Fate brings people together no matter how far apart they may be ♛ ft. Emmerich

L'une des choses que tu savais faire le mieux, c'était bien rendre service. T'aimais bien pouvoir aider quand t'en avais l'occasion. Et aujourd'hui ne faisait pas exception. Toi et tes amis deviez organiser une fête d'anniversaire pour Erich. Quelque chose de sympa, mais pas en trop grand comité. Seulement les proches amis. Et il avait fallu se décider pour savoir dans quel appart on ferait la fête. Sans grande surprise, la majorité avait voté pour le tien, argument principal : "C'est toi qui as le plus grand appart, alors c'est logique qu'on fasse la fête chez toi !" T'as pas eu le cœur de refuser. À la condition qu'il était hors de question que tu sois le seul à tout organiser. Et à ta grande surprise, tout le monde avait mis la main à la patte pour l'occasion.

Et voilà comment ton appartement s'était retrouvé couvert de ballons, banderoles et confettis en tout genre, semblant cacher en chaque recoin des bouteilles et cannettes vides ou entamées. Et dire qu'après t'étais supposé tout remettre en ordre. L'angoisse, ça allait te prendre un temps fou. Mais mieux valait ne pas penser à ça tout de suite, et profiter d'abord de la fête. Toute ta bande de potes était là. Minna aussi bien entendu. Et accessoirement, Anna. Depuis la sortie en boite de nuit où Erich l'avait rencontré, il avait du mal à la lâcher. Il était, il fallait croire, plus déterminé qu'on l'aurait cru.
Et l’événement semblait être l'occasion de tous les excès. Encore heureux que sous ton toit, tu aies formellement interdit la drogue. Pas de ça chez toi. Mais pour ce qui était de l'alcool, tu ne pouvais pas dire grand-chose, et la plupart s'en donnaient à cœur joie. Mais bon, tu ne pouvais pas vraiment les blâmer. Et puis après tout, tu n'étais pas sans avoir bu aussi de toute façon.

Comme d'habitude, Lorenz avait été le premier à finir dans un état pas possible, pour changer. Même Minna qui n'avait pas l'habitude de boire était pompette, et restait accrochée à toi, puisque son cousin était trop occupé avec une autre demoiselle. Mais Minna, même bourré restait assez sage, tout ce qu'elle voulait, c'était qu'un mec la fasse danser, le mec en question, toi évidemment. "Tu danses bien Engy... Dis, ça t'arrive d'inviter des mecs à danser ?" Tu hoches la tête, oui ça t'arrivait parfois, quand l'envie t'en prenait. "Et alors lequel mène la danse, puisque vous êtes deux mecs ?" Question tout à fait pertinente. "Je m'adapte en fonction des préférences de mon cavalier, si y'en a pas, c'est chacun son tour." Minna s'extasia alors sur place, pendue à ton cou. "Hann, c'est mignon comme tout." Oui Minna, on sait, les gays sont beaucoup trop adorables, des petits chatons.

La soirée continuait de battre son plein, et bientôt tu remarquais que Anna semblait complètement bourrée, et à côté de la plaque. Ce qui n'empêchait en rien ton ami de poursuivre ses avances. À quel moment c'est sexy une nana bourrée, sérieux ? Mais sincèrement, de ce que tu pouvais en voir, Anna n'était vraiment plus très lucide. Et il était tout bonnement inconcevable que les deux "tourtereaux" ne terminent leur soirée dans ton appart, non, en aucune façon. Vu son état, c'était mieux qu'elle retourne chez elle. Mais tout le monde avait bu, alors pour la ramener, merci bien.

T’essaies de réfléchir, plus difficile qu'à l'habitude une fois que t'as bu quelques verres. Tu finis par te dire qu'appeler quelqu'un pour venir la chercher est une bonne idée. Oui, mais qui ? Un pote serait plus simple. Mais vu les tensions entre les groupes, pas si brillant... Finalement, t'as pas tellement le choix. Emmerich. Le seul de la bande avec qui il n'y aurait pas de potentielle envie de meurtre. Problème, t'as évidemment pas son numéro. Pas le choix, tu vas devoir utiliser le téléphone de Anna, elle doit bien l'avoir, son numéro ? Tu t'approches, mine de rien, alors que la brune semble entretenir une discussion enflammée avec son Roméo du soir. Tu prends son téléphone, et t'éloignes. Tu réfléchis à nouveau, pour te rappeler du schéma qu'elle passe son temps à dessiner pour déverrouiller le saint Graal. Heureusement que t'es observateur comme personne, ça t'a sauvé plus d'une fois. Un truc qui ressemble à un A, pour Anna. Original. Hop, les portes te sont ouvertes. Tu vas direct dans les contacts, t'as beau être curieux, la vie d'Anna t’intéresse pas pour le moins du monde.

Tu cherches Emmerich, tu ne trouves pas. "Fuck !" C'est pas possible, t'y crois pas, elle l'a forcément. Surtout si elle en pinçait pour lui, elle devait le harceler par téléphone. Tu passes les contacts au peigne fin. "Connard" finit par attirer ton œil. Après avoir lu le reste de la liste, t'en déduis que ça peut être que lui. Donc tu décides de l'appeler, t'éloignant un peu du brui de la fête en allant dans ta chambre. Ça sonne, ça ne décroche pas, boite vocale. "Shit !" Tu réessaies une deuxième fois. Rebelote. Ça t’énerve qu'il ne décroche pas, tu commences à pester tout seul. Ou alors t'es comment un con à appeler un inconnu. Troisième tentative, ça sonne, une fois, deux fois, trois fois. T'es persuadé qu'il ne décrochera toujours pas.

Jusqu'à ce que Emmerich décroche enfin, et gueule à l'autre bout du fil un "Quoi ?!" Aussi charmant qu'il est possible. "Calme-toi Grincheux, je suis pas Blanche-Neige. C'est le prince charmant à l'appareil !" Tu peux pas t'empêcher de sourire face à ta blague, tu te fais marrer tout seul. Mais tu reprends ton sérieux et expliques. "On fait une fête chez moi avec les gars, et Erich a invité Anna. Mais elle a carrément trop bu et est déchirée. On ne peut pas la ramener, alors ce serait cool si tu pouvais venir récupérer ta pote. S'il te plaît." Et là tu pries mentalement pour qu'il accepte sans faire de vague. Mais tout au fond, tu sais que ça n’arrivera pas, et qu'il va faire des siennes, tu le sens.

Le calme était revenu dans sa vie. Ce n'était peut-être qu'une simple accalmie avant le retour de la tempête mais Emmerich comptait en profiter autant qu'il le pourrait avant de se recevoir une nouvelle claque en pleine figure. Il avait vraiment besoin de souffler, de sortir et de penser à autre chose. Alors ce soir, il avait prévu d'aller boire un coup dans un bar, simple mais efficace pour se changer les idées, surtout qu'il n'aurait pas à supporter la présence de certains de ses potes qui lui rappelaient sans cesse les erreurs qu'il avait commises. Il n'osait pas imaginer s'il devait continuer à vivre toute sa vie avec le poids de la culpabilité sur les épaules. Heureusement avec Engel la situation s'était tassée, ils avaient réussi à parler et il avait enfin pu prononcer ses excuses après toutes ses années. Il ne se pardonnait pas totalement ce qui s'était passé entre eux mais au moins il pouvait aller de l'avant dans cette histoire.

