We belong together ll Harry

Déjà six semaines que j'étais ici en Allemagne avec Jamie. Il s'acclimatait plutôt pas mal ici et il aimait bien la ville. J'avais peur qu'il me reproche un peu ce nouveau départ mais ce n'était pas le cas. Je l'avais arraché à sa vie à Santa Monica, où il avait ses amis, ses repères et quelque part je m'en voulais.. J'avais appris depuis quatre ans, depuis que je connaissais Harry, l'allemand, il n'était certes pas parfait mais c'était suffisant pour retrouver un travail ici. Nous avions trouvé un appartement avec deux chambres, plutôt bien situé et au loyer modéré, ce qui me permettait de pouvoir trouver un travail tout en assurant une vie à peu près décente pour mon fils. Inscrit dans une école internationale, et il allait prendre l'école dans une semaine. J'appréhendais beaucoup cela mais j'essayais de ne pas y penser.

J'avais aussi décidé de prendre ma vie en mains et de faire ce pour quoi j'étais faite, cuisinière. Je voulais vivre de cette passion pour laquelle mes parents avaient trimé pour me payer de bonnes études. J'étais douée, et je trouvais ça criminel de ne pas en faire profiter des autres personnes que mon fils et autrefois mes parents. Ils me manquaient beaucoup, ils était ma famille, et je regrettais beaucoup nos moments mais désormais je n'avais plus que Jamie. Alors que j'avais laissé Jamie à la voisine avec qui je m'entendais très bien et qui avait une fille de son âge pour la journée, je m'étais préparée pour le travail. Dans une agence où j'étais inscrite, j'avais décroché un job en tant que cuisinière dans la résidence d'une famille aisée. J'avais sauté sur l'occasion, c'était fait pour moi. Peut être qu'avec quelques mois d'expérience et quelques économies mises de coté, je pourrais ouvrir ma propre entreprise de chef traiteur..

J'avais rendez vous dans une résidence dans un quartier que je ne connaissais pas encore. Je me voyais déjà dans une maison grandiose, à la déco contemporaine très épurée, avec des domestiques. Je me rends à l'adresse indiquée dans ma petite voiture de location. J'avais fait quelques courses pour faire à manger, avant de rencontrer cette famille. J'espérais qu'ils aiment la diversité, j'avais déjà pleins d'idées de repas.

Arrivant devant l'immeuble, je sors de la voiture en mettant mes lunettes de soleil sur la tête comme si je voyais mieux la résidence de cette famille dont j'ignorais tout jusqu'à leur nom de famille. Je me demandais s'ils étaient nombreux, ou s'il n'y avait qu'une personne, s'ils avaient des domestiques ou non, toutes ces questions allaient trouver réponses rapidement j'en suis sûre.

Prenant les deux sacs que j'avais remplis de nourriture, je me dirige vers la porte d'entrée du loft avec une pointe d'appréhension tout de même. Une femme m'ouvre et au vue de sa tenue, je suppose qu'elle fait le ménage dans cette maison. Je lui souris.

Bonjour je suis Mademoiselle Cooper, j'ai été engagé pour..

La cuisine ! Entrez je vous en prie, le maître des lieux va vous recevoir, la cuisine est par là, faites comme chez vous je vais le prévenir que vous êtes là.

Je lui souris, l'accueil qu'elle m'offre est plutôt chaleureux, ce qui permet à ma jauge de stress de diminuer un minimum. La cuisine est immense, c'est un parc d'attraction pour moi et je sens que je vais m'éclater à préparer de bons petits plats. Je dépose tout dans le réfrigérateur et laisse sur la table le reste en attendant celui qui m'a embauchée. J'entends les pas derrière moi.

Une nouvelle vie démarrait enfin, tout était enfin prêt pour que le tournant que j'avais décidé de prendre était le bon.Un nouveau chemin s'écrivait désormais.. Seule avec mon fils, nous avions le monde a nos pieds. J'aurais aimé pouvoir me reposer sur quelqu'un mais ce n'était clairement pas possible. Bien sûr, mes amis me manquaient beaucoup mais je n'avais pas de famille. J'avais toujours souffert de ne pas avoir eu de frère pour veiller sur moi. Je voulais ce qu'il y avait de mieux pour Jamie, je passais bien après lui. Il était toute ma vie, et il me rappelait son père un peu plus chaque jour. Ce petit blond était son portrait craché, le même sourire, le même regard, les mêmes mimiques. C'était tout Harry, il avait d'ailleurs son deuxième prénom sur son acte civil.

