FT. Gabi& Em'
Cette soirée tu ne l'oublieras pas de si tôt. Pourquoi ? Parce que tu t'es laissé aller, te faisant emporter par la drogue et l'alcool qui coulait à flot. Si la seule chose à retenir serait le moment où tu as cédé ta place dans le bus lorsque vous avez quitté l'appartement pour aller en boîte, toi tu gardes d'autres souvenirs, des flash-backs bien moins glorieux.
C’est une successions d'événements plus ou moins voulus... Par exemple tu as accepté de boire trois shooters sans les mains juste pour ne pas les payer, défié par un type que tu ne connais pas. Tu savais à ce moment là que tu avais déjà bien consommé mais tu as quand même pris la peine de le faire, comme si tu avais besoin de descendre encore plus loin dans les enfers. Et le pire c'est que tu es même reparti avec un cocktail à base de vodka, enfin si tes souvenirs sont bons, offert par une belle inconnue impressionnée par ton courage. Tu as abandonné le petit parasol sur une table en chemin et le glaçon en trop tu l'as glissé dans le haut d'un de tes potes en revenant vers eux. Tu ne peux pas oublier le cri qu'il a poussé avant de se vautrer entre la banquette et la table, les mains dans son dos pour essayer de retirer l’objet de torture. Forcément vous avez tous éclatés de rire en voyant le résultat donc tu n'éprouves pas le moindre regret.
Armé d’une bière après avoir terminé ton cocktail, tu te laisses entraîner dans les discussions. Tu ne peux t’empêcher d’ajouter ton petit grain de sel à une histoire qui n’arrête pas de tourner depuis l’été dernier. «
Non mais il avait un... Koala énorme ! » Tes potes te regardent, tu les regardes. Il te faut un moment pour comprendre que tu n'as pas utilisé le bon mot dans ta phrase. Alors les sourcils froncés tu essayes de raccorder les pièces du puzzle pour tout remettre dans son contexte. Et là ça te percute. «
Ah non mais la meuf vient de passer avec un t-shirt où une tête de koala énorme était imprimée dessus. » L'image t'a tellement marqué que tu as fini par perdre le fil de tes paroles, ne pensant même plus à ce que tu voulais dire à la base sur ton pote et la rencontre étrange qu’il a faite lors de vos vacances. «
Elle est là bas ! » Tu la pointes du doigts et tous tes potes suivent le mouvement. La fille a l'air mal à l'aise en voyant tout le monde la fixer mais tu ne peux t'empêcher de penser qu'elle l'a cherché. Elle n'aurait jamais dû mettre un tel t-shirt si elle voulait pas attirer les regards.
La suite tu l'as oubliée. Tu te souviens juste que tu as osé donner ton numéro à un mec au bar. Sa gueule tu l'as oubliée aussi, tu n'as pas vraiment eu le temps de la graver dans ta mémoire que sa meuf est venue te saouler. Bourré tu l'as provoqué, juste pour l'embêter car son pseudo copain ne t'intéressais même pas en vrai. Tu avais juste envie de draguer, de t'amuser, de te sentir désirer. Le reste tu t'en fichais, ce n'était qu'un jeu à tes yeux. Alors quand tu as senti que le ton montait trop et que tu ne pouvais pas suivre, tu as fui. Oui tu as été lâche. Mais c'était mieux que de te faire virer pour avoir créé du grabuge, autant laisser les deux tourtereaux gérer leur dispute. Alors tu es reparti vers ton groupe à qui tu as fait croire que tu avais gagné au loto, leur disant de prendre la bouteille la plus chère que tu pouvais payer. L'erreur qu'ils n'ont pas fait en te croyant ! Ils ont commandé et toi, tu t'es tiré, prétextant une envie pressante. Tu ne sais pas pourquoi tu as fait ça, ou du moins tu préfères faire comme si tu ne savais pas, tu ne veux pas penser à Gabi qui a déjà payé des tournées en sortant sa carte de crédit. Enfin une seule amie n'a pas été dupe, Magda. Elle t'a suivie, te demandant de récupérer son sac pour elle. Soit disant que tu lui devais bien ça pour avoir osé essayer de lui faire payer une bouteille hors de prix ! Mais elle aussi a sous estimé ton état car tu t'es ramené avec le mauvais sac. OK le look était le même mais l'intérieur c'était pas ça. Elle a du y retourner te maudissant au passage. Pour tout réponse tu lui as donné une claque sur les fesses en lui disant que tu allais l'attendre dehors.