« - Hey », Souffla un homme en se glissant sur le siège à côté de lui, « Ça te dirait un nouveau verre ? »

Emmerich jeta un coup d'oeil à son interlocuteur, il devait avoir la trentaine, brun, yeux verts et une légère barbe. Il n'était pas trop mal et l'idée de ne pas rester seul dans son coin le tenta bien, surtout avec un verre gratuit à la clé.

« - Pourquoi pas. »

Si à la base le blond ne pensait pas repartir accompagné la donne changea lorsque le courant passa bien avec cet homme, Christian. Ils parlèrent de différentes choses, de musique, d'art -Emmerich réussit même à sortir quelques informations qu'il avait retenues de son nouveau travail, de souvenirs de soirées, … Bref ils ne semblèrent pas manquer de sujets au fil des heures. Et lorsqu'une main se glissa sur sa cuisse après plusieurs verres, Emmerich attrapa le col de son vis-à-vis pour l'attirer à lui et l'embrasser. Il ne pouvait pas souvent se laisser aller comme ça mais là il n'avait rien à craindre à l'intérieur de ce bar gay. Et puis il y avait fort à parier que le brun était venu l'aborder dans l'idée d'aller plus loin, il n'y avait qu'à voir comment il s'était rapproché de lui pendant le baiser.

« - On bouge ? »

Pour toute réponse, Emmerich entraîna son partenaire vers la sortie, il était bien décidé à profiter, oubliant sa dernière discussion avec Engel. Enchaîner les coups d'un soir ne lui posait aucun problème alors pourquoi changer ? Surtout qu'il n'était pas prêt à accorder sa confiance à quelqu'un sans mourir de peur que tout parte en vrille un jour ou l'autre, il ne se pensait pas capable de se poser. Ce serait forcément lui qui poserait problème dans l'équation, il n'était pas fait pour être en couple, alors autant se faire plaisir.

« - Chez toi ou- »

Emmerich ne laissa pas le temps à son partenaire de finir sa question, l'attirant à nouveau à lui pour s'emparer de ses lèvres. Il ne savait pas s'il préférait aller chez lui ou chez Christian alors autant gagner un peu de temps, surtout qu'il n'y avait personne dans la rue pour les surprendre. Ils se retrouvèrent collés l'un à l'autre, Emmerich plaquant presque son compagnon de soirée contre le mur à côté d'eux. La proximité de leurs corps lui permit de sentir son téléphone vibrer dans sa poche. Bordel ! Qui pouvait bien l'appeler à un moment pareil ? Il se décolla légèrement, rompant le baiser, pour récupérer son portable et voir le nom de la personne qui tentait de le joindre. Anna. Cela faisait un moment qu'elle ne l'avait pas contacté, même s'ils étaient de nouveau en bon terme.

« - Ne me dis pas que c'est ta copine ... »

En entendant ces mots, le blond rangea l'objet à sa place et secoua la tête avant que son partenaire ne décide de le lâcher maintenant. Il s'occuperait de la demoiselle plus tard.

« - Non c'est juste une amie. Crois-moi, les relations c'est pas pour moi. »

Ce n'était pas parce qu'il enchaînait les partenaires qu'il était un salaud, il ne pourrait pas tromper quelqu'un, et Christian semblait être comme lui. Au moins, ils étaient sur la même longueur d'onde. Ils reprirent donc où ils en étaient avant que son téléphone ne se remette à vibrer. Emmerich poussa un long soupir, son front posé sur l'épaule de son partenaire. Ce n'était pas possible … Pour une fois qu'il pouvait se faire plaisir, il fallait que quelqu'un vienne le déranger.

« - Ça va aller ? », Demanda Christian en voyant clairement qu'Emmerich était tiraillé à l'idée de répondre. Le blondinet savait qu'il allait penser à l'appel, se demandant ce qui pouvait bien se passer pour que son amie le harcèle comme ça, mais il n'avait pas envie de planter son compagnon de soirée là, comme ça.

« - Oui, elle n'a qu'à laisser un mess- »

Emmerich s'interrompit en voyant à nouveau l'écran s'allumer entre ses doigts après l'avoir mis en mode silencieux pour ne plus être dérangé. Anna insistait un peu trop pour que ce soit bon signe. Il se mordit la lèvre. Bon sang ! Il allait probablement le regretter mais il embrassa Christian, promettant d'être tout à lui une fois sûr qu'il n'y avait aucun problème et s'éloigna de quelques pas pour décrocher. Il avait beau sentir une pointe d'inquiétude en lui, ce fut son agacement qui prit le dessus lorsqu'il répondit.

« - Quoi ?! »

S'attendant à entendre la voix de son amie, Emmerich fut surpris en reconnaissant celle d'Engel. Il sentit son cœur manquer un battement et tourna les talons pour ne pas laisser Christian le voir.

« - Prince charmant ? Rien que ça », Fit-il en se demandant pourquoi son ancien amant l'appelait depuis le portable d'Anna. Il y avait forcément un problème sinon Engel n'aurait pas autant insisté mais celui-ci semblait assez calme pour ne pas alarmer vraiment le blondinet.

« - On fait une fête chez moi avec les gars, et Erich a invité Anna. Mais elle a carrément trop bu et est déchirée. On ne peut pas la ramener, alors ce serait cool si tu pouvais venir récupérer ta pote. S'il te plaît. »

Emmerich poussa un long soupir. Il avait maintenant le choix entre babysitter Anna qui l'avait fait chier pendant des années et la laisser tomber pour profiter de la charmante compagnie de Christian. S'il avait été un vrai salaud la réponse aurait été vite trouvée mais son sens de l'amitié le poussa à gagner un peu de temps avant de trancher réellement.

« - T'es sérieux ? Ça peut pas attendre ? La fête est chez toi, c'est pas comme si vous étiez sortis. Tu peux très bien la laisser dans un coin et elle rentrera chez elle demain sans souci », Dit-il en se massant l'arête du nez. Il savait qu'Engel ne la mettrait pas dehors comme ça mais il comprenait l'envie de la renvoyer chez elle, de toute façon ce serait mieux pour la jeune fille d'être dans son lit pour décuver. Et puis maintenant qu'il savait ce qui se passait, Emmerich se voyait mal retourner auprès de son compagnon de soirée pour profiter d'une nuit torride, il avait perdu toute envie de poursuivre...

