Event #14 : J'prendrai ta main un jour c'est sûr !

Ce soir, c’est soir de fête. Alors que l’été est bien installé, que les soirées sont particulièrement chaudes et belles, une soirée est organisée sur la plage en faveur des droits LGBTQ+, en ce mois des fiertés. L’association à la tête de l’organisation de cette soirée lutte depuis de nombreuses années afin de sortir de la rue les jeunes homosexuels que les parents mettent dehors, n’acceptant pas leur condition, leur coming-out. Naturellement, l’argent récoltée au cours de la soirée permettra à l’association de continuer ses actions tout au long de l’année à venir.

Ils sont nombreux, réunis sur la plage d’Hambourg ce soir, face à la scène, pour profiter du concert et des petits groupes amateurs venus se faire connaître, tout en faisant une bonne action. Ils sont nombreux, venus se presser sur le sable pour passer une bonne soirée, bouger au son de ces musiques et prouver au monde que l’amour n’a ni limites, ni barrières, encore moins ces barrières sociétales que les esprits les plus étriqués entendent ériger.

Pour que tout se passe bien, la sécurité sur place est à son maximum, contrôlant les entrées sur le site, modérant les disputes et les bagarres qui pourraient éclater. Mais ce soir, au bord de l’eau, on prône l’amour, à la lumière des étoiles et des feux de camps. On prône la tolérance et le respect des uns et des autres. Parce que tout le monde devrait être libre d’aimer, sans craindre pour sa vie, sans redouter les réactions d’autrui. Et si quelques uns ici ne sont présents que pour se faire bien voir, que pour gonfler leur ego et leur réputation, le principal reste que les dons explosent, n’est-ce pas ?

A savoir

- L'event a lieu mi-juillet, les vacances viennent de commencer pour tous les scolaires

La musique est bonne, l’ambiance est au rendez-vous. Sur la plage ce soir, Victoria est évidemment de la partie, portant une robe aux couleurs de l’arc-en-ciel, soutenant le droit de tous à tomber amoureux. Même si elle est pour sa part totalement hétérosexuelle, la jolie brune a des amis directement concernés par les réflexions et les tourments que la société impose encore aux homosexuels. Plusieurs de ses potes sont gays, voire bi. Pan pour certains. Et alors ? Qui ça dérange ? Elle est là ce soir, parce que ça lui semble important, de prôner l’amour sous toutes ses formes, sans distinction de sexe. Ça n’a aucun sens, cette haine constante, cette lutte actuelle pour priver certains de leurs droits. La société doit être drôlement malade, pour en arriver à de telles conneries. Y’a bien que les abrutis, qui ont besoin de répandre le malheur chez les autres, pour être heureux eux-mêmes. Et ça, la demoiselle ne le comprend pas. Alors un verre à la main, le corps bougeant au rythme des paroles et des notes de musique, la jeune femme profite de la soirée après avoir fait un don pour l’association organisant tout ça et œuvrant pour les droits de ces jeunes que leurs familles mettent à la rue, un comportement que, là non plus, la demoiselle ne peut pas comprendre. Ses parents, heureusement, n’auraient jamais eu l’esprit aussi étriqués. Mais la brunette sait que ce n’est pas le cas de tout le monde malheureusement et cette soirée, aussi agréable soit-elle, est aussi là pour le rappeler. Des amis répudiés par leur famille, dans son cercle, la brunette n’en a pas. Mais ça ne l’empêche pas d’être sensible à la cause. Ça ne l’empêche pas de vouloir lutter contre ce genre de choses, tant bien que mal, un peu comme elle peut. Même si ça se résume à danser.

Une fête pour les Homosexuel ? Ou du moins, pour tous ceux que la société avait du mal à qualifier de ''normaux''. Une soirée caritative, une soirée pour permettre à chacun de sortir et profiter sans la moindre crainte, sans la moindre peur d'être jugés. Du moins, pendant l’événement, en rentrant chez eux, il était malheureusement fort à parier que quelques personnes se retrouveraient dans une fâcheuse situation. Même si une partie de la ville, au vu du nombre de gens présents, semblait tolérante, il ne fallait surtout pas oublier l'autre partie, surtout celle tout au fond, dans l'ombre. Bien moins chaleureuse, accueillante et surtout, partageuse. Pour certains les bousculer, tabasser ou que sais-je encore, simplement parce qu'ils étaient différents. Il n'y avait qu'à voir les faits divers relatant d'agressions en tout genre. Aldo lui, en toute honnêteté, ne s'était jamais intéressé à tout ce qui tournait autour. Disons plutôt que, en tant qu'hétéro, bien dans sa peau, cela ne le concernait en aucun cas et, contrairement à tous ceux qui hurlaient au scandale et à l'hérésie lorsqu'il était question de mariage pour tous, ou encore d'adoption, lui préférait se taire. Après tout, ce n'était pas lui que ça concernait, ce n'était pas lui qui vivait dans l'incapacité d'accéder à des droits communs. En quoi avait-il le droit de donner son avis ? Pour quelle raison pourrait-il être contre cela de toute manière ? Qu'est-ce que cela changeait qu'une femme aime une femme plutôt qu'un homme ? Pourquoi être contre le bonheur d'autrui ? Lui qui avait grandi dans la misère et avait côtoyé la merde, à tous les sens du terme, le napolitain était plutôt bien placé pour savoir que l'immense majorité des laissés pour compte aurait préféré deux parents aimants du même sexe plutôt que d'être abandonnés, ou encore d'un père alcoolique et violent qui passait ses nerfs sur son gosse, lui trouvant tous les défauts et le rendant responsable du départ de sa mère.

