Are you so surprised to find out I’m human after all? (Ludmila)

Il était tôt ce matin là, mais il se trouvait que Salvador était debout depuis... cinq heures du matin très exactement. Il avait passé le reste de la nuit jusqu'au petit matin à faire un tour dans son quartier, se planquer derrière des voitures ou même à simplement épier comme il le faisait si bien. Il ne travaillait sur aucune affaire pour l'heure, mais c'était un peu son petit plaisir coupable d'observer les gens et de s'en faire une histoire. La plupart du temps, il développait les photos qu'il prenait par simple hobby, dans sa chambre noire où il accrochait le résultait avec des pinces à linge. Il gardait tout précieusement tel un trésor enfoui sans pour autant aller plus loin que cela. Il aimait simplement apprécier la beauté de l'instant présent qu'il avait capturé à jamais, cela lui donnant l'illusion de pouvoir maitriser le temps comme tout bon photographe qui se respectait. Que ce soit un couple en train de se bécoter à la sortie d'une boite de nuit, une femme qui promenait son chien, des gens qui fumaient sur le pas de la porte de leur immeuble... On n'accordait jamais d'importance à ce genre de chose. C'était banal, les classiques de la vie quotidienne, nocturne ou non. Pourtant, Salvador adorait ça. Il n'était jamais allé à la rencontre de ces personnes qu'il prenait en photo de peur de gâcher ce moment là. Et puis, il n'était pas photographe professionnel. Un jour peut être se rapprochera t-il d'une galerie experte en la matière, mais pour le moment, c'était son jardin d'Eden personnel. Le genre de chose qui le raccrochait à sa vie et ainsi, il ne s'estimait pas tout à fait inutile de par cela.

A sept heure du matin passées, on pouvait le voir traverser le parc Planten un Blomen, grand terrain végétal apprécié et qui offrait de jolis paysages dans lesquels les gens adoraient se relaxer et prendre des photos. Sans doute le calme et l'apaisement de l'endroit inspirait avait attiré le détective qui cherchait comment occuper sa matinée avant la sieste qui l'attendait. Déjà, l'effet de la fatigue le gagnait et il allait falloir prendre son traitement pour ne pas se retrouver à s'endormir sans s'en rendre compte au milieu de nul part. Il n'avait pas envie de rentrer à la maison pour le moment et comme dans son entourage, tout le monde devait être en train de dormir à l'heure qu'il était, il profitait de cette solitude pour ce genre de moment. Installé sur la terrasse du café, il poursuivait la lecture de son livre en fumant une cigarette, grand stimulatrice également. Il remercia la serveuse qui apporta son café sans porter d'attention aux quelques personnes se trouvant dans les parages. Pourtant, Salvador avait l'oeil en général, mais il avait décidé de couper son attention pour se focaliser sur l'essentiel.

Un bruit sourd vint détourner son attention de sa lecture. Un peu sonné, il avait regardé autour de lui afin de situer d'où il pouvait provenir. Réflexe automatique, en soi, il lui en fallait peu pour l'alarmer avec tout ce qu'il avait déjà vécu. Pourtant, une personne venait de renverser le contenu du plateau qu'elle portait alors qu'elle échangeait un regard ahuri en sa direction. Il n'y avait pas encore grand monde dans les alentours, et bien qu'il faisait un petit peu frai, Salvador devinait que cet échange là n'était pas un hasard.
Toutefois, étant le seul client jusqu'à maintenant, il se décida de lui venir en aide. Salvador ne la reconnut d'abord pas, étant donné qu'au cours de sa vie, il en avait vu des visages et qu'il avait plutôt tendance à retenir des noms que des têtes (sauf exception). Il s'approcha d'elle, mais pas trop, afin de lui adresser un regard interloqué : "Tout va bien madame?" se risqua t-il de demander à voix haute d'une voix calme et paisible mais un peu inquiète.
Depuis qu'il avait quitté les forces de l'ordre, Salvador était beaucoup plus tranquille et surtout, moins irrité et agacé. Il avait rangé au placard sa personnalité ingrate et sa nature aigrie pour laisser place à un nouvel homme beaucoup plus patient et plus ouvert d'esprit. C'était comme si, tout le long durant, il avait été aveuglé et qu'il découvrait la réalité de ce monde. Cette démarche l'avait même éveillé sur sa situation et c'était ce qui l'avait conduit à poser sa démission. Même envers les gens, il se sentait plus proche, plus à même d'être à l'écoute et de venir véritablement en aide. Servir et protéger, il n'avait jamais eu plus ce sentiment là que depuis qu'il vivait à son compte.
"Attendez" prononça t-il afin de chercher dans la sacoche qu'il tenait autour de sa silhouette quelques mouchoirs qu'il lui tendit aussitôt qu'il les retrouvât. "Je m'en vois désolé pour votre café mais je comprend, je ne suis pas matinal non plus d'habitude."
Il s'était risqué à échapper un rire afin de dédramatiser cette chute mais ce n'était peut être pas le moment de faire un peu d'humour. D'ailleurs, il s'attendait à ce que l'échange avec cette inconnue s'arrête là, lui même peu friand des small talks américains.