« - Bordel ! Ok, envoie-moi l'adresse par texto, j'arrive. Je te jure, elle aura ma peau celle-là ! », S'exclama-t-il en raccrochant. Il avait promis qu'il ne planterait pas Christian mais il n'avait plus le choix, Anna avait besoin de lui. Il ne fallait pas être idiot pour savoir qu'il était probablement le seul gars à pouvoir se rendre chez Engel sans créer des tensions inutiles entre leurs groupes. Si Samuel aurait pu être un bon choix, vu qu'il tentait de marquer des points auprès de la jeune fille, c'était aussi le plus sanguin de la bande alors ça risquait de très mal finir.

« - Alors ? »

Emmerich croisa le regard de Christian en revenant vers lui et se sentit mal de l'abandonner comme ça. Il avait l'impression qu'il était voué au rôle du connard qui pose des lapins à ses partenaires, même si pour une fois il avait une bonne raison de le faire. Et puis, son compagnon n'était qu'un coup d'un soir, ce n'était pas comme s'ils sortaient ensemble.

« - Je dois filer. Ma pote a besoin de moi. Le gars avec qui elle est vient de m'appeler pour me dire qu'elle était pas bien. »

Inutile d'entrer trop dans les détails, mais au moins il prenait le temps de donner une explication avant de partir. Il n'était plus le genre à fuir sans rien dire, il avait au moins évolué de ce côté.

Il était évident que t'allais le prendre au dépourvu, à l'appeler comme ça à cette heure, et à lui demander de but en blanc de se ramener chez toi. Mais t'avais pas tellement eu d'autres options, du moins s'il y en avait eu, ça t'avait clairement échappé. Et au vu de la situation, il n’allait pas t'envoyer balader quand même ? T'entends son soupir à l'appareil. Tu t'en serais douté. Tu le déranges t'en es persuadé. Puis il te demande si c'est vraiment obligé ? Si y'a pas moyen de faire autrement. Tu ressens son envie de ne pas bouger de là où il est. Mais non, ça ne va pas être possible ça. "Alors franchement Em', ça, c'est pas possible. Quand bien même je voudrais la laisser dans un coin, Erich lui semble pas décidé à se décoller d'elle. Ils commencent déjà à se peloter, et il est hors de question qu'ils baisent dans mon appart. No way. Et puis c'est pas ma pote, je ne veux pas la foutre à la rue, mais je ne tiens pas à ce qu'elle passe la nuit ici non plus, et la retrouver à moitié nue demain matin parce qu'elle ne semble actuellement pas tenir à garder ses fringues encore longtemps. Au secours Emmerich, au secours !"

Bon, t'avais un peu exagéré les faits, Anna n’était pas réellement en train de se déshabiller. Mais vu comme c'était bien parti entre elle et le brun, ça serait peut-être finalement bientôt le cas. Et le seul endroit vraiment dispo pour un minimum d'intimité étant ta chambre, y'avait pas moyen qu'ils couchent dans ton lit. T'en avais des frissons d'horreur rien que d'y penser. Donc ouais, t'avais un tout petit peu exagéré, histoire de convaincre le blond de venir. Et finalement, Emmerich finit par accepter. "Merci, Emmercih, tu me sauves la vie ! T'es génial ! Je t'envoie ça tout de suite."

Em' raccroche, et tu fais un geste victorieux. T'auras plus à la subir longtemps la Anna, qui d’un t'énervait un peu, et qui de deux avait pour ainsi dire monopolisé Erich presque toute la soirée. Super, bonne ambiance. Ça ne semblait pas empêcher tout le monde de s'amuser, mais c'était vachement dommage quand même. Tu envoies ton adresse par SMS, avant de ressortir de ta chambre pour aller remettre le téléphone à sa place. Anna était si occupée depuis tout à l'heure qu'elle n'avait vraisemblablement rien vu.

Tandis que tu vas te resservir une bière, Wilfried vient à ta rencontre. "C'est toujours sympa les teufs chez toi ! Mais c'est vraiment naze que Erich ne lâche pas sa nana d'une semelle." "Ouais, ça craint, mais tu sais, c'est même pas sa meuf, ils sont pas en couple en vrai." "Ohhh ça je sais, t'as déjà vu Erich en couple en même temps ?" Demande le rouquin avec ironie. Il n’a pas tort. Wilfried était sympa comme mec. Il était grand, baraqué, avait quelques tatouages, et cicatrices pour avoir trop fait le con étant plus jeune. Le genre de mec que tu veux pas approcher quand tu ne le connais pas, parce qu'il te fait peur. Mais au fond c'était un vrai nounours, et dans son couple, c'était clairement sa copine qui portait la culotte, alors qu'elle ressemblait à une petite poupée fragile. Ce contraste était hilarant. "Alors, elle va bien Lotte?" "Oui très bien merci. L'autre jour je lui ai acheté une bague sur laquelle elle avait flashée y'a deux semaines, depuis elle est aux anges." Et vous avez continué de parler de tout et rien pendant un moment.

Cela devait faire tout au moins une bonne demi-heure, si ce n'était un peu plus, que tu avais appelé Emmerich, quand tout à coup on sonnait à la porte. Tu te fraies un chemin jusqu'à l'entrée pour ouvrir. Hallelujah ! Le sauveur était arrivé à bon port. "Salut ! C'est cool que tu sois vraiment venu, ça va m'enlever une épine du pied. Entre !" Tu te décales de la porte pour le laisser passer et refermer derrière lui. Et c'est seulement quand tu vois les regards interrogateurs de tes potes que tu te rends compte qu'il y a bel et bien une chose que t'as oublié de faire. Les prévenir que Emmerich allait arriver. Oups... "Euh, Engel, c'est quoi ce bordel ?" dit Gaspard avant que Lorenz ne renchérisse : "Qu'est-ce qu'il fout là, lui ?" Te justifier maintenant et devant tout le monde, ce n'est pas la meilleure des idées. "Euh, c'est... Une longue histoire... Et vous avez trop bu pour comprendre, j'ai pas envie d'expliquer ça maintenant. Mais on se détend, c'est pas grave. Et puis c'est mon appart, je fais rentrer qui je veux chez moi !" Gaspard lève les mains en l'air, visiblement désabusé. "Si Erich le voit, ça va le gonfler." "Ouais, bah il a qu'à râler, Erich, moi ça me gave de le voir collé aux fesses d'Anna depuis tout à l'heure. Ça devait être une fête entre potes, pour lui, et il la lâche pas, c'est à peine si on peut lui parler. Alors qu'il râle, je m'en fous ! Puis si ça se trouve, occupé comme il est, il ne verra même pas que Emmerich est là."

