Surpriiiiiiise [Morel - Fisher and Co]

14 novembre 2021. Un jour somme toute banal. Et pourtant, pour ma bien aimée, c'est un jour particulier. Celui où une petite bouille d'amour est entrée dans sa vie, a fracassé son quotidien, a rempli son cœur d'une nouvelle part d'amour : celui de la naissance d'une sœur et l'arrivée d'un nouvel enfant chez les Morel.

Songeur, je songe à mon propre vécu. Quand Moïra est née, j'ai crié, j'ai pleuré toutes les larmes que je pouvaient pleurer pour qu'elle reparte d'où elle est arrivée. J'avais eu neuf mois pour me faire à l'arrivée de ma sœur. Neuf mois où j'avais profité pleinement de ma mère et où je caressait émerveillé le ventre tout rond de ma maman. Oui j'avais bien compris qu'un bébé se cachait là. Mais je n'avais pas saisi ce que cela impliqué.

Je me suis fait à ma sœur au bout de quelques semaines. Apparemment elle n'était pas cassée et on ne pouvait pas la ramener au magasin pour l'échanger contre autre chose. Je m'y étais résigné avant de tomber sous son charme. Moïra était une enfant facile. Elle ne pleurait que rarement et ses caprices ne se résumaient qu'à une seule chose : me voler mes jouets. Ou me tirer les cheveux. C'était un petit monstre mais que j'aimais malgré tout. Comme si le lien frère-sœur avait permi de passer au-dessus de nos querelles. Astrid et Aline entretiennent la même relation que celle que j'ai avec Momo. Elles sont soudées, alors même que je n'ignore pas que leur enfance a été aussi faites de caprices, de chamailleries et d'autres choses qui remplissent de nostalgies nos souvenirs.

Pensif sur ces points communs, je m'affaire. Un à un, je ficelle les ballons en lot de 5 que j'accroche ensuite aux tringles à rideaux de mon salon. La maison, pourtant irréprochable en d'autres temps, est sans dessus dessous. Des ballons aux teintes dorées et rosées jonchent le sol et pendent aux murs. Une grande table agrémente la pièce de sa seule présence, canapés et table basse poussés sur les côtés. Une banderole "joyeux anniversaire" traverse le plafond. J'ose un regard à la pendule : 11h10. Je grogne en mon fort intérieur et hèle Astrid : "Ils viennent pour quelle heure déjà ?!" je connais pourtant la réponse. À la demie, tous les proches d'Aline arrivent pour attendre la demoiselle qui ne se doute de rien. Normalement. La benjamine des Morel ignore tout de la surprise. Et quelle surprise ! J'esquisse un sourire, songeant déjà à la tête qu'elle fera en découvrant la supercherie. Astrid lui a vendu la journée en rangements et tris en abondance. Autant dire qu'elle est loin de se douter qu'elle va être le centre des festivités. 26 ans, ça se fête autant que les 18 ans ou les 50 ans après tout !

La sonnette retenti alors que je dresse le dernier couvert. Je recule pour admirer mon travail avant de me précipiter à la porte lorsque que le "dring" sonne à nouveau. "Ah parfait ! De la mains d'œuvre." je m'esclaffe avant de saluer les premiers arrivant et de les inviter à entrer. À vrai dire, avec El' nous n'avons pas chômés depuis ce matin. Le salon est méconnaissable tellement il est décoré. La table est dressée, aux couleurs douces et chaleureuses qui caractérisent si bien Aline. Dans la cuisine, le four tourne depuis un moment et diffuse une bien bonne odeur. Ça va être une journée parfaitement parfaite.

Dimanche 14 novembre 2021. Une journée normale pour bien des personnes mais pas pour tout le monde. Habituellement le dimanche, tout le monde passait du temps dans leur lit à traîner un peu, à ne rien faire si ce n’était se détendre et se prélasser. Ce n’était jamais mon genre, j’étais bien souvent la première voiture à sortir du garage pour aller travailler, bien tôt. Le centre équestre était bien souvent au cœur des loisirs que les familles voulaient faire le dimanche alors la charge du travail était multipliée par plusieurs. Alors pour être certain de ne pas être en retard aujourd’hui, je m’étais réveillé encore plus tôt que d’habitude. Tant pis si j’arrivais avec une tête fatiguée. De toute façon, je ne ressemblais presque jamais à quelqu’un de présentable, cela n’allait pas changer pour une seule journée, malgré tous les efforts que je pourrais être amené à faire. D’ailleurs, en parlant d’efforts, il était à peine plus de 10h lorsque je quittais la compagnie des chevaux pour aller chez moi retirer toute odeur suspecte de ma peau, allant même jusqu’à mettre une touche de parfum dont j’avais totalement oublié l’existence. Il n’avait pas d’odeur suspecte donc cela ferait très certainement l’affaire.

