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 Ce que je ferai, ce sera l'impression de ce que j'aurai ressenti ಎ ANAËLLE ༝ NINA

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Ce que je ferai, ce sera l'impression de ce que j'aurai ressenti ಎ ANAËLLE ༝ NINA
Lun 3 Jan 2022 - 17:32
Ce que je ferai, ce sera l'impression

de ce que j'aurai ressenti


Stadtpark de Hambourg ༝ 15 janvier 2022 ༝ 07h40


« La vie est ainsi ; on réalise rarement dans l'instant que les moments difficiles ont une fonction cachée : nous amener à grandir. »Les Dieux voyagent toujours incognito, Laurent Gounelle

A N A Ë L L E  ☩  N I N A


Le reflet des arbres dans l'eau ressemblait à un tableau de Monet. Ne manquaient plus que les nymphéas pour jouir d'une immersion totale ; mais rien n'était parfait, jamais. L'important était, paraît-il, de profiter de l'instant présent et de chérir ce que l'on avait. D'ordinaire, cette philosophie était celle de Nina. Plus encore depuis le décès brutal de son père, elle s'essayait de se satisfaire des bonheurs du quotidien. Le tableau qui défilait devant ses yeux, alors que ses poumons se levaient au frénétique rythme de ses enjambées, aurait dû la satisfaire. À tout le moins, il aurait dû la faire sourire. Il est vrai qu'en temps normal, la trentenaire aurait apprécié l'air frais frappant ses joues rougies par l'effort physique et le scintillement des couleurs dans l'eau qu'elle longeait. Aujourd'hui, seulement, il ne pouvait rien en être.

Pour comprendre l'inquiétude de Nina et l'état dans lequel elle se trouvait, il ne fallait pas remonter bien plus loin qu'à la soirée de la veille. Revoir  @Alrik Müller l'avait dérangée plus qu'elle ne pouvait l'admettre. Sentir sa respiration si près de son oreille, voir sa main si près de la sienne, avait été troublant. L'intégralité du spectacle de l'humoriste Hazel Brugger avait pris les apparences d'une mauvaise blague, pareilles à celles d'une caméra cachée. Du passage chez le gynécologue et de la contraception loupée, aux attitudes des enfants de quatre ans, en passant par comportements que l'on ne pouvait tolérer en société, tout avait trouvé une résonance chez la trentenaire. La vie de Nina s'était fait l'écho d'une comédie loupée alors que, dans l'histoire, c'était elle, la ratée. Elle qui élevait aujourd'hui l'enfant de l'ex petit-ami de sa sœur et s'efforçait de ne pas se laisser ronger par ce terrible secret.

Le meilleur moyen qu'elle avait trouvé ce matin pour extérioriser tout cela et parvenir à taire encore ses secrets avait été, non pas d'aller récupérer tout de suite Elias chez sa mère, mais bien de rejoindre le nord de la ville pour courir jusqu'à en perdre haleine. La course à pied ne faisait d'ordinaire pas partie des activités sportives qu'elle pratiquait ; elle tournait plutôt avec l'adrénaline provoquée par l'escalade. Pour autant, au vu des horaires de la salle et de l'évidence qu'elle trouverait porte close à une heure si matinale, Nina avait dû se résigner. Son moyen d'extérioriser s'était ainsi matérialisé par cette course dont elle ne maîtrisait pas le rythme et qui faisait naître dans sa bouche un goût de sang tant l'effort qu'elle s'infligeait était intense. La musique bourdonnant dans ses tympans avait au moins le mérite de lui faire tenir la cadence à défaut de l'aider à évacuer ce qu'elle contenait en elle. À mieux y réfléchir, une initiation à la boxe aurait peut-être été préférable.

“You better lose yourself in the music, the moment. You own it, you better never let it go. You only get one shot, do not miss your chance to blow. This opportunity comes once in a lifetime yo”. Eminem entamait son deuxième refrain lorsque Nina manqua de trébucher dans le chien qui, plus paisiblement qu'elle, profitait de cette claire matinée pour sentir les milles odeurs qui s'offraient à lui. La rambarde en bois qui balisait le sentier et empêchait tout accès à l'eau lui permit de se rattraper, quoi que cela interrompit instantanément Nina dans sa course. L'instant d'après, la seule trace de sa presque chute était sa paume rougie par le frottement sur le bois abîmé par la pluie, et les seuls témoins ce paisible chien et sa maîtresse.