Lorenz, pendu au bras de Gaspard pour garder son équilibre toisa Emmerich, puis toi, puis Emmerich, et encore toi. "Et donc... Vous vous connaissez ? Parce que la dernière fois c'était tendu entre vous... Mais là... Enfin tu vois..." Tu lâches un soupir de compétition. "Me regarde pas comme ça Lorenz, c'est pas du tout ce que tu crois. Il est juste venu m'aider. Pour Anna." Le concerné se mit à sourire comme un crétin. "Ouais, ouais... Mais c'est carrément ton genre de mec quand même ! Il le sait que t'es gay ?" Gaspard donna immédiatement un coup de coude à Lorenz. "Putain, t'es lourd quand t'as bu sérieux ! Viens on va ailleurs, t'es chiant." Gaspard tira son ami plus loin pour te faire de l'air. Et toi tu savais plus trop où te mettre. Bon certes, t'avais déjà couché avec Em' trois ans plus tôt, c'était évident qu'il était à ton goût. Mais dit comme ça, par quelqu'un d'autre, c'était extrêmement gênant. "Euh... Désolé, il est tout le temps comme ça et... Anna est là." Tu désignais alors le canapé sur lequel elle et Erich étaient en plein baiser intense, en train de se peloter. "Si non, tant que t'es là, tu veux boire un truc ?"

Abandonner Christian avait été plus dur qu'il ne l'avait pensé. Pour être honnête, Emmerich s'attendait à ce que son vis-à-vis pousse un long soupir avant de lui dire d'aller se faire foutre mais à sa grande surprise il lui proposa d'échanger leur numéro pour reprendre cette soirée une autre fois, quand Anna irait mieux. Bordel ! Il ne l'avait pas vu venir et sous le choc, il avait bêtement dit oui avant de sortir son téléphone. Il eut à peine fini d'enregistrer le numéro que le message d'Engel arriva pour lui donner l'adresse de la soirée. Il ne savait pas pourquoi mais il avait l'impression de creuser sa propre tombe pour une raison qui lui échappait. Ok, il y avait de grandes chances qu'il décide de ne jamais recontacter cet homme une fois loin de lui. Il n'était pas doué pour faire face à quelqu'un à qui il avait posé un lapin une fois.  

« - Je t'envoie un message avec mon numéro, là je dois filer ! », Lança-t-il, la gorge nouée, en lui volant un dernier baiser avant de lancer son GPS et de quitter la rue où ils étaient. Heureusement il le plantait maintenant avant que les choses deviennent vraiment sérieuses. Cette consolation ne dura pas longtemps lorsqu'il vit qu'il avait une bonne demi-heure avant d'atteindre l'appartement de son ancien amant. Il allait sérieusement regretter d'avoir accepté mais maintenant qu'il avait dit qu'il venait il ne se voyait pas retourner dans les bras de Christian. De toute façon sa soirée était foutue. Il était bon pour ramener une Anna complètement défoncée qui vomirait probablement sur le trajet de retour, en espérant que ce serait pas dans le bus.

Écouteurs dans les oreilles, Emmerich se laissa bercer par la musique sans penser à l'accueil qu'il allait recevoir. Engel était en présence de ses potes dont le fameux Erich, les retrouvailles risquaient d'être sympas. Heureusement qu'il ne venait que dans l'intention de récupérer sa pote, il ne comptait pas s’incruster. Ça devrait éviter les commentaires désagréables et le risque que ça se finisse en bain de sang, de toute façon Emmerich n'était pas d'humeur pour se battre. Lui, tout ce qu'il voulait ce soir, c'était un peu d'amour. Malheureusement il allait devoir faire une croix dessus.

Une fois devant la porte de l'immeuble, Emmerich prit soin de retirer ses écouteurs, coupant sa musique, avant de sonner. Lorsqu'il entendit le bip caractéristique de l'ouverture de l'entrée, il n'hésita pas une seconde et se faufila à l'intérieur, gravissant les escaliers jusqu'au troisième. La porte était déjà ouverte avec Engel devant qui l'attendait comme le messie. Emmerich esquissa un sourire un peu gêné, c'était la première fois qu'il revoyait son ancien amant après leur dernière discussion, il ne savait pas trop comment se comporter.

« - Hey », Dit-il en s'approchant pour entrer, « Que veux-tu, fallait bien que je te montre ce qu'est d'être un vrai prince charmant. »

Voilà, une petite pique amusante en écho à la blague d'Engel de tout à l'heure, parfait pour éviter le malaise. Après tout, il semblait être le seul un peu gêné pour le moment alors pourquoi se stresser pour rien ? De toute façon, il allait rentrer, récupérer Anna et disparaître comme si de rien n'était. Ce serait le plus simple. Manque de chance son entrée ne passa pas inaperçue et les potes de son ancien amant semblèrent surpris et assez mécontents de le voir débarquer. Emmerich leva un sourcil, regardant Engel, lui demandant silencieusement pourquoi ils n'étaient pas au courant de son arrivée.

Et moi c'est pas censé me gonfler tout ça ?, Pensa-t-il à la réplique de Gaspard. Après tout, il aurait pu être dans les bras de Christian plutôt qu'ici à subir un accueil aussi désagréable alors qu'il venait juste pour rendre service. Ça lui apprendrait à vouloir être gentil, mais heureusement Engel calma le jeu rapidement. La situation devint même plutôt amusante avec les questions idiotes de Lorenz. Évidemment qu'Emmerich savait qu'Engel était gay, mais ça, il se garda bien de le dire devant les potes de son ancien amant. Après tout, lors de leur dernière discussion il lui avait avoué ne pas leur avoir dit quoi que ce soit sur leur aventure.

Un sourire se dessina doucement sur les lèvres d'Emmerich qui ignora volontairement la tentative désespérée d'Engel de détourner l'attention vers Anna. Sa pote pourrait bien attendre un peu qu'il profite, après tout sa soirée avait été gâchée à cause d'elle.

« - Alors comme ça je suis carrément ton genre de mec ? Peux-tu m'en dire un peu plus autour d'un verre ? »

Hors de question de laisser passer ça ! C'était bien trop tentant de répondre. Et puis il n'allait pas refuser un verre même s'il avait déjà bu un peu avant de venir. Il avait de la marge avant de finir dans le même état qu'Anna, elle était vraiment dans un sale état, c'était à se demander ce qu'Erich pouvait lui trouver à cet instant.

« - Je ne suis pas vraiment pressé vu que ma soirée a été annulée à cause de toi. »

Emmerich préférait rester vague, il n'avait pas envie d'étaler sa vie privée devant Engel. Il n'était pas très fier d'enchaîner les conquêtes d'un soir mais vu qu'il n'était pas prêt à se lancer dans une histoire, il n'avait pas vraiment d'autre choix pour profiter un peu. Il réfléchirait peut-être un peu plus s'il trouvait enfin la perle rare dans son entourage, jusqu'ici il n'avait pas trouvé quelqu'un qui lui donnait envie d'oublier sa vie actuelle pour tenter de se poser enfin. De toute façon, il était encore jeune, il avait le temps pour trouver la bonne personne.

« - Tu regrettes déjà de m'avoir appelé, avoue », Dit-il avec un sourire taquin sur les lèvres tout en donnant un coup de coude à Engel. Finalement l'accueil pourri qu'il avait eu était passé au second plan, là il avait juste envie d'embêter un petit peu plus son ancien amant.  

