organise des JO de littérature, sinon tu auras toujours plus de choses à raconter… » Pendant que je racontais mes bêtises, nous arrivâmes à la voiture et j’ouvris directement le coffre pour permettre à Justin d’y ranger sa valise, afin que l’on puisse quitter le parking de cet aéroport et rentrer dans notre douce maison. « Dis moi tout, comment c’était la Chine ? Tu as pu visiter un peu plus que le village olympique ou pas ? » Je n’y avais jamais mis les pieds, quand bien même ce pays m’attirait énormément - comme à peu près tous les pays du monde dans lesquels je n’avais jamais posé une valise - et le récit de mon fils ne me donnerait qu’une envie plus forte encore d’y aller. « En tout cas, j’ai pu regarder toutes tes prestations, c’était vraiment incroyable. Je suis très fier de toi. » Il m’était important de le féliciter encore et encore, pour tout ce qu’il entreprenait et tout ce qu’il avait déjà accompli. Je le faisais deux fois plus qu’avant, pour l’encourager doublement, à la place de sa mère qui ne pouvait plus le faire.

Biscuit avait pris une très grande place dans la vie de Justin comme de Johannes et cela faisait beaucoup de bien. Les deux hommes avaient fini par caler leur vie, leur quotidien sur celui du chien bien que celui-ci soit bien loin d’être du genre à dormir toute la journée, à ne pas vouloir sortir de chez lui. C’était un animal sportif qui savait réclamer des moments de courses à son maître et dans un même temps, il savait pertinemment être bien plus calme avec Johannes pour aller au rythme du père de famille et se ressourcer. « Puis même si c’était le cas, il t’aime alors il ne s’éloignera pas ! » dit-il en souriant doucement. Les chiens arrivaient à sentir les personnes qui pouvaient les apprécier ou non et dans le cas présent, Biscuit savait très bien qu’il avait une place dans la famille Ehrlich comme membre à part entière qu’il était une présence agréable pour les deux hommes.

Les mots de son père le firent doucement sourire. Avec les mois et les années, ils avaient tous deux fini par se rapprocher et le faire d’entendre de la bouche de son père que le retrouver ne pouvait que le faire aller mieux le rendit particulièrement heureux. Il l’appréciait très grandement, cela ne faisait aucun doute, c’était comme de retrouver la maison avant même d’être entré dans leur appartement. Il embrassa la joue de son père avant de prendre sa valise vpour la tirer tranquillement derrière lui, le chien les suivant tout joyeusement. « Est-ce qu’il t’en reste beaucoup à corriger ? J’ai envie de faire pleins de choses avec toi ! Comment va Grace » dit-il en souriant tout doucement. Il avait toujours pleins de petites choses en tête, surtout lorsqu’il s’agissait de passer du temps avec ses proches, avec les personnes qu’il appréciait. Et sortir son paternel de leur maison était l’une de ses plus grandes passions.

Coffre de la voiture ouvert, il y glissa rapidement sa valise, Biscuit grimpant à côté. Il en profita pour commencer à embrasser sa jolie tête avant de fermer la porte et de partir s’installer côté passager. « Il faudrait inventer ça, tu aurais une occasion de voyager ! Après il y a déjà des compétitions de lecture rapide à l’étranger. Après un peu d’entraînement je suis sûr que tu pourrais y participer, c’est à l’étranger ! » dit-il en souriant légèrement, ne partageant absolument pas son goût pour les gros bouquins qu’il trouvait bien plus pompeux qu’autre chose.

Ils se mirent à parler des Jeux Olympiques de cette année, arrachant un petit sourire à Justin pendant qu’il s’attachait. « Pas beaucoup parce que le village était un peu éloigné de tout en fait… J’ai visité un ou deux villages autour, j’ai eu l’impression de me retrouver en Afrique… J’ai jamais visité ce continent mais les gens avaient l’air tellement pauvres… Mais ils étaient gentils. Ils ne comprenaient pas pouvoir j’étais asiatique mais que je ne parlais pas leur langue. Sinon on a visité un peu Pékin avant de rentrer, c’est un tout autre monde, j’ai adoré ! Je me suis cru dans un film ! »

Il sourit en tournant le regard en direction de son père. « Merci papa… La veille du programme libre je suis allé manger dans un petit restaurant, c’était hyper épicé… Je sais même pas comment j’ai fait pour tenir sur la glace, j’avais hyper mal au ventre et envie d’aller aux toilettes ! Vraiment, merci beaucoup papa, je n’en serais pas là sans toi ! »