It's like déjà vu, all over again. ı Cornelia

Une nouvelle journée commence et malheureusement pour toi, tu es supposée la passer seule. Mais plutôt que de rester chez toi, tu as décidé de sortir, d'aller prendre l'air et même d'aller faire un peu de shopping. Il s'agit de l'un des endroits où on peut souvent te retrouver dès que tu es seule. Que ce soit pour t'acheter un nouveau sac à main, une paire de chaussure ou même des vêtements, pour toi ou pour Leila d'ailleurs, c'est toujours un véritable plaisir. Vêtue d'un jeans, d'une paire d'escarpins et d'un haut rouge, tu as décidé de rejoindre le centre commercial de Hambourg afin d'aller faire quelques achats. En plus, ta fille a besoin de quelques pantalons puisqu'elle a abîmé les siens, c'est donc l'occasion idéale.

Tu passes environ une heure dans le centre commercial et tu as fais quelques jolies trouvailles. Le temps passe à une vitesse folle et tu commences à avoir un peu faim. Cependant, pour ne pas restée encombrée, tu es allée déposer tes sacs dans le coffre de la voiture avant de rejoindre un petit restaurant appartenant au centre commercial. Il n'y a pas encore grand monde. Tu t'installe donc à une petite table tout en gardant le sourire, appréciant de pouvoir profiter un peu de la ville. Malheureusement, avec ton emploi, ce n'est pas toujours possible pour toi mais depuis plusieurs semaines, tu n'as pas dû quitter Hambourg et honnêtement, c'est un véritable soulagement pour toi de pouvoir être présente pour tes proches.

Alors que l'un des serveurs est venu prendre ta commande, tu sens un regard posé sur toi. Une jeune demoiselle est installée non loin de toi et c'est son regard que tu remarques. D'ailleurs, il te perturbe quelque peu parce que ce regard, ces yeux, tu as l'étrange sensation qu'ils te rappellent quelqu'un alors que tu ne l'as jamais vue auparavant. Ce n'est pas comme si elle te regardait en te jugeant ou quoi que ce soit, en plus... Ce genre de sensation a l'art de te déstabiliser alors qu'étant mannequin, tu aurais dû t'y habituer, non ? Seulement, plutôt que de perdre pied, tu décides simplement de briser le silence.

Bonjour. Est-ce que je peux vous aider, ou faire quelque chose pour vous ?

Après tout, tu n'es pas méchante ni même aussi hautaine que pourraient le laisser croire les apparences. Au fond, tu as seulement besoin de comprendre, de lui tendre la main.

Une journée off pour un sportif qui prépare de grandes compétitions, ça n’arrive pas si souvent que ça. Pour Cornélia, la dernière en date remontait à la journée passée avec Justin, il y a tout juste deux semaines, déjà. Et celle d’aujourd’hui, de fait, n’était pas volée, quand bien même elle avait toujours un peu de mal avec ces journées off. Une journée sans sport était une journée triste, morne. Une journée qu’elle n’appréciait jamais particulièrement, même si son corps avait bien besoin de temps de récupération de temps en temps. D’un point de vue santé, parait-il que ça ne faisait pas de mal. Parait-il.

Profitant de la journée pour faire quelques courses - notamment acheter de nouveaux pantalons - c’est vers le centre commercial que ses pas l’ont guidé sur le coup des 10 heures ce matin-là, lui faisant parcourir les boutiques de celui-ci à la recherche de quelques pièces soulignants sa morphologie, ses formes sculptées par les entraînements. En toute innocence. Absolument pas, même inconsciemment, pour les beaux yeux d’un ami et partenaire de glace. Bien sûr. Sur le compte de ce dernier, Cornélia se voilait encore bien trop la face pour admettre qu’elle pouvait avoir d’autres intérêts dans ce shopping que le simple fait de se vêtir.

