Le Message Doux d'une Mère : 'Je t'aime ma fille'

Samedi, Anneliese s'est levée avec un affreux mal de tête qui semble s'éterniser depuis quelques jours. La barre sur son front pesait de plus en plus lourd, la douleur gagnant en puissance. Les dolipranes peinaient à faire effet, rendant le quotidien de la rousse très difficile. Entre les rendez-vous, le téléphone qui n'arrêtait pas de sonner et le stress qui lui collait à la peau depuis la pandémie. C'est pourquoi elle n'a pas rechigné à se lever lorsqu'elle a consulté son emploi du temps de la journée : "Une journée mère-fille." Que pouvait-elle demander de plus ? C'était une excellente idée et une activité qui tombait à point nommé. Cela faisait quasiment un an, voire un peu plus, qu'elle s'était efforcée de s'effacer du quotidien de sa fille afin qu'elle vive pleinement sa nouvelle vie de femme mariée avec son époux. Il était un peu idiot de croire qu'elles ne se voyaient plus ou qu'elles ne se téléphonaient plus non plus, mais Anneliese voulait le bonheur de sa fille unique. S'effacer était une volonté stratégique, et son travail ne lui avait pas franchement donné le choix. Après la fermeture d'une galerie durant la pandémie, elle avait tout donné pour reprendre cet emplacement, mais sans succès. Les artistes ne couraient plus autant les rues, s'étant recyclés dans un domaine plus rentable, et la crise ne permettait pas non plus de jouer en faveur de la rouquine. La pandémie avait beaucoup impacté cette dernière, mais ayant plusieurs flèches à son arc, elle n'était pas prête à abandonner pour autant.

Une visite au spa s'imposait. À la fois pour retrouver sa fille unique, mais aussi pour se vider la tête. Elle avait remarqué que les idées semblaient plus claires et plus abordables une fois que tout ce qui était superflu n'était plus. Anneliese avait des idées, moult, mais aucune n'avait de chances de fonctionner tant que la crise économique continuait de lui mener la vie dure, à elle et à ses artistes. Le plus efficace avait été de partager et de faire vivre son art sur les réseaux sociaux. Elle avait eu l'occasion d'apprendre à gérer les réseaux sociaux tels qu'Instagram, Facebook, Twitter. Ce n'était pas facile au début, mais elle arrivait à en faire son gagne-pain et avait gagné en popularité. De plus, elle avait réussi à mettre en place une routine lui permettant de faire parler son art, à la peinture mais également à l'aquarelle. Ce n'était pas grand-chose, et pourtant, vivre de sa passion à défaut de ne plus enfiler de patins, c'était un bon geste que lui faisait la vie. Après avoir enfilé une tenue de yoga, allant au plus simple possible, elle s'est attaché les cheveux en queue de cheval avec un élastique rouge. Un soin du visage pour garder son teint frais sans pour autant se maquiller, et la voilà sur le point de quitter son appartement.

Elle a envoyé un message à sa fille alors qu'elle descendait les escaliers : « Je passe te prendre, je suis prête. Je t'aime ma fille. » C'était possessif, de l'amour maternel dont elle avait toujours fait preuve et qu'elle portait sur elle. L'importance pour la rouquine était de faire sentir à sa fille combien elle était aimée et choyée. L'absence de son père avait longtemps été difficile à combler, et elle espérait qu'aujourd'hui, ce traumatisme ne subsistait plus autant. Difficile d'ignorer le fait que Lisa s'était entichée d'un homme de seize ans son aîné, mais comme celle-ci était heureuse, elle n'allait pas faire parler sa psychologie de maman maintenant. Il était trop tard, sa fille était amoureuse, Garrett semblait sincère et amoureux lui aussi. C'était tout ce dont avait besoin une mère pour savoir sa fille en sécurité. Quelques rues et klaxons plus tard, Anneliese n'avait jamais été un modèle de patience en voiture ; elle est arrivée chez Lisa en tirant son frein à main un peu trop fort qu'elle n'aurait dû. Elle n'en a pas fait un cas, car elle s'est dépêchée d'envoyer un message à sa fille : « Je suis devant chez toi » Avec un petit cœur, c'était surtout pour donner à son message quelque chose de plus doux qu'il ne l'aurait été sans. Et puis, patiemment, elle a pris le temps de checker son compte Instagram, avec lequel de nouveaux partenariats pourraient lui ouvrir des portes et retrouver le bonheur d'organiser des vernissages, des galeries, et plus encore.