Ayant plus ou moins grandi dans un milieu sévère, macho et violent, Aldo savait très bien que dans ce genre de coin, avouer sa différence se serait sûrement fini dans un bain de sang. Même s'il pouvait être irréfléchi dans son adolescence, notre homme était certain que grandir là-bas et ne pas pouvoir être qui on est réellement avait de quoi briser une âme. Alors oui, il a toujours été très tolérant, passer une soirée avec des hommes qui aiment d'autres hommes ne le dérangea jamais plus que ça. Bien entendu, pour éviter tous malentendus et malaise, le musicien précisa sa sexualité et, tout se passa toujours pour le mieux. En arrivant à Hambourg, l'étranger avait même fini une soirée, sans forcément le faire exprès, dans un bar gay et, malgré quelques mises au point, notre ami passa une très bonne soirée, se faisant même quelques amis au passage. C'est donc tout naturellement que, apprenant l'existence de la levée de fonds pour aider celles et ceux dan le besoin, que le violoniste voulu aider. Habitué depuis quelques années à aider dès qu'il le pouvait et à promouvoir la culture musicale, la chose lui semblait la plus naturelle du monde. Le destin avait fait de sa passion un métier qui lui offrait un confortable niveau de vie, cela lui semblait normal de partager.

Une fois n'est pas coutume, le quarantenaire opta pour des habits bien plus décontracté. Des espadrilles, un short en jean et une chemisette, achetée pour l'occasion, fleurie et presque festive. Loin de ce qu'il avait l'habitude de porter, certes, mais qui se prêtait un peu plus à l’occasion et au lieu du rassemblement : la plage. Lorsqu'Aldo arriva enfin sur place, la fête battait son plein, d’innombrables personnes s'étaient déjà rassemblées et un groupe de musique était sur scène. L'on voyait de nombreux drapeaux colorés s'agiter qui .. Certainement avaient une signification. Laissant un chèque généreux à l'association, l'italien s'offrit une pinte de bière avant de se fondre dans la foule, avançant doucement jusqu'à la scène jusqu'à ce qu'une silhouette attire son attention. Une silhouette que notre ami avait déjà pu admirer avec grand intérêt, celle de Victoria. Une délicieuse jeune femme qui avait de quoi subjuguer quiconque croisait son regard ou son sourire. Malgré son charme presque féerique, la demoiselle était des plus agréables et des plus accessibles, loin, très loin, de l'image que l'on pourrait se faire d'une telle femme, au premier regard. S'approchant doucement d'elle en l'observant de nouveau dans cette charmante robe d'été colorée, Aldo se permit une petite phrase d'accroche en arrivant à portée de voix, faisant attention à ce que, entraînée dans sa danse, elle ne vienne pas dégommer son verre. « Eh bien, eh bien. Quelle que soit la situation, quelle que soit les couleurs, tout semble t'aller à ravir ma chère. » Un petit sourire en coin offert à la danseuse lorsque leur regards se croisèrent enfin. « J'ignorais que tu serais présente. C'est un sacré coup de chance de croiser un visage connu ici, vu la foule. » Et quel visage ! Phrase qui faillit lui échapper, d'ailleurs. Levant doucement son verre avant de boire une gorgée, il reprit. « Ils ont mis les moyens cette année, c'est une bonne chose. Je ne m'attendais pas à voir une telle installation et autant de gens. »

Le monde était en train de changer. Petit à petit, les tabous évoluaient, certains commençant à disparaître petit à petit, à être acceptés. L’Allemagne était un pays qui se disait en avance sur les droits des LGBTQ+. Il était vrai que l’on ne passait plus autant de temps à les humilier, à vouloir les frapper ou les envoyer dans des camps pour les soigner, les éradiquer comme c’était encore bien malheureusement le cas dans certains pays. Et pourtant, les agressions étaient encore bien trop nombreuses dans ce pays. Les mentalités n’avançaient pas forcément si vite dans l’ancienne Allemagne de l’Est. Certaines familles continuaient d’être élevées avec des idées bien trop extrémistes, créant ainsi des conflits parfois importants.

