Libre * Nulle interdiction n'est destinée à être enfreinte

Tallulah avait du temps à tuer. Elle s'était levée beaucoup trop tard, comme à son habitude. Elle n'avait rien prévu. Aucune fête, aucune course à faire, à court de coke, elle ne pouvait rien faire. Alors, drôle d'idée elle avait eu, elle s'était rendue au zoo. Le zoo. Quelle drôle d'idée vraiment. Un endroit grouillant d'enfants, de couple et de bestioles. Des bestioles sales qui plus est. Qu'est-ce qu'elle foutait là au juste ? Elle ne savait pas. Mais bon, elle s'était franchement dit que freiner sa consommation de cocaïne pouvait être pas mal. On dit de s'aérer pour se changer les idées. Ca ne marchait pas. Elle leva les yeux au ciel avant d'enfourner un chewing-gum dans sa bouche.
Mâche, mâche, mâche et l'envie passera comme une lettre à la poste. Mais les quatre lettres de "coke" restaient gravées dans son esprit. Comme une chanson entêtante, cette foutue drogue ne voulait pas partir de ses pensées. Saleté. Parfois elle se disait qu'il serait mieux pour ses finances -seulement- qu'elle stoppe mais, c'était tout bonnement inefficace. Elle n'y arrivait pas. Comme une sale manie, comme se ronger les ongles. Sauf qu'elle savait que la drogue était bien pire qu'une simple onychophagie. Elle rentra donc dans l'enceinte du zoo et regarda les gens aux alentours. Des enfants, des enfants et encore des enfants. Elle n'en aurait jamais. Pas avec son mari, son cher et tendre. Cette pensée la fit dériver. Et les larmes furent bientôt au bord des yeux. Elle aurait tellement voulu des enfants. Seulement avec lui. Pas avec le premier connard de Hamburg. Seul lui. Elle soupira et se réfugia loin des enfants. Elle trouva un endroit propice. L'enclos des autruches. Elle regarde ces volatiles d'un drôle d'oeil. " Tiens sale piaf. " dit-elle en lui balançant un bout de pain acheté un peu plus tôt. Du bon pain en plus. Mais, elle s'en foutait. Ce n'était que du pain. Qu'est-ce que c'était du pain quand on avait perdu son mari ? Elle soupira avant d'être dérangée. " Il est formellement interdit de nourrir les animaux ! Leur régime alimentaire est très surveillé et vous pourriez leur causer des maladies, vous ne savez pas lire !? " Tallulah se retourne. Elle arque un sourcil. Elle s'empêcha de lui rétorquer de fermer sa grande gueule. Ce n'était pas très poli. Surtout qu'elle aurait rajouté un petit "salope" à la fin de sa phrase. Une simple ponctuation dirons-nous. Tallulah regarda le panneau, haussa les épaules et jeta le reste de son pain dans l'enclos. Il était à peine entamé. Le sale piaf pouvait donc s'étouffer avec un aussi gros bout de pain. Mais, Tallulah s'en fichait. Comme elle se fichait de la vie, des interdictions et de tout d'ailleurs. " Tu vas faire quoi là ? Le chercher ? Laisse-moi rire. " Elle ne put s'empêcher de rigoler à gorge déployée. Imaginer la scène la faisait beaucoup rire. N'était-il pas interdit de monter dans l'enclos des animaux ? Il lui semblait mais sur le coup, elle n'en était pas vraiment sûre.