Une journée avec sa mère lui ferait le plus grand bien et, en l’état actuel des choses, était peut-être tout ce dont la demoiselle avait besoin. Avec les fêtes de fin d’années, elle n’avait pas trop eu le temps de penser - et n’avait heureusement pas de neveux ou nièces dans son entourage pour la renvoyer à sa propre incapacité à procréer - mais maintenant que ces préoccupations festives étaient passées, que la routine avait repris son cours, les pensées sombres revenaient à la surface, lui rappelant encore et encore l’absence de vie dans ses entrailles, l’absence de ce bébé qu’elle espère toujours. Une journée avec sa maman, au spa, serait donc idéale pour se détendre, pour se changer les idées, ne pas penser à tout ça. D’autant plus que sa mère aussi semblait avoir quelques préoccupations en tête ces derniers temps et le besoin, elle aussi, de passer du temps avec sa fille.

Se préparant ce matin-là, elle laisse Lady sortir dans le jardin, monopolisant la salle de bain tandis que son cher et tendre travaille dans le bureau et le rejoint plusieurs longues minutes plus tard, portant une tenue confortable qu’elle ne conservera de toute façon pas longtemps et quittera sitôt parvenue dans les vestiaires du spa. Déposant un baiser sur la tempe de son époux, elle glisse un regard en direction du dossier sur lequel il est en train de travailler, s’installant sur ses jambes quelques minutes comme sa mère n’est pas encore arrivée, curieuse de savoir sur quelle affaire il est en train de travailler.

Le bip de son téléphone la fait se redresser et, comme sa mère lui annonce qu’elle passe la chercher, Lisa se lève rapidement pour laisser Garrett travailler, lui volant un baiser avant de sortir de la pièce. Ouvrant la baie vitrée, elle appelle Lady, l’animal s’empressant de revenir dans le salon, réfugiant ses petites pattes dans son panier bien rapidement tandis que l’avocate referme la porte derrière l’animal. Elle attrape ses clés, les glisse dans son sac à main au cas où, passe sur son épaule son sac pour le spa et reçoit déjà un second SMS de la part de sa mère, la prévenant de son arrivée.

Elle se dépêche de sortir, sans faire s’échapper Lady, et remonte la cour jusqu’au portail pour trouver la voiture de sa mère stationnée juste devant celui-ci, Anneliese Hampton semblant concentrée sur son téléphone portable. Avec un sourire, la blonde ouvre alors la portière passager et se hisse sur le siège, laissant son sac à ses pieds.

"- Coucou maman !" Un baiser sur sa joue, sur laquelle elle s’attarde un peu, la prenant dans ses bras. "Ça va ?"

Une journée entre filles et surtout entre mère et fille, c’était ce dont elle avait envie en ce moment et comme cette dernière était disponible pourquoi se le refuser ? Elle scrollait sur instagram quand sa fille arriva et lui déposa un baiser sur la joue. Sa mère le lui rendit en un peu plus bruyant puis s’engagea dans la circulation en répondant à sa fille : « Bonjour, ma puce ! Ça va très bienm je te remercie! » Inutile s’épancher sur les soucis qu’elle rencontrait en ce moment. Le monde de l’art avait toujours été un univers qui fonctionnait un jour et qui dégringolait un autre jour. Il fallait seulement qu’elle prenne son mal en patience. Aussi, Anneliese désirait retrouver sa fille et redoubler de vigilance. Ces derniers, elle trouvait sa fille un peu maussade et quelque part, elle comprenait. « Et toi, comment ça va ? » Elle manqua de rater la sortie mais eu le bon réflexe et s’engagea dans la rue du spa. Les places étaient chers dans le coin et trop rapidement occupée. Elle ne désirait pas se retrouver à l’autre bout de la ville et comme si elle avait été entendue par quelqu’un très haut, une grosse berline quittait le minuscule parking du Spa : « Et le boulot, ça se passe ? » Elle se concentra pour manœuvrer en marche arrière et consulta l’heure. Elles avaient quelques minutes avant de se rendre à l’intérieur et de prendre leur session. Il n’y avait pas urgence mais Anneliese était du genre à honorer tout ces rendez-vous, les plus futiles soient-ils ?