Se posant finalement dans un restaurant du centre commercial, ses paquets posés à ses pieds, la brune se perd dans la contemplation du menu que le serveur lui apporte, hésitant bien vite entre un plat sain ou quelque chose de bien moins diététique, de beaucoup plus gras. Pièce de viande, riz et ses petits légumes ou pizza quatre fromages et sauce piquante ? La question se pose, alors que la brune songe que ne s’étant pas entraîné, elle n’avait pas brûlé beaucoup de calories aujourd’hui. Est-ce qu’elle devait pour autant, alors, se priver de cette pizza, alors qu’elle respectait strictement sa diète le reste du temps ? Peut-être pas. Et les prochaines compétitions étaient loins, encore. Alors, peut-être…

Reposant sa carte devant elle, ayant choisit, elle n’a pas le temps de faire signe au serveur pour attirer son attention que son regard s’arrête, lui, sur le visage d’une femme installé seule à une table. Un visage qui lui parle, sans qu’elle ne comprenne cette impression de déjà vu, dans un premier temps. A moins que, justement, elle ne la comprenne trop bien. Ce visage, il lui semble l’avoir vu - quoique bien plus jeune - dans son dossier d’adoption. Celui qu’elle a finalement voulu consulter il y a quelque temps, à la recherche de ses racines. Non ?

Lorsque la femme lui adresse la parole, Cornelia se sent prise au dépourvu. Mal à son aise. Ne sachant que dire. L’avait-elle vraiment tant dévisagé, que l’inconnue l’avait remarquée ? Probablement, oui. De quoi accroître son malaise. Le rouge lui monte aux joues.

”- Est-ce que… Est-ce que vous vous appelez Sofia ?”

Bien qu'être en ville est assez agréable pour toi, c'est encore très étrange pour toi de passer de tout à rien... En effet, tu avais tendance ) passer de villes en villes, de voyager d'avions en avions et même si c'est très éreintant, ça faisait partie de ton quotidien. Pour toi qui songes sincèrement à une reconversion afin d'être présente pour Leila, il faudra tout de même t'y habituer. Dans le fond, ça te donne presque un avant goût de ce à quoi pourrait ressembler ta vie d'ici quelques semaines, voir quelques mois si jamais tu te décides réellement à opter pour un changement de carrière professionnelle... Est-ce une si mauvaise chose ? Non, pas vraiment. Ça sort de tes habitudes, tout simplement. Il faudra donc du temps pour t'habituer.

Le seul truc qui t'embêtes un peu plus est que pour l'instant, il est parfois difficile pour toi de savoir comment occuper tes journées. Quand le temps libre se fait rare, il y a toujours mille et une chose que tu as envie de faire, mais quand c'est quotidien, c'est tout de suite bien plus complexe pour toi qui n'a jamais réellement dû te poser la question. Aujourd'hui, tu as opté pour du shopping mais demain, que feras-tu ? Tu n'en sais encore rien. La question, tu te la poseras plus tard. Chaque chose en son temps.

Ayant décidé de faire escale pour manger quelque chose, tu as opté pour un bon petit plat. Assez consistant et qui va caler ton appétit jusqu'à ce soir, mais pas non plus rempli de gras et de calories puisque tu veilles tout de même à faire attention à ce que tu manges, même si tu n'iras jamais jusqu'à te priver de tout non plus. Il y a tout de même des limites que jamais tu ne dépasseras. La demoiselle à tes côtés avait le regard fixé sur toi. Pas au point de te dévisager ni même de te mettre mal à l'aise, mais il attire tout de même ton attention. Sa question, tu ne pensais pas vraiment l'entendre un jour et elle attire tout de même ta curiosité, tu dois l'admettre.

Oui, c'est bien moi. Sofia Gonzalez. Et vous, si je peux me permettre de vous demander votre prénom ?

Comme si tu te sentais obliger de lui préciser ton nom de famille. La question qui te brûles les lèvres seraient "pourquoi ?" mais tu as l'étrange impression que tu risques d'en savoir plus très bientôt. Dans tous les cas, tu t'es tout de même permise de lui demander comment elle s'appelle, chose qui te semble plutôt normale dans le fond.

Se retrouver face à face avec ce visage est un peu particulier, un peu étrange. A vrai dire, Cornélia serait bien incapable de décrire la sensation qui l’enveloppe sur le moment T, comme elle dévisage l’inconnue à la recherche du moindre indice pouvant confirmer ou infirmer sa pensée, sa théorie. Cette femme, elle sait cependant qu’elle ne se trompe pas, qu’elle l’a déjà vu, il n’y a pas si longtemps, sur papier glacé. Avec quelques années de moins au compteur, mais elle tout de même. Dans son dossier. Ce fameux dossier qu’elle a découvert depuis peu, révélant le nom de sa génitrice. Un nom qu’elle aurait reconnu, si elle avait été un peu plus branché mode, tant cette femme qu’elle ne reconnait pas était pourtant célèbre.

