TIME TO CATCH UP ▸ LISA

Pour être tout à fait honnête, depuis quelques mois, Arthur a mis sa vie entre parenthèses. Il continue à travailler, à répéter, à donner des cours et des concerts, à courir, à faire toutes sortes d’autres sports. Il continue à bien manger et à s’entretenir. En revanche, sa vie sociale s’est nettement ralentie – et l’idée l’angoisse un peu. L’idée de reprendre une vie sociale, de retourner voir ses amis… Lisa, par exemple. Pourtant, ça fait une éternité qu’ils ne se sont pas vus, et la jeune femme lui manque – comme sa bonne humeur et sa conversation. Arthur a cru comprendre que son père était de retour en ville, en plus – et l’idée lui déclenche une impression assez désagréable de déjà vu quelque part. Il a décidé de la rejoindre, ce soir, pour discuter un peu et rattraper le temps perdu – ou plutôt, se mettre à jour sur ce qu’il se passe dans sa vie depuis la dernière fois qu’ils se sont vus.

Mais Arthur a l’impression que son aventure avec son demi-frère est inscrite sur son front – et c’est une impression très désagréable. Comme si tout le monde s’apprêtait soudainement à découvrir qu’il se tapait un homme qui porte le même nom de famille que lui sous prétexte qu’il se remet à voir ses amis. Il a surtout peur, pour nuancer, que ses amis ne se rendent compte que quelque chose a changé, que quelque chose cloche. Parce que oui, Arthur le sait – coucher avec Laz, c’est mal. Penser à Laz tout le temps, c’est mal. L’attendre le soir quand il ne vient pas, c’est mal. Mais il ne peut pas s’en empêcher.

Il a acheté une bouteille de vin et des chocolats, comme convenu, et sonne à la porte de la maison de Lisa à 20h tapantes. Il a abandonné son chien dans la chaleur de l'appartement, peu désireux de le faire subir à Lisa ou à sa mère - la soirée est plutôt aux retrouvailles. Quand son amie apparaît dans l'encadrement de la porte, il lui offre un sourire bienveillant. « Hello, toi », il lance en s'approchant pour une courte étreinte, à la suite de laquelle il claque deux bises sur ses joues. « J'ai l'impression que ça fait une éternité », il lance, légèrement grimaçant. « Désolé, je n'ai pas été très présent ces derniers temps. »

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Lisa était pressée, pressée de pouvoir voir son ami Arthur, l'homme le plus important de sa vie, peut-être bien avant Benett ou à égalité. Encore que. Non. Au-dessus. Si Benett lui brisait le cœur, Arthur serait encore là pour lui ramasser le cœur à la petite cuillère. Arthur serait toujours là, dans la vie de Lisa. Comme Lisa serait toujours là pour lui. Et elle n'avait pas besoin qu'ils se voient tout les jours pour en être certaine. Cependant ces derniers temps, voir la tête de son pianiste favoris se faisait rare et quoique les textos allaient toujours bon train, à un rythme quotidien, ne pas le voir commençait à peser lourd sur le cœur de la jeune femme. Et sa fin de journée lui avait donné toutes les raisons du monde d'avoir besoin de le voir.

Elle savait qu'il serait à l'heure. Quand à 20:00 tapante on sonna à la porte, Lisa savait que c'était lui qui venait et laissant Ruth à la cuisine sur un «j'y vais», Lisa fut prompte à ouvrir la porte, arborant son plus beau sourire pour saluer Arthur. Arthur était comme le chevalier servent qui débarquait toujours quand elle en avait besoin. Et Lisa était intimement convaincue que s'il avait eut d'autres projets pour ce soir, en apprenant que son amie allait mal, ou s'il le supposait du fait qu'elle ait révélé avoir croisé son père, l'homme aurait tout annulé pour elle. Exactement comme elle le ferait s'il l'appelait avec un besoin urgent de la voir, de se faire remonter le moral.