Donc, elle se tourna vers elle et glissa une mèche de cheveu rebelle derrière l’oreille de sa fille : « Es-tu sûr que ça va, ma fille ? » Son alarme interne de maman se mettait constamment en alerte. Elle savait que sa fille ne lui cacherait pas si son mariage ne fonctionnait pas ou si quelque chose la préoccupait. Elle espérait, justement, que sa situation nouvelle d’épouse ne change pas cette dynamique si fusionnelle. Bien sûr, elle ne souhaitait pas connaître tout son quotidien mais si elle pouvait l’aider ou jouer son rôle de mère-tigre pour protéger son bébé, elle le ferait. Dans le fond, elle voulait prouver à sa fille que sa maman était toujours présente.

Et elle, comment elle va ? Hé bien… Si cette question concerne les amours, elle a une réponse évidente. Elle a un mari absolument parfait, un couple stable, une histoire amoureuse qui la comble de bonheur. D'un point de vue du travail, elle s'épanouit totalement dans son cabinet d'avocat, reconnaissante à son mari et sa mère de lui avoir permis de se lancer à son compte aussi rapidement. Si on pose cette question d'un point de vue santé, a priori, elle va bien. D'après les docteurs, tout est en place. Il n'y a rien qui pose problème. Mais si on creuse sous la surface, si on se demande comment elle va, vraiment, psychologiquement, alors, on découvre une toute autre réponse. Bien sûr, elle a presque tout pour être heureuse. Des proches en bonne santé, un mari aimant, un travail qui lui plaît mais, malgré tout ça, au fond d'elle, il manque quelque chose. Cet enfant qu'elle désespère d'avoir un jour. Et pourtant, tout va bien. C'est ce que la gynécologue a dit. Il n'y a rien qui cloche chez Garrett. Rien qui cloche chez elle non plus. Mais toujours pas de bébé à l'horizon. Elle baisse la tête doucement comme sa mère lui pose cette question, à deux doigts de manquer la sortie avant de finalement reprendre la bonne route, la voiture devenue silencieuse.

Le travail, comment ça se passe. Lisa redresse la tête. De ce point de vue là, tout va bien. Elle a des contrats, des affaires intéressantes, et les affaires marchent bien. Le travail c'est loin d'être son problème en ce moment. Sa mère le sait probablement déjà. En réalité, Lisa croit savoir ce qu'elle essaie de faire. Elle énumère les possibilités, creuse à tous les niveaux pour faire parler sa fille. Elle devrait s'en douter. Sa mère n’est pas le genre de femme qui ferme les yeux sur les malheurs de son enfant. Elle a toujours su lire en elle. Et Lisa sait très bien qu'avant même qu'elles soient installées au spa, elle aura tout dit à cette dernière de ce qui pèse sur son cœur.

"- Ça va, ça va. J’ai de plus en plus de dossiers, c'est intéressant. Quelques affaires compliquées parfois, mais dans l’ensemble, ça va."

Sa mère entame la marche arrière et finit par se garer à deux pas de l'Institut alors qu'elles ont encore quelques minutes devant elle avant leur rendez-vous. Quelques minutes dont Anneliese profite pour passer une mèche de cheveux de sa fille derrière l'oreille de cette dernière, s'inquiétant de savoir si tout va bien. Alors la jeune femme pousse un soupir, sachant bien qu'elle ne pourra rien cacher à sa mère. D'autant plus qu'elle n'en a pas envie. Le soutien de sa maman a toujours été essentiel pour elle. En étant privée de père, elle avait été, avec Aayden, son noyau face à l’adversité.