Sofia Gonzalez. La femme confirme son identité et autour de la brunette, le monde vascille, s’effondre presque. Si elle n’avait pas si souvent imaginé ses retrouvailles avec sa génitrice, le moment qu’elle vit ne ressemble à rien des quelques scénarios qu’elle a pu envisager. Si elle avait pensé que ça ne lui ferait pas forcément grand chose, tant elle n’avait jamais été vraiment perturbé de se savoir adoptée, il n’en était rien. Bien sûr, retrouver sa mère ne pouvait pas être anodin. Elle ne pouvait pas ne pas en être chamboulée, bouleversée, quand bien même elle avait toujours accepté la situation, bien mieux que son ami Justin. Si elle avait toujours pensé que ses parents biologiques avaient eu une bonne raison de l’abandonner, si elle aimait les Hardt de tout son cœur, retrouver sa mère biologique avait naturellement quelque chose de spécial, de particulier.

”- Cornélia.” se présente la demoiselle, la femme lui demandant son nom en retour. ”Cornélia Hardt.”

Son nom, c’est à ses parents adoptifs que la demoiselle le doit. Nul doute que cette femme ne doit pas même savoir qu’elle a ainsi été nommée un peu après qu’elle l’ait abandonné. Pas plus qu’elle ne doit savoir qui l’a adopté. Autant d’informations que la patineuse donne alors, qui n'aident guère son interlocutrice à comprendre qui elle est. Des mots que Corny est incapable de sortir cependant, dans l’immédiat.

Est-ce que, de temps en temps, sa mère pensait à elle ? Est-ce qu’elle se demandait ce que son enfant pouvait bien être devenu, si sa fille était heureuse ? Si elle avait été adoptée par de bons parents, capables de l’élever correctement et la faire grandir dans l’amour ? Et elle, cette mère qui avait choisit de la laisser, qui était-elle ? Pourquoi avait-elle eu besoin de faire ce choix il y a vingt-et-un an et celui-ci avait-il payé ? Si Cornélia l’ignorait  encore, elle le saurait peut-être bientôt.

”- Et vous êtes… ma mère.”

Jamais, au grand jamais tu n'as cessé de penser à cet enfant que tu n'as malheureusement pas eu la chance de connaître. Tout comme tu t'es demandé à plusieurs reprises ce à quoi aurait ressemblé ta vie si tu n'avais pas été contrainte d'abandonner ta première fille. Ce que tu as espéré, c'est qu'elle ne manque de rien. Qu'elle ait pu être adoptée par une famille aimante qui n'attendait qu'elle et qui avait bien plus à lui offrir. Si ce choix avait été le tien, jamais tu ne l'aurais laissé partir. Jamais tu n'aurais pris cette décision. Malheureusement, encore bien trop jeune et dépendant encore de tes parents, tu n'as pas eu le choix. Ils étaient bien trop catholiques, du genre extrêmes. Jamais tu ne mettras tous les pratiquant de cette religion dans le même panier mais eux ont commis l'irréparable envers toi, ce n'est pas sans raison si tu n'as plus aucun lien avec eux depuis un paquet d'années maintenant. Ce n'est pas prêt de changer non plus, cela dit. Ils ne font pas partie de ta vie, ni de celle de Leila, ta deuxième fille mais la seule que tu as eu la chance d'élever.

Bien-sûr, tu as déjà espéré retrouver ta fille aînée. Pour toi, ça ne faisait pas l'ombre d'un doute. Ne serait-ce que pour t'assurer qu'elle a eu la vie décente qu'elle méritait de mener, pour savoir où elle est et si elle a connu l'amour d'une famille car c'est bien ce qui compte le plus, au fond. Seulement, malgré plusieurs tentatives assez longues, toutes se sont soldées par un échec. Pourtant, elle n'a pas disparu de la surface de la Terre, c'est une certitude. Elle est là, quelque part. Mais où ? Voilà l'une des nombreuses questions auxquelles tu n'as pas de réponse, sans certitude d'en avoir un jour d'ailleurs. Cela ne t'as jamais empêché d'être rêveuse, de songer au jour où tu pourrais la retrouver, même si tu es conscience que ce jour pourrait très bien ne jamais arriver.