«- Mais ça fait une éternité !» se plaît Lisa en se séparant de lui après leur étreinte avant de lui tirer la langue. «Et je t'interdis de me refaire un coup pareil, sinon... sinon je débarquerai chez toi moi même avec des biscuits, bonbons, soda et un DVD pour t'imposer un tête à tête follement romantique !» lance-t-elle amusée, pour le charrier. «Toi, moi, un plaid, un film et de la bouffe. Que demande le peuple ?» interroge la demoiselle avec un petit jeu de sourcils

Des bonbons, un tas de cochonneries, alors que tout deux entretenaient leur corps. Evidemment. L'idée du siècle. Mais le meilleur cheatmeal du monde, en même temps. Et ce n'était pas une soirée d'abus qui viendrait déglinguer tout leur travail.

«- Oh t'inquiète pas, certains s'absente dix-sept ans et reviennent comme des fleurs, en te sortant un «Lisa, j'ai été un mauvais père je sais.» Sérieusement ? On avait pas remarqué la qualité du père en question ! Enfin, entre, reste pas dehors ! Je prend ta veste, installe toi au salon. Maman !? Arthur est là !»

Comme si Ruth n'avait pas déjà compris, en entendant sa fille faire sa pipelette.

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Il faut qu’il se chasse les idées de la tête, Arthur. Qu’il arrête de penser en boucle à toutes ces choses qui composent désormais son quotidien un peu bancal. Il ne sait pas ce qu’il va advenir de lui, de Laz, de sa famille, et du reste – la seule chose qu’il sait, c’est qu’il n’a pas trop envie d’y penser. Alors, une soirée loin de ses pensées lui semble être une idée assez bien trouvée, et c’est donc le cœur un peu plus léger qu’il se présente sur le pas de la porte de Lisa. Dire qu’ils se connaissent depuis toujours serait à peine exagéré ; d’aussi loin qu’il se souvienne, elle a toujours fait partie de son entourage direct, principalement parce qu’ils avaient pour habitude d’être voisins, tous les deux. Ils se sont rapidement bien entendus, surement du fait que leurs parents étaient proches, eux-mêmes. Le suicide de la mère d’Arthur – un tabou sans fin qu’il n’aborde jamais – a changé, pour sûr, les relations entre les parents de Lisa et son père, Kurt, mais jamais la relation entre lui et son amie. Il n’en n’a pas plus parlé avec elle ; Arthur ne supporte pas d’aborder le sujet, comme une ancienne blessure pas vraiment cicatrisée mais qui continue de faire mal, un mal de chien. La première fois que Kurt est réapparu avec une nouvelle compagne, Arthur a réellement eu l’impression qu’il ne lui pardonnerait jamais – et puis finalement, il avait bien été obligé de s’y faire. Progressivement, la douleur était devenue moins aigue, plus linéaire. Aujourd’hui, il se plait volontiers à prétendre qu’il n’en souffre plus – il n’empêche qu’il fréquente le cimetière les jours d’anniversaire. Il ne sait pas pourquoi soudainement, il pense à sa mère. Peut-être parce qu’il est devant cette porte familière, devant ce visage familier. Peut-être parce que les rapports de Lisa avec son père le ramènent à cette réalité, là.

« Ca c’est une menace qui me fait vachement peur, Liz », il lance, un peu amusé, en levant les yeux au ciel tendrement. « C’est vrai que ça me mettrait vraiment dans tous mes états de te voir débarquer sur le pas de ma porte avec un DVD et de la bouffe, tiens ». Il croise les bras, l’air taquin, et hausse une épaule en se laissant entrainer à l’intérieur de la maison sans demander son reste. Il retire sa veste et la lui remet, en ayant au préalable déposé ses chocolats et son vin sur une petite console dans l’entrée. « Bonsoir Ruth ! » il crie, pour saluer la mère de Lisa, une femme remarquable pour laquelle il a beaucoup d’affection, en somme. « Va vraiment falloir que tu me racontes tout ça, j’avoue qu’en lisant ton SMS, j’avais un peu de mal à y croire. Il s’est vraiment pointé comme une fleur ? » il demande en penchant un peu la tête. « Et attends, il veut quoi ? Que vous ayez une relation, maintenant ? Après toutes ces années ? Faire amende honorable d’un coup ? » Beaucoup de questions, en somme, mais Arthur est d’une nature curieuse, et sa loyauté envers les gens qu’il aime le pousse à s’intéresser de manière démesurée à leurs vies. Surtout quand, en plus, ça lui permet d’éluder la sienne.