Ce genre de manifestations ne se déroulaient pas toujours comme sur des roulettes, des opposants aimant souvent se glisser dans la foule, bien malheureusement, pour créer des discordes et tenter de se faire entendre, d’une façon ou d’une autre. Matt était friand de soirées, cela ne faisait aucun doute mais il allait très rarement dans ce genre de rassemblements. Il n’en avait pas besoin pour s’assumer auprès des autres, puis généralement il était parti en mission pendant cette période de l’année, dans son ancienne vie, comme il l’appelait très souvent.

Ce soir, il avait réussi à avoir sa soirée. Il s’était dit que, pour une fois, cela pouvait changer, que ça ne lui ferait pas de mal, de rencontrer un peu de monde. Karl n’avait même pas vraiment posé la question, ne lui avait pas demandé pourquoi cette soirée et pas une autre. C’était vraiment un patron avec lequel il était très agréable de travailler. Rien que pour lui, il serait capable de travailler des années au bar. Mais là n’était pas le sujet, l’américain n’avait aucunement la tête à se préoccuper de son ami ce soir. Cela faisait déjà plusieurs heures qu’il était arrivé sur la plage, quelques pintes avaient déjà été descendues. Ses habits étaient très éloignés des accoutrements de certains. Pas vraiment voyants, il portait ses rangers avec son treillis parfaitement taillé sur son joli petit fessier. Le tout était accompagné d’un haut simple, noir. Il n’avait pas vraiment fait beaucoup d’efforts, il se fichait un peu de son apparence à dire vrai, il fallait bien des vêtements confortables, qui ne craignaient ni le sable, ni l’eau. Au fur et à mesure du temps qui avait avancé, il s’était retrouvé avec des traces de bisous -des rouge à lèvres de diverses couleurs- un peu partout sur le visage, le cou et les bras. Il fallait dire qu’il était assez sociable et tactile, que faire connaissance avec de nouvelles personnes n’était pas du tout un problème pour lui.

Pinte presque vide à la main, il était assis sur le sable près d’un feu de camp, occupé à discuter et à rire avec un groupe de personnes qu’il ne connaissait pas vraiment, personnes de tous genres confondus, une femme glisser sous le bras. De temps à autre, ses yeux s’égaraient sur les personnes qui se trouvaient autour d’eux, à la recherche de visages qu’il pouvait connaître, peut-être… Non, il ne fallait pas rêver.

Cette journée je l'attendais depuis l'année passé. Comme chaque année depuis que je pouvais y assister. Je sais que je ne suis pas comme tout le monde, mais je suis moi et je m'aime comme je suis. Alors aller dire à tout le monde qu'on est libre d'aimer qui nous voulons et être comme nous sommes est un droit, je ne vais pas passer à côté ! J'avais pris ma journée pour faire la fête ! Déambuler dans les rues crier ma joie c'est si défoulant et satisfaisant. C'est comme si nous faisions un doigt d'honneur à toutes ses personnes mal dans leur peau, voulant nous empêcher d'être qui nous sommes !
J'avais retrouvé des amis, pour partager notre bonheur ensemble. Je me suis, aussi, un peu lâcher niveau vestimentaire, après tout, c'était le bon jour pour être encore plus excentrique que d'habitude. J'ai même laissé une amie me maquiller un peu !

La nuit commence à tomber, j'avais un peu perdu de vue mes amis, je me dis que j'allais les retrouver sur la plage. Le meilleur moment de la journée. La fête sur la plage, là où il y a toujours de belle rencontre à faire. Mais ce soir, ce n'est pas vraiment ce que je cherche, je me dis que, pour une fois j'allais rentrer seul chez moi. Mais c'était sans compter la vision que j'ai. Je me dis que c'est sûrement à cause des quelques bières que j'ai bu, sauf que ça ne fait pas autant d'alcool pour que j'hallucine à se point. Pour être sûr de ce que mes yeux envoie les bonnes informations je m'avance vers lui, m'assois alors en face de lui, sur le sable.
Je le fixe un instant avant de lui sourire. Pour le coup, je ne sais pas du tout quoi lui dire, alors que ce n'est pas du tout mon habitude. Mais je n'y peux rien, Matt me rend étrange. Je finis quand même par le saluer.

- Salut !  