Clope au bec, tu fouilles ta galerie sur ton téléphone. Tu ne peux t'empêcher de chanter en même temps, t'es de bonne humeur grâce au chaos que tu as semé, tu as l’impression de vivre. Dans ta tête tu es persuadé d'avoir chanté Radioactive d'Imagine Dragons mais en réalité ta mémoire te semble assez floue à cet instant. Tout comme tu es persuadé d'avoir envoyé une photo de toi assez sexy à un de tes plans cul, dans l’espoir de le retrouver tout à l’heure, alors que tu l'as envoyée à Oliver dont tu as gardé le numéro pour une raison qui t'échappe. Tu n'as pas remarqué l'erreur, pas sur l'instant car ton attention est détourné par Magda qui te rejoint. «
T'as appelé un taxi ? » Non, bien évidemment que tu ne l'as pas fait car tu étais trop occupé à faire n'importe quoi, mais tu gardes ça pour toi et tu commandes un Uber depuis ton portable. «
Me regarde pas comme ça. » Tu vois bien le regard de ton amie, elle te maudit une nouvelle fois de ne pas avoir réagi plus tôt pour le taxi, et ça te fait chier alors tu la gratifies d'un doigt d'honneur qu'elle te retourne avant de prendre place à tes côtés sur le banc.
Alors ouais vous êtes là comme deux pauv' cons à attendre votre Uber. Mais le pire c'est que vous êtes en train de jouer à ce jeu pour gosse, celui où vous vous tenez par le menton et le premier qui rit aura droit à une baffe. Vous avez l'air aussi sérieux que vous le pouvez malgré votre taux d'alcoolémie plus que critique. Tu te souviens parfaitement que la chanson Le Gang de BB brune était en train de passer lorsque tu as reçu une tarte. Tu as même pas eu le temps de dire "je te tiens par la barbichette" que Magda t'as frappé. Là tu t'es dit que ça n'allait pas le faire alors vous avez abandonné le jeu. Si elle veut te taper qu'elle le dise directement ce sera moins contraignant pour toi.
«
Tu es sûr que tu as bien commandé un Uber ? » Qu'elle te demande. Pour toute réponse tu soupires et récupères ton portable dans ta poche. Manque de chance tu l'échappes, le faisant tomber entre les planches du banc. Tu grimaces. Magda grimace. Le bruit que ton téléphone a fait en atterrissant au sol ne te dit rien qui aille. Il a eu plusieurs chocs durant sa chute alors tu pries pour qu'il soit indemne lorsque tu t’aplatis sur le banc pour l'attraper. Mais le fait que la musique ne marche plus est un bon indicateur, il est foutu. Forcément vu qu'il ne fonctionne pas tu rames à le retrouver sous l'ombre du banc. Magda peut rien faire, elle est plus défoncée que toi et son portable n'a plus de batterie. «
Et fuck ! » Tu pousses un juron lorsque tu as enfin ton téléphone entre les doigts et que tu vois l'écran complètement fissuré, sans parler que tu maltraites le bouton d'allumage sans que ça change quoi que ce soit à la situation. Tu te retiens de le jeter à l’autre bout de la rue, te disant que tu pourras toujours récupérer quelques données mais ça te fait vraiment chier.