À l'arrivée de Emmerich, sa petite référence à la blague que tu avais faite plus tôt dans la soirée t'avait fait rire. Oui, entre un pauvre type qui en appelle un autre au secours, et l'autre qui vient à sa rescousse, tu faisais un piètre prince à côté de lui. Mais peu importe. L'ambiance était vite redescendue avec l'intervention de Gaspard et Lorenz. Fallait dire que c'était quand même un peu de ta faute, si t'avais été plus malin et que t'avais pensé à prévenir les autres que Emmerich allait venir pour raccompagner Anna, on n’en serait pas là. Mais ça t'était complètement sorti de l'esprit, alors que tu fus vite distrait par d'autres choses. Et face au regard inquisiteur de ton nouvel invité, tu lui avais lancé un regard l'air de dire Désolé.

Et la situation aurait juste pu revenir à la normale grâce à ton intervention, si seulement Lorenz l'avait fermé, pour une fois. Mais une fois qu'il a bu, lui demander de garder ses commentaires pour lui tout seul était une mission impossible à réaliser à ce jour. Pourquoi fallait-il toujours que ça te tombe dessus ? Sérieusement, Lorenz passait son temps à te foutre la honte. Pourquoi toi ? Pourquoi pas Erich, Gaspard ou Wil' pour une fois ? Non toujours sur toi que ça tombait. Et au pire moment en plus de ça ! À croire qu'il le faisait exprès. Très certainement que c'était intentionnel d'ailleurs. Pourquoi ? Ça, tu l'ignorais. Tu n'avais qu'une envie, celle de devenir tout petit et d'aller te cacher là où plus personne ne pourrait te voir ! Et apparemment, ta tentative pour éviter le sujet avait été un échec cuisant.

"Alors comme ça je suis carrément ton genre de mec ? Peux-tu m'en dire un peu plus autour d'un verre ?" Tu ne pouvais pas voir ta tête à ce moment, mais t'étais certain d'être passé de rouge écrevisse à blanc comme neige en moins de trois secondes chrono. Que quelqu'un t'achève maintenant, par pitié ! "Euh... Tu veux boire quoi ?" Tu préfères lui demander, et lui servir son verre, comme si tu cherchais à gagner un peu de temps pour trouver ce que t'étais supposé répondre à ça. Il ne pouvait pas juste se taire, ne rien demander, ce serait tellement plus simple de faire comme si Lorenz n'avait rien dit du tout. Mais non, ça aurait été bien trop beau, n'est-ce pas ? "Je ne suis pas vraiment pressé vu que ma soirée a été annulée à cause de toi." Encore mieux, c'était bon à savoir ! Vraiment Engel, c'était ton jour de chance aujourd'hui. Rahhh, toi qui pensais que Em' allait arriver, récupérer Anna et puis repartir, qu'en dix minutes grand max, si la brune faisait des siennes, et qu'ensuite ce serait claqué. Bah apparemment tes pronostiques devraient être revus, parce que c'était bien parti pour durer plus que dix minutes.

Buvant une gorgée de bière pour aller chercher un peu de contenance que t'avais perdu, tu te pris un coup de coude et une petite raillerie de la part du plus jeune. Non, actuellement tu regrettais surtout d'avoir invité Lorenz en fait. C'était lui qui te mettait dans l'embarras. "Non, mais tu sais, faut pas écouter tout ce que Lorenz dit, surtout quand il est bourré. Il exagère un peu quand même. Il a bu, et sa conception visuelle est plus très bonne... Enfin je ne dis pas que t'es pas mon genre du tout, mais... Enfin t'es pas mal. Euh..." Non, mais sincèrement "T'es pas mal" ? T'avais couché avec lui, t'aurais même pas dit non à plus, tu le trouvais carrément canon comme mec, et oui il était carrément ton genre de mec, et t'osais dire qu'il était seulement "pas mal" !? C'était le plus gros mensonge que la terre ait porté !

"Enfin je t'assure que c'est pas ce que tu penses, y'a pas d’ambiguïté ou quoi que ce soit... Enfin j'ai aimé ce qu'on a fait y'a trois ans hein, c'est pas le problème ! Mais là, j'essaie pas de... Tu vois... Fuck... Je m'enfonce là, non ?" Que tu concluais en plaquant ta main contre ton front. L'alcool ne t’aidait pas tellement à te sortir de cette situation. Il allait forcément se foutre de toi, et tu ne pourrais même pas lui en vouloir pour ça, parce qu'il y avait carrément de quoi se moquer. N’importe qui à la place d'Emmerich se foutrait de toi. Help ! Tu cherchais comment te sortir de ce malaise, et au plus vite. Ton cerveau semblait surchauffer sous l'effort de réflexion qu'il tétait nécessaire de produire. Soudain une idée, ta seule ouverture s'offrant à toi.

"Mais tant qu'on y est, parlons-en. Toi alors, c'est quoi ton genre du coup ?" Tu priais pour que la question le surprenne bien assez pour qu'il ne s'attarde pas trop sur ton cas davantage. Et puis au final la question n'était pas si bête, et t'étais bien curieux de voir comment lui allait s'en sortir avec ça. Peut-être mieux que toi malgré tout, t'en savais trop rien. Mais si ça pouvait au moins détourner un peu son attention sur autre chose que la catastrophe qui venait de se produire, ce ne serait déjà pas si mal.

Une simple bière suffirait pour le moment, il n'avait pas envie d'attaquer trop fort, surtout s'il devait jouer les chaperons pour sa pote. Anna n'allait pas tenir debout toute seule alors il allait avoir besoin de sa tête et son corps pour arriver sains et saufs jusqu'à l'appartement de la demoiselle. Il eut un bref doute à cette pensée, n'habitait-elle pas encore chez ses parents ? Si c'était le cas, il allait peut-être devoir improviser et la ramener chez lui pour éviter de tomber sur un père qui voudrait lui démonter la tronche en s'imaginant que c'était sa faute si elle était dans cet état. Mais le moment de partir n'était pas encore arrivé, le blondinet n'avait aucune envie de partir et de laisser Engel après avoir entendu ce que Lorenz avait dit. Promis, il n'abuserait pas trop, surtout que les amis de son ancien amant n'allaient pas tolérer sa présence trop longtemps.

« - Pas mal ? », Dit-il faussement vexé par les paroles d'Engel qui semblait avoir du mal à se sortir de cette situation. Le pauvre ! Mais c'était tellement tentant de le taquiner dessus, pour une fois que ce n'était pas lui qui se retrouvait complètement embarrassé par un pote, il ne voulait pas laisser passer l'occasion.

Buvant une gorgée de sa boisson, Emmerich écouta son interlocuteur tenter de se justifier, s'enfonçant un peu plus. Il avait bien bu aussi, ça se voyait, ça n'aidait pas à trouver les mots justes pour se sortir de cette situation. En plus, le blondinet ne comptait pas le laisser s'en tirer trop facilement, même s'il risquait de s'en mordre les doigts plus tard lorsque la conversation se retournerait contre lui.