Alors que cette dernière s'approchait de Nina, celle-ci coupa sa musique depuis sa montre connectée, avant d'ôter ses écouteurs qui finirent leur course dans la poche de son jogging. C'est alors qu'elle la reconnue : Anaëlle, un autre fantôme du passé. La meilleure amie de sa sœur qui avait promis à @Iris Vahid un emploi dans sa librairie pour lui permettre de revenir sereinement en Allemagne. Encore une chose dont Nina ne se réjouissait pas, quoi qu'elle ne montra rien en saluant poliment la rouquine.

« Bonjour Anaëlle, ça fait longtemps. », dit-elle dans le sourire qu'elle feint. « Il est plus habile que moi. », releva-t-elle en désignant du menton le chien qui s'était dégagé à temps pour ne pas se prendre la vitesse de Nina.


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Sam 8 Jan 2022 - 23:39
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de ce que j'aurai ressenti


Stadtpark de Hambourg ༝ 15 janvier 2022 ༝ 07h40


A N A Ë L L E  ☩  N I N A




Anaëlle est de ceux qui n'aiment pas que les choses changent. Elle est de ceux qui se complaisent dans la routine, et qui ronchonnent quand un imprévu survient. Elle est de ceux qui reproduisent les mêmes gestes, jour après jour, et qui s'en satisfont. Elle est de ceux qui ne vivent qu'à moitié, par peur d'échouer en vivant en entier. Le monde pourrait bien s'écrouler, qu'elle continuerait à se lever aux aurores, à boire son thé brulant à s'en faire fondre la langue. La vie pourrait bien flancher, que cela ne l'empêcherait pas de continuer à vivre sa vie par procuration, à travers ses livres qui ne la quittent jamais.

En revanche, elle n'a jamais envisagé que ce serait sa vie à elle, son monde à elle, qui faiblirait. Elle a toujours tout mis en oeuvre pour éviter cela.

Dans son plan de vie, le retour d'Iris n'était pas notifié. Bien sûr, la libraire se réjouit du retour de sa meilleure amie dans sa vie, qui serait désappointé de la venue de son humain préféré, après-tout ? Mais d'une certaine manière, elle se retrouve forcée de de revoir ses habitudes, tant dans sa vie privé, qu'à la librairie, où elle n'est plus seule capitaine à bord du navire. Mais les éclats de rire que lui arrache la plus jeune des Vahid valent bien tous les bouleversement du monde.

Dans son plan de vie, elle n'a jamais pensé qu'un jour, elle partirait de chez ses parents en claquant la porte, sa patience atteignant le bout de ses limites. Avec les années, les questions de sa mère concernant sa vie sentimentale se font plus fréquentes, plus intrusives, et le jour de l'an, après un énième " Mais enfin Annie, tu as 32 ans maintenant ! " la dite Annie a décidé de couper court une bonne fois pour toutes au discours de sa mère, en quittant la table familiale, sous le regard ébahi de ses ainés. Jamais ils n'auraient cru qu'elle puisse un jour réagir ainsi face à leurs parents, elle, la petite fille modèle.

Mais la plus grand changement, et certainement celui qui l'affecte le plus, concerne la présence d'Alrik dans sa vie. Ou plutôt, sa non présence, actuellement. Bien sûr, Anaëlle comprend. Iris est revenu en ville, partiellement grâce à la libraire qui lui a offert un travail, et elle peut concevoir que le policier en soit tout retourné. De là à mettre autant de distance entre eux, là, c'est elle qui en est totalement retournée. Alrik n'est pas totalement absent, non, c'est encore pire. Ils continue à lui parler, et à la voir, bien mois souvent qu'avant, et lorsqu'ils sont ensemble, Annie semble ressentir toute la culpabilité qu'il souhaite lui faire éprouver. S'il tient à lui faire comprendre qu'il lui en veut, c'est chose réussie. Ou alors est-ce tout simplement qu'il est tant perturbé par le retour de son ancienne petite-amie, qu'il est incapable d'agir comme à l'ordinaire. Allez savoir... Anaëlle n'est pas la plus doué en ce qui concerne les relations humaines, et ses congénères bipèdes lui sont bien souvent incompréhensibles.

