Assis sur un banc, cinq minutes avec toi…. Si une habitude avait rempli le quotidien de Thomas ces dernières années dans ce petit appartement qu’il galérait à payer, c’était d’empiler les vêtements un à un pour que la tour grandisse, grandisse et s'effondre telle la Tour de Pise qui ne tiendrait plus de travers. Mais c’était un peu ça Tommy, un bazar sans nom dans ce logement qu’il louait au centre d’Hambourg, un bazar dans sa vie entre son coup de foudre pour Ella et ses doutes sur Amber. Le bazar également dans son groupe de musique où le batteur avait décidé de les lâcher avant même que le concert commence, un heureux hasard de voir débarquer Victoria et de la savoir batteuse à ses heures perdues. Un concert qui avait été une franche réussite, mais depuis ce jour, rien, nada, pas de contact en particulier, aucun appel, aucun mail. Pourtant Tommy restait scotché à son téléphone, attendant chaque appel comme un espoir de pouvoir percer un jour. Si leur rencontre avec Dallas l’avait fait espérer, il se disait bien qu’il avait attendu pour rien.
Rendant cette journée interminable, il avait fini par aller faire ses énormes lessives à la laverie automatique, en profitant pour promener son chien Wolfgang qui était bien une chose qu’il gérait plutôt bien. Sa mère lui avait bien balancé un “Tu ne sais même pas t’occuper de toi-même alors pourquoi un chien ?” Et au final, le petit toutou était sans doute l’animal le plus heureux de l’univers avec le guitariste, certes il avait fallu un temps d’adaptation pour sortir de son appartement tous les jours. Thomas fait le tour du quartier, récupère son linge, rentre à l’appartement, donne à manger à son compagnon à quatre pattes, ranger des papiers, une journée plutôt bien organisée pour une personne aussi bordélique que le musicien. Puis son téléphone sonne. Un décrochage, une parole et le voilà en route vers un endroit tanqué au nord d’Hambourg, si son bus l’emmenait à l’endroit indiqué il ne vit aucun bâtiment avec le numéro qui lui avait décrit pendant l’appel.
Thomas resta près de son arrêt de bus, assis sur un banc. Le temps de retrouver le numéro qui l’avait contacté, quelqu’un s’était assis à côté de lui, et comme à son habitude, le jeune homme ne fit aucunement attention à lui, préférant bien sûr saisir cette opportunité qu’il ne raterait pour rien au monde.
Cela faisait un petit moment que Wolfgang était arrivé en Allemagne. Nouveau pays, nouvelle adaptation. Il avait retrouvé certaines connaissances professionnelles qui étaient l’une de ses motivations de sa présence ici, à côté d’autres. Celle de retrouver son neveu, notamment. Il était assez étonné que ce dernier n’ait pas été mis au courant de sa présence ici, puisqu’il lui en avait parlé. Il avait sans doute oublié. Il faut dire aussi que cet homme était particulièrement occupé et qu’il avait plusieurs choses à gérer.
Il n’avait pas encore recommencé le travail depuis qu’il était là. Même s’il avait côtoyé des gens dans le milieu professionnel et qu’il s’était même lié à une église pour donner quelques concerts à l’orgue lors de messes, il n’avait pas fait grand chose. Retrouver son neveu en avait été une. Il vivait depuis ce moment là chez lui, sur son canapé, en attendant de trouver son chez lui. Il s’était mis déjà à chercher des appartements. Des endroits pas trop grands, mais pas trop petits non plus. Juste assez pour avoir son petit confort. Il ne demandait pas énormément, les espaces trop grands l'effrayait pour lui seul et les espaces trop petits lui donnait la sensation d’être dans une cage à lapin.
Cela dit, il avait retrouvé une personne qu’il ne pensait jamais retrouver. Gracelyn, l’amour de sa vie. Comme quoi, peut être que quelque chose avait fait qu’il devait se trouver là, dans cette petite ville d’Europe bien loin de son écosse natale. Il avait peut être rencontré Grace à Paris mais elle était repartie à New York, à la base, et depuis, rien du tout. Et voilà qu’il la rencontre à nouveau. A une sorte de dating imposé par un ami à lui. Et à Grace. Décidément, le monde était petit.
Il allait rentrer pour rejoindre son neveu, chez lui, ou plutôt chez eux pour le moment. Il avait hésité à prendre un taxi pour rentrer, mais finalement, attendre avec le jeune homme sur le banc à l’arrêt de bus lui semblait plus amusant.Il n’avait aucune idée de qui ça pouvait être, mais il avait un bon feeling à son propos. Il semblait assez… stressé, perturbé. Enfin, du moins, selon sa première impression. Peut-être était-ce parce que tout le monde lui faisait cet effet en ce moment? En tout cas, il n’était pas seul, un chien l’accompagnait. Heureusement, c’était des chats dont il était allergique, les chiens, ça passait.
“La vie c'est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber.” finit-il par prononcer en regardant droit devant lui et en prenant son talent d’acteur inégalable qui faisait de lui un pro de l’improvisation tout en se mettant dans la peau du personnage qu'il voulait interpréter. Certes, ce n'était qu'une simple citation, mais il avait trouvé là une occasion parfaite pour pouvoir la sortir.
Un discours au téléphone après la rencontre avec ce chercheur de tête, Dallas, Tommy avait tant été mené en bâteau avant cette rencontre qu’il avait difficilement cru ce recruteur lors de leur rencontre. Le guitariste avait un groupe de musique et un très bon en plus ! Lui et son meilleur ami n'avaient commencé qu’à deux, puis la venue de Krim quelques mois après, au détour d’une soirée trop arrosée, et tous les trois avaient continué leur bout de chemin ensemble. Il ne leur manquait plus qu’un batteur. A chaque fois qu’ils faisaient un show, ce n’était jamais le même batteur. Son travail à la boutique faisait qu’il rencontrait du monde, son oncle connaissait du monde et Thomas était quelqu’un qui avait un sacré réseau depuis le temps.
Il aura fallu un gros incident un soir pour que la batteuse actuelle se pointe, en la personne de Victoria dont le passif avec le guitariste était plus que douteux. Qu’importe la personne, ils étaient là, ils étaient prêts, et ce rendez-vous allait sûrement changer quelque chose dans son histoire, mais voilà que Thomas se retrouvait à attendre à l’arrêt de bus car il n’arrivait pas à trouver le bon bâtiment. Le guitariste s’était assis, en essayant de contacter l’agence, mais personne ne décrochait. Il ne pouvait plus avancer.
Un homme vint s’asseoir à côté de lui sur ce banc dans cette rue déserte. Il sort une réplique de Forrest Gump en plein milieu de ce silence d’attente. Thomas releva la tête, l’homme arborait son meilleur attirail d’improvisateur théâtral. Le jeune homme cligne des yeux en le fixant, puis finit par éclater de rire.
- Je vous demande pardon ? Mine de rien, cette réplique l’avait détendu un peu, il allait sûrement arriver en retard à ce rendez-vous, mais au moins il y arriverait plus que détendu. “- Pourquoi vous dîtes ça ?” Peut-être que Thomas avait fait une sacré tête de désespéré et laissant penser qu’il était juste bien paumé dans sa vie. Difficile de changer de son humeur habituelle.
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