La mort nous sourit à tous, tout ce qu'on peux faire, c'est lui sourire à notre tour.

La voix de Gracelyn au téléphone avait trahit l’urgence de la situation et de sa fragilité dès les premières secondes, de sorte que Gisela avait rapidement compris qu’il se passait quelque chose. Quelque chose de grave. La voix entrecoupée de sanglots de sa meilleure amie ne laissait aucunement place au doute sur ce point. Elle était torturée, fragilisée, attristée. Par un mal que la blonde ne pouvait malheureusement que trop bien comprendre, pour avoir été traversée par la même vive émotion des mois plus tôt, quand elle avait quitté Berlin à la hâte pour retrouver Hambourg. Sa mère n’allant pas bien, elle n’avait pas eu à réfléchir avant de plier bagage et arranger ses affaires pour revenir en ville aussi vite que possible. Et il était normal qu’à présent, Grâce ait besoin de soutien à son tour, au vu de ce qu’elle venait d’apprendre.

Le père de sa meilleure amie étant malade à son tour et plutôt gravement, Gisela ne s’était pas faite prier pour quitter son boulot, tout laisser en plan, afin de prendre la direction d’Altona où réside Grace, soucieuse de la rejoindre et la soutenir au plus vite, l’aider peut-être même à faire ses valises ou prendre une décision, quelle qu’elle soit.

Se garant à deux pas de chez sa meilleure amie, Gisela quitte rapidement son véhicule en passant son sac à main par-dessus son épaule, rejoignant le bâtiment de cette dernière à grandes enjambées. S’engouffrant dans l’ascenseur, elle appuie directement sur le bouton de l’étage, arrivant après quelques longues secondes devant la porte du loft de Grace à laquelle elle toque, attendant patiemment que le visage éploré de sa meilleure amie lui ouvre la porte. Alors, immédiatement, la blonde la prend-elle dans ses bras, la laissant pleurer tout son saoul en lui caressant les cheveux, la soutenant comme elle peut.

"- Je sais… Je suis là… Pleure autant que tu en as besoin…" souffle-t-elle, compatissante.

Dans la voix de sa meilleure amie au bout du téléphone, elle avait bien senti toute l’étendue d’une détresse sourde, vive. Elle avait bien ressenti toute l’intensité d’une urgence, alors que sa meilleure amie avait eu besoin de l’appeler, de se sentir épaulée. Elle n’avait alors pas traîné pour quitter son travail sur le champ, rejoignant sa voiture pour laisser défiler les kilomètres sur le compteur, la raccrochant toujours un peu plus du domicile de Gracelyn, où cette dernière l’attendait.

Elle ne sait que trop bien, Gisella, ce que c’est que d’avoir un parent dont on ne connaît pas vraiment l’état. Ce que c’est que de redouter au quotidien de le voir partir, de devoir lui dire adieu, de ne pas avoir le choix. La quadragénaire vit la même chose avec sa mère dont elle voit l’état, la santé, se dégrader au fil des semaines, retardant toujours un peu plus son retour à Berlin, à tel point qu’elle n’était plus sûre d’y retourner un jour. Elle avait déjà pris la décision de rapatrier quelques affaires, avait trouvé un appartement, au lieu de vivre dans la maison de sa mère où cette dernière n’était même pas. Elle avait eu, elle aussi, ce besoin urgent de voir Grâce en apprenant la nouvelle. Ce besoin de sentir ses bras autour d’elle, son soutien. D’entendre ses mots qui lui diraient que tout allait bien aller, même si ça n’était pas vrai. Dans ce moment-là, la blonde aurait été prête à n’importe quoi pour croire, toutefois, que tout finirait par s’arranger, quoique cette hypothèse lui paraisse de plus en plus invraisemblable.

”- Je sais.” souffle la blonde. ”Je sais.” assure-t-elle encore tandis qu’elle réceptionne sa meilleure amie, la porte tout juste ouverte, l’invitant à pleurer tout son saoul, autant qu’elle en aurait besoin.

Elle n’a pas besoin d’en dire plus pour que Grâce sache qu’elle comprend parfaitement. Qu’elle avait réellement cette capacité de comprendre, de se mettre à sa place. Il était évident que cette scène résonnait d’un vibrant écho dans l’esprit de la blonde, dans son âme. Une impression de déjà vu, dans le sens opposé. Une détestable impression, à vrai dire.

”- Qu’est-ce qui lui est arrivé ?” questionne Gisela comme elle fait entrer son amie dans l’appartement, fermant la porte derrière elles.