"- Ça va c'est juste que…" elle soupire. "Je n’arrive toujours pas à tomber enceinte. Et les médecins me disent qu'il n’y a rien. Je n’ai pas d’explication. On essaie depuis des mois, depuis le mariage en fait, mais ça ne donne rien…"

La marche arrière enclenchée, elle se gara sur le minuscule parking. Intérieurement, elle était contente d’avoir eu cette place car elles étaient particulièrement cher. La preuve, une voiture entamait sa marche arrière mais pour quitter les lieux, faute de place. Avec douceur, elle questionnait sa fille dans le but que cette dernière réussisse à se libérer et donc, crever l’abcès. Car s’il y avait une chose qui n’était pas possible avec Anneliese, c’était de la tromper, de lui mentir ou de lui cacher quelque chose. Surtout en ce qui concernait sa fille. Elle gardait son calme, toujours, elle n’était pas du genre à perdre son sang froid pour la moindre petite piqûre de moustique et c’était bien pour ça qu’il était souvent difficile de la déchiffrer. « Ça va c’est juste que… » Le regard de la rouquine devint plus sévère mais elle attendit que sa fille aille plus loin dans sa réflexion. « Je n’arrive toujours pas à tomber enceinte. » Le sujet bébé était, pour un jeune couple, toujours une problématique. Elle prit une profonde respiration en passant une mèche à elle derrière son oreille et fit une moue compréhensive. « Et les médecins me disent qu’il n’y a rien, je n’ai pas d’explication. » C’était surement ce qui frustrait sa fille et probablement le couple lui-même. N’avoir aucune explication au sujet de ce manque de résultat même avec des efforts, il y avait de quoi se poser des questions. Elle était au courant de petites choses que sa fille ignorait et si elle l’avait embarqué pour une journée mère-fille, c’était aussi dans le but de permettre à Garrett de faire ses petites affaires. Il ne lui en avait pas trop dit mais il préparait quelque chose pour tenter de changer les idées de sa fille. Elle n’était pas contre et avait rapidement proposé son aide. Si biologiquement et physiquement, les choses étaient normales alors il n’y avait que le psychologique à mettre en avant mais Anneliese savait, en regardant la mine déconfite de sa fille, que ce n’était pas le moment. Cela aurait comme effet d’apporter le coup de grâce et ce n’était pas ce qu’elle désirait. « Peut-être que vous avez besoin de faire une pause, donner du repos, à ton corps et à ton esprit. Après tout ce que vous avez traversé… entre les examens et le stress qui accompagnent tout ça. » Évoquer ses pensées d’une manière complètement détournée sans être trop brutale, aborder sans trop brusquer. Elle glissa sa main sur l’arrière du crâne de Lisa et vint lui baiser son front, son côté maman-lionne prenant souvent le dessus lorsque sa fille se sentait mal. Dans son geste, elle jeta un coup d’œil à sa montre : « Allez viens ma Lili, on va tenter de se changer les idées et se faire chouchouter et le meilleur moyen ! »

Lisa ne pouvait rien cacher à sa mère, encore moins des préoccupations telles que celles qui, ces derniers temps, embrument son esprit. Elle ne pouvait rien cacher à cette dernière, d’autant plus si sa mère commençait à la questionner. Mentir à sa mère n’était pas quelque chose qu’elle voulait faire. Elle ne l’avait jamais fait. Elle n’était de toute façon pas à l’aise avec le mensonge, elle n’avait ainsi jamais su faire. Alors elle dit tout, confie ses pensées et ses tourments à sa mère lorsque cette dernière s’étonne de lui voir une mine si triste, si préoccupée. Elle l’est, bien entendu. Et elle ne tarde pas d’éclaircir la lanterne de sa mère, lui faisant savoir ce qui cause une si triste mine. L’absence d’un enfant, qu’elle essaie pourtant de porter depuis des mois, sans succès. Ils étaient mariés depuis un an et demi, maintenant. Les échecs successifs, mois après mois, commençaient à avoir raison tant de sa patience, que de ses espoirs.