Cette situation avec Alrik lui pèse. Alors qu'au départ d'Iris, elle avait mis un point d'honneur à l'éviter, elle a à présent bien du mal à le faire. En quelques mois, il a pris dans sa vie une place si importante, que sa mère a bien finit par croire qu'un mariage aurait un jour lieu entre les deux, bien qu'Anaëlle n'ait de cesse de lui répéter qu'il ne sont que de très bons amis. À sa manière, il a réussi à lui faire oublier la terreur qu'elle ressentait chaque fois qu'elle sortait de chez elle, après l'effraction dans la librairie. Pendant plusieurs années, il a été son seul et unique ami. Il sait comment la faire rire, comment lui donner confiance en elle, il comprend, quand le monde extérieur lui semble trop violent, et il la pousse un peu, quand elle veut se complaire dans ses angoisses. C'est également lui qui l'a convaincue d'adopter un chiot, et force est de constater qu'il a eu totalement raison. Avec Archibald, sortir prendre l'air est bien moins angoissant.

- Viens Archi, c'est plus que toi et moi, maintenant...

Rares sont les moments où Anaëlle sort seule son chien, très souvent, Alrik les accompagne dans leurs balades. Pourtant, depuis quelques semaines, les balades à trois sont bien plus rares. Alors quand la rousse ouvre le coffre de sa voiture pour en faire descendre le chien, celui-ci comprend très bien qu'ils n'attendent plus personne, et qu'il peut dès à présent gambader sur les sentiers du parc.

L'air est frai, et force Anaëlle a resserrer son écharpe autour de son coup. D'un oeil méfiant, elle observe Archibald, son fidèle compagnon depuis plusieurs années déjà. Athlétique, le chien court dans sa sens, puis revient sur ses pas, comme pour montrer à sa maitresse qu'il ne s'éloigne pas trop d'elle. Ainsi, Annie ne loupe pas une miette de la rencontre fortuite entre son chien et l'ainée des Vahid, qu'elle aurait reconnue à des kilomètres à la ronde. Avec une grimace, elle ne peut que s'approcher, et en conservant d'abord les yeux fixés sur ses bottes, elle passe la laisse autour du coup d'Archibald. Dire qu'elle n'apprécie pas Nina serait exagéré, disons plutôt qu'elle... l'impressionne. Au point où, adolescente, Anaëlle craignait toujours ce que Nina allait penser d'elle, en la voyant avec sa soeur. Par ailleurs, les tensions entre les deux soeurs ne pouvaient que la mettre mal à l'aise, la rouquine étant censée être du côté d'Iris.

Elle affiche tout de même un sourire cordial, allant même jusqu'à lâcher un petit rire, à la mention de l'agilité de son chien.

- Bonjour Nina, c'est vrai, quelques années, non ? Je suis désolée pour Archi, j'espère qu'il ne t'a pas fait trop mal... Il se comporte encore comme un chiot, parfois.

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Mer 2 Fév 2022 - 16:11
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de ce que j'aurai ressenti


Stadtpark de Hambourg ༝ 15 janvier 2022 ༝ 07h40


A N A Ë L L E  ☩  N I N A


Si certains reniaient les théories de l’existence d’un « avant » et d’un « après », Nina faisait partie de ceux qui étaient intimement convaincus de leur existence. Sa propre histoire de vie comportait un avant et un après. À vrai dire, sa propre histoire de vie comportaient des avants et des après. Avant et après un évènement – important, tragique ou même heureux, la vie se dessinait sous un angle différent. Le tournant le plus marquant que Nina avait eu à vivre était sans nul doute le décès de son père. À cette époque, sa vie s’était façonnée d’une façon nouvelle, loin de lui plaire. Il y avait d’abord eu l’égoïsme d’Iris et son départ pour les États-Unis, avant l’inévitable adieu fait à leur père. Même si Elias était arrivé pour embellir ce tableau devenu bien trop terne pour être apprécié, Nina était encore parfois nostalgique de ce temps d’avant, où sa famille était réellement une famille ; cette époque où elle avait encore une sœur, en dépit de leurs différends déjà existants. En quelques mois seulement, Nina avait tout perdu : son père qu’elle considérait comme son plus grand héros, sa sœur qui avait fui les difficultés pour briguer des rêves illusoires, et une mère qui s’était laissé peu à peu envahir par le chagrin. Certes, le temps avait fait son œuvre et les blessures s’étaient progressivement refermées. Sa vie avait retrouvé ses bonheurs et un équilibre que Nina chérissait particulièrement.

