Start of Something New || AXELINA

”- Comme dans I, robot, je crois !” remarque la brune comme il évoque des films de robots qui ont mal tourné.

Il existe pléthore de films dans lesquels les robots ne sont effectivement pas fiables et finissent par se retourner contre l’humain, qui les as initialement créé. Un nombre conséquent d'œuvres de fictions, qu’elles soient littéraires ou cinématographiques, font appel à ce scénario. Même elle qui ne regarde pas beaucoup la télévision, préférant de loin être dans la nature, est au courant de ce genre de choses. Et elle pense que oui, un jour, l'humain finira peut-être par connaître sa perte en l’ayant orchestré par leur imprudence, par leur manque de méfiance. Énormément de gens veulent créer de l’intelligence artificielle et la contrôler mais… Est-ce qu’à terme ces entités qui ne sont encore que des objets, n’auront pas suffisamment de connaissances pour finalement se rebeller ? La naissance d’une conscience, naît de leur intelligence, pourrait éventuellement les pousser à vouloir se venger de ceux qui les auront utilisés. Bien sûr, ce ne serait pas pour tout de suite, ce ne serait pas dans l’immédiat, mais d’ici quelques dizaines d’années…

”- Les progrès sont si rapides… Qui sait ce que l’homme et les robots seront capables de faire dans plusieurs dizaines d’années. Aura-t-on toujours le contrôle de la situation, ou est-ce qu’on ne risque pas de le perdre car certains voudront toujours plus ?” remarque la brune en jouant avec sa paille avant de hausser les épaules. ”Non, je n’ai jamais essayé ce genre de casque. Je préfère le réel et je dois admettre que je suis relativement peu souvent chez moi ou même enfermé. Je préfère les grands espaces, la nature, la famille… A toute cette high-tech. Je crois… Je crois que ce genre de choses déconnecte les gens. C’est triste de voir comme les gens sont devenus solitaires avec le temps avec l’explosion des réseaux sociaux, alors qu’il y a une trentaine d’années, ils étaient beaucoup plus connectés les uns aux autres…”

Proposant de boire autre chose, elle rit un peu quand l’homme demande qu’elle choisisse un cocktail pour lui, étant un peu perdu avec les noms de la carte. Il veut simplement quelque chose de sucré mais a peur de se tromper avec toutes les appellations allemandes de ces alcools qui ne sont pas forcément évidentes, quoique beaucoup aient conservé leur appellation d’origine. C’est la liste des ingrédients qui pêche et, il faut l’avouer, une recette peut changer d’un établissement à l’autre même sur un même cocktail.

”- De rien.”

Elle rit de nouveau comme il voudrait savoir comment on dirait ce terme en allemand. Ce n’est pas le plus compliqué, à vrai dire. Il y a des alcools bien plus difficiles à prononcer ou à épeler. Il ne devrait pas trop galérer avec ce dernier.

”- On dirait Sex am Strand en allemand, ce n’est pas le plus barbare qui soit.” souligne-t-elle. ”Mais on le dit tous en anglais même ici alors... C'est facile.”

Axel hocha la tête. Il y avait plusieurs films qui parlaient de ce phénomène. Le brun avait tendance à y croire. Comme il travaillait beaucoup dans le milieu des technologies, il voyait les évolutions de près. Pour l’instant, ce n’était pas encore grand-chose. Les gens se servaient des intelligences artificielles pour faire chanter les personnalités publiques, mais après ? … Axel aimait mieux ne pas trop y penser. Ce n’était pas le moment d’angoisser n’est-ce pas ?

Aurelia et lui n’avaient pas du tout la même vision du monde. Elle était même totalement son inverse et le brun de nature timide ne put s’empêcher de se sentir mal, il sentait qu’il dérangeait avec ses propos sur la technologie et les jeux vidéo. Il baissa légèrement la tête et sous la nervosité, il se mit à jouer avec ses doigts blessés. C’était une habitude qu’il avait prise lorsqu’il faisait une connerie. Comme si ce simple geste lui faisait réaliser qu’il avait fait ou dit un truc de mal. Et cela, même si ce n’était pas le cas. C’était le manque de confiance en lui qui parlait. Déjà qu’il soit assis à cette table était presque un moment historique pour lui. « J-je… Oui je comprends votre point de vue. Je suppose qu’il y a plusieurs façons de voir les choses. Personnellement, je ne me suis jamais senti autant entouré depuis que j’effectue mon métier actuel. Ça m’a permis de créer des amitiés au quatre coins du monde. J’aime autant être dans ce monde que faire des longues balades en extérieur sur ma moto. » Un petit sourire naquit sur ses lèvres. Il était heureux comme cela. Certes, il passait beaucoup de temps en intérieur, mais pour lui, c’était là qu’il se sentait le plus entouré. C’était même dehors qu’il se sentait un peu plus seul. Il avait quelques amis dans le coin, mais son cercle était beaucoup réduit qu’en France. « Je suis navré de vous embêter avec ça…» S’excuser… Une passion d’Axel qui avait dû pratiquement s’excuser de vivre lorsqu’il était avec sa femme. La moindre phrase, le moindre mouvement pouvait la faire éclater. Il avait appris à se faire petit. Il tâchait au maximum de se sortir de ce comportement, mais parfois il revenait au galop. Surtout quand il avait l’impression d’avoir parlé trop longtemps ou d’avoir embêté quelqu’un.

Heureusement, sa rencontre de la soirée ne lui demanda pas de partir et elle accepta même de prendre un verre supplémentaire avec lui. Verre qu’elle choisit permettant enfin au brun de boire autre chose que de la bière. « Ah oui ? Je prends note dans ce cas, ça risque de me faciliter la vie. Les menus sont souvent en allemand, donc j’ai supposé qu’il fallait commander dans cette langue. » Il rit, il se sentait un petit peu bête, mais on ne pouvait pas dire que c’était nouveau avec lui. Il prit une nouvelle gorgée de sa boisson avant que son regard ne se perdre vers la scène où s’amusait un duo. « J’adore cette chanson. » dit-il avant de rire. « Et eux, ils ne sont pas à leur premier Sex am Strande. » L’homme se tenait au pied de son micro pour ne pas tomber tandis que la femme titubait plus qu’elle ne dansait.

Ils ne sont pas d’accord, ce n’est pas bien grave. Ils ont seulement deux visions très opposées. Lui, amateur de jeux vidéos, d’écran, trouve des connexions dans son travail. Elle, qui préfère les grands espaces et la liberté de balades à cheval, y trouve, au contraire, un manque de relations sociales. Peut-être que, lorsque l’on joue en équipe, les effets sont moindres mais il lui semble pour autant que d’être devant un écran ne favorise pas la connexion aux autres. Ceux qui jouent seuls, qui en oublient de manger, de se doucher, de se coucher… Ce n’est peut-être pas une majorité mais c’est une dérive qui concerne malgré tout une grande partie de la population. Sans parler des effets néfastes sur l’éducation des enfants, entre ceux qui sont placés devant une télévision pour ne pas déranger les parents et ceux qui sont laissés à leurs sorts, parfois oubliés, car les parents jouent. Le nez rivé sur un écran, focalisé sur un jeu, combien de ces parents oublient de passer du temps de qualité avec leur progéniture ? Quand aux autres, lorsque l’on voit comment les gens se parlent en ligne…

”- Ce que je veux dire c’est que beaucoup, en étant en ligne, sont déconnectés de leurs proches. Les gens se parlent mais ne s’écoutent pas. On place les enfants devant des écrans pour avoir la paix, pouvoir soi-même s’installer devant une série ou un jeu, au lieu de jouer avec eux, développer leur créativité, leur découverte… C’est en cela que je trouve que la high-tech déconnecte les gens.” explique-t-elle.