Pour les personnes homosexuelles, bisexuelles, transgenres ou encore même non-binaires, ce genre d’événements était le l’occasion de faire connaissance avec d’autres, amicales ou un peu plus poussées. Il ne faisait aucun doute que beaucoup de personnes allaient rentrer accompagnées en cette soirée, pour une relation de quelques heures simplement ou bien plus longues encore. Matt était là pour le simple fait de s’amuser, de faire connaissance, de passer du temps loin du boulot, sans se prendre la tête. Il n’allait très certainement pas croiser de clients dans cet endroit ! Ou pas d’habitués en toit cas alors bien évidemment, il allait se faire plaisir.

Une femme dans les bras, il discutait d façon très animée autour de ce feu de camp, les flammes venant se refléter sur son visage tout comme dans ses prunelles. Sur son visage, un large sourire ne le quittait plus, tout comme son rire n’arrêtait pas de fendre l’air aux blagues graveleuses qu’il lâchait, largement aidé par l’alcool. Petit à petit que les minutes et les heures avançaient, des personnes se levaient pour partir tandis que d’autres prenaient les places vides. Tout le monde était le bienvenu et accueillit à la perfection. Ce fut également le cas d’Austin lorsqu’il s’installa. Accueillit de nombreux sourire, Matt finit par tourner le regard dans sa direction en même temps qu’il avalait quelques gorgées d’alcool. Ses yeux s'écarquillèrent doucement alors qu’il observait cet homme avec qui il avait déjà pu avoir un échange bien loin d’être cordial. Un petit sourire venant étirer ses lèvres, il laissa la fille qu’il tenait se lever et s’en aller, ses yeux ne quittant plus le nouvel arrivé. « Salut ! Comment tu vas ? Je m’attendais pas à te voir ici ! » dit-il tranquillement en tapotant doucement le sable près de lui pour lui dire de s’approcher. « Tu as pas de bière ? Tu viens d’arriver ? »

Le sourire de Matt me fait littéralement fondre. La ville était grande et je ne pensais pas un jour revoir Matt, même si j'en avait vraiment très envie.
Je souris quand il me dit qu'il était surpris de me voir, pourtant, une journée comme celle ci, bien sur que j'allais la fêté ! Je n'allais pas passer à côté. Je bouge mes fesses pour les installer à ces côtés.

- J'étais sur un autre feu de camps.... Mais je t'ai vue... je n'ai pas pu résisté à venir te voir.

Je le bouscule un peu avec l'épaule, avant de lui prendre son verre et le vider.

- Toi non plus maintenant !

Il n'y aurai que moi, je lui demanderait de venir directement chez moi, prendre un dernier verre. Cependant, je voulais changé, ne plus paraitre pour un chaud lapin, même si je me vois plus comme une personne profitant de la vie et des bonnes choses !

- Je suis content de te voir.

Et si il savait à quel point. Si je me retenais pas, je l'embrasserai comme un fou. Ca ne choquerai personne, mais à ce n'était pas ce que je voulais pour une fois. Ce qui est loin de me ressemblé. Lisa serai surprise. Vue que je m'étonne moi même.
Je fixe le feu, parce que fixer Matt comme je le fais c'est vraiment très déplacé, et mes mamans ne m'ont pas élevé comme ça. Je fini tout de même par tourner la tête pour revoir le beau visage de Matt à la lumière des flammes, il est encore plus beau.

- T'es toujours aussi canon, tu as dut avoir plein de succès aujourd'hui.

Le droit d’aimer, sans être jugé. Le droit d’être qui on est, sans reproches. C’est ce en quoi Victoria veut croire, même si elle n’est pas queer elle-même, même si elle n’est pas directement concernée par les problématiques qui touchent les personnes queer. Se battre pour les droits de ses semblables, cependant, lui semble important. Parce qu’elle n’a pas peur d’aimer elle-même, parce que les autres ont le droit aux mêmes droits. Parce que l’être humain n’est jamais meilleur que quand il faut priver les autres de certains droits et que c’est insupportable. Vicky, ça la révolte. Peu importe le sujet, d’ailleurs. Qu’on s’en prenne aux queers, qu’on s’en prenne aux étrangers, qu’on s’en prenne aux femmes, ça lui est parfaitement insupportable. Peut-être parce qu’elle est jeune, Victoria voudrait changer et révolutionner le monde. Elle ne peut cependant pas faire grand-chose. Mais chaque petit acte accomplit à sa mesure est une pierre de plus sur l’édifice de la tolérance et si ce n’est pas la dernière pierre, c’est au moins un geste qui compte. Peu importe sa portée.