Aussi, ce que craignait le plus Nina avec le retour d’Iris en ville, c’était bien de voir sa vie connaître de nouveaux changements et perdre l’équilibre qu’elle avait mis tant de mois à retrouver. Nina, elle, s’en remettrait ; elle faisait précisément en sorte de garder ses distances pour que le futur départ de sa sœur ne l’affecte pas. Là où elle était bien plus inquiète, en revanche, c’était s’agissant d’Elias. À trois ans et demi, le petit garçon n’avait pas le discernement suffisant pour se méfier de sa tante qu’il avait toujours attendue. Devant tant d’entrain et devant ce qui semblait être une réelle affection qu’il lui portait, Nina n’avait pas non plus à cœur de le priver de la voir. Pourtant, elle savait que viendrait le moment où Iris s’en retournerait et emporterait avec elle des morceaux de cœur d’Elias. Cette seule pensée était insupportable mais, en l’état, Nina ne savait trop ce qu’elle pouvait y faire.

Bien que ce ne soit pas rationnel, se retrouver face à Anaëlle la renvoyait à sa vérité : le retour d’Iris était en grande partie dû à la rouquine. Sans l’emploi qu’elle lui avait proposé à la librairie, et sans le soutien de son amie de toujours, Iris serait probablement restée sur ce point de la planète si éloigné du sien qu’il fallait tourner le globe pour le voir. C’aurait été mieux, à n’en pas douter.

Aussi, ce fut bien un sourire de convenance qui para les lèvres de Nina par suite de sa rencontre avec Anaëlle. Sourire qui se dissipa à mesure que des paroles durent se dessinèrent dans ses pensées. Quelques années qu’elles ne s’étaient pas vu ? Assurément. Depuis qu’Iris était parti alors que leur père était mourant. C’aurait été une réponse sanglante que Nina aurait pu sortir si le simple prononcé de ses mots ne l’avait pas atterré. La disparition d’Erik était encore trop douloureuse pour qu’elle ne puisse en parler au détour d’un footing. Pour cette raison, Nina préféra acquiescer silencieusement de la tête en reportant son regard sur le chien.

« Non, non, il ne m’a pas fait mal, tout va bien. », dit-elle en observant le chien explorer les environs, alors qu’elle apprit qu’il se comportait encore parfois comme un chiot. « Certaines personnes se comportent comme des enfants même à l’âge adulte et nous ne pouvons rien y faire. »

Le regard accordé à la rouquine en dévoilait long sur ce que pensait Nina et la personne à qui elle faisait référence. Anaëlle était intelligente et le comprendrait aisément.

« Ça va ? Iris ne te met pas trop de pagaille à la librairie ? », s’enquit-elle juste après. « Même si ce n’est que temporaire, c’est gentil de ta part de lui avoir proposé ce poste. »

Intelligemment, Nina venait d’orienter la conversation autour de sa sœur. Avec un peu de chance, elle en apprendrait davantage sur les projets d’Iris et peut-être connaîtrait-elle la date de son futur départ. Départ qu’elle espérait le plus proche possible ; tant pour protéger Elias avant qu’il ne s’attache davantage à sa tante, que pour éviter son pire secret d’éclater. Elle sentait dangereusement l’étau se resserrer en ayant croisé Alrik hier, et Anaëlle aujourd’hui. Trop de fantômes du passé se mettaient à surgir autour d’elle pour que Nina ne reste parfaitement sereine quant à l’avenir.


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Re: Ce que je ferai, ce sera l'impression de ce que j'aurai ressenti ಎ ANAËLLE ༝ NINA
Lun 14 Mar 2022 - 0:04
Nina Vahid a écrit:
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A N A Ë L L E  ☩  N I N A


La mémoire d’Anaëlle peut s’apparenter à celle d’un éléphant, si l’on considère que les éléphants ont effectivement une mémoire incroyable, évidemment. Anaëlle n’oublie rien, jamais. À l’école primaire, elle montrait un talent hors norme pour apprendre les poésies, mais celle qui avait un réel talent d’interprétation s’appelait Iris, pas Annie. Anaëlle, elle, se laissait submerger par sa timidité maladive. Et avec cette mémoire, elle ne risquait pas d’oublier ce jour, où lors de sa première récitation devant ses camarades, elle avait vomi dans le seau dédié à mouiller l’éponge nauséabonde du tableau. Peut être sentait-elle aussi mauvais, parce que d’autres avant elle y avaient déjà régurgité leurs petits déjeuners. De quoi la faire paniquer un peu plus chaque fois qu’elle se retrouvait devant la grande ardoise noire.
Il n’y a donc pas à gamberger pendant des heures, sa méfiance envers le monde entier, qui lui donne parfois un air grincheux, vient de cette mémoire. Après-tout, elle ne peut pas ne pas se montrer méfiante face à cette serveuse, lorsqu’elle se souvient qu’au collège, cette même serveuse, ancienne camarade de classe, se moquait de ses cheveux roux, par exemple.
Appelez cela bénédiction, ou malédiction, vous aurez certainement raison, dans les deux cas. Ne rien oublier a forcément des avantages, notamment lors de contrôles et autres examens, et l’hypocrisie ne figurant pas dans les défauts d’Anaëlle, elle se trouve bien incapable de nier ce point. Cependant, si elle pouvait s’éviter des situations la rendant mal à l’aise, en raison de cette profonde mémoire, elle ne rechignerait pas.