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«- Ce qui veut aussi dire que je suis susceptible de me pointer sur le pas de ta porte quand tu es en plus ou moins galante compagnie et j'aimerais autant éviter... J'ai vu assez d'horreur pendant la guerre !» fait-elle remarquer avec une petite moue boudeuse, taquinant ainsi son ami.

Et ça, la demoiselle se demande si l'homme l'a envisagé, avant de se moquer de sa menace. Il n'empêche que pendant un câlin, on a pas vraiment envie d'être coupée par des coups donnés à la porte ou pas un bruit de sonnette, voire par la voix d'une personne qui nous est très proche, demandant si on est là. Lisa n'a jamais subit une telle situation mais elle ose espérer que ça ne lui arrivera jamais. Hors, avec Benett, ce n'est pas comme s'ils limitaient vraiment les risques, à force de se donner l'un à l'autre dans les lieux où justement, on risquait de les pincer, tels que les cabines d'essayages ou encore les vestiaires de la patinoire ou encore le bureau de l'avocat. Certes, le reste du personnel était toujours parti quand ça arrivait, mais sait-on jamais.

«- Et j'pense que Ben apprécierait pas. Il a manqué étrangler Alexander parce que... Mon entraîneur me regardait.»

Ben. Lisa a toujours raccourcit le nom de son partenaire, assez étrangement. Comme une putain de malédiction. Si elle avait dit Benett Rosenthal, il y a trois ans, peut-être que Rosenthal aurait éveillé quelque chose dans l'esprit d'Arthur, qu'il se serait souvenu de Gabi, qui est très proche de son demi-frère. Peut-être que le nom de Rosenthal l'aurait interpellé. Peut-être qu'il aurait put sauver Lisa de Benett, la sauver d'elle-même et de cupidon dans un même temps. Mais non. Cela aurait été trop simple.

«- Bah j'étais partie acheter des fleurs pour maman et il se pointe justement chez le fleuriste ! Il ne m'a même pas cherché, on s'est croisé comme ça, par hasard. Il était à la guerre  ce qu'il paraît et je sais pas ce qu'il veut, il n'est pas revenu pour moi mais parce qu'il avait besoin de soins. Ouai, ça fait toujours plaisir. Comme quoi j'suis vraiment qu'un espèce d'ovule qu'il a malheureusement fécondé, pour lui quoi ! Et toi tu raconte quoi de neuf !?»

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Sur ce sujet, Lisa marque un point. Ca ne le dérangerait pas qu’elle débarque à l’improviste pour le voir, encore moins avec de l’alcool ou de la bouffe, mais force est de constater que ça le mettrait dans une position délicate s’il était effectivement accompagné. Et sa remarque, d’ailleurs, lui glace le sang, pas seulement sur le fait qu’il soit accompagné, mais sur le fait qu’elle pourrait le trouver en sa présence à lui, maintenant qu’il lui a définitivement cédé le bénéfice de ses clés. Laz. Dans son salon, à moitié nu, comme l’autre soir. A son humble avis, la découverte jetterait un froid – et même si Lisa est sa très proche alliée, Arthur n’est pas sûr qu’elle puisse le soutenir dans un cadre pareil. Elle risquerait, comme toute personne normalement constituée, de trouver cela très malsain, immoral, honteux. Il ferme les yeux quelques instants pour reprendre contenance et finit par joindre son rire au sien. « Je ne me tape pas des horreurs, Lize, mais merci pour sa sollicitude ». Il se marre en même temps qu’il entre et hausse une épaule pour évacuer la conversation – et la piqure de stress, légère, certes, mais piqûre quand même – qu’elle vient d’injecter dans son organisme.