Sur cette plage, dans sa robe aux couleurs de l’arc-en-ciel, la demoiselle rit et danse, défiant les homophobes, les biphobes, les transphobes et tous les autres queerphobes d’oser s’en prendre aux libertés d’une partie de la population. Parce que c’était hors de question. Parce que les queer n’étaient pas seuls à se lever contre tout ça. Qu’ils n’étaient plus seuls, désormais. Parce qu’il y aurait toujours un certain nombre de personnes pour se lever avec eux contre l’oppression, pour un monde plus juste, plus égalitaire, plus beau. Un monde où tous seraient libres, affranchis de toutes les conneries humaines, de toutes les considérations de certains… Un monde utopique, certainement, mais vers lequel ils pouvaient avancer. Un monde dans lequel plus personne, ni les queers, ni les femmes et les personnes sexualisées n’auraient à avoir peur.

Une voix se fait entendre, la surprenant dans sa danse et Victoria se retourne, adressant un grand sourire à l’homme qui l’a rejoint. Aldo Giallo, un joggeur qu’elle a rencontré maintes fois pendant ses runnings. Un joggeur avec qui elle a sué elle-même il n’y a pas si longtemps. Et qui ne manque, aujourd’hui encore, pas une occasion de la complimenter.

"- Merci !"

Il ignorait qu’elle serait ici et, avec le monde qu’il y a sur cette plage ce soir, reconnaître un visage, le distinguer parmi les anonymes, relève d’un heureux hasard. Il avait eu toutes les chances de passer à côté d’elle sans la voir. Avec le monde, ça n’aurait pas été surprenant. Mais il l’avait repéré.

"- Oh je dirais qu’ils mettent toujours le paquet, chaque année ! C’est seulement différent dans la programmation." souligne Victoria. "J’assiste à la pride depuis… à peu près douze ans !" elle rit. "Certaines années sont meilleures que d’autres mais c’est parce que les goûts et les couleurs…"

Je me suis réveillée il y a quelques heures, sous le soleil brûlant de l'après-midi après une garde agitée à l'hôpital. Cette chaude soirée d'été a presque le goût d'une matinée et, après cinq heures de sommeil et trois tasses de café, j'ai suffisamment d'énergie pour tenir toute la nuit. Le vent fait voltiger mes cheveux et, face à la mer, je laisse les vagues m'enfoncer dans le sable. Mon regard se perd à l'horizon et tandis que la musique me fait doucement onduler, je songe à ma première Pride. C'était il y vingt-neuf ans, à Édinbourg. Je m'y étais retrouvée un peu par hasard, entraînée par une amie lesbienne. A l'époque, je m'identifiais comme une alliée un peu curieuse. J'ai toujours senti que je n'étais pas à l'aise dans la case de l'hétérosexualité normative mais il m'a fallu du temps pour véritablement me questionner sur mon orientation romantique et sexuelle. Bien que je me définisse comme queer depuis plus de deux décennies, ce processus n'a jamais véritablement cessé.

J'en ai vu flotter, des drapeaux arc-en-ciel. J'en ai entendu résonner, des slogans et des revendications, tout autant que résonne le silence des complices de la haine, du patriarcat et de l'oppression. Je ne suis pas pessimiste, simplement réaliste. Il me semble que l'histoire va dans le bon sens mais sa marche n'a rien de linéaire. Le backlash est partout et ce n'est pas qu'un concept abstrait. Notre simple existence dérange et nous expose à la violence. Par réflexe, j'ai pris une trousse de premiers secours et un kit de suture dans mon sac. Je me rappellerai toujours de cette nuit d'hiver où j'avais dû recoudre dans la réserve d'un bar un ami qui avait été littéralement défiguré parce qu'il tenait la main de son conjoint. Quant à mes pauvres oreilles, elles ont l'habitude d'entendre les pires atrocités lorsque je m'affiche publiquement aux côtés d'une femme ou d'une personne non-binaire. Autour de moi, la fête bat son plein. Les gens dansent, sourient, s'embrassent mais il y a fort à parier que nous sommes nombreux à porter une colère profonde en nous, une colère qui peine à trouver son écho.

Je suis fière, je l'ai toujours été. J'ai mis du temps à comprendre et appréhender mes désirs mais je ne me suis jamais excusée de vivre comme je l'entendais. Ce soir, je vais faire la fête jusqu'à l'aube. Je jette un dernier regard vers l'horizon puis je me dirige vers le bar où un demi de bière m'attend sans doute déjà.

Je devais être sur la plage, ce soir. C’était important. Important pour mes droits, important pour les droits de mes semblables. Il fallait que je défende nos couleurs. Que je me montre, que l’on se montre, pour faire bouger les choses, pour les faire changer, alors qu’il est hors de question de continuer à vivre dans la peur. Hors de question de continuer à vivre en rasant les murs, en se faisant discrets, en ne faisant surtout pas trop de bruit. Du bruit, au contraire, je veux en faire. Je veux qu’on me remarque. Qu’on nous remarque. Que la question de notre genre cesse de déranger. Que tous les genres, finalement, soient libres de vivres en paix.