Foutus pour foutus, vous avez décidé de rentrer à pieds. Au moins ça pourra vous aider à décuver un peu grâce à l'air frais. Bien sûr c'est dans un moment pareil que tu regrettes de n'avoir pris qu'un pauvre sweat pour te couvrir. Il ne fait pas un froid glacial mais c'est pas non plus l'été où vous pouvez sortir à toute heure de la journée en t-shirt. Magda est dans le même cas que toi. Vous faites vraiment la paire. «
Quand j'avais sept ans, j'ai dormi chez un pote, enfin chez sa grand-mère à la campagne. Le couloir menant aux toilettes me faisait tellement flipper que j'ai pas eu le courage de le traverser. Donc forcément je me suis rendormi la vessie pleine et au petit matin ben j'avais pas tenu. » Tu tires sur ta nouvelle cigarette, te demandant pourquoi tu as accepté de révéler un truc embarrassant de ton enfance à ton amie. «
J'ai plus jamais voulu y retourner. » Enfin vu votre état vous aurez oublié ces histoires au petit matin. Et puis Magda tu l’apprécies, donc si elle te confie quelque chose sur elle tu te sens obligé de faire de même. De toute façon, vous avez déjà utilisé tous les autres sujets de conversation alors faut bien que vous en trouviez de nouveaux.
Sur votre chemin, vous croisez un groupe de jeunes qui taguent un mur. Tu ne peux t'empêcher de t'arrêter pour les regarder faire, même si Magda essaye de te tirer pour avancer. Tu trouves qu'ils sont doués. En plus contrairement à toi ils ont les couilles de le faire. «
Hey je peux marquer un truc ? » Tu es surpris par ta propre voix. Les gars se retournent vers vous et tu sens que Magda force un peu plus sur ton bras pour t'entraîner. Mais au lieu de vous menacer ou de vous insulter, un du groupe te tend une bombe, visiblement curieux de voir ce que tu as en tête. Honnêtement toi aussi tu aimerais bien savoir ce qui t'as pris et ce que tu veux écrire mais tu cherches pas plus et attrapes la bombe. Devant le mur tu hésites une seconde avant de tracer un message simple, tu n'as pas la fibre artistique. «
Souriez vous êtes vivant. » Un des gars a lu à haute voix ton inscription et tu ne peux t'empêcher d'être fier du résultat, surtout avec les dessins autour. Même si c'est hypocrite d'écrire ça alors que tu n'es pas foutu de l'appliquer toi même.
Tu passes ton temps à te flinguer la santé en buvant et consommant de la drogue. Ton entourage s'inquiète. Enfin une minuscule partie s'intéresse à ton sort. Une autre semble complètement indifférente et ça te fend le cœur car forcément tu penses à quelqu'un en particulier. Son visage et son prénom te sont revenus en tête toute la soirée. Cette personne te manque et ça te fait chier. Vraiment chier d’en être arrivé là car même si tu aimes ceux qui sont encore à tes côtés, tu ressens toujours ce vide laissé par cette personne. «
Magda, je... Allons y. » Tu ne dis rien de plus, tirant ton amie à ta suite. Votre discussion est sommaire jusqu'à l'appartement de celle-ci. Tu aurais presque voulu l'abandonner avec les tagueurs pour faire ce que tu avais en tête mais tu n'as pas eu la force de la laisser en pleine rue seule alors que le quartier est loin d'être le plus safe à cette heure-ci. Mais maintenant qu'elle est chez elle, tu délaisses tes inquiétudes et fonces là où tu veux aller. Tu n'as aucune idée du temps que tu mets à courir à travers les rues de la ville avant d'arriver à bon port mais une chose est sûre tu es à bout de souffle devant la maison de ta meilleur amie. Gabi. Tu pensais pouvoir l'oublier, vu qu'elle a préféré ton connard de meilleur ami à toi, mais c'est impossible. Ton cœur se serre dès que quelqu'un évoque son nom. Et puis combien de fois as-tu cherché à l'appeler quand tu avais envie de parler à quelqu'un ? Bien trop souvent pour que ce soit envisageable de la rayer de ta vie. «
Gabi ! » Tu hurles au milieu de la rue alors que tout le quartier semble endormi. Tu t'en fiches, tu veux qu'une seule chose, que ta meilleure amie revienne dans ta vie. Alors tu hurles son prénom une fois, deux fois, trois fois. «
Bordel ! J'ai besoin de toi ! Tu es ma meilleure amie alors je ne peux pas vivre sans toi ! »
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