« - Oh oui tu t'enfonces. Enfin c'est rassurant si tu as aimé ce qu'on a fait y a trois ans, même si je ne suis que « pas mal » ! »

Emmerich n'avait pas perdu son sourire, il avait même ponctué ses paroles d'un petit haussement de sourcils avant de boire à nouveau sa bière. Il avait presque oublié qu'il était chez Engel en compagnie de ses potes qui le haïssaient, se sentant presque de retour trois ans auparavant comme si rien ne s'était passé. Il y avait toujours eu une connexion facile entre eux et ce n'était que maintenant qu'il prenait conscience qu'il n'avait pas vraiment réussi à ressentir ça avec quelqu'un d'autre. Mais c'était trop tard, il avait merdé. Il était prêt à dire qu'il n'y avait pas de souci, qu'Engel n'avait pas à se justifier plus, mais ses paroles restèrent coincées dans sa gorge alors que son ancien amant retournait enfin la question contre lui.

« - Mais tant qu'on y est, parlons-en. Toi alors, c'est quoi ton genre du coup ? »

Pendant une fraction de secondes Emmerich sembla perdre contenance, surpris par la question. Son type ? Il n'avait pas vraiment eu la chance d'en discuter avec quelqu'un jusqu'à maintenant. Il fallait dire qu'il cachait à tout le monde le fait qu'il était gay jusqu'à très récemment et comme ses potes n'en avaient pas grand chose à faire des hommes qu'il aimait, il avait gardé ça pour lui. Il n'y avait que Gabi qui avait pu avoir un avant-goût de ses préférences en matière de copains.

« - Bonne question », Fit-il finalement tout en prenant une gorgée de sa bière, « Je dirais que j'aime bien les mecs grands, pas trop baraqués, du genre à profiter de la vie et … J'avoue que les yeux bleus me font quelque chose. »

En y repensant Christian n'était pas vraiment son type de mec, pour le coup il était simplement « pas mal », sans plus, mais le courant était bien passé alors Emmerich s'était laissé tenté. À côté, Engel remplissait tous les critères. Bordel ! Il se rendait compte de l'erreur qu'il venait de commettre en donnant autant de détails sur ses goûts. Même si finalement cela n'avait rien de vraiment étrange puisqu'ils avaient déjà couché ensemble, Emmerich ne l'aurait jamais approché s'il l'avait trouvé sans plus.

« - Mais pourquoi tu tiens tant à savoir ça ? Tu comptes me présenter quelqu'un ? »

Hors de question de laisser paraître sa légère gêne, Emmerich préférait reprendre le contrôle de la conversation en piégeant Engel. Certes c'était risqué de rester sur le même sujet, sachant que son ancien amant avait déjà tenté de le coincer, mais ce serait évident qu'il n'était pas à l'aise s'il parlait d'autre chose sans transition. Il allait devoir faire attention. Heureusement que ses potes n'étaient pas là pour dire des choses gênantes comme Lorenz l'avait fait avec Engel. C'était le seul point positif à être en « territoire ennemi ».

Lorsque Emmerich prit cet air vexé face à ce que tu venais de dire, cela venait renforcer l'idée que ce que tu étais en train de dire était hyper maladroit, et les mots vraiment pas choisis avec intelligence. Tu tentais à nouveau de te rattraper comme tu le pouvais encore. "Bon, j'admets que "pas mal", c'était maladroit. J'aurais pas couché avec quelqu'un de juste "pas mal". T'es... T'es peut-être un tout petit peu mon genre, c'est vrai..." Parce qu'admettre qu'il te plaisait vraiment beaucoup semblait beaucoup trop te demander, actuellement. Et puis à quoi ça servirait que tu lui dises que tu le trouvais carrément trop canon comme garçon, ce n'était pas comme si vous alliez de nouveau coucher ensemble ou quoi que ce soit. Alors définitivement non, ce n'était pas une bonne idée de dire un truc pareil, à part pour te mettre toi-même mal à l'aise. Ce qui n'était pas l'objectif.

Mais tu jurerais en voyant la tête de Emmerich après que tu ais retourné la question contre lui, qu'il était pris au dépourvu. Alors il ne s’attendait pas du tout à ce que tu puisses lui poser la question en retour ? Mais toi-même, tu ne t'attendais pas réellement à ce qu'il te réponde avec sincérité. T'aurais plutôt misé sur une réponse ponctuée d'humour ou quelque chose comme ça. Mais Em' sembla prendre la question très au sérieux, au contraire.

Donc, garçon assez grand, pas trop baraqué, qui profite de la vie, les yeux bleus... Tu manques de t'étouffer avec ta gorgée de bière. T'avais bien entendu ? Tu le fixais un instant, les yeux grands ouverts, comme pour t'assurer que ce n'étaient pas tes oreilles qui t'avaient fait défaut. "Attends... Je rêve ou tu viens de faire mon portrait, là ? T'es en train de dire que je suis carrément ton type de mec ?" Que tu demandais en levant un sourcil. Bon, dans un sens c'était logique de coucher avec quelqu'un qui rentre dans nos critères. Mais là, ce qu'il venait de dire, c'était flagrant à quel point ça te ressemblait. "Hein ? Te présenter quelqu'un ? Non, t'es un grand garçon, tu trouveras tout seul ! J'étais juste curieux. Et la réponse était... Intéressante. Je ne regrette pas d'avoir demandé." Que tu lui réponds, avant de sourire.

C'est à ce moment-là qu'une petite tête brune vint se loger sur ton épaule, te faisant sursauter au passage. "Que tu ne dises pas aux autres que t'as invité Emmerich, je conçois, mais que tu ne me l'ai pas dit à moi... T'es un traître Engy, un gros traître..." Dit-elle en te dévisageant, avant de poser les yeux sur Em' et tendre la main. "Enchantée d'enfin te rencontrer dans des conditions convenables. Moi c'est Minna !" Puis, elle se tourna de nouveau vers toi. "Je ne savais pas que t'avais son numéro !" "Euh, je l'avais pas en fait, je l'ai appelé en empruntant le portable de Anna. Il est venu pour la raccompagner." Minna toisa alors longuement Anna, l'air contrarié. "Engy, t'es un génie. Mais c'est gentil de ta part Emmerich, d'être venu. Tu vas sauver la vie de tout le monde, on en peut plus de cette fille. J'ai pu adresser que trois mots à mon cousin de toute la soirée, tu te rends compte ? Il la lâche plus, j'en ai marre..."

La demoiselle s'accrocha à ton bras et commença à te faire les yeux doux. Elle avait forcément un truc à te demander. "Dis... Tu veux pas m'emmener danser, je m’ennuie..." Ce à quoi tu répondis : "Non, pas tout de suite Minna." La jeune femme, visiblement déçue, mais déterminée, insista alors en dégainant son plus bel accent. "I wanna dance. Please Engel, say yes... Please..." "That's still a no Minna. Tu sais, c'est pas parce que tu me le demandes en Anglais que ma réponse va changer." La concernée sembla bouder un peu. "Je me suis dit que si je te parlais dans ta langue natale, tu serais plus disposé..." "Minna, ça n'a aucun rapport ce que tu dis. Tu dis n'importe quoi." Apparemment, dans la tête de la brune, son raisonnement avait du sens. Mais seulement dans sa tête alors. Mais Minna étant ce qu'elle était ne fit pas la tête longtemps et continua alors : "Ahhh, mais tu veux pas parce que je te dérange ? T'allais demander à Emmerich de danser, c'est ça ?"