Pour mon nouveau travail, je voulais vraiment m'investir à fond pour être la meilleure. Mon patron n'allait pas être déçu. Il allait avoir les papilles gustatives en fête c'est certain. J'aurais pu choisir plusieurs emplois en même temps mais je voulais me consacrer à celui ci à temps plein pour pouvoir faire du bon travail, j'étais perfectionniste dans l'âme et j'aimais être satisfaite de moi-même, jusqu'à faire des heures supplémentaires bénévolement pour que ce soit parfait. Puis ne pas prendre deux jobs me permettait aussi de profiter de Jamie d'une part et de prendre soin de moi aussi comme courir ou trouver une salle de sport pour faire de la boxe par exemple mais ça se sera seulement dans un deuxième temps. Pour le moment, tout s'enchaîne, peu de temps pour flâner et de chealer par exemple. Je ne peux pas remettre à demain ce que je peux faire aujourd'hui, je dois être méthodique pour que tout aille pour le mieux.

Arrivée dans ce loft magnifique aux employés sympathiques, j'appréhende la rencontre avec le maître de maison.J'espère que ce n'est pas une peau de vache, mais quelqu'un de raffiné qui aime la bonne cuisine. J'entends la femme qui m'a accueilli parler à l'étage et j'inspire profondément, je sais que la personne va descendre. Ce n'est qu'une questions de seconde. J'espère lui plaire car parfois ça ne passe pas forcément dès le premier abord, et j'ai vraiment besoin de ce travail qui me correspond parfaitement pour le moment. L'idée de faire de la cuisine sans pour autant avoir le stress de driver une équipe c'est ce qu'il me faut pour le moment, en tout cas le temps que je prenne mes marques. Alors que j'entends la voix de cet homme qui deviendra mon patron, je tiens dans mes mains un pot d'épice que j'aime beaucoup me servir pour certaines recettes personnelles. Cette voix, je la reconnaîtrais entre mille que dis-je parmi un million de voix, parce que c'est la sienne, parce que je ne peux pas oublier son timbre de voix, sa façon de parler et cet accent. Je me rappelle de lui comme si c'était hier, je n'ose pas me retourner car je sais ce qu'il m'attend. Mon coeur s'accélère, si cela continue, il va sortir de ma poitrine et s'échouer au sol. Pourtant je me retourne et je le vois, là devant moi,  cel me paraît tellement irréel que j'ai du mal à le croire, j'aimerais le toucher pour en être sûr. Je n'ai pas encore ouvert la bouche, je n'en ai tout bonnement pas la force, je reste juste stoïque, tétanisée par la situation, il s'assoit, plongé dans ses documents, je vois mon cv dans ses mains, il me pose une question à laquelle je vais répondre mais nos regards se croisent et j'observe sa réaction. Tout un tas de sentiments fait surface.. Je suis triste, j'ai envie de pleurer, je suis en colère, j'ai envie de hurler, je suis heureuse de l'avoir retrouvé de façon tout à fait hasardeuse.. Tout s'enchaine, je le regarde sans parler avant de reculer jusqu'à me prendre la poignée du réfrigérateur dans le dos.

Je...

Je n'arrive pas à parler, mais je dois partir, être dans la même pièce que lui est insoutenable, je sens la colère s'emparer de moi et les larmes monter.

Je crois qu'il vaut mieux que je m'en aille. Je .. Je suis désolée.

Dis-je en prenant mon sac à mains, laissant tout en plan, je me dirige vers la sortie à la hâte sans me retourner, j'ai la nausée.