Mais pour autant, il ne l’embête pas, elle comprend qu’il puisse penser différemment. Après tout, le monde est fait de personnes qui ne pensent pas de la même façon, ne voient pas les choses de la même manière. C'est un fait, il est impossible d'être toujours d'accord sur tout avec qui que ce soit. Et, parfois, on ne l'est pas même avec soi-même.

"- Vous ne m'embêtez pas." affirme-t-elle en réponse, haussant les épaules. ”Dans la vie nous ne sommes jamais tout à fait d’accord avec les gens, c’est normal. Cela ne veut pas pour autant dire que nous les ennuyons, du moins je ne l’espère pas. J’ai dû ennuyer pas mal de monde, si c’est le cas..”

Elle jette un regard au mouvement de ses doigts, notant son anxiété. Était-ce le fait de ne pas être d’accord qui le mettait dans un tel état ? Elle aurait aimé pouvoir répondre que non mais, pour avoir vécu des comportements similaires, elle sait qu’elle ne peut pas se tromper sur le fait qu’il s’agisse réellement d’anxiété. Elle avait eu ce genre de réactions aussi, à une époque. Stress post-traumatique.

”- Pas pour les cocktails non.” elle dessine un sourire sur ses lèvres. ”Et dans les restaurants, n’hésitez pas à demander une carte anglaise, ou bilingue, ils en ont souvent un peu. Cela vous permettra de vous repérer un peu dans les plats.”

Surtout sans se priver d’aller au restaurant par peur de ce sur quoi il allait pouvoir tomber dans les plats, s’il se trompait dans la commande. Il a de la chance, Hambourg est tout de même bien touristique, permettant donc que les serveurs y parlent pas mal anglais. Pour peu que l’on sache se débrouiller en anglais, c’est toujours d’une grande aide pour les étranger.

”- Non, sûrement pas le dernier… Probablement le six ou septième !”

Axel ne pouvait pas dénigrer sa passion. C’était toute sa vie, ce qui le rendait vivant. Il ne pouvait pas non plus être d’accord avec les propos de sa nouvelle rencontre et ça avait ce don de le rendre nerveux. Ça avait toujours été difficile pour lui d’avoir un point de vue différent. Dans le cas présent, il ne parlait pas d’enfants ou d’autres cas. Il parlait de son expérience à lui. De l’échappatoire qu’Internet et les réseaux sociaux ont été pour lui. Tout ça l’avait permis d’échapper à son horrible quotidien, de rester vivant pendant une période sa vie où il aurait voulu disparaître. Ce qu’il avait fini par faire d’une certaine façon.

Pour Axel, dans certain cas, c’était plus facile de ne rien répondre, de garder ses ressentis pour lui. Fuir était également une option et il en vint à se demander si ce n’était pas mieux qu’il retourne à sa place. La nervosité se voyait dans ses gestes, gestes qui ne semblèrent pas échapper à la femme. Son regard s’était dévié vers les mains d’Axel. Immédiatement, l’homme avait arrêté et il avait posé ses mains à plat sur ses cuisses. « Je vois ce que vous voulez dire, vraiment… mais… » Il se contenta d’hausser les épaules. Avait-il vraiment besoin de préciser qu’il n’avait pas le même moindre de vue et que cette discussion ne pourrait aller plus loin ? Axel n’était pas du genre à débattre pendant des heures. Il n’était pas doué pour argumenter de toute façon. Il ne ferait jamais changer personne d’avis. Le plus simple pour lui restait de s’excuser et ensuite de disparaître.

Changer de sujet était sans doute une meilleure option, non ? Il ne voulait vraiment pas la contrarier, mais il ne pouvait non plus faire une croix sur la personne qu’il était. La boisson et la nourriture, ça fonctionnait toujours. Il n’allait pas se plaindre, en plus, ça lui avait permis d’apprendre à prononcer un cocktail en allemand. « J’ai tendance à dire que je suis aussi mauvais en anglais qu’en allemand. Heureusement que la plupart du temps, les serveurs sont patients avec moi. Ou je suis accompagné, on commande pour moi. » Oups ? Démasqué ? Axel faisait souvent commander par d’autres personnes. Ce n’était pas la meilleure façon d’apprendre, mais tant que ça lui permettait de manger. « J’adore quand il y a des photos sur les menus. C’est facilitant. » Peu importe la langue, même en français, c’était toujours plus facile avec des images. Il avait l’impression, dans certains cas, que les plats étaient une énumération d’ingrédients. C’était plus facile avec une image de savoir ce qu’on allait manger.

Le brun observait la scène où se défoulait un couple qui le fit sourire. Leur état était clairement avancé et le trentenaire les trouvait presque courageux d’aller sur scène. Lui, il avait tellement peur du jugement des autres qu’il n’oserait pas. Déjà qu’il n’osait plus aborder un nouveau sujet, par crainte d’embêter encore sa nouvelle connaissance. Même si elle affirmait le contraire, l’homme restait avec une mauvaise impression de ce qu’il avait pu dire ou faire. Comme toujours. C’était typique de chez lui. Cette crainte de déranger qui le poussait à observer ailleurs. L’homme sourit à l’approbation de la brune et il hocha la tête : « Dans ce cas, je les admire de tenir encore debout. »

Ils ne sont pas d’accord l’un avec l’autre c’est un fait, mais ça n’est pas non plus un problème. Leur opinion divergent, comme c’est le cas pour bien du monde, à vrai dire. On ne peut jamais être d’accord tout le temps avec tout le monde. Elle ne voit pas pourquoi il l’embêterait parce qu’il pense différemment. Au contraire. Ce serait sans doute très ennuyeux si tout le monde était toujours d’accord sur tout, s’il n’y avait jamais de débat ni discussion passionné. On tournerait vite en rond avec les gens, finalement. Il n’y aurait plus rien à dire. Ce serait vite angoissant, quelque part.

Il hausse les épaules sans achever sa phrase et elle suppose que la discussion à ce sujet est close, qu’il ne veut pas aller plus loin. Mais ce n’est pas la seule chose qu’elle remarque. Sa nervosité, également, est évidente et elle lève un sourcil en le constatant. Elle se demande ce qui lui arrive. Ce qui l’angoisse à ce point. Est-ce donc de ne pas être d’accord ? Elle ne voit pas pourquoi réagir de cette manière, ce sont des choses qui arrivent. Mais elle ne voit rien d’autre qui pourrait expliquer cette déstabilisante réaction. Est-ce qu’il redoute les conflits à ce point ? Peut-être. Elle ignore pourquoi, mais ça se tient. Pour autant, ça la questionne, ça l’interroge, quoiqu’elle n’en dise rien, ne pouvant se le permettre, ne le connaissant pas assez pour s’autoriser des interrogations peut-être trop intimes, trop intrusives. Elle ne peut pas se l’autoriser. Pas ainsi.

Il change de conversation, ayant besoin de son aide pour se dépatouiller avec les commandes, comme il ne sait pas appeler le cocktail de son nom allemand. Le point positif est que personne ne l’utilise pour les cocktails, tout le monde les nomme par leurs noms d'origine. Cosmopolitan, Sex on the beach, White Russian, Moscow Mule et autres… Tous sont appelés à l’anglaise finalement, sans la moindre traduction en allemand. Mais pour le reste du temps, pour les plats, il peut demander une carte bilingue pour s’aider. Il n’en trouvera peut-être pas en Français mais en Anglais, ça devrait se faire. Malheureusement, il confesse ne pas être spécialement doué dans cette langue non plus.  