La voix de la jeune femme te fait bien rapidement redescendre sur Terre. Heureusement car il était temps, penser à autre chose ne te fera certainement aucun mal.

Enchantée, Cornelia.

Lui dis-tu d'une voix assez douce, posée et calme. Digne de celle que tu peux être au quotidien, lorsqu'on prend la peine d'apprendre à te connaître. Au delà de ces apparences parfois froides, qui laissent penser que rien ni personne ne peux t'atteindre. Mais la réalité, c'est que rien de tout ça ne représente celle que tu es vraiment. Ces impressions, ces premiers jugements sont complètement faussés. Les mots qu'elle prononce ensuite ne te laissent pas de marbre, ton visage se décomposant petit à petit. Il te faut quelques secondes afin d'assimiler les informations qu'elle vient de te donner, ayant pas forcément imaginé que ce jour où tu la verrais pour la première fois pourrait être aujourd'hui. Les traits de ton visage laissent paraître la douleur et ton regard, quant à lui, reflète le vide qu'à laissé son absence.

Je n'imaginais pas pouvoir te voir un jour. Du moins pas hors de mon imagination un peu débordante. Et pourtant j'ai énormément espéré que ce jour arrive. J'imagine que tu dois avoir des questions...

Lui dis-tu en veillant autant que possible à contenir tes émotions, à ne pas fondre en larmes. Face à elle aujourd'hui, tu réalises à quel point son absence a été difficile, à quel point tu n'as jamais pu cicatriser de certaines blessures du passé.

Si elle cherchait ses parents depuis quelque temps, Cornelia n’avait jamais vraiment su comment elle réagirait lorsqu’elle les retrouverait enfin. Lorsqu’elle se trouverait devant eux et pourrait leur poser toutes les questions qui étaient naturellement les siennes. Si elle avait toujours accepté l’idée d’être adoptée, si elle n’avait jamais eu aucun mal avec l’idée de grandir sans ses parents biologiques, cela ne l’empêchait pas de vouloir comprendre le parcours qui avait conduit à cette situation. Cela ne l’empêchait pas d’avoir des questions, de vouloir connaître ses racines et comprendre son histoire. Elle préférait avoir eu la vie qu’elle avait eu que d’avoir grandi auprès de parents qui n’auraient peut-être pas pu l’assumer ou qui lui auraient fait payer son existence, parce qu’ils ne voulaient pas d’elle. Ses parents, quelles que soient les raisons qui les avaient poussés à la confier à l’adoption, l’avaient ainsi mise sur la route des Hardt, lui avaient offert une famille aimante, un frère…

Avoir sa mère devant soi était quelque chose que Cornélia avait déjà imaginé, sans en saisir toutefois ni l’essence ni la portée. Cela n’avait alors été rien d’autre qu’une spéculation, qu’une image abstraite sortie de son imagination. C’était tout autre que de l’avoir vraiment sous les yeux pour la deuxième fois de son existence seulement, après vingt-et-un ans passés sans elle. La rencontrer en chair et en os, cela faisait tout drôle. Et de toute évidence le moment avait l’air étrange pour Sofia elle-même, laquelle semble un peu surprise, statufiée, comme Cornelia révèle être probablement sa fille. Presque assurément, à vrai dire.

"- Quelques unes oui…" confirme Cornélia lorsque son interlocutrice suppose qu’elle doit avoir des questions.

Elle avait enfin l’opportunité d’y obtenir une réponse. De comprendre l’histoire de sa venue au monde. D’en apprendre plus sur son bagage, quel qu’il soit. Elle n’avait jamais imaginé que ce jour pourrait être aujourd’hui, quand elle s’était levée ce matin. Mais l’heure était de toute évidence venue d’en apprendre plus sur son héritage. Pourtant, ce n’est pas par une question que la brune décide de commencer, cherchant soigneusement ses mots.

"- Je ne t’en veux pas." affirme-t-elle, pour commencer. "Tu avais tes raisons." complète la patineuse, quoiqu’elle ne les connaisse pas.

Et quelles que soient celles-ci, Cornelia n’avait pas à les juger. Elle le savait depuis longtemps. La rancœur, du reste, ne lui apporterait rien de bon.