Peut-être qu’ils ont besoin d’une pause, de donner un peu de repos à son corps, à son esprit. Elle n’est pas la première à le lui dire. Aayden aussi avait émis l’hypothèse que le problème soit d’ordre psychique. De sa faute. Il ne l’avait pas dit comme ça, bien entendu. Mais lui aussi avait supposé que, peut-être, la demoiselle devrait se reposer, essayer de se détendre avec tout ça, ce qui était naturellement plus facile à dire qu’à mettre en pratique, évidemment.

"- C’est vrai mais…"

Bien sûr, le processus est long, difficile, éreintant. Parce qu’à force, il a bien fallu passer quelques examens, pour s’assurer que tout aille bien, que cette absence de conception ne soit pas le résultat d’un blocage physique. Une infertilité de sa part était ce qu’elle avait redouté, la fertilité de son mari n’étant plus à prouver. Mais ça n’était pas ça. Cela ne venait pas d’elle. Pas de son corps, en tout cas, même si elle continuait d’en vouloir à ce dernier de ne pas faire ce qu’il avait à faire, de la trahir, en quelque sorte

Sa mère se fait douce, câline, passant une main réconfortante sur sa nuque avant d’embrasser son front puis l’enjoindre à sortir de la voiture, comme la meilleure chose à faire dans l’immédiat est de se changer les idées, se faire chouchouter étant un bon moyen d’y parvenir. La jeune femme hoche la tête alors, attrapant son sac à main pour le passer à son épaule en sortant de la voiture avant de se diriger vers le bâtiment.

"- Est-ce que tu sais déjà par quoi tu veux commencer ?" s’enquit la demoiselle alors qu’elles entrent.

Anneliese se rappelait d’un certain nombre de question qu’elle s’était posée après la naissance de ces deux enfants. Le mélange de joie avec le deuil qui lui avait été difficile à combiner et qu’en réflexe de protection pour son enfant en vie, elle avait décidé d’éteindre le cheminement normal du deuil pour son enfant décédé. Les histoires des enfants ne jouaient jamais un bon rôle, en tout cas, pas toujours. C’est au cours de nombreuses recherches sur internet qu’elle avait découvert qu’elle faisait partie des plus chanceuses dans cette machination morbide. Malgré tout, elle n’avait pas été capable de faire son deuil et avait finalement coûté son couple et un gros malaise dans le cœur de la rouquine qui n’a jamais réussi à combler ce vide, nécrosé par l’absence d’un être qui n’aurait pas du disparaître si tôt.

Sa fille, aujourd’hui, était dans l’incompréhension, elle n’arrivait pas à concevoir l’enfant qu’elle désirait tant. C’était une expérience traumatisante que Lisa devait apprendre à faire face car rien ne semblait être physiquement impossible. Il en revenait qu’à se questionner si ce n’était pas psychologique ou que le moment n’était pas bien choisi. En effet, Garrett entamait une nouvelle carrière de conférencier mêlée aux diverses affaires dont il était encore en charge. Lisa, quant à elle, était entrain de se créer une réputation et une notoriété d’avocates à la main de fer dans un gant de velours. Parfois, il suffisait seulement laisser les choses arrivées sans se poser des questions. Bien sûr, Anneliese pouvait lire entre les lignes : Lisa avait bien conscience que son mari ne rajeunissait pas et si elle, elle avait encore la vie devant elle, sa vie ne tournait qu’autour de son époux.

En tant que maman, la cinquantenaire était complètement impuissante dans le malheur psychologique dans lequel sa fille se retrouvait, à tourner en rond, en attendant que son vœux le plus cher se réalise enfin. « C’est vrai mais… » Anneliese interrogea sa fille du regard. La meilleure des thérapies, et la rousse le savait plus que n’importe qui d’autre, était de mettre des mots soi-même sur ce qui bloquait ou sur ce qui hantait l’esprit de l’avocate. Pour l’encourager, et pour éviter de lui montrer que son cœur de maman se brisait de voir sa fille aussi malheureuse, elle se montrait douce et patiente. En complet décalage avec ce qui se passait dans sa tête mais l’heure passait et si le cadre de sa voiture n’aidait pas cette dernière à s’ouvrir, peut-être qu’après un état de relaxation lui permettrait de se sentir beaucoup mieux.