Elle n'en était pas vraiment sûre et vraiment, ça la ferait bien marrer de voir la brune crapahuter la barrière et entrer dans l'enclos. A moins que ce soit impossible... Les fils étaient électrifiés peut-être ? Ca serait vachement moins cool. Elle dévisagea de haut en bas la chieuse de première. Brune, peau bronzée -pour ne pas vexer certain. Rien de bien appétissant pour Tallulah. Elle soupira. Pourtant, ça serait tellement drôle de voir une femme enceinte bouger son gros cul pour passer la rambarde. Tallulah leva les yeux au ciel. Une femme enceinte, il ne manquait plus que ça ! Tallulah allait subir ses hormones. Déjà qu'elle avait l'air du genre énervée si les hormones s'y mettaient.... La brune prit son talkie-walkie. " Un individu de sexe féminin jette du pain aux autruches, secteur 2. Un morceau pourrait étouffer les bêtes. Elle se montre moqueuse quand on lui rappelle l'interdiction. Vous intervenez ? Merci. " Et blablabla se répéta Tallulah en boucle. Elle était tombée sur la chieuse de première. Elle n'avait rien de fantastique cette nana -à part son gros ventre. Ces paroles arrachèrent un sourire narquois à Tallulah. Et ils allaient faire quoi les gars du parc ? La séquestrer parce qu'elle avait jeté un gros morceau de pain ? La blague. Tallulah regarda les hommes du zoo s'affairer avec beaucoup trop de soin pour un simple bout de pain. Tallulah était presque émerveillée devant ce spectacle là. " Vous savez que c'est dangereux et passible d'une amande ce que vous venez de faire !? " Tallulah soupira et regarda ses pieds. Telle la gamine qu'elle n'était plus. Elle finit par relever la tête et prit un air penaud. " Excusez-moi, je ne savais pas. " Tallulah regarda la brune profondément dans les yeux. Histoire de la mettre bien mal à l'aise. Histoire qu'elle y croit à son histoire de sainte nitouche qui s'excuse. Tallulah finit par ricaner comme la vieille sorcière qu'elle était. Elle finit par souffler. " Et tu crois vraiment que ça me fait peur ? " Qu'est-ce qui faisait peur à Tallulah au juste ? Elle ne sut pas sur le moment.
Enfin si, elle s'imagina la pire situation: le perdre une seconde fois.

Sarah est agacée et c'est vrai qu'avec son ventre, avec ses hormones, avec sa fatigue, il lui en faut peu pour être courroucée. Alors cette femme et son comportement, qui se moque ouvertement des règlements, Sarah a bien du mal à la supporter et ce d'autant plus qu'elle la défie, en jetant ce pain dans le parc comme justement Sarah lui fait savoir que c'est interdit. Sans perdre de temps la demoiselle prévient les soigneurs de sorte que ces derniers puissent intervenir, comme il ne faudrait pas qu'une autruche tente de manger le morceau et ne s'étouffe avec devant des milliers de visiteur, un animal à l'agonie n'étant pas ce que les parents souhaitaient montrer à leur enfant même si c'était aussi l'occasion de montrer à ces derniers l'exemple même de la connerie humaine dans ce qu'elle a de plus détestable. L'humain détruit tout, il pense détenir tout les droit sur les espèces, tout les droits sur le monde et il en joue, affreusement.

Elle ne croit pas une seconde à son petit air désolé quand le jeune femme dit qu'elle ne savait pas. A vrai dire selon elle si elle était sincère, elle se serait abstenue de jeter ce pain dans l'enclos, elle aurait écouté tout de suite les recommandation de la guide et n'aurait pas cherché à faire la maline. Alors elle n'est pas surprise quand cette femme rit comme une folle, avant de faire remarquer qu'elle n'a pas peur. Fort bien. Sarah ne peut pas faire grand chose contre ce genre de personnes, mais elle reste malgré tout, grillant sa pause avec cette femme en attendant que les gardiens du zoo arrivent. Sarah suppose qu'ils sont fort occupés à l'entrée.

«- Ce que je crois n'as pas d'importance ici. Ce que je crois c'est que ce n'est plus de mon ressors et que d'autres feront le nécessaire. La maltraitance animale est considérée comme un crime.»

Elle se souvenait trop bien des débordements de l'affaire Arnold, le chat, qui avait aboutit à une prise d'otage et des mises à mort. Elle frissonne.