On a fait de mal à personne, nous, les queers. On a rien demandé. Seulement le droit d’être en paix, seulement le droit de vivre. De vivre comme n’importe qui, de vivre sans avoir peur de marcher dans la rue, d'être qui nous sommes, de prendre la main de la personne que l’on aime, quel que soit son genre, quelle que soit son identité. De vivre dans l’indifférence générale, comme n’importe quelle personne cis. Mais on est là, on existe et ça dérange. Ça dérange ce monde aux principes d’un autres temps, arriérés. Ça dérange la pudibonderie, les puritains et quelques extrémistes, qui pensent pouvoir tout contrôler, qui pensent pouvoir nous museler.

Je suis queer. Cela fait quinze ans que je le sais. Quinze ans que je le suis. Quinze ans que je l’assume, que je le dis haut et fort, avec fierté. Quinze ans que je me bas, au quotidien, pour que l’on soit reconnu, considérés, estimés. Quinze ans que je me bas pour faire reconnaitre qui nous sommes. Quinze ans que je me bas pour moi, pour mes droits, pour ceux de mes adelphes. Quinze ans d’une vie à assumer mon genre, à osciller entre le féminin et le masculin, à me battre pour que mon genre soit reconnu comme un genre à part entière, non pas une passade, non pas une crise d’adolescence un peu tardive, ni même une crise existentielle.

Genderfluid, c’est ce que je suis. Masculin et féminine en un même corps, au grès des jours, de mes émotions, de mes ressentis. Pansexuel.le, parce que choisir c’est renoncer, parce qu’un corps n’est pas une âme, parce qu’aimer, ce n’est pas s’amouracher d’une enveloppe charnelle. Pas pour moi. Parce qu'un cœur n'est pas un corps, parce qu'il y a plus à découvrir chez l'autre qu'une anatomie.

Je devais être sur la plage, ce soir. Alors j’y suis. Ma bière à la main, mes pieds nus caressés par le sable, je me montre. Je danse. Je profite de la vie. Parce que j’existe. Parce que j’ai le droit. Et parce que ça emmerde les coincés, les extrémistes, les queerphobes. Parce que la haine ne doit pas gagner. Que la haine ne doit jamais gagner.

Retrouver des connaissances dans ce genre d’évènements lorsque l’on appartenait ouvertement à ce genre de mouvements, ce n’était pas si étonnant que ça. Les deux hommes étaient très sociables, ils devaient certainement avoir croisé d’autres de leurs connaissances sans même s’en rendre compte, peut-être un peu trop occupé par une bonne discussion ou alors une vue agréable. Pour le moment, la vue agréable pour Matt, c’était ce cuisinier qu’il avait déjà vu. Le voyant s’installer près de lui, l’américain ne perdit pas une seule seconde pour glisser un bras autour de ses épaules et le ramener tout doucement vers lui.

« Tu as changé de feu de camp juste pour moi ? Et bien dis donc, je me sens beaucoup trop honoré, là… » dit-il une nouvelle fois, son sourire devenant on ne peut plus grand encore.

Son verre se vidant sans qu’il ne dise quoi que ce soit, il regard Austin avec des yeux très clairement choqués. Sa bière… Jamais personne ne lui prenait sa bière, en général, c’était son truc à lui, de faire ça ! Il se tourna vers une fille de leur cercle qui venait de se lever pour partir vers la buvette. La faisant revenir, il lui demanda de leur ramener deux pintes, en profitant pour glisser un billet dans sa main au passage.

Puis il reposa sa totale attention sur Austin pour le regarder. C’était toujours un très bel homme, malgré qu’ils ne se soient pas vu depuis un très long moment. Et des plans culs, ils en avaient très certainement vu plusieurs. Il fallait dire que savoir qu’il avait marqué l’esprit du bel homme, ce n’était pas rien, bien au contraire. Ca faisait vraiment très plaisir à l’américain.

« Moi aussi, il faut dire qu’on a pas vraiment prit le temps de discuter, la dernière fois… »

Tout doucement, les doigts du plus âgé se glissèrent dans la douce chevelure d’Austin pour la caresser, se fichant bien de pouvoir le décoiffer. Il était tard, il faisait nuit, ce n’était plus vraiment une heure pour être tiré à quatre épingles de toute façon. Lorsque Austin se remit à l’observer, leurs regards se croisèrent, Matt déjà occupé à le faire. Ce gars était toujours si attirant, donc bon, il serait peut-être un peu trop fou de s’empêcher de l’observer. Il haussa doucement les épaules.