Quand Lisa parle de Ben, Arthur ne peut retenir une grimace. Pas qu’il n’apprécie pas le type, ni même son idylle avec Lisa, non. Simplement, il trouve que cette jalousie est un peu abusive. « Allez, quoi ? On se connait depuis le bac à sable, Bennett croit pas sérieusement que si on avait dû finir dans le même lit, on s’y serait mis avant ? » Arthur hausse un sourcil curieux et hausse une épaule. Il n’a jamais envisagé Lisa comme ça, comme une fille qu’il coucherait dans son lit. Et de toute façon, le blond n’a jamais réellement été doué avec les relations sérieuses ou suivies, ce qui a eu pour conséquence de faire de lui une personne qui préserve ses amitiés. Il préfère largement conserver celle de Lisa plutôt que de la mettre en péril pour des questions de… sexe. « Il n’a aucune raison d’être suspicieux sur nos éventuelles soirées bouffe-vodka, si tu veux mon avis. »

« C’est quand même pas croyable, attends… Il a disparu toutes ces années pour faire la guerre et il revient comme une fleur en te disant qu’il veut te voir alors qu’il t’est tombé dessus par hasard ? » Arthur grimace – ces histoires de famille sont vraiment très étranges. Il joint ses deux mains, penche un peu la tête. « Mais alors, tu vas faire quoi ? Le voir pour rattraper le bon vieux temps ? » il demande en se posant dans le canapé comme s’il était chez lui – ce qui est un peu le cas, mine de rien. « Moi écoute, rien de particulier. Same old life, les cours de piano, les répétitions de piano, les compositions de piano… et les concerts, parfois. Une vie normale, quoi ». Ah oui, et, je m'envoie en l'air avec mon demi-frère. Parfois.

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La jeune femme éclate de rire comme l'homme dit ne pas se taper d'horreurs, pour se défendre. Oh certes la demoiselle pense bien que l'homme ne se tape pas des moches, ce n'est pas ce qu'elle veut dire. Mais elle n'a pas vraiment envie de tomber sur Arthur dans le plus simple appareil, en compagnie de qui que ce soit. Voir Arthur dénudé n'avait rien d'un problème. Lisa n'avait pas de gène à se changer devant lui, parce qu'il n'y avait aucune ambiguïté dans leur relation. Elle avait seulement à se détourner pour ne lui offrir qu'une vue sur son dos, ce qu'elle était incapable de faire avec un autre, Benett exclu évidemment. Et ils avaient déjà dormis ensemble après avoir regardé un film et qu'il était trop tard pour qu'elle rentre chez elle, craignant les rues aux alentours de minuits. De fait il était déjà arrivé qu'elle dorme avec lui, à demi couverte seulement et réciproquement. Ou qu'elle le voit sortir de la douche en portant uniquement son caleçon quand il revenait d'habiller dans la chambre. Non, le problème, ce n'était pas Arthur à moitié nu. C'était Arthur nu en compagnie de quelqu'un d'autre. Ce serait vraiment gênant.

«- Mais pas eux banane, la situation ! T'es bien foutu, j'suis sûre que tes partenaires aussi mais... il n'en reste pas moins que je n'ai aucune envie d'te trouver à jouer au docteur.» elle rit.  

Et elle était certaine que Benett n'aimerait absolument pas apprendre qu'elle s'était retrouvé dans cette situation, même si Arthur avait raison. S'ils avaient eut à fréquenter le même lit, ça serait arrivé avant. Genre vers 15 ans pour elle, l'âge où la sexualité pose pas mal de questions dans l'esprit des ados et que Lisa ne trouvait personne, de peur de tomber sur quelqu'un avec qui ça ne compterait pas.

«- En fait je rectifie, on se connaît depuis l'époque où tu m'enterrais dans le bac à sable ! Et que seule ma tête dépassait et que tu riais !» fait-elle remarquer amusée. «Oh ça je sais bien. Cela dit il n'a aucune raison d'être suspicieux à propos d'Alexander, comme je lui ai dis,  c'est pas parce qu'on me regarde potentiellement et je dis bien, potentiellement, que je regarde aussi. Puis regarder c'est pas toucher.» fait-elle remarquer en riant.