J'étais loin de me douter que la journée se passerait ainsi, à croire que le destin se fichait de moi. J'aurais préféré ne jamais revoir Harry. Car le voir en chair et en os devant moi, me ramenait 4 ans en arrière où tous nos souvenirs et cette fameuse soirée où je ne l'avais pas vu, cette soirée qui conclut tant de bonheur et qui vira au chagrin.. Tout remontait à la surface, un mélange de sentiments de nostalgie, colère, tristesse, je n'ai pas du tout envie de revivre ça. Bien sur de l'eau a coulé sous les ponts depuis quatre ans, j'ai mûri et je suis devenue maman, j'ai du élever seule ce petit bout mais je suis fière. Je n'ai même pas pu le lui dire à l'époque puisque je n'avais aucune nouvelle de sa part... Cette absence et ce silence m'ont pesé sur la conscience et sur le coeur longtemps.. 4 ans et me voilà devant lui maintenant.. Je n'ai jamais retrouvé une relation aussi intense et simple à la fois que nous avions Harry et moi, j'avais souvent fantasmé notre petite famille, mais toujours avec amertume. Lorsque mon fils était petit, j'imaginais beaucoup qu'Harry reviendrait ou donnerait signe de vie, mais cette idée partait aussi vite qu'elle traversait mon esprit.

Aujourd'hui, la vie s'amuse de tout ça, comment me retrouvais-je en face de lui dans SA maison... Le monde n'était-il pas assez vaste pour que l'on se retrouve? A l'époque, j'aurais tout donné pour ce blondinet, absolument tout, je l'aurais suivi jusqu'en Antarctique s'il me l'avait demandé, j'étais complètement folle de lui. Avais-je été puni par le saint esprit pour me retrouver là, face à mon passé douloureux? Etais-je en train de faire un cauchemar? J'avais envie de claquer des doigts et disparaître et surtout oublier tout ça.
M'enfuir me semblait être la meilleure solution à mon sens, c'est la raison pour laquelle je m'étais dirigée vers la porte de sortie, j'étais loin de me douter que Harry se mettrait entre la porte et moi pour m'empêcher de fuir. Je soupire en levant les yeux au ciel. Puis lorsqu'il parle, ça me met deux fois plus en rogne. Je le regarde avec un sourire narquois aux lèvres.

Eviter quoi?? De te retrouver dans la même pièce que celle que tu disais aimer y'a quatre ans? Eviter de te retrouver en face de la fille que t'as abandonné sans crier gare? Désolée que tu doives subir tout ça Harry. Vraiment. Maintenant, laisses moi passer s'il te plaît. Je préfère partir que d'entendre des conneries pareil.

Le ton se voulait ironique, j'étais en colère et je sais que si je restais quelques minutes de plus dans cette maison qui puait le fric à plein nez j'allais dire des choses que je ne pensais pas vraiment.

Harry, je ne t'en veux pas d'être parti, je t'en veux de ne plus m'avoir donné de nouvelles, comme ça, du jour au lendemain c'est ça que tu comprends pas... Que tu t'en ailles comme ça, ce devait être pour une bonne raison tu n'avais sans doute pas le choix mais faire le mort, ça c'était par choix. Et je pensais compter assez à l'époque pour que tu fasses pas cela. Aujourd'hui, je n'en ai plus rien à faire, c'est du passé, et j'ai tourné la page depuis.

Ma dernière phrase était totalement fausse.. je pensais à lui très souvent, trop souvent. J'ai envie de m'en aller d'ici, je ne suis pas violente dans mes gestes, mais je sais être blessante dans mes propos. Je le regarde et je ris, sa phrase est ridicule comme si j'allais le taper pour une chose qu'il a faite y'a quatre ans.. Je ne suis pas une adolescente prébubére qu'on a largué comme ça du jour au lendemain, c'était bien pire que ça et j'avais assez de dignité pour ne rien laisser paraître.

De m'expliquer les raisons de ton départ précipité et ton silence, ça te soulagera la conscience tu dormiras mieux la nuit ?

Dis-je pour le blesser, car même s'il me disait ce qu'il n'avait pas pu me dire par téléphone ou sms à l'époque où il était parti précipitamment, ça ne changerait en rien le chagrin et tout ce mal être que j'ai vécu pendant tant de mois pour remonter la pente. Cela dit, j'étais assez curieuse de connaître les raisons malgré tout.

Je t'écoute, je te donne cinq minutes avant de franchir la porte derrière toi.

Je croise les bras comme pour me protéger de lui.