Comme la situation actuelle, par exemple. C’est bien cette incroyable mémoire qui rend Anaëlle si mal à l’aise face à Nina. La grande sœur de sa meilleure amie, à savoir, pas une personne lambda. Non, Nina en sait forcément plus à propos d’Anaëlle qu’elle ne voudrait bien l’admettre. Après tout, pendant une longue période, les cadettes Vahid et Renard ne se séparaient jamais. Ainsi, Nina avait eu l’occasion de la voir dans ses bons jours, comme dans ses mauvais. Elle avait pu la croiser durant de difficiles moments de détresse, dans des postures partiellement humiliantes, et n’avait rien loupé de ses essais capillaires ou vestimentaires douteux. Oui, Anaëlle sentait un profond malêtre grandir en elle, face à cette femme qui l’avait toujours impressionnée, qu’elle avait tantôt admiré, tantôt craint, et qui avait aujourd’hui toutes les cartes en main pour se moquer d’elle, là, au milieu du parc. Elle pourrait le faire sur le ton de la conversation, l’air de rien, en lâchant un « Au fait, te souviens-tu de la fois où... » qui lui donnerait assurément envie de se cacher dans un terrier. Et même s’il ne lui semble pas l’avoir déjà entendue émettre la moindre parole désagréable à son sujet, ces petites contractures dans son estomac semblent vouloir la préparer à toutes les éventualités.

Elle reste donc droite comme un piquet, sans trop savoir que dire, la laisse d’Archie le chien coincée entre ses mains, dont les jointures blanchissent à vue d’oeil. D’un côté, il y a son chien, en pleine manœuvre de séduction avec un ballon dérobé à un pauvre enfant, la langue pendante et la bave coulante, et de l’autre, il y a cette femme, charismatique, qui la fixe avec l’air de celle qui sait déjà tout, qui a déjà tout compris. Sans doute a-t-elle remarqué à quel point Annie panique toujours aussi rapidement, lorsqu’une situation imprévue se présente à elle. Peut-être même a-t-elle une idée très précise du cinéma que se fait Anaëlle dans son esprit à cet instant précis. Et repousser toutes ces idées néfastes, alors que le silence s’installe et dure, se révèle extrêmement difficile.

Heureusement, elle le brise, ce silence. D’abord pour parler du chien, en assurant qu’il ne lui a pas fait mal, puis en lâchant une pique à peine déguisée à propos de sa sœur. Ah. Nouvelle torsion de l’estomac. Comment oublier le mordant de l’ainée des Vahid ? Le sourire pincé qu’affiche Anaëlle doit certainement lui confirmer qu’elle à compris à quoi, ou plutôt à qui elle fait référence. Pourtant autant, ses lèvres restent résolument fermées, jusqu’à ce qu’elle ne renquille, sur de nouveaux reproches faiblement dissimulés, et à travers lesquels, Annie le sait, elle tente de recueillir quelques informations. Informations qu’elle ne lui donnerait pas.

« -  Au contraire, j’avais bien besoin d’une aide supplémentaire à la librairie, mes deux bras commençaient à ne plus suffire. Et il n’y a rien de plus normal, Iris aurait fait exactement la même chose pour moi. »

La relation entre les deux sœurs lui a toujours échappé. Elle qui a une relation fusionnelle avec chacun de ses quatre frères ne peut pas envisager que deux sœurs se fassent autant la guerre. Mais cette animosité inconnue réveille en elle un instinct de protection qui la ferait presque se sentir sur-puissante. Presque. Quoique dirait Nina de méchant à propos d’Iris, elle saurait comment le contredire. Quitte à enjoliver légèrement la vérité, ou à omettre quelques détails. Par exemple, cela fait plusieurs jours qu’elle n’a plus eu besoin de repasser derrière Iris pour re-ranger les étagères. Alors pourquoi en parler ?



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