Mais s'ils sont là c'est pour une raison précise, une raison qui rattrape la demoiselle, alors que sa maman amène sur la table basse un tas de choses à grignoter, ayant décidé qu'elle ferait un apéritif dînatoire pour  ce soir. Lisa chipe une knacki fumante en écoutant Arthur.

«- Bah en soit j'suis même pas sûre qu'il veuille passer du temps avec moi ou qu'il en ai quelque chose à faire. Il m'semble  paumé, un truc de fou !» soupire la jeune femme. «C'était tellement... bizarre. J'avais un tas de trucs à dire mais j'en ai pas dis la moitié et je m'en veux !» elle soupire de nouveaux. «Faudra que tu me fasse écouter tout ça prochainement ! Et tu sais que je finirais par te traîner dans une patinoire, afin que tu joue pour moi !» lance-t-elle avec un sourire. «Le plus dur étant d'y mener un piano, à la patinoire !»

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A bien y réfléchir, ce n’est sans doute effectivement pas une bonne idée que Lisa se pointe à l’improviste. Pour la plupart de ses conquêtes, Arthur n’en n’aurait pas grand-chose à faire, en réalité, qu’elle interrompe quoi que ce soit, qu’elle le trouve dans un jean enfilé à la hâte sur le pas de sa propre porte, à s’interroger sur une intrusion, ni même qu’elle découvre le corps nu d’une femme – ou d’un homme, pourquoi pas – dans son lit. Seulement en ce moment, c’est Lazlo qu’il invite un peu trop régulièrement dans son lit, et en admettant même que Lisa soit un jour au courant de ce qu’il se passe – ce qui n’est déjà pas gagné – il n’a aucune envie qu’elle ne l’apprenne comme ça, par surprise, brutalement. Il n’a aucune envie qu’elle ne l’apprenne tout court, du reste – mais à envisager la possibilité qu’un jour elle le sache, il préfèrerait largement lui annoncer lui-même. Histoire de lire la déception et le dégoût directement dans ses yeux. « D’accord, d’accord, t’as raison. Mais tu sais quand même que mon appartement n’est pas un baisodrome géant et que je ne passe pas toutes mes soirées ou mes nuits à m’envoyer en l’air avec des inconnus, hein ? » il précise en riant un peu, à nouveau. Comme elle. Ils rient ensemble.

« Attends, tu m’accuses de t’avoir enterré dans le sable, qu’on soit clairs ? Je réfute cette accusation, je n’ai jamais fait une chose pareille », il proteste, sans se départir de son sourire. Oh, il est fort probable qu’il ait déjà fait ça, sous le regard attendri de sa propre mère, d’ailleurs. Quand il repense à elle, il se sent immédiatement nostalgique. Sans qu’il ne sache pourquoi, il ne l’a jamais blâmée, elle, directement, d’avoir préféré mourir plutôt que de s’occuper de lui. Il en a plutôt voulu à son père de n’avoir pu éviter ça.

La jalousie possessive de Bennett fait sourciller Arthur. S’il était complètement objectif – et s’il s’écoutait, un peu – il admettrait sans doute aucun qu’il est parfois jaloux, lui aussi, surtout quand ses sentiments entrent en ligne de compte. Il est facilement jaloux d’un regard appuyé sur un autre, d’une main effleurée. Mais Lisa, sa meilleure amie, qui est pour lui comme une sœur – et c’est assez ironique d’ailleurs – ne devrait pas avoir à subir la pression jalouse d’un homme. Surtout qu’Arthur connait les sentiments de la brune pour Bennett et qu’il serait idiot de croire qu’elle serait capable de se réfugier dans les bras d’un autre sur un coup de tête.