Je n’aimais pas mentir, je n’étais même absolument pas doué pour ça mais par message, il n’y avait rien de bien compliqué. Avant de démarrer le moteur, je brouillais donc un peu les pistes en échangeant quelques messages avec la femme de la journée, lui demandant de m’accorder un peu de temps dans la soirée. Elle ne se douterait pas de quoi que ce soit et même si elle voulait toujours que je passe dans la soirée, j’avais toujours quelques idées dans la tête, sûrement une imagination un peu trop débordante, encouragée par les nombreux bouquins que je dévorais. Astrid Morel en étant d’ailleurs une grande fautive.

C’était d’ailleurs devant la maison de cette dernière et de Gabriel que je me garais. Un rapide coup d’œil en direction de l’heure me permit de remarquer que j’étais à l’heure. Ça ne m’était certainement jamais arrivé depuis le lycée. Comme quoi, quand je le voulais, je le pouvais. Je crois que cette nouvelle était la meilleure de ma journée, enfin pour le moment. Cela se fêtait bien avec une petite bière, non ? Non, je n’allais certainement pas m’emballer pour ça alors que je sonnais à la porte de cette grande maison. On pouvait dire que j’avais fourni un effort aujourd’hui. Bon, certes mon visage montrait clairement que je venais de faire une journée complète de travail mais j’avais une chemise blanche bien repassée et un ensemble pantalon et veste de costume parfaitement ajustés. J’avais les bras totalement chargés entre plusieurs bouquets de fleurs et un gros sac bien rempli. Les anniversaires, c’était particulièrement important, Aline devait passer la meilleure journée de sa vie ou l’une des meilleures en tout cas, tout serait réuni pour. Ce qui me mettait la pression de façon particulièrement forte. Une pression inutile mais qui ne voulais décidément pas s’en aller. Rapide accolade échangée avec mon frère de cœur, je déposais un rapide baiser sur sa joue avant d’aller mettre tout mon bazar dans un coin du salon. Je ne pouvais pas m’empêcher d’observer les décorations déjà en place. Ca allait plaire à Aline, c’était sûr et certain, ça. « Et bah dis donc ! A quoi je peux vous aider ? »

Comme tous les 14 novembre, l'excitation était à son comble pour Astrid. C'était toujours une journée bien particulière à ses yeux. Celle de l'anniversaire de sa petite sœur. Et même si cette année, la demoiselle avait tout juste vingt-six ans, ce n'était pas aux yeux de l'auteur une raison pour ne pas la célébrer comme il se devait. Toute nouvelle bougie méritait une belle fête, surtout que cette année, le 14 novembre tombait un dimanche, libérant l'emploi du temps de la plupart des proches d'Aline. Et leur mère était récemment arrivée en Allemagne, s'y installant définitivement. Tous les astres étaient ainsi assemblés : l'occasion était trop belle pour ne pas festoyer. L'idée de faire une fête n'avait alors pas traîné et Astrid avait été la première à lancer les hostilités, proposant la villa comme lieu d'accueil pour tout ce petit monde. L'endroit serait parfait et ils ne prenaient pas le risque qu'Aline les surprenne en plein préparatifs. De plus, ils auraient de la place à foison.

Les mains dans la pâte, la jeune femme s'affaire dans les dernières préparations culinaires pour le déjeuner au beau milieu d'une cuisine ressemblant d'avantage à un champ de bataille qu'à autre chose. Le regard rivé sur la recette, Astrid suit scrupuleusement les instructions sur celui-ci, jetant en parallèle un coup d'œil à sa montre pour surveiller l'heure, qui semble inquiéter Gabriel à ce moment même, comme l'homme s'inquiète de savoir à quelle heure leurs invités sont supposés. La pression monte d'un cran. Dans quelques minutes seulement, les premiers invités feraient leur arrivée. Par après, ce serait au tour de sa sœur. Et la demoiselle enfourne ses petits canapés en répondant à son cher et tendre.

Depuis la cuisine, la jeune femme entend Gabriel se charger de l'accueil, tandis qu'elle termine de donner un coup de propre à la cuisine. Un petit coup de torchon pour sécher le tout et elle sort de la cuisine en retirant son tablier, affichant un grand sourire face à Philipp, le premier arrivé de leurs invités. Une surprise. Il n'est pas spécialement le plus ponctuel en temps normal, pour ce qu'elle en sait, mais le voilà présent avant même leurs parents.

”- Entre vas-y fait comme chez toi !” accueille la demoiselle. ”Comment vas-tu ?” s'enquit-elle. ”Alors, Aline ne se doute toujours de rien ?” s'empresse de demander la blonde.