Une rencontre particulière • Elise

La nuit. Les rayons lunaires vinrent transpercer les fissures des stores mécaniques de l'appartement. Sovjan, sur son lit, avec sa tablette, recherchait des filles potentielles à son entreprise. Il avait les yeux rivés sur l'écran quand son téléphone sonna. Il répondit rapidement et parlait en suédois. C'était un cousin qui l'appelait pour aucune raison et l'agacement de Sovjan se fit ressentir. Il finit par raccrocher, l'ennui de la discussion qui l'envahit.

L'homme quarantenaire se leva de son lit. Ses yeux fixèrent un message qu'il avait reçu « Viens au Lion. », disait le message de Patrik. Répondant un « Ça marche », Sovjan prit un café, un rail de cocaïne sur un cd de Nirvana et il se doucha. Bizarrement, il sortit le costard ce soir. Il avait un rendez-vous important à deux heures du matin donc c'était pour cette occasion qu'il avait sorti le costume trois pièces. Une rencontre tardive avec un représentant de la nuit était ordinaire. La routine de vivre la nuit plaisait bien à Sovjan.

Il sortit et décida de sortir sa moto au lieu de la voiture. Il faisait bon. La pluie était éparse et l'averse de ce matin eut terminé de s'acharner sur la Terre. Sovjan roula jusqu'à le quartier d'Altstad. Il gara sa moto devant le bar. La porte était fermé, le bar ouvrait dans cinq minutes. Quelques personnes s'amassaient devant et Patrik l'attendait déjà, la cigarette entre ses lèvres. Sovjan avait son paquet mais il osa demander à son partenaire de lui en donner une. Il l'alluma.

Le gérant du bar vint ouvrir la porte et ils pénétrèrent à l'intérieur. Ils prirent place au fond du bar contre le mur et près des toilettes. C'était une place discrète. Sovjan se mit face à la porte pour observer les personnes qui rentraient. Le bar commençait déjà à se remplir.

La coutume était pour Sovjan, quand il entra dans un bar, d'interpeller des demoiselles. Mais, accompagné de Patrik qui était homosexuel et efféminé, les femmes les regardaient comme s'ils étaient un couple. Il avait déjà couché avec Patrik, à plusieurs reprises. Ils s'enfilaient des cachets d'ecstasy et ils partaient dans un délire sexuel où les deux protagonistes prenaient leur pied pendant cet échange fugace. Mais depuis que Patrik était en couple, ce dernier ne posait plus ses mains sur le corps musculeux de Sovjan et cela déplaisait à notre suédois. Il était du genre possessif, à ne pas vouloir partager tant qu'il ne l'avait pas décidé dans un procédé d'échangisme. Oui, Sovjan pratiquait le libertinage et ne le cachait pas. Alors que Patrik parla de son époux, Sovjan poussa un soupir. Cela l'exaspérait, mais il essayait d'être poli en l'écoutant, même si sa concentration était sur autre chose.

Son regard fixé sur la porte d'entrée, il croisa la silhouette d'une femme mûre blonde. Son physique n'était pas déplaisant, au contraire. Un sourire vint intercepter le visage rigide de Sovjan. Il parut intéresser par cette dernière comme si les autres qui l'entouraient n'hésitaient plus. Il but son verre, il le finit même. Ses yeux ne cessèrent de l'observer. Elle était au comptoir et un ivrogne vint l'aborder. Sovjan paria sur combien de minutes allait-elle mettre avant de le virer à coup de poing tellement elle en aurait marre. Allez, dix minutes. Elle en eut promptement marre de lui et partit alors. Sovjan ne pensait pas qu'elle viendrait rejoindre le fond vers les deux solitaires, écartés des groupes. Il avait baissé les yeux car sa démarche le faisait envie. Il les leva quand elle s'adressa à eux par de banales salutations.

« Bonsoir. Je vous prie, asseyez-vous. », répondit-il, neutre.

Patrik devint stresser comme il l'était en présence des femmes. C'était pour cela aussi qu'il était gay. Pour lui, c'était plus naturel d'être avec un homme qu'une femme. Cette dernière le mettait dans un de ces états, abominables. Patrik regarda sa montre et jeta un œil perplexe à Sovjan. Sovjan comprit de quoi il s'agissait. Il connaissait son partenaire. Patrik annonça qu'il avait un rendez-vous avec un professionnel alors qu'il rejoindra son amant et qu'ils passeront une énième nuit d'enfer. Patrik s'excusa auprès de la dame et serra la main à Sovjan qui se leva. C'était vrai que le suédois était grand. Il fit une accolade à Patrik et se rassit. Sovjan était ravi qu'il parte, il pouvait rester seul avec cette belle damoiselle.

« Eh bien, je vois que vous avez été accostée par un brave homme. »  

Il ne put s'empêcher de rire. Un brave homme. Loin de là. L'ivrogne, d'ailleurs, se décida de revenir vers l'inconnue. Il n'était pas prêt à lâcher sa proie du soir. Sovjan lui lança un regard avant de se tourner vers la blonde et de presser ses lèvres sur les siennes pour lui procurer un doux baiser. Sovjan se délecta de ce baiser tandis que l'ivrogne avait fait demi-tour, résigné à ne pas chercher les embrouilles. Sovjan ne s'était pas gêné de mettre la langue pendant ce partage savoureux. Le baiser dura quelques secondes avant qu'il se termine.

Sovjan se retira, les yeux rivés dans ceux de la jolie blonde. Elle avait de ces yeux bleus couleur du ciel. Au milieu ses iris étaient dilatées, représentant une pleine éclipse solaire. Un phénomène rare, qui emplissait de bonheur les astrologue et apporte de mauvaises nouvelles chez les croyants. Le suédois passa sa langue ses lèvres. Il regarda l'ivrogne s'éloigner avec un sourire satisfait sur ses lèvres.