Retour sur ce père, miraculeusement réapparu. Il ne sait pas trop comment il aurait réagi, à sa place, Arthur. Mal, sans doute. En l’envoyant bouler. « T’as pas prévu de le revoir pour vider la moitié restante de ton sac ? » il demande en penchant un peu la tête, piquant dans la nourriture devant eux. « Histoire de pas avoir de regret. Et ensuite, seulement, peut-être, d’envisager d’attendre quelque chose de lui. C’est con mais, il est toujours vivant, au moins. Y’a peut-être quelque chose à en tirer, du coup ? » Il soupire, s’enfonce un peu plus dans le canapé sans lâcher la brune des yeux. « Bien sûr que je te ferai écouter. Et c’est toi, la grande professionnelle des patinoires, à toi de me dire quand je dois venir jouer pour toi ! » il lance en riant à nouveau. « Moi, je n’ai rien contre. »

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Lisa a un petit rire comme Arthur lui demande si elle est au courant que son appartement n'est pas un baisodrome géant. A vrai dire, elle se doute bien que son frère n'est pas du genre à collectionner les relations non plus et que sa piaule n'est pas une garçonnière. Mais il n'empêche qu'elle peut tout de même débarquer à l'improviste à un moment inopportun et ils n'ont certainement pas envie de cela, ni elle ni lui. Pas que la sexualité d'Arthur la dérange mais la demoiselle n'a pas particulièrement envie de le trouver en pleine action. Probablement que la réciproque est vraie et Arthur n'a pas l'intention de la trouver sur le bureau de Benett, ni même contre un mur. En soit c'est assez normal.

«- Ouaip j'me doute mais j'tiens pas à voir ça quand-même on sait jamais ce qui peut se passer. Puis bon, tu voudrais pas m'trouver avec Benett toi non plus j'imagine donc... » fait remarquer la demoiselle. «Garde de moi l'image d'une innocente jeune fille, c'est mieux. Et je continuerais à penser que tu cueille des pâquerettes avec tes partenaires, j'aime autant !» le taquine la demoiselle.

Comme ils parlent de Benett qui n'apprécierait pas que Lisa puisse voir Arthur dans le plus simple appareil – il ne supporte déjà pas les regards de son entraîneur sur elle n'oublions pas – Arthur proteste en évoquant la période du bac à sable, que Lisa n'a certainement pas oubliée et alors que son ami réfute les accusations qu'elle porte contre lui, la demoiselle prend un air outré.

«- Goujat !» évidemment que tu l'as fais ! Et même plusieurs fois ! Et ça te faisait rire parce que j'avais « les joues aussi rouges que les cheveux !» répond la demoiselle. «D'ailleurs quand nous irons à la plage cet été je prendrais ma revanche ! Et je ferais un Arthur des sables ce sera charmant !» annonce Lisa.  

Si Lisa a prévu de revoir son père ? Elle ne sait pas. La discussion, le fait de le revoir après toutes ces années... cela avait été étrange. Elle baisse la tête en ignorant son téléphone, alors que Benett lui envoie un message justement.

«- Je pense que je le reverrais. C'était perturbant de le recroiser mais... toutes ces années... il m'a manqué. Et j'me dis que... je sais pas, c'est idiot, il ne m'a pas cherché, il n'a peut-être pas envie de me revoir, de me retrouver... Mais... j'me dis que tout ce temps passé à l'attendre, c'est peut-être une seconde chance que la vie me donne et ce serait idiot de cracher dessus... Il m'a dis qu'il avait suivit mon parcourt tout ce temps, qu'il savait ce que je faisais, tout ça... qu'il... ne pouvait pas oublier sa princesse. J'ai réagit un peu vivement. Beaucoup. Mais... ça reste mon père. Et.. j'l'ai attendu dix-sept ans. Mais je n'ai probablement pas finit de régler mes comptes avec lui.»

Lisa se fend d'un sourire, comme elle rappelle à son meilleur ami qu'il doit jouer pour elle à la patinoire, il ne semble pas contre et attend seulement après elle.

«- Bah... si tu sais jouer le Moonlight Sonata et je n'en doute pas, pour Fribourg dans deux mois et qu'on m'autorise à avoir un pianiste – qu'ils puissent y mettre un piano, dans leur patinoire... c'est envisageable !» dit-elle encore persuadée qu'elle fera ce concours bien sûr.

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