« Un peu… Tu as du en récupérer aussi, c’est sûr ! Beaucoup ? Tu es venu tout seul d’ailleurs ? T’as l’intention de rentrer accompagné ? »

Quand j'ai décidé de venir sur cette plage j'étais loin de penser que j'allais le retrouver, lui, se beau Matt. Je ne vais pas cacher le fait que oui, j'ai eu un profond désir de le revoir, après tout, nous avions passé une bonne après midi.

- Je changerai de feu pour un bel homme tel que toi !

Et je n'allais pas passer à côté d'une nouvelle petite discussion avec lui. C'est un réel plaisir de passer du temps avec lui, le peut qu'on avait parlé dans le taxi me donnait bien envie de le connaitre plus. Mais ça a vite dévié et puis, ça faisait longtemps que je n'avais pas pris un tel plaisir.
Une de ces mains dans ma chevelure je ne peux que sourire, surtout au vue de son magnifique regard qui me donne envie de l'embrasser. Mais je me retiens malgré tout, alors que bon, on serai pas les premiers à s'embrasser.

- Il y a eu quelque bisou par ci par là, mais rien voir avec toi.... Cette année, ce n'était pas mon idée.... cependant..... si j'ai la bonne personne pour rentrer avec quelqu'un....

Un gros sous entendu, bien évidemment, je n'allais pas louper une occasion de passer du temps avec lui.

- Et toi ? Prévue de ramener quelqu'un ?

Une façon polie de savoir si il va répondre à ma question caché.

C’était ce genre d’évènement qui favorisaient les rencontres, bien qu’ils se trouvaient pourtant dans un pays, dans une ville particulièrement ouverte sur les droits. Cela n’empêchait aucunement de profiter un peu, de trouver des personnes avec qui pouvoir discuter d’un peu tout et n’importe quoi sans s’en soucier totalement. Alors forcément, si Matt ne travaillait pas, il n’allait pas rater cette occasion de faire de nouvelles rencontres ou plutôt… De tomber sur quelqu’un qu’il appréciait très fortement, comme c’était le cas avec Austin. Il avait particulièrement apprécié ce moment qu’ils avaient déjà pu passer, tous les deux.

« J’serais trop fou de ne pas en faire de même j’crois. » dit-il, le regard posé de façon plutôt intense sur le visage de celui avec lequel il discutait. Il ne parlait bien évidement pas de lui-même mais plutôt du cuisinier.

Tout doucement, il rit. Qui ne s’était pas fait embrasser, dans la journée ? Seulement les personnes qui étaient totalement fermées et celles qui étaient présentes pour essayer de faire prendre conscience à tout le monde que leur orientation sexuelle était contre-nature. Et encore, si ça ne tenait qu’à Matt, il serait premier à leur offrir de grands baisers, juste pour les embêter. « Rien à voir avec moi ? Dis m’en plus ! » dit-il en riant légèrement. Il ne détestait pas du tout l’idée de passer un peu de temps avec Austin, ce soir. Il lui lança d’ailleurs un petit regard en coin pendant qu’il se tournait pour récupérer leurs bières, un regard qui en disait bien long.

« Ramener j’sais pas, j’crois pas que ma coloc soit vraiment heureuse que je ramène un gars dans le lit que je partage avec elle… » dit-il en riant légèrement. En revanche, raccompagner quelqu’un, il ne disait pas non du tout. Il tendit sa pinte à Austin, trinquant rapidement avec lui avant de boire quelques gorgées, ses yeux passant du feu au beau visage du garçon. « Reste un peu… »

C'était vraiment impensable de retrouver Matt ici sur cette plage. J'en suis dès plus heureux, je n'allais pas passer à côté de Matt, oh non, dès que c'est possible, je veux passer du temps avec lui. Il est si incroyable au lit mais pas seulement, il était aussi très mystérieux et intéressant, tout ce qui m'attirait. Et puis, nous sommes sur la même longueur d'onde à cet instant. ​

- Tu es un mec qui embrasse bien, j'espère que tu en a conscience !

Si je voulais, je pourrais lui caresser la joue, soulier son menton un peu carré et l'embrasser avec fougue, mais je me retient pour faire durer le plaisir.
Le message est passé Matt, croit moi, si la soirée continue dans le bon sens, il peut me croire il va découvrir ma chambre...
Je prend le verre que Matt me tend, j'en prend un gorgé, mais je dois faire attention si je veux pas faire n'importe quoi.

- J'ai pas envie d'aller ailleurs.