Tu la dévisages. Elle tient ça d'où ? T'allais pas du tout demander à Em' de danser, non. Face à ton regard interrogateur, elle précise : "Bah je sais pas, tout à l'heure tu m'as dit que ça t'arrivait de demander à des mecs de danser, je croyais que t'allais lui demander." "Oui, mais... J'ai dis que ça m'arrivait parfois. Et j'ai jamais dit que j'allais danser avec qui que ce soit maintenant. Si toi tu tiens tant à danser, demander à Gaspard, ça lui fera plaisir." Vraiment, c'était trop demander qu'on te foute la paix et qu'on cesse de donner à Emmerich matière à rire sur toi. Ce n’était pas possible ça ! Minna, se tourna de nouveau vers Emmerich, et dit l'air fière d'elle : "T'as vu comme il veut se débarrasser de moi, juste parce que t'es là ! C'est un ami ingrat, tu crois pas ?" "Minna !" C'était un scandale, une blague, un coup monté contre toi.

Un long soupir faillit échapper à Emmerich lorsqu'Engel réagit rapidement à ce qu'il venait de dire. Bordel ! Sa réponse n'était pas passée inaperçue, au contraire son ex amant avait saisi la ressemblance frappante entre lui et le portrait que le plus jeune avait dressé. Pouvait-il vraiment lui en vouloir ? Il n'avait pas été très subtil avec sa description, mais au moins pour une fois il n'avait pas essayé de fuir, d'esquiver la question, il avait accepté de dire ce qu'il pensait vraiment, même s'il avait oublié un détail important.

« - Genre, tu es le seul mec à correspondre à cette description ? », Dit-il en levant les yeux au plafond pour faire genre qu'il n'était pas vraiment déstabilisé par cette répartie. Au fond, il était gêné à mort mais heureusement il ne sentait pas ses joues s'empourprer plus que nécessaire.

« - Intéressante ? N'importe quoi. Mais bon, oui, tu - »

Sa phrase s'arrêta là lorsqu'il vit Minna s'approcher. Emmerich ne voulait pas avouer qu'Engel remplissait plusieurs de ses critères si quelqu'un pouvait l'entendre, il n'était pas prêt à assumer ça publiquement. Il ne connaissait pas assez la demoiselle pour savoir s'il lui faisait confiance ou non, après tout, elle pouvait être comme Lorenz à balancer les trucs sans penser aux conséquences que ça pourrait créer. Par contre, aussi étonnant que ça pouvait paraître, le blondinet n'était pas contre dire la vérité au concerné.

Prenant une gorgée de sa bière, Emmerich écouta à moitié ce que disait la jeune fille avant de se tourner vers elle et de lui serrer la main. Il esquissa un sourire un peu gêné, ne sachant pas vraiment s'il était à sa place ou pas. Après tout, il n'était pas là pour se rapprocher d'Engel, il n'avait aucune raison d'apprendre à connaître ses amis. Il avait pour seule mission de ramener Anna saine et sauve chez elle avant qu'elle ne couche avec Erich dans l'appartement de son ancien amant. C'était simple et pourtant il avait déjà réussi à se laisser distraire quelques instants.

« - Hm, enchanté, Minna. »

Quel beau mensonge. Lui-même sentait que ses mots sonnaient faux mais la jeune fille ne sembla pas s'en préoccuper puisqu'elle était déjà en train de reprendre la parole pour questionner Engel. Ils avaient déjà échangé leurs numéros, trois ans auparavant pour avoir une chance de se revoir, mais depuis Emmerich avait changé deux fois de numéros. Il n'avait pas fait ça pour empêcher son ancien amant de le joindre, il avait été obligé d'en arriver là pour stopper des homophobes de le harceler constamment. Il avait utilisé la même excuse à chaque fois pour justifier ces changements à sa mère, celle du forfait moins cher et plus intéressant.

« - Hm hm, ouais », Fit-il en observant Anna qui se collait de plus en plus contre Erich. Il l'avait rarement vue dans cet état. Normalement Madga veillait à ce qu'elle ne picole pas trop pour ne pas avoir à la traîner ou à la retrouver violée dans un coin de la boîte mais ce soir son amie n'était pas là alors la brune s'était laissée aller.

« - T'allais demander à Emmerich de danser, c'est ça ? »

Bouteille de bière en main, Emmerich failli s'étouffer, avalant de travers. Pourquoi les potes d'Engel passaient leur temps à les pousser dans les bras l'un de l'autre avec leurs idées à la con ? N'étaient-ils pas censés le détester et vouloir qu'il parte le plus vite possible ? Il n'en revenait pas de ce qu'il venait d'entendre. Il n'y avait aucune chance pour qu'Engel l'invite à danser ce soir et encore moins pour qu'Emmerich accepte de se lâcher devant des personnes qui faisaient partie de la bande ennemie. Il avait besoin d'être vraiment à l'aise pour danser devant d'autres personnes.

« - Rhm, non, ça n'a rien à voir avec moi. Je suis juste là pour récupérer Anna. En parlant d'elle, je ferais bien d'aller la prévenir de ma présence, histoire de lui laisser le temps de se préparer mentalement. »

Tout se passait bien jusqu'ici entre Engel et lui mais la présence de Minna mettait clairement le blondinet mal à l'aise. Il ne se sentait pas à sa place alors il préférait s'éloigner quelques instants, même si pour le moment sa pote ne risquait pas de vouloir lâcher son Jules. Elle était accrochée à Erich comme une moule à son rocher, c'était désespérant comme spectacle, mais il fallait bien que le blond lui laisse un peu de temps pour se faire à l'idée qu'il allait l'embarquer de force d'ici quelques temps. Il ne pouvait pas s'éterniser ici sinon qui pouvait prédire ce qui risquerait d'arriver ? Il ne pouvait pas s'attacher à nouveau à Engel.  

« - Ah oui, j'ai oublié de dire, j'ai aussi un faible pour les gars qui ont un accent et qui parlent bien anglais », Souffla-t-il discrètement à l'attention d'Engel avant de s'éloigner. Il ne savait pas pourquoi il précisait ça maintenant que la conversation était finie, mais il avait eu envie de rappeler ce détail. Il était persuadé qu'il avait déjà dit à son ancien amant qu'il aimait ça, c'était lorsqu'il l'avait entendu parler anglais avec Minna qu'il s'était souvenu qu'il avait un faible pour ça, aussi ridicule que ça pouvait paraître. Et avant de sentir ses joues rougir, Emmerich se faufila jusqu'à la place où étaient assis Erich et sa pote. Il les regarda un instant en se raclant la gorge avant de s'annoncer plus franchement.