À la question de Lisa, la galeriste poussa un grognement rauque en s’étirant : « Sincèrement, j’opterais bien pour un massage de la tête au pied.. Donc la totale !» Elle verrouilla la voiture et entraîna sa fille avec elle jusque dans le salon : « Qu’en dis-tu, ma fille ? » Elles entrèrent et Anneliese n’avait plus besoin de se présenter. Cela faisait des années qu’elles se rendaient dans ce spa et avait droit à des petites avant-premières concernant les nouveaux services que l’endroit pouvait offrir. « Nous avons besoin d’être chouchouter, aujourd’hui. » commenter Anneliese en serrant sa fille tout contre elle qui n’était pas méconnue non plus. En cliente régulière, elles furent rapidement prise en charge et rapidement, elles se retrouvèrent en tenue pour commencer par un massage.

- Qu’est-ce que ça fait du bien ! Qu’as-tu envie de faire ensuite, ma Lili  ?
Maintenant qu’elles étaient un peu plus relaxe, on leur proposa les bains à remous, bains de boue : « Je me disais une chose, as-tu pensé à faire de l’acuponcture ? Quand tu étais petite et que, dans le temps, je n’étais pas au sommet de ma forme et une amie m’a encouragé à aller voir ce genre de médecine douce.. Au bout de quelques séances, il s’est passé que je me suis sentie de mieux en mieux, ou j’ai pu me trouver et être vraiment là pour toi.. Je me dis que si ça m’a aidé, pourquoi pas toi ? »

Elle opterait pour un bon massage de la tête aux pieds, la totale, un bon moyen de se détendre, un bon moyen de se vider la tête. Tout ce dont la jeune femme a besoin, finalement. Un peu de relaxation, un moment pour faire le vide dans son esprit, pour ne plus penser à rien, pour oublier ses tourments. Commencer par un massage n'est pas une mauvaise idée. C'est même probablement ce qui la détendra le plus et lui permettra de profiter du reste de la journée comme il se doit. Il serait dommage qu’elle n’aborde pas les soins proposés de la meilleure des manières.

"- Je suppose que c’est la meilleure manière de commencer pour pouvoir pleinement profiter du reste." remarque la blonde, sa mère lui demandant son avis.

Entrant dans la bâtisse dont elles sont toutes les deux des habituées, sa mère étant une cliente régulière depuis des années et ayant par la suite montré l’endroit à sa fille quand elle avait été en âge de ces choses-là, elles obtiennent rapidement une place dans le salon de massage. Aussitôt, deux professionnels les invitent à prendre place sur une table chacune avant de commencer la pratique, parlant à voix basse dans une ambiance reposante, bercée d’une douce musique.

Comme d’habitude, le moment du massage du cuir chevelu et des cervicales est le point d’orgue du massage pour l’avocate, le moment qui la détend le plus et la fait se sentir comme dans du coton, à tel point qu’elle pourrait sans aucun doute s’endormir sur la table. Elle se demandait encore comment ça pouvait ne jamais lui être arrivé, alors qu’aux dires de certains masseurs, ce genre de clients existaient. Elle devrait clairement en faire partie. Et pourtant non.

Alors que sa mère demande ce qu’elle compte faire ensuite, Lisa réfléchissant à l’hypothèse de se diriger vers l’une des grottes de sels du bâtiment, on leur propose des bains à remous, la faisant hésiter. Une hésitation que sa mère coupe en reprenant la parole, évoquant de l’acupuncture qu’elle avait faite il y a quelques années, le visage de sa fille se décomposant à mesure qu’elle parle. Non, les aiguilles, ce n’est définitivement pas son truc. Sa mère l’aura probablement oublié, se laissant emporter par sa pensée.

"- Tu veux dire… des aiguilles et tout ça ?" demande Lisa, comme si elle avait vraiment besoin que sa mère confirme.