”- Effectivement, dans ce cas-là, ça n’aidera pas beaucoup.” remarque-t-elle. ”Je suis d’accord qu’avec des photos, c’est plus parlant.” Elle admet. ”Sinon vous avez les applications de traduction automatique, vous avez déjà vu ça ? Avec votre téléphone vous prenez le menu en photo et vous n’avez ainsi plus qu’à passer celle-ci dans le google Lens, qui vous traduira le texte dans la langue que vous voulez ! C’est parfois bien pratique.”

Leur attention se posant sur la scène, ils remarquent un couple qui crient plus qu’ils ne chantent, des paroles plus ou moins correctes en essayant de lire le prompteur. Non, ils n’en sont pas à leur premier cocktail de la soirée c’est certain, elle parierait volontiers sur une demi-douzaine, si ça n’est pas plus, une réflexion qu’elle partage avec l’homme qui s’étonne alors de les avoir encore debout.

”- Oh, ce ne sont que des cocktails, ce n’est pas si fort… Je crois.”

Axel ne pouvait pas être totalement serein avec le fait de ne pas être en accord avec quelqu’un. Il n’arriverait pas à se raisonner, pas comme cela. Il aurait besoin de davantage de recul et d’une longue conversation avec lui-même pour réaliser que ce n’était pas grave. Sauf qu’on l’avait habitué autrement, on l’avait contraint à ne pas penser par lui-même, à tout accepter en hochant la tête. On l’avait poussé dans ses retranchements en s’attaquant à ses sujets préférés pour le pousser à ne pas réagir. C’est ce qu’il fit à cet instant précis, il se refusa de réagir préférant accorder le point à sa connaissance de la soirée. Ils auraient sûrement pu en parler longtemps si Axel n’avait pas été… Lui-même. Il savait qu’il donnerait l’impression de manquer de courage, mais peu importe. Il avait l’habitude au fond.

Peut-être qu’avec un verre de plus ça irait mieux pour lui ? Peut-être allait-il se sentir moins gêné d’être là ? Il n’était pas l’humain qui avait le plus de facilité avec les nouvelles rencontres. Souvent les sujets de conversation s’essoufflaient vite et il ne savait pas comment relancer. C’était sûrement bête à dire pour un garçon de son âge, mais il était comme cela Axel. Il était beaucoup plus renfermé que la moyenne et ensuite, il avait besoin de temps pour recharger sa batterie de sociabilité.

Heureusement pour lui, sa nouvelle rencontre ne le laissa pas seule avec ses problèmes d’allemand. En plus de l’aider, elle se permit de lui donner un conseil. Il haussa un sourcil. « Attendez… Ça se fait directement via téléphone ? Je connais Google Lens, mais que sur mon ordinateur. Oh, vous devez m’apprendre. » Le brun ne laissa pas réellement le choix à la jeune femme. Il s’était déjà saisi de son propre téléphone pour prendre le menu des boissons en photo. Ensuite il tendit son appareil à la brune. « Je suis tout ouïe. » Contrairement à d’autres, ça ne le vexait pas de ne pas savoir quelque chose. Bien au contraire. Axel avait toujours été très ouvert à apprendre et à découvrir des nouvelles choses. Si en plus, ces nouvelles choses pouvaient lui sauver la vie, il serait d’autant plus attentif. Allait-il, un jour, réussir à commander par lui-même ?

« Je crois que ça dépend du barman. Mon patron, lui, il ne sait pas doser. Ça l’amuse de voir les gens grimacer sous ses supers cocktails. » L’homme sourit légèrement avant de prendre une nouvelle gorgée de sa boisson. « Dans les commerces, ils sont moins généreux sur l’alcool. Probablement parce que ça coûte plus cher… Et que ça pousse les gens à boire davantage. » Il haussa les épaules. Après tout, certaines personnes ne buvaient que pour le « feeling » d’être bourré. Lui ce n’était pas son cas. Malgré son côté renfermé, lorsqu’Axel était confiance avec son entourage, il faisait partie de ceux qui savaient s’amuser sans abuser des bonnes choses.

Il peut s’en sortir avec la langue allemande et les cartes des restaurants en utilisant un outil très simple et que tout le monde a dans sa poche, s’il a peur de ne pas comprendre la langue. Il suffit de faire une photo avec son smartphone et de la passer sur google lens, pour la faire traduire. Après quoi, il n’y a plus qu’à lire le menu dans une langue que l’on connaît. Simple. Pratique. Efficace. Si elle voyageait, elle utiliserait sans aucun doute cette astuce. Mais elle ne s’en sert que pour traduire quelques textes sur internet, quand elle ne parvient pas à traduire en ligne directement. Au moins, c’est une astuce dont elle sait qu’elle marche. Une astuce que l'homme n’avait pas, comme il affirme ne connaître google lens que sur l’ordinateur. Il a besoin qu’elle lui montre.

”- Alors c’est simple, vous ouvrez votre galerie, vous prenez votre photo avec du texte, regardez…”

Elle en ouvre une au hasard, une page russe sur l’équitation qu’elle a eu besoin de traduire il n’y a pas si longtemps. Ce sera pratique pour lui montrer ce qu’il y a à montrer. Lui présentant donc son écran, elle désigne le deuxième bouton à gauche, le plus au centre.

”- Là vous voyez !? Google Lens ! Et une fois que vous êtes là, l’option traduire est juste ici ! Regardez ! Et voilà ! Le texte en russe, traduit en allemand ! En anglais. En Français !” explique-t-elle en changeant la langue au fur et à mesure qu’elle parle pour appuyer son propos. ”Il y a juste à faire ça avec le menu et l’affaire est dans le sac ! Allez y, essayez !” propose-t-elle en attrapant le menu pour le lui tendre, afin qu’il puisse reproduire l’exercice qu’elle vient de lui montrer.

Sur scène, un duo chante sans grande justesse, plus enivré qu’ils ne le devraient. Il est certain qu’ils n’ont pas bu qu’un ou deux cocktails mais deux ou trois fois ce compte-là. Probablement trois fois, en réalité, au minimum. Une dose qui semble inquiéter l’homme qui lui fait face et qui la fait rire. Ce ne sont que des cocktails, ça ne semble pas être si dangereux, crois-t-elle. Elle en a l’image de quelque chose de plutôt doux. Mais elle se trompe peut-être et certains sont plus coriaces que d’autres. Surtout, comme il le remarque, ça dépend aussi du barman, qui s’occupe de la boisson. Son patron est infoutu de le faire correctement, apparemment, ne sachant pas doser et étant amusé de voir les gens un peu mal.

”- Mais quel tortionnaire !” elle esquisse un sourire. ”Oui, il faut qu’ils rentabilisent, c’est normal ! Eux, ils ont dû en boire quelques uns pour en arriver là, les pauvres !” dit-elle en sirotant son propre verre.

Attentivement, Axel écouta la femme lui expliquer comment utiliser un outil de traduction directement sur son téléphone. Même si Axel passait beaucoup de temps sur des ordinateurs, il n’était pas nécessairement le meilleur. Il y avait encore de mystères pour lui dans ce domaine. Même avec son téléphone… Lui qui passait toujours par son PC lorsqu’il avait besoin de traduire quelque chose… Ça allait grandement lui faciliter la vie. Ça semblait tellement simple lorsque c’était elle qui le faisait. Axel espérait vraiment avoir la même facilité son tour venu.