Toujours le sourire aux lèvres, je n'arrive pas à me détourner de Matt, il pourrait y avoir un tremblement de terre juste à côté, je m'en moquerai bien. Je ne cacherai pas que Matt, m'a taper dans l'œil, il m'a peut-être même taper dans le cœur, mais vue que je ne sais pas ce que s'est vraiment...
Ma tête tournée vers celle de Matt, j'ai la grande envie de l'embrasser et vue que ça vient de plus en plus fort, je craque totalement, je me penche vers lui, et de ma main libre que je pose sur sa nuque, je le ramène vers moi pour enfin coller mes lèvres aux siennes.

- J'en avais tellement envie....

Ce genre de soirées étaient très fortes pour créer des relations, rapides ou non. Des liens qui ne seraient peut-être pas arrivés dans la vie de tous les jours. Parce qu’ici, chaque personne semblait un peu plus décomplexée. Matt ne l’avait jamais été mais dans un même temps, là il pouvait parler librement, se lâcher totalement sans forcément être avec sa meilleure amie. C’était une personne très sociable, il aimait être avec du monde, il aimait faire des rencontres, être entouré de pleins de personnes en train de faire la fête, des personnes qui croquaient très clairement la vie à pleines dents, c’était tellement agréable et beau à voir… Il adorait ça.

Et Austin, il semblait faire partie de ces personnes. Depuis qu’il l’avait rencontré, c’était ce qu’il renvoyait. Et c’étaient tout simplement des choses qu’il adorait. Il souhaitait en apprendre un peu plus sur ce garçon, découvrir sa vie, savoir ce qu’il aimait, ce qu’il faisait, voir les jolies petites étincelles de joie, de bonheur dans ses yeux.
Le barman se mit à rire tout doucement en entendant qu’il embrassait bien. Large sourire posé sur les lèvres, ce fut un petit clin d’œil qu’il adressa au plus jeune.

« Comme si embrasser était si compliqué… Pleins de personnes embrassent bien, tu sais. Tu en fais partie, d’ailleurs… » dit-il doucement. Quel que soit la façon dont ils allaient terminer leur soirée, ils avaient tous les deux bien le droit de passer un bon moment ensemble là, actuellement. C’était bien ce qu’ils étaient en train de faire.

La bière n’était pas du tout la meilleure du monde, bien au contraire. C’était une petite bière d’entrée de gamme, simplement pour contenter les personnes présentes. Il n’y avait pas de raison de la déguster bien que presque tout le monde soit en train d’en consommer. Et alors qu’il allait encore en prendre, se furent les lèvres d’Austin plutôt que son gobelet que les siennes rencontrèrent. Il sourit légèrement, bien séduit à l’idée qu’il craque bien facilement de la sorte. Il se pencha doucement vers l’homme pour prolonger leurs baisers alors qu’une voix venait les déranger, couvrant presque les mots très bas du cuisinier. L’américain laissa quelques secondes ses yeux glisser dans le beau regard de celui qui avait partagé son lit il y avait peu de temps avant de relever la tête pour apercevoir Dallas. Il lui offrit un large sourire légèrement crispé, ce qui prouvait bien que ses mots étaient quelque peu restés en travers de sa gorge.

« Ca fait presque vingt ans, faut bien continuer de vivre un peu. Dallas, je te présente Austin. Austin, voici Dallas. Tu te joins à nous ou tu restes là à grogner ? » demande-t-il doucement, restant bien près d’Austin.

Quitter les lèvres délicates de Matt est difficile, j'aime bien trop les embrasser. Surtout que juste avant il me dit que j'embrassais bien, comment résister. C'était impossible.
Mais je me sentais observé, je regarde le mec debout, un regard assez noir envers Matt. Un ex ? Son mec ? Je ne suis pas un briseur de coeur moi, si Matt est avec cet homme, assez charmant, il faut l'avoué, il avait des qualités, et je peux comprendre que le beau brun est été séduit. A attendre Matt, c'était un ex datant de 20 ans ! Rien que ça ! Donc ce Dallas et lui on eu une aventure il y a longtemps. Bon, je ne suis pas jaloux, après on est pas ensemble donc en soit...

- Enchanté Dallas !

Pas sur que ce dernier le soit aussi, mais tant pis, je devais rester polie, et puis, je suis ouvert d'esprit moi et si Dallas veut se joindre à nous... je ne dirai pas non, ça sera pas mon premier plan à trois, enfin avec deux hommes si... Enfin bref, ce n'est pas le moment de penser à tout ça.

- Si, tu veux Dallas, je peux t'embrasser aussi ! Après tout, c'est la journée de l'amour !

Je luis fais un sourire, et lui lance un petit regard malicieux, moi je veux bien... plus on est de ou, et plus... le plaisir est grand non ?
Je regarde Matt, puis, embrasse son cou, ce qui me rappel notre derniers moments ensemble, il y a plusieurs jours.