(LIWRY) time after time

Au FreshFusion, cela faisait déjà son cinquième soupire en moins d’une demi-heure. Il y avait un nombre incalculable de choses qui le préoccuper notamment son manque de sommeil inhérent à son passé compliqué. Son verre à cocktail, tout juste entamé, l’ennuyait ne serait-ce que par sa couleur que par son goût. C’était injuste pour la serveuse qui faisait de son mieux après sa troisième tentative pour le satisfaire. Elle lui faisait les yeux doux, il lui retournait des sourires tendres sans prendre l’occasion d’approfondir cet échange silencieux avec elle. Volontaire ou volontaire, son cœur ne battait pas pour elle aussi jolie pouvait-elle être, il ne voulait pas aller plus loin. Il touilla le mélange fruité tant dans un sens que dans l’autre avant de tirer sur la grande paille. Il sortit son téléphone et scrolla les activités sur les actualités du hockey. Il leva les yeux de manière à sonder la salle, sans aucun intérêt au début. Il resta un moment à la regarder sans qu’elle ne se rende compte qu’il l’a dévisagé. Elle devait être vraiment épuisée car il remarqua les petites grimaces de douleur survenant souvent au moment d’un entraînement intense. Par chance, surement, il détourna le regard avant de rencontrer le sien et le releva sur la rousse quand il entendit un salut un peu sorti en volute de fumée, instantané. « Salut ! » Il lui adressa un sourire franc et opéra une posture ouvert, nettement moins renfrognée du départ :

─ Salut ! Est-ce que je peux te l’offrir ?

D’un petit coup de tête léger, trainant, il pointa la barmaid travaillant sur sa boisson multivitaminée, en grand gentleman. Il espérait que cela entraîne une conversation plus longue qu’à l’accoutumée et comme ils s’étaient croisés de temps en temps avant aujourd’hui, il ne passerait pas pour quelqu’un d’invasif mais curieux d’en apprendre un peu plus sur elle.

─ Longue journée ?

Il s’engagea sur ce terrain, trouvant la jeune femme tellement épuisée que cela aurait été hypocrite – venant de sa part, que d’ignorer cet état de fait.

Spoiler:

Henry prit son temps pour étudier la moindre petite parcelle de peau de la jeune femme, dérivant l’attention de la jeune fille sur autre chose pour ne pas l’effrayer. Il ne jouait pas, il était réellement fasciné par cette beauté rousse qu’il avait pour compagnie. Il ne se laissait jamais démonter par l’imprévu, c’était une question d’improvisation et en la voyant arrivée aussi déconfite, il s’était donné pour mission de lui rendre le sourire qu’elle n’avait pas en arrivant. Malheureusement pour lui, en voyant ses lèvres s’étirer y laissant découvrir une petite fossette, il se sentait déconnecter de ces propres volontés. Il lui offrit donc le verre de jus fruit multivitaminé, emballé à l’idée de passer un peu plus de temps avec elle.

─ Je suis content que tu acceptes.

Il lui fallait valider cette information à voix haute tandis que son corps s’ouvrit puis se rapprocha de la jeune femme. Cette élégance ne pouvait être qu’une danseuse ou une patineuse ayant de l’entraînement. Il détermina le bon moment pour lui poser une question. Elle était là, fatiguée avec un corps meurtri. Elle l’ignorait, ou peut-être pas, mais à chacun de ces gestes, même infimes, elle avait une petite grimace de douleur. De plus, elle bailla rien qu’à l’idée de décrire sa journée éreintante.

─ Bon signe, va falloir que tu m’en dises un peu plus ?

Si Hambourg avait déjà un coach tortionnaire, cela lui pouvait lui être profitable dans le sens où il ne se ferait pas autant remarquer qu’à Berlin. Après quoi, cela dépendait de l’auteur de la torture et de la victime ainsi que de son endurance.

─ Je viens me détendre un peu, ici. Il est sympa ce bar ! On y trouve de bons jus de fruits et.. on y fait de belles rencontre, je dirais.

Il sirote son jus, il avait une saveur différente, un peu comme si la jeune femme avait ramené quelque chose qu’il n’avait plus et dont il ne savait plus. Il voulait en savoir plus, sur elle et sur son quotidien mais comment arriver à ses fins sans lui faire prendre la fuite. Étrangement, cela lui importait beaucoup. Il aimerait la revoir. Il savait où, il savait comment mais il ne savait pas quand. C’était à lui de jouer.

─ Qu’est-ce que tu fais dans la vie ?

Il reconnaîtra les postures de patineuse artistiques professionnelles au bout de quelques minutes. Il les observait et les admirait.

─ Tu patines ?

Spoiler:

Henry se maintenait à flot comme il le pouvait, mais en réalité, c’était loin d’être une tâche ardue tant la jeune femme l’impressionnait. À chaque regard qu'il posait sur elle, c'était comme s'il découvrait une beauté sans pareille : une beauté à couper le souffle, si ravissante qu'il se retrouvait muet, incapable de trouver des mots intelligents pour la faire rire, si envoûtante qu'il ne pouvait détourner son regard. Cela aurait pu lui faire perdre ses moyens.
─ Oui, c’est bon signe, elle insista, et la musique de sa voix lui parvint particulièrement lorsqu'elle esquissait un sourire, rendant son intonation mélodieuse. Bien sûr, il était évident que lorsque l'entraînement devenait difficile, la douleur était inévitable. À présent, il se percevait lui-même comme un parfait imbécile, perdant progressivement toute estime de soi.

─ Oui, c’est.. très juste.

Elle semblait comprendre ce qu'il faisait dans ce bar.

─ Possible ! Je ne cherche pas forcément non plus. J’aime bien les rencontres imprévues.

Il voulait être sûr. Cependant, elle semblait véritablement surprise. Comme ils n’avaient pas encore eu l’occasion de discuter en privé, il espérait saisir cette opportunité pour approfondir la conversation. Au-delà de sa surprise, elle avait répondu. Elle patinait. Une patineuse aussi raffinée ne pouvait que réaliser des performances exemplaires si elle avait la chance d’avoir un entraîneur compétent. Un entraîneur qui ne faisait transpirer ses élèves pour rien ne méritait pas ce titre. Il avait déjà eu des retours.

─ Je me défends…

Il n’avait aucune intention de mentir, et la réponse lui était venue naturellement. Henry se passa une main dans les cheveux pour les rabattre en arrière, puis il se rapprocha légèrement. Le trentenaire n’avait pas l’intention de s'étendre sur son passé, car il n'en était pas fier. Il prit une nouvelle gorgée et se racla la gorge.

─ Il est amusant de se croiser aussi souvent sans jamais prendre le temps de se parler.

Il cherchait quelque chose, mais en réalité, il ne désirait qu’une chose : l’inviter à sortir. Il souhaitait en apprendre davantage sur elle, à commencer par son prénom.

─ Que penses-tu de commencer par quelque chose de simple ? J’imagine quelque chose comme : Salut, moi c’est Henry Nowak. Enchanté !

Alors qu'il imaginait leur première poignée de main, une émotion nouvelle l'envahit. Une onde de chaleur s'insinua dans ses veines, faisant naître un frisson délicieux qui parcourut son corps tout entier. L'idée de sentir ses doigts entrelacés aux siens créait une sensation électrisante, une connexion anticipée chargée de promesses. Dans son esprit, le simple contact de leurs peaux évoquait déjà un sentiment d'intimité partagée, un moment d'échange où les mots seraient superflus.

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