« C’est parti ! » S’exclama-t-il presque joyeusement en attrapant le menu tendu pour le poser correctement sur la table. Son téléphone en main, il prit une photo et il suivit les étapes apprises plus tôt. Il avait toujours été un bon élève Axel après tout. Quelques instants plus tard, le menu allemand s’affichait désormais en français sur son téléphone. Un français peut-être un peu sommaire, mais qui lui permettait de comprendre la majorité de la carte. Un petit rire de joie lui échappa avant qu’un sourire ne s’affiche sur son visage. « Woah! C’est impressionnant. C’est incroyablement simple. Il n’est jamais trop tard pour apprendre, mais qu’est-ce que ça m’aurait sauvé si j’avais connu cette technique à mon arrivée. » Il pinça les lèvres ensemble avant de rire de nouveau. Ouais, les souvenirs de son arrivée ici n’étaient pas les meilleurs. Il avait de la difficulté autant en anglais qu’en allemand. Il avait maudit quelques temps sa petite sœur d’avoir choisi cet endroit, mais maintenant, c’était histoire du passé. Axel avait perfectionné son anglais assez rapidement. Surtout via son boulot avec Adrian qui l’avait poussé à sortir de sa zone de confort et de discuter dans cette langue avec certaines marques. Aujourd’hui, même avec son accent, il se sentait beaucoup plus à l’aise.

« C’est l’image qu’il aime bien donner, mais c’est vraiment un mec sympa. C’est un bon patron. Et un bon ami depuis. » C’était impressionnant au début de travailler pour son streameur préféré, mais depuis, Axel avait appris à connaître et à apprécier l’homme. Homme qui ressemblait beaucoup au streameur au fond. Axel n’avait eu aucune surprise. « Et ils vont le regretter demain. Ils risquent peut-être de se retrouver sur Tiktok. » Non loin de la scène, Axel pointa une personne qui était en train de filmer le duo loin de son état normal. « Ma hantise. » Ouf non… Se retrouver sur Internet comme cela… Oui, c’était sa plus grande crainte. Il pensait surtout au fait que sa femme pourrait tomber dessus et ça serait fini pour lui… Brrr… Il ne fallait pas qu’il y pense trop. Il serait capable de faire une crise d’angoisse. Axel attrapa son verre à deux mains et il prit une longue gorgée. Il préférait se concentrer sur son alcool.

Pour se débrouiller à l’étranger, quand on ne connaît pas la langue et que l’on a besoin de traduire des textes, l’astuce qu’elle s’apprête à lui présenter est passible de sauver des vies. Peut-être pas jusque là, bien sûr, mais ça reste quelque chose de très utile à connaître et qui peut permettre de se dépatouiller dans certaines situations. Paulina lui montre donc comment procéder, allant dans le dossier galerie de son téléphone pour y retrouver un cliché et finalement ouvrir Google lens, appuyant sur le bouton traduire qui, en un instant, apporte une traduction claire de l'article en allemand puis en anglais et en français au jeune homme. Ce dernier trouve ça impressionnant et incroyablement simple, regrettant de n'avoir pas connu l'astuce plus tôt, ce qui aurait pu le sauver lorsqu'il est arrivé en Allemagne et ne connaissait rien à la langue du pays.

"- C'est en effet très pratique et le mieux avec ça c'est que ça marche pour n'importe quel pays, n'importe quelle langue. C'est-à-dire que, où que vous alliez dans le monde, vous pouvez utiliser cette astuce ! Et ainsi, plus de problème de carte, plus de problème de commande dans les restaurants, ou de problème pour lire une carte routière ou quoi que ce soit d'autre ! Une simple petite photo, Google Lens et l'affaire est dans le sac !" annonce fièrement la brunette. "C'est vraiment une astuce à connaître." admet elle, le laissant faire sa propre tentative pour vérifier qu'il a assimilé le truc.

Comme il parle des compétences de barman de son supérieur, Paulina le taquine quelque peu et rapidement, le jeune homme indique que son patron est vraiment un mec sympa, quelqu'un de bien, qui est devenu un bon ami. Elle opine de la tête. Elle peut dire la même chose avec son propre patron. Emeric est vraiment un homme incroyable, qui gagne à être connu. Elle n'oubliera jamais la manière qu'il a eu de considérer son accident, sa tentative de démission, la refusant en bloc lorsqu'elle avait pensé que sa vie était foutue, qu'elle ne pourrait plus jamais être monitrice d'équitation. Son patron ne l'avait pas laissé tomber, il lui avait montré à quel point elle pouvait compter sur lui, à quel point il était humain.

"- Ils ne le sont pas tous, ce sont des spécimens rares, alors quand on en a un, on a plutôt intérêt à le remarquer et être reconnaissant pour cette grâce."

Elle sait qu'elle est redevable envers son propre patron, qu'elle ne pourra jamais partir de son centre. Pas après tout ce qu'il a fait pour elle. Pas avec tout le soutien qu'il lui a apporté. Et elle est reconnaissante envers lui comme envers le ciel d'avoir mis quelqu'un comme lui sur sa route. Elle sait qu’elle a eu de la chance, beaucoup de chance. Et en parlant de chance, il y en a deux qui en auront beaucoup s’ils ne finissent pas sur Tiktok avant la fin de la soirée, à faire le buzz avec leur interprétation disons… alcoolisée.

"- Je crois que j’y suis vaguement, par quelques élèves mais heureusement, rien d’aussi embarrassant que ça !" remarque la brune.

Axel aimait apprendre des nouvelles choses. Surtout lorsque ces dernières allaient lui faciliter la vie dans le futur. D’une certaine façon, il se disait que c’était mieux qu’il ait découvert cette astuce plus tard, il avait dû se mettre un vrai coup de pied aux fesses pour apprendre l’Allemand. Certes, que la base, il avait dû apprendre deux langues en même temps. Lui qui n’était pas très fort en Anglais. Axel avait dû remettre son nez dans des livres dès son arrivée ici. Il ne le regrettait pas. Il avait appris beaucoup de choses et il savait se débrouiller aujourd’hui. Bon, surtout à l’écrit. C’était plus facile pour lui. Il avait encore de mal à parler les deux langues. Son accent était très présent. « Merci beaucoup. C’est noté dans un coin dans ma tête et c’est sûr que ça va me servir plus d’une fois! » Pour ça, il ne doutait pas. Surtout dans les menus où les articles n’avaient pas d’images.

Axel n’était pas le plus doué pour sociabiliser, il le savait. Entretenir une discussion n’était pas son fort, encore plus avec une femme qui pouvait potentiellement le plaire. C’était sûrement idiot, mais il était capable de tout gâcher à lui-même en n’étant pas… assez présent ? Certes, physiquement il serait toujours là, mais il faisait partie de ceux qui savait très comment s’effacer et il finissait toujours par le faire inconsciemment. Il avait cette crainte de prendre trop de place, de devenir ennuyant. Donc il se contentait souvent d’écouter les conversations, de réagir avec la tête et d’attendre qu’on vienne vers lui. Ce soir, ça pouvait paraître mineur, mais il avait réellement fait des efforts. Et là, il se sentait sur son déclin. Surtout lorsqu’il observait la pièce où il se trouvait à la recherche du moindre détail intéressant. Son attention s’était centrée sur la scène où il y avait un spectacle particulier, mais pas inhabituel dans ce genre d’endroit. Quelque chose qu’il n’oserait jamais faire lui-même, il était beaucoup trop timide pour ça. Sauf peut-être avec quelques verres dans le nez où il devenait une toute autre personne.