« Sinon, je suis partant pour un verre. »  

Patrik était parti. Il était très angoissé, mais Sovjan préféra se taire sur ce sujet et ne pas donner d'explications à l'inconnue afin d'excuser son partenaire. Il les avait laissés seuls, ce qui était un parfait plan pour draguer. Le suédois était très en forme ce soir, vraiment. Sa libido était en hausse et cela faisait longtemps qu'il n'avait pas pris plaisir. Il était prêt à foncer sur tout ce qui bougeait. En plus, cette femme était séduisante, belle, que demander de plus. Sovjan était aux anges, qu'il pourrait même se mettre à prier Dieu pour y rester. Cependant, il savait que la réalité était bien là et que c'était normal des belles femmes dans ce monde. Lui, il se pensait beau. Narcissique, il aimait se regarder dans un miroir. Il était une vraie femme pour le coup. D'ailleurs, il passait deux heures dans la salle de bain et prenant un bain qui faisait ressemblait la douche en un sauna suédois.

Sovjan regarda l'ivrogne s'approcher. Il échangea donc un baiser avec elle, mettant toute la conviction nécessaire pour que l'ivrogne croît qu'il était un couple. Le baiser était agréable certes mais trop court pour Sovjan. Le suédois avait encore les yeux qui s'étaient noyés dans ceux de l'inconnue. Son visage était tout prêt et il allait récidiver, mais Sovjan se redressa à contre-cœur. Il offrit un sourire à la charmante femme. Ses pupilles dilatées en disaient long sur l'attirance qu'il éprouva à l'instant pour elle. Il était souvent attiré par les gens, mais il ne contractait jamais de sentiments. Pour lui, l'amour était à bannir, un fruit maudit.

« Et l'ivrogne s'en va. », fit-il remarquer.

Il fixa l'ivrogne qui avait rejoint de nouveau le bar pour reprendre à boire. Cela fit penser à Sovjan que son verre était vide et qu'il était en train de mourir de déshydratation. L'alcool n'hydrate pas, au contraire, mais c'était une image pour dire qu'il avait très envie de boire ce soir. La cocaïne qu'il avait pris, l'avait motivée. C'était de la bonne. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas ressenti ces effets. Il avait le pied droit qui tapait le sol. Ses yeux dérivèrent sur le décolleté de l'inconnue qui l'épiait du regard elle-aussi. Il finit par relever les yeux. À son tour, il secoua sa tête pour chasser ses pensées salaces au sujet de la séduisante femme qui se trouvait face à lui.

« Je ne sauve jamais les femmes de leur souci donc vous êtes un cas à part. »

Un sourire qui dévoila sa rangée de dents blanches à la femme. Ses iris se frayèrent un chemin pour fixer ses iris bleues. C'était vrai, il ne sauvait pas les femmes célibataires des ivrognes qui les désiraient sauf quand l'une d'entre elles l'intéressa particulièrement. C'était le cas de cette blonde qui l'avait rejoint à sa table. Dès qu'elle eut pénétré le bar et marchait jusqu'au comptoir, le suédois s'était directement empli les yeux de brillants. Il connaissait beaucoup de femmes séduisantes, mais le charme de la blonde était mystérieux. Elle lui ordonna de ne plus recommencer avec une menace, mais Sovjan voulait découvrir ses secrets. Un baiser permettait de dévoiler beaucoup de choses. L'entrain qu'elle avait mis dans ce contact avait déjà montré des choses à Sovjan.

« Mh, mon rectum s'en passerait volontiers. Mais laissez-moi plutôt le plaisir de vous enfoncer quelque chose dans le vôtre. »

Il pensa à ses fesses qui se contractèrent à cette nouvelle. Cela devait être douloureux. Même s'il côtoyait des hommes sexuellement parlant, il était du genre actif. Il lui arrivait parfois d'être dessous, mais c'était rare. Il n'aimait pas vraiment cela, n'ayant pas de plaisir mais pourtant il adorait échanger un moment intense avec une personne du même sexe. Il avait ajouté qu'il aimerait partager un instant salace avec elle, en censurant tout de même ses mots. Il resta courtois, pour le coup. Néanmoins, cela prouva qu'il désirait plus avec elle. Il se maudit, ne voulant montrer sa faiblesse mais il n'avait jamais tu ses intentions. Il regarda le bar où l'ivrogne avait déjà accosté une autre dame. Elle, cependant, il ne la sauvera pas puisqu'il ne l'intéressait même pas sauf si l'inconnue aux yeux bleus lui dictaient d'aller l'aider.

« Je bois un whisky. »

Il aimait le whisky, c'était sa boisson attitré. Sovjan regarda la main levée de l'inconnue et entendit les claquements de doigts. Elle l'appelait comme un chien et cela amusa le suédois. Il se mit à pouffer légèrement avant de tousser et reprendre son sérieux. Le serveur avait entendu l'appel et s'approcha de leur table. Sovjan sortit son paquet de cigarettes et en prit une entre ses lèvres. Il regarda l'inconnue essayant d'analyser si elle fumait ou pas avant de lui demander. Ses dents étaient blanches mais elle pouvait faire un blanchissement régulier. Ses ongles étaient naturels, mais elle pouvait se laver les mains fréquemment ou opter pour l'eau de javel si jamais c'était trop voyant. Une méthode efficace et approuvé par lui-même. Il n'en savait quoi tirer de cette observation.

« Vous fumez ? », finit-il par demander.