Abandonner ton enfant n'étais pas une décision que tu as pu prendre de ton plein gré. Au contraire, tu y as été contraire et c'était certainement la pire chose que tu pouvais imaginer. Dès le jour où on te l'a arrachée, tu n'as su cessé de penser à ton bébé, à ce qu'elle pouvait devenir, tout comme tu aurais simplement aimé savoir si elle était heureuse. La seule chose que tu pouvais lui souhaiter est d'être heureuse, d'avoir une meilleure vie que ce que tu pouvais peut-être lui offrir vu la situation avec tes parents. Tu as longtemps imaginé de potentielles retrouvailles, tout comme tu as cherché à la retrouver mais tes recherches n'ont malheureusement jamais pu aboutir...

Au moment où tu t'y attendais le moins, le destin l'a mise sur ta route. Qui aurait pu le croire ? Elle est grande, mais si belle. Ta fille biologique a un visage si doux et tendre, de ceux qui marquent une existence. Elle a des questions et ça se comprend, c'est tout à fait logique et tu as envie de pouvoir lui apporter des réponses. Après tout, c'est bien le minimum que tu puisses faire pour elle. Tu n'as déjà pas pu tenir le rôle que tu aurais dû avoir dans sa vie alors bon, lui ôter ses questions sans réponse, c'est un bon départ.

N'hésites surtout pas à les poser.

Lui assures-tu tout en lui adressant un léger sourire. Les mots qu'elles prononcent te rassurent, t'incitent donc à lui expliquer les raisons pour lesquelles tu n'as pas pu être présente, pour lesquelles tu as donc dû l'abandonner.

Je t'ai désiré. Plus que tout. Mais j'étais encore jeune, ton père biologique n'a pas été présent et mes parents... Ils sont très catholiques. Avoir un enfant hors mariage était la pire chose que je puisse faire pour eux, même si ça ne comptait pas vraiment. Ils m'ont menacée de bien des moyens afin que je signe les papiers d'adoptions même si je ne le voulais pas. Je n'ai jamais réellement réussi à vivre avec ça...

Lui confies-tu pour commencer, désirant tout de même lui laisser le temps d'accuser un peu le coup.

Des questions pour sa mère biologique, naturellement, Cornelia en a quelques-unes, c’est évident. La première étant de savoir pourquoi ce choix, pourquoi l’avoir abandonné. Elle en avait besoin pour comprendre son histoire, savoir d’où elle vient…  Savoir qui elle est ? Peut-être pas vraiment. Ne le sait-elle pas déjà ? Probablement. En grande partie, en tout cas. Mais il est des morceaux de son passé qui lui manquent, dont seule sa mère biologique a les réponses. Des morceaux qu’elle va enfin pouvoir découvrir aujourd’hui comme elle se retrouve devant cette femme qui, tout en ayant parcouru le monde n’a jamais pu la retrouver avant aujourd’hui. L’avait-elle seulement voulu ? Elle affirme que oui en tout cas, assurant avoir longtemps attendu ce jour, elle aussi.

Elle ne lui en veut pas, pas le moins du monde, pas un instant. Parce que de tous les choix que cette femme pouvait faire, elle avait décidé de lui permettre de rencontrer la famille Hardt. A sa façon, elle lui avait offert une famille. Des parents, un frère… Voilà ce qu’elle lui avait offert, tout en décidant de ne pas la garder, de l’abandonner. Elle lui avait permis de connaître l’amour de ses proches, la chaleur d’un foyer. Quelques soient les raisons de cette femme pour abandonner sa fille, Cornelia ne pouvait pas les lui reprocher. Elle ne pouvait pas se plaindre, pas même une seconde, de la vie qui avait été la sienne. Elle préférait milles fois avoir eu la chance de grandir dans une famille aimante que d’essuyer les frais d’une grossesse accidentelle, non désirée.

Désirée, pourtant, la demoiselle l’avait été et elle lève un sourcil comme Sofia commence son explication, lui assurant cette pensée que la brune n’avait jamais ne serait-ce que suspecté. Elle avait été voulue. Si elle n’avait pas grandi avec sa mère biologique, ce n’était donc pas le fait de Sofia. Seulement celui de son père et de ses grands parents. Cornelia hoche la tête, accusant le coup, l’air surprise. Une famille très catholique, donc, aux valeurs arriérés, voilà son bagage. En partie.

”- Est-ce que tu t’es marié après ?” interroge-t-elle après un silence. ”Est-ce que j’ai… des demi-frères ou demi-soeurs ?”