Au fil de la discussion, Axel avait réussi à se faire peur tout de seul. Il sentait vraiment une panique incontrôlable montrer en lui à la simple pensée qu’on puisse le retrouver et le forcer à rentrer en France… Ou pire. « Tant que vous êtes « ok » avec les vidéos postées, tout va bien…» Il tenta de lui sourire, mais il se sentait crispé. Sa respiration avait de nouveau accéléré et le fait de boire son verre plus rapidement n’avait pas aidé son cas. Merde, merde, merde… Pas maintenant, ça allait si bien, non ...?

La soirée est plutôt bonne, se passe plutôt bien, mais quand ils remarquent le duo qui chante, elle a l’impression que les choses se gâtent un peu, que l’humeur de son interlocuteur se fait un peu plus lourde, un peu plus maussade, sans qu’elle n’en comprenne les raisons. Elle avait l’impression que ça avait commencé quand il avait évoqué le fait que ces gens risquent de se retrouver sur tiktok, mais elle ne pouvait pas en être sûre. Elle avait bien l'impression, pourtant, que ça avait été le déclencheur d’une sorte de malaise, quelque part.

L’observant encore, alors qu’elle porte son verre à ses lèvres, elle essaie de comprendre ce qui ne va pas d’un coup, ce qui lui arrive à présent. Est-ce qu’il a peur de finir sur les réseaux sociaux, comme elle vient de dire qu’elle y est probablement à son insu, en raison des cours et des vidéos des élèves ? Peut-être. Il pourrait craindre que des gens dans son entourage aient déjà fait ce genre de choses et que des photos ou vidéos de lui se baladent sur le web, mais est-ce une raison suffisante pour s’inquiéter comme ça ? Elle n’en est pas vraiment certaine, à dire le vrai.

"- Disons que c’est assez anecdotique, je ne pense pas qu’il y ait quoi que ce soit de compromettant, ce ne sont que des vidéos qui pourraient concerner mon travail, que ce soit dans ou hors leçon. Heureusement rien d’aussi gênant que ça…" elle fait un signe de tête vers les chanteurs.

Non, ça ne serait rien d’aussi terrible. Les vidéos qui traînent d’elle sur quelques réseaux que ce soit ne devraient au moins, contrairement à ces gens, pas vraiment la ridiculiser. Donc, rien qui ne soit vraiment embêtant, si ce n’est que son image traîne peut-être plus ou moins n’importe où. Mais ce n’est pas si grave. Lui, en tout cas, ne semble vraiment pas serein avec cette conversation et elle lève finalement un sourcil.

"- Est-ce que vous vous sentez bien ?" demande-t-elle alors en le fixant, comme il a le regard fuyant.

Axel détestait se sentir comme cela. Il n’avait aucun contrôle sur ses émotions, sur les pensées intrusives qui lui gâchaient la vie depuis bien trop longtemps maintenant. Un instant, il allait bien, l’instant d’après il frôlait la crise d’angoisse. Et cela, pour un oui ou pour un non. Ce n’était pas nouveau pour le brun, mais c’était toujours aussi difficile à gérer. Voire impossible. Axel ne gérait pas grand-chose au fond. L’avait-il déjà fait ?

Plus que tout, il essayait de se concentrer sur les paroles de la femme. Elle précisait que sa présence sur les réseaux sociaux n’avait rien d’aussi gênante que le duo sur scène qui se faisait filmer à son insu. Heureusement. Axel expira doucement dans l’optique de calmer la boule présente dans son estomac. Il s’était contenté d’hocher la tête aux propos de la brune. Il était déjà ailleurs et… c’était frustrant. Il ne voulait pas lui donner l’impression qu’il l’ignorait ou qu’il n’en avait rien à faire. Ce n’était pas du tout ça. Tout était beaucoup plus compliqué.

« Il y a… beaucoup de gens non ? » remarque complètement futile tandis qu’Axel tournait la tête de gauche et à droite. Non, en fait. C’était plutôt tranquille, c’était une mauvaise impression qu’il avait. Causée par la peur qui le gagnait, mais également par le fait qu’il avait bu très rapidement. Le rouge commençait à monter sur ses joues. « Je me sens bien, j’ai soudainement très chaud. » Ce n’était qu’un demi-mensonge, non ? Il ne se sentait pas tellement bien, mais il avait vraiment très chaud. Axel n’arrivait pas à tenir le regard de la femme. Ce dernier se baladait dans tous les coins de la place, comme s’il était à la recherche de quelque chose. « Pardon. Je suis désolé. Je suis désolé… » C’était presqu’un automatisme pour lui de s’excuser lorsqu’il faisait quelque chose de mal. À cet instant précis, il avait ce sentiment que sa perte de contrôle était très mal. Au point où il se releva, presque prêt à partir, mais ses jambes ne semblèrent pas de cet avis, car il ne bougea pas. Il avait besoin d’un instant pour se ressaisir.

Paulina étudie Axel comme il remarque qu’il y a du monde et lève un sourcil face à cette affirmation. Certes, le karaoké est un peu fréquenté mais… ça lui semble plus que supportable. Axel, en revanche, semble de plus en plus mal à l'aise, laissant transparaître des signes indiscutables de son malaise et, si elle prête attention à ces dernier, elle remarque bien que quelque chose ne va vraiment pas, pour lui, dans cette foule. Que quelque chose est difficile. Agoraphobie ? Probablement pas, sinon il ne serait même pas là. Mais il semble de plus en plus évident qu’il a, malgré tout, du mal avec les rassemblements.

"- Hé bien, il y a un peu de monde, oui…" souffle Paulina, observant les tables tout autour.

Personne ne fait attention à eux cependant, si bien que tout en étant entourés, ils sont presque seuls. C’est tout comme, en réalité. Mais, reportant son regard sur lui, elle perçoit la réalité de cette gêne, de cet inconfort, presque palpable. Alors elle sourit doucement, s'efforçant de le mettre à l'aise, un peu comme elle le pouvait, ne le connaissant pas très bien. Il y a encore une heure, il n’était qu’un étranger.

"- Vous n'avez pas à vous excuser, ne vous en faites pas, ce sont des choses qui arrivent... Est-ce que vous avez besoin que nous sortions prendre un peu l’air ? Peut-être que cela vous ferait un peu de bien…" remarque-t-elle, penchant la tête sur le côté en l’observant.

Elle lui accorde un sourire encourageant, lui offrant un soutien silencieux tout en lui laissant le choix de décider de leur prochaine étape. Sortir ou rester, c'est à lui de décider. Elle sait par expérience que parfois, c'est en affrontant les moments difficiles qu'on découvre sa propre force. Elle le sait parce qu'elle a elle-même connu des moments difficiles. Parce qu’elle-même a dû composer avec l’adversité, quand elle a perdu son mollet gauche à la suite de son accident. Apprendre à vivre avec le traumatisme, avec la prothèse, à faire face pour se reconstruire… Tout ça l’avait forgé. Exactement comme le fait de trouver son compagnon dans le même lit qu’une amie. Alors elle est bien placé pour savoir que les moments les plus difficiles sont ceux qui nous construisent. Mais elle sait aussi que, parfois, on en a simplement pas la force. Qu'on ne peut pas lutter sans cesse.

Axel détestait ses pensées. Tout simplement. Elles savaient se montrer si intrusives et cela, même dans les moments où tout allait bien. Comment avait-il pu passer d’un extrême à un autre aussi rapidement ? Merci ses pensées et cette femme qui avait détruit l’homme qu’il était. Cette femme qui revenait dans son esprit dès qu’il osait s’accorder un peu de répit, lorsqu’il essayait de l’oublier, d’avancer. Soudainement, Axel avait cette impression d’étouffer. Il avait cette fausse sensation que le nombre de personnes dans le bar avait doublé alors que pas du tout. C’était un soir plutôt tranquille, un soir où il aurait dû rester en contrôle de lui-même.

Axel avait l’impression de regarder sa nouvelle rencontre de la soirée sans vraiment la voir. Il était là et ailleurs en même temps. Il tâchait au mieux de contrôler sa respiration et d’éviter cette crise de panique qui l’attaquait sauvagement. Néanmoins, même sans la voir, il l’entendit. Il avait réussi à se concentrer sur ses mots se voulant rassurant et l’espace d’un instant, il s’en sentit même apaisé. Il hocha vivement la tête comme réponse à la brune. Oh oui, il voulait sortir, il voulait prendre l’air, il voulait se concentrer sur autre chose. Sans hésiter, Axel se leva. Il n’avait pas l’impression d’être en contrôle de ses mouvements, mais il se dirigea vers l’extérieur. L’espace d’un moment, il avait complètement oublié son ordinateur portable et toutes ses affaires sur sa propre table au fond du bar. Axel ouvrit la porte du karaoké presque à la volée pour rejoindre l’air frais. Il prit une profonde inspiration avant de souffler de longues secondes. S’approchant du mur le plus près, le brun posa sa main gauche contre ce dernier pour prendre appui. « Super la première impression, Axel. Vraiment, de plus en plus doué. » Il avait grommelé pour lui-même sans réellement savoir si la brune l’avait suivi. Si c’était le cas, elle n’aurait pas échappé à son dialogue avec lui-même. Étrangement, ça lui faisait toujours du bien de se maudire à voix haute. Peut-être, car il avait été habitué de se faire disputer en toutes circonstances ? Pouvait-il vraiment trouver un réconfort dans le fait que quelqu’un soit en colère contre lui ?

Il affirme avoir trop chaud, qu'il y a trop de monde et, jetant un regard autour d'elle, la brune propose rapidement de sortir pour prendre l'air. Peut-être que ça lui fera le plus grand bien. Un peu d'air frais de la nuit ne manquera pas d'étouffer la sensation de chaleur qu'il ressent. De dissiper le malaise qui le prend. Avec un peu de chance, à peine sorti, il sera déjà beaucoup mieux. C'est en tout cas tout ce qu'elle lui souhaite. Et l'homme ne se fait pas prier pour se ranger à son avis, affirmant qu'il aimerait effectivement sortir d'un simple hochement de tête, se levant déjà pour avancer vers la porte sans même attendre qu’elle le suive. Paulina ne l’arrête pas mais se lève et lui emboîte le pas, boitillant un peu avec sa prothèse, récupérant son sac à main au passage pour ne pas le laisser seul sans surveillance dans le karaoké.

À peine sortie, elle le retrouve rapidement comme il est simplement installé contre le mur le plus près, la main gauche contre celui-ci, marmonnant quelques mots qu'elle distingue tout juste. Elle ne comprend pas tout, mais il lui semble avoir entendu quelque chose comme “impression”. Elle ne sait simplement pas vraiment ce que cela veut dire, à quoi il peut bien penser sur le moment. Peu importe. Elle se rapproche de lui et pose une main sur son épaule, doucement, pour manifester sa présence avant de le questionner.

"- Est-ce que ça va un peu mieux ?" demande-t-elle. "Moins chaud ?"

Il fait si froid dehors que, s’il affirme avoir encore chaud,elle ne comprendra pas vraiment. Enfin, elle comprendra surtout qu’il est fiévreux, malade, et a besoin de voir un médecin. Elle-même a l’impression de se geler et resserre sa veste autour d’elle, comme si elle pouvait vraiment la protéger de ce froid mordant.

"- Est-ce que ça vous arrive souvent d'avoir chaud d'un coup comme ça ?" demande-t-elle pour briser le silence.

Axel se sentait idiot, Il se sentait inutile et surtout, il se sentait très nul. Il fallait toujours qu’il gâche tout. Il n’avait aucune raison d’angoisser et pourtant… Il se retrouvait dehors, à essayer de maitriser des émotions pour lesquelles il n’avait jamais eu le contrôle. La brune avait déjà été très sympathique de lui proposer de sortir et encore plus de l’accompagner. Aurait-elle dû prendre la fuite ? Axel avait l’impression que ça aurait le mieux pour elle. Elle n’était pas obligée de « s’occuper » de lui et de ses problèmes. Elle ne le connaissait pas, elle n’avait aucune obligation envers lui et pourtant… Elle était là. Elle avait posé une main contre son épaule et par réflexe, Axel avait posé la sienne par-dessus. Comme par besoin de se rassurer. De sa main blessée, il tentait de serrer la sienne de ses doigts valides tandis qu’il avait fermé les yeux dans l’optique de se maîtriser.

« Je crois que ça va mieux. J’ai moins l’impression d’étouffer. » Il n’avait pas encore moins chaud. Sinon, il aurait remarqué qu’il faisait très froid dehors et que ce n’était pas le moment de sortir sans manteau. Encore moins d’entraîner une personne innocente dans sa cause.

Axel se risqua à se retourner à sa question suivante. Est-ce que ça lui arrivait souvent ? Son regard se planta dans celui de la brune et Axel poussa un profond soupir. « J’aimerais vous répondre que non, mais… ça m’arrive. Je crois que les bars, ce n’est pas pour moi finalement. » Il tenta un léger rire, mais ça ne semblait pas naturel. Il arrivait plus facilement à dédramatiser une situation lorsqu’il n’était pas directement concerné. « Je vous remercie de m’avoir suivi. Mais si vous voulez prendre la fuite, vous pouvez. Je vais fermer les yeux. » Il sourit. Il n’allait pas lui imposer sa présence plus longtemps. Dans son esprit, il avait tout gâché. Et il ne pouvait même pas définir qu’est-ce qu’il considérait par « tout ». En si peu de temps, difficile de croiser quelque chose, non ?

À l'intérieur, la soirée karaoké bat son plein, contrastant avec le silence de la nuit, tout comme la chaleur étouffante du lieu contraste avec la fraîcheur de cette nuit de Mai. Pourtant, Paulina se tient là, dans la fraîcheur de la nuit, à quelques pas d'Axel, captant chaque expression, chaque hésitation qui traverse son visage alors qu'il se risque à partager ses pensées. Ses yeux bleus se fixent sur lui alors qu'il avoue ses doutes concernant les bars. Peut-être que ce n'est pas pour lui.

Elle remarque sa tentative maladroite de rire, un rire qui sonne faux, mais qui révèle la vulnérabilité de son interlocuteur. Un éclair d'empathie traverse Paulina. Elle comprend ce sentiment de malaise dans un lieu bruyant, cette envie pressante de s'échapper loin de cette agitation. Parfois, tout ce dont on a besoin, c'est d'être seul. Elle le sait, le comprend. Elle l'a longtemps été elle-même, a longtemps cherché la solitude.

Sa proposition pour qu'elle s'échappe si elle le souhaite la surprend et elle lève un sourcil, le dévisageant quelques instants avant de finalement esquisser un petit sourire. Elle détourne brièvement le regard vers la fenêtre, son regard se perdant sur les ombres dansantes à l'intérieur. Puis elle reporte son attention sur lui.

"- Vous savez, les endroits animés ne sont pas pour tout le monde.", commença-t-elle, sa voix douce brisant le silence de la nuit. "Et parfois, le besoin de s'éloigner un moment est tout à fait compréhensible."

Elle fait une pause, observant son visage tourmenté, conservant un sourire encourageant sur ses lèvres avant de reprendre.

"- Je ne partirai pas."

TW : Violence conjugale

Axel se mettait beaucoup de pression. Ce n’était pas quelque chose de nouveau et ce n’était pas quelque chose qu’il pourrait changer d’aussi tôt. La perfection, il avait dû essayer de la toucher encore et encore sans jamais y parvenir. Il ne pourrait jamais oublier toutes les reproches qu’il avait eues, toutes les insultes et surtout les coups qu’il avait reçus, car il avait eu le malheur d’être maladroit. On lui en avait toujours beaucoup demandé et même seul, aujourd’hui, il se mettait cette même pression sur les épaules. Et il avait tendance à beaucoup s’en vouloir lorsque tout ne se passait pas comment il l’aurait souhaité. Comme à cet instant précis où l’angoisse avait pris le dessus sur tout et ça, sans raison valable. Axel allait s’en vouloir longtemps et il allait se reprocher ce comportement idiot. Pour lui, c’était un frein à cette nouvelle rencontre qu’il avait voulu faire.

Axel aurait pu mentir, comme il savait si bien le faire, il aurait pu dire à la brune que c’était une situation rare, qu’il ne comprenait pas ce qui lui arrivait, mais… Il ne fallait pas débuter du mauvais pas, non ? « Oui, vous avez raison. Je ne sais pas pourquoi je m’inflige ça. » Il rit doucement, dans l’optique de dédramatiser la situation. Peut-être parce qu’il avait envie de rencontrer des nouvelles personnes et que c’était une bonne façon de le faire. Axel avait beaucoup d’amitié virtuelle, mais la plupart se trouvait en France. Ce n’était pas le plus pratique quand il avait besoin d’être avec des gens. « Moi qui avais encore espoir d’aller chanter. » Non pas du tout. Il n’avait jamais eu cet espoir, mais il avait besoin de dédramatiser la situation. Encore et encore. Presque dans l’espoir de faire oublier sa bêtise.

Ils se regardèrent un moment. Elle lui sourit et il se sentit presque défaillir. Son cœur s’emballa d’un coup tandis qu’il observait la brune sous la lueur de la lune. Elle affirma qu’elle ne partirait pas et c’est l’incompréhension qui prit place sur le visage d’Axel. Il fronça légèrement les sourcils avant de demander, tel un enfant : « Mais pourquoi ? » C’était un comportement presque inhabituel pour lui.

Alors qu’il parle, Paulina l’observe, essayant de comprendre ce qui lui arrivait. Pas grand chose en particulier, visiblement, si ce n’était qu’il s’imposait quelque chose qui n’était pas pour lui. Apparemment, ce n’était pas la première fois qu’il avait un problème dans un bar, pas la première fois qu’il était confronté à ce genre de malaise. Pas la première fois qu’il avait trop chaud d’un coup, parce qu’il y avait trop de foule autour de lui, trop de monde. Et ce n’est pas grave. C’est peut-être seulement que ce genre de soirées, ce n’est pas pour lui. Pas ce dont il a besoin. Il y a des gens qui aiment ça. D’autre pour qui ça n’est pas leur tasse de thé. Cela n’est pas un problème. Enfin, ça ne devrait pas l’être, tout du moins.

"- Oh… Je crois que c’est parfois dans la nature humaine de se montrer entêté, de penser que l’on va finir par apprécier quelque chose simplement parce que c’est ce qui plaît à la grande majorité des gens. Le fait est que l’on est pas toujours fait pour aimer ce que les autres aiment. Tenez, par exemple, beaucoup de monde aime les films d’horreur et je… déteste ça ! Pourtant j’ai essayé d’en regarder, plusieurs fois, en me disant que le problème venait peut-être de moi…" grimace-t-elle.

Le résultat avait été sans appel. Elle détestait vraiment ça et il ne semblait rien y avoir à faire pour changer la donne. Aujourd'hui, elle l'avait accepté et elle n'en regardait plus mais elle avait insisté plus d'une fois, parce que ses amis lui avait fait des recommandations de films qu'elle pourrait apprécier.

"- Oh mais si ce n'est que ça, si vous y tenez vraiment, nous pouvons toujours retourner à l'intérieur…" souffle-t-elle avec un petit rire comme il affirme qu'il était à deux doigts de chanter.

Naturellement, elle ne le croit pas, pas une seconde, pas un instant. Il semble évident qu'il ne se serait jamais jeté à l'eau, d'autant plus qu'il ne semble pas être à l'aise face à un public. Elle doute qu'il aurait supporté d'être le centre d'attention du bar. D'autant plus qu'il ne semble pas encore tout à fait remis de ses émotions, prêt à la laisser fuir pour qu’elle profite de sa soirée. Qu’elle ne parte pas semble l’étonner. Elle hausse les épaules.

"- Hé bien je ne vais pas vous laisser comme ça."

Axel avait craqué. Ce qu’il pouvait détester ça. Surtout après autant de temps. Il devrait être plus fort, plus solide non ? Et pourtant, il n’arrivait toujours pas à dormir sur ses deux oreilles. Il vivait avec cette peur au ventre causée par sa fuite. Peut-être aurait-il dû quitter de façon plus légitime ? Demander le divorce et se bâtir une nouvelle vie sans regarder derrière lui constamment ? Peut-être… Mais ce n’était pas ce qu’il avait fait… Il avait eu peur. Comme toujours au fond. Elle lui avait toujours fait peur. Il se demandait encore pourquoi il s’était engagé si profond dans cette relation qui le poussait aujourd’hui à gérer une crise d’angoisse dans la ruelle d’un bar. Quelle vie Axel. Quel succès n’est-ce pas.

Un petit rire s’échappa de ses lèvres à la remarque de la brune sur les films d’horreur. « Je déteste ça aussi. Je suis un vrai trouillard. Peut-être qu’on pourrait se donner du courage mutuellement… Enfin, je veux dire… Je… » Ils n’étaient même pas à l’étape de se revoir, pourquoi parlait-il de l’éventualité de regarder un film ensemble ? Il était idiot. « Je ne sais pas ce que je voulais dire. » Il se sentait déjà suffisamment maladroit. Pourquoi devait-il toujours en ajouter une couche ? Au moins, Axel savait faire preuve d’autodérision et il le montra en spécifiant qu’il avait manqué sa chance d’aller chanter. Tout de suite, la femme lui spécifia qu’ils pouvaient toujours retourner à l’intérieur et le brun secoua négativement. « Je peux retourner à l’intérieur pour récupérer mes affaires et… on peut peut-être se faire un karaoké privé sur mon ordinateur, dans le parking. » Il rit. « C’est un plan louche, non ? Vous avez déjà eu plus louche que ça ? » Si elle ne voulait pas le laisser tomber, est-ce qu’il allait finalement la pousser à fuir avec ses idées à la con ? Ce n’était pas son but premier, il était bon pour le faire de manière inconsciente.

Il affirme être un vrai trouillard et détester, lui aussi, les films d’horreur. Au moins quelqu’un qui peut la comprendre, comprendre l’inconfort qui s’empare d’elle quand elle regarde ce genre de films, qu’elle ne termine de toute façon jamais, parce qu’elle ne prend aucune sorte de plaisir en s’installant devant ce genre de choses. Au moins lui ne cherchera pas à lui montrer par A plus B que ces films sont “drôles” et que c’est elle qui n’est qu’une “petite nature”, commentaires qu’elle a déjà vraiment entendu. Au contraire, il lui propose de trouver un moyen de se donner un courage mutuel, même s’il se coupe rapidement, ne sachant visiblement pas quoi dire, comment expliciter sa pensée.

"- Ah ! Voilà qui va être embêtant…" remarque-t-elle comme il affirme qu’il ne sait pas ce qu’il voulait dire.

S’il ne le sait pas, ou plus, elle ne risque pas de le savoir pour lui, ne risque pas de le savoir à sa place. Comment voudrait-ils qu’ils se donnent mutuellement du courage ? Ce n’est pas comme s’ils avaient l’obligation de regarder ces films, de les aimer. Aujourd’hui qu’elle a prit le parti d’accepter son désamour pour ce genre de choses, qu’elle ne s’impose plus d’essayer, elle ne voit pas de raison de s’y remettre.

"- Je crois que, si nous n’aimons pas, c’est notre droit. Il n’y a pas vraiment à nous encourager." remarque la brune. "Il y a plein de gens qui n’aiment pas certaines choses, je ne crois pas que cela soit un problème. Tous les goûts sont dans la nature comme on dit !"

Rien ne les force à rien, pas même à aimer les bars. C’est correct. Il a le droit de ne pas non plus aimer l’idée de chanter devant une foule de personnes comme l’avaient fait les gens qu’ils avaient vu un peu plus tôt et qui découvriront demain de sacrés vidéos d’eux prises par leurs amis comme par, peut-être, quelques inconnus. Mais il veut prouver le contraire en affirmant être prêt à y retourner juste pour danser. Elle ne se le fait pas dire deux fois et rebondit sur la chose, suggérant d’y retourner, pour rire. Evidemment l’homme décline mais formule une proposition plus étonnante, ensuite, qui lui fait froncer les sourcils.

"- Un karaoké dans un parking ?" répète-t-elle. "Et c’est à quel moment de la chanson, exactement, que j’apprends que vous êtes un tueur en série habitué à décapiter des femmes dans ses parkings obscurs ?" questionne-t-elle en plaisantant.

Pour être étonnant, ça l’était.

Axel n’était vraiment pas le plus doué lorsqu’il était question de rencontre. Il avait toujours l’impression de dire la chose qui le faisait passer pour un être bizarre. Au fond, c’est ce qu’il était, non ? Il était bizarre. Lui, il l’avait accepté. Il fallait que ses nouvelles rencontres l’acceptent également. Il ne pourrait pas changer, il était condamné à être étrange. Il aurait préféré être condamné à l’excellence. Ça aurait été mieux, non ? Dans tous les cas, on ne pourrait pas lui reprocher de tout donner. Même s’il se prenait quelques leçons de moral depuis le début de cette soirée. Il avait l’habitude au fond.

« Oui, tous les goûts sont dans la nature. Même si ce n’est pas toujours simple de ne pas se plier à ce que la société attend de nous. Marié, des enfants, un boulot stable, une maison. » Il haussa les épaules. Il s’était marié, mais c’était un échec. Il n’avait pas d’enfant et c’était sûrement mieux comme cela. Un boulot stable ? Ça, il l’avait, mais ce n’était pas un boulot « conforme ». Il n’était pas accepté dans la société actuelle. Et une maison ? Il n’avait jamais regardé. Il aurait sûrement les moyens de s’en acheter une, mais seul ? Non, il préférait vivre avec sa petite sœur. Cette vie lui convenait et elle lui permettait d’être entouré tous les jours.

« Hm. Je pense que vous pourrez commencer à vous poser des questions à la moitié d’Every breath you take. Mais promis, je ne vais pas la chanter en premier. » Axel avait décidé d’embarquer dans le jeu avec une chanson un peu glauque. Aussi bien jouer totalement plutôt que de jouer à moitié, non ? Il était presque évident que le brun n’avait rien pour lui. Comment pouvait-il séquestrer quelqu’un ? Et encore… Il ne fallait pas se fier totalement aux apparences n’est-ce pas ? « Alors ? Achetez-vous ce projet ? » Bien sûr, tu allais attendre d’avoir son consentement avant d’imposer quoi que ce soit.

Tous les goûts sont dans la nature, c’est bien vrai. Parfaitement vrai. Et ils n’aiment pas forcément les films d’horreur, contrairement à d’autres ce n’est sûrement pas un crime. Ils apprécient forcément d’autres choses, l’un comme l’autre, qui sont tout aussi valables. Elle apprécie davantage les films d’aventure et les comédies, ceux qui captivent, ceux qui font rire, ceux qui permettent de se déconnecter de la réalité, pas de se pisser dessus toute la nuit par après au moindre petit bruit de pas, de bruissement de vent dans les feuilles ou quoi que ce soit d’autre. Et leur propos, s’il est valable pour les films, l’est tout autant dans tous les aspects et domaines de la vie, comme l’homme remarque que c’est difficile, en même temps, de ne pas se conformer au moule prédéfini par la société. Elle pince ses lèvres l’une contre l’autre.

"- Ce sont des diktats qui, heureusement, je crois, tendent de plus en plus à disparaître, non ?"

Il lui semble qu’il y a de plus en plus d’ouverture d’esprit à ce sujet, ou bien est-ce seulement parce qu’elle ne s’entoure que des bonnes personnes ? Peut-être. C’est une possibilité. En attendant, personne ne vient se mêler de ses affaires à essayer de savoir quand est-ce qu’elle aura un mari ou des enfants. D’autant plus que tout ça ce n’est pas vraiment pour elle. Le mariage lui semble être une chose effrayante, tant il donne de l’emprise à l’autre. Quant aux enfants… Comment pourrait-elle penser à devenir mère, quand elle ne peut pas faire confiance au moindre homme pour en être le père ? Parce que les hommes… Hé bien, les hommes l’ont déçu. Elle a apprit à ses dépends qu’homme ou femme, on est jamais mieux trahi que par ceux qui nous sont les plus proches, malheureusement.

"- Tout du moins, ce n’est pas un problème que je rencontre souvent dans ma vie, heureusement." affirme-t-elle.

Il propose de poursuivre la soirée karaoké en privée, dans un coin en retrait, loin des oreilles indiscrètes et elle ne peut s'empêcher de lever un sourcil. Dis comme ça, ça sonne un peu comme un mauvais plan. Le genre de manœuvre qui pourrait voir faire finir dans les faits divers. Elle en plaisante cependant, parce qu'il n'a pas l'air bien méchant, pas bien l'air menaçant. Peut-être manque-t-elle simplement de prudence ? Il affirme néanmoins qu'elle n'a pas de question à se poser avant la moitié d’Every breath you take, tout en promettant de ne pas la chanter immédiatement, jouant d’humour. Et ça marche. Elle rit, dans un premier temps.

"- Hé bien voyons voir si nous pouvons faire déluger demain !" lance-t-elle, dans un second.