« - Hey Anna.
- Quoi ? », S'exclama cette dernière visiblement énervée d'être interrompue, mais lorsque son regard croisa celui du blond, elle sembla surprise et en même temps perdue. Qu'est-ce qu'il faisait là ?, c'était probablement la question qu'elle devait se poser en le dévisageant.

« - Je te laisse le temps de finir … ça », Dit-il en désignant Erich et Anna d'un vague geste de la main, avec celle qui tenait sa boisson, « Et après je te ramène. Mais bon, profitez encore un peu, je suis pas à la seconde près. »

Bien évidemment que non, tu n'étais pas le seul mec à correspondre à cette description. Mais le fait est que tu en faisais partie, et que tu te trouvais juste en face de la personne qui te faisait sa liste de qualités du mec idéal. Alors évidemment que tu te sentais concerné, immédiatement. Mais cette conversation n’eut pas le temps d'aboutir à quoi que ce soit d'autre, puisque Minna venait casser l'ambiance. Minna était gentille, mignonne, mais parfois elle ne se rendait clairement pas compte à quel point elle pouvait se montrer encombrante. Elle gênait au point où Emmerich n’avait même pas souhaité finir la phrase qu'il avait entamée, de peur que la petite brune ne puisse l'entendre. D'autant plus qu'il ne fallait pas être aveugle pour se rendre compte que Em' n'était pas spécialement à l'aise en sa présence, ce qui pouvait se comprendre. À sa place tu aurais eu la même réaction.

Et il y avait fort à croire que si Minna s'était permis de se taper l'incruste, ce n'était que pour la simple et bonne raison que tu lui avais parlé de tes déboires avec le blondinet. Mademoiselle était au courant, donc elle se pensait tout permis. Un pot de colle cette fille quand elle s'y met. Mais le coup de la danse, ce fut le pompon ! La cerise sur le gâteau ! Et Emmerich manqua de s'étouffer en entendant ça. Mais évidemment, c'était affreusement gênant comme situation, pour tout le monde sauf Minna qui ne semblait pas gênée pour le moins du monde, ni même désolée d'ailleurs.
Et c'est pour cette raison que t'étais bien incapable de blâmer Emmerich, et son envie de fuir la conversation une bonne fois pour toutes. Cependant le jeune homme prit le temps d'ajouter quelque chose à ton attention avant de s’éclipser ailleurs. Tu te mordillas la lèvre pour te retenir de glousser. Et là, t'étais pas supposé te sentir visé, c'est ça ? T'avais oublié ce petit détail. Emmercih te l'avait déjà dit, y'a trois ans de cela, que ce détail le faisait craquer. Mais entre temps, ça t'était complètement sorti de l'esprit. "Je rêve ou c'est un sourire de crétin sur ton visage, Engel ?" "Hein ? Mais non, tu dis n'importe quoi !" La demoiselle croisa les bras, dubitative. "Il te plaît encore, avoue ! On ne me la fait pas à moi !" Tu soupiras lourdement, avec l'envie de lui renverser ton fond de bière pour la faire taire, mais tu te ravises. "Bah sache que t'observes mal quand t'as bu. On a mis les choses à plat et ça va pas plus loin. Et il va rien se passer entre lui et moi. On se contentait de discuter, c'est tout. Maintenant arrêtes avec tes questions chiantes, et fait moi de l'air, t'es la deuxième à me foutre la honte ce soir." Et c'est sous les protestations de ton amie que tu la poussas dans les bras de Gaspard pour qu'il l'emmène danser, et que tu puisses avoir la paix cinq minutes.

De son côté, Erich semblait fort occupé, collé à Anna. Et c'était sans grande surprise qu'il ne fut pas bien gai d'être interrompu. Tout comme la concernée soi dit en passant. "Je te laisse le temps de finir … ça. Et après je te ramène. Mais bon, profitez encore un peu, je suis pas à la seconde près." Et cela n'enchanta d'autant moins le brun. "Excuse-moi ? Je crois que j'ai mal entendu ? Et on peut savoir ce que tu fous ici toi, d'abord ?" Erich se leva alors, et pointa son index en direction d'Emmerich. "Toi petite merde, écoute-moi bien, t'as trente secondes pour dégager avant que je te fasse sortir moi-même en te bottant le cul ! Je sais pas quel est le con qui t'a fait entrer, mais..." "Le con c'est moi. T'as quelque chose à me dire?" que tu interrompais alors, puisque les choses commençaient à déraper. "Pardon ? Engel, tu te fous de moi ?" "Pas du tout, je l'ai appelé pour qu'il ramène cette meuf qui casse les couilles à tout le monde. Je te rappelle que ça devait être une soirée entre potes, juste pour toi, et t'as passé la soirée collé aux fesses de cette fille que personne d'autre ici peut supporter. Donc maintenant elle va rentrer, je tolère plus sa présence sous mon toit."

De ce que tu pouvais lire sur le visage de ton meilleur pote, il n'aimait pas du tout le ton que tu prenais avec lui. "Tu nous fais quoi là Engel, au juste ? Tu fais entrer un mec que personne ici peut sentir, tu veux virer la fille que j'ai invitée, et tu t'en prends à moi ? Redescends tout de suite." Là, t’hallucines. " Ahhh, donc c'est moi le grand méchant de l'histoire, c'est ça ? Tu m'emmerdes Erich ! Quand tu réagis comme ça, ça me rappelle pourquoi je voulais plus te parler pendant si longtemps ! Quand t'es comme ça, t'es trop con !" Erich qui voyait rouge s'approcha de toi et te saisit au niveau du col. Les autres de la bande savaient pertinemment que tu avais raison. Mais vu comme Erich était en colère, personne n'avait très envie de contredire le leader du groupe. Sympa la solidarité. Plus jamais tu ne feras de fête chez toi, plus jamais. "Répète ça Engel ? Je t'emmerde ? Vraiment je t'emmerde ?" Tu serres les dents, sérieusement, c'est comme ça que la soirée allait finir ? Toi et Erich à vous battre ? Quelle soirée inoubliable, vraiment ! Mais tu ne pouvais pas t'empêcher de répondre : "Ouais, tu commences à me faire chier là !"

Ça ne pouvait pas bien finir cette histoire. Emmerich savait déjà que la situation allait empirer rien qu'en se trouvant ici, personne ne pouvait le blairer, du moins en dehors d'Engel et de Minna. Mais ce n'était pas pour ça qu'il allait prendre la poudre d'escampette, il allait ramener Anna chez elle avant qu'elle ne fasse quelque chose qu'elle allait regretter. Elle n'était pas droguée, comme Gabi l'avait été, mais elle n'était pas en état de décider, Erich ne faisait que profiter d'elle. Un vrai connard. Samuel n'était peut-être pas le garçon le plus intelligent et le plus attentionné mais il ne courrait pas après la brune juste pour tirer son coup.

Toisant du regard le garçon qui lui faisait face, Emmerich ne comptait pas reculer. Combien de fois il avait fait face à un groupe d'homophobes qui voulait lui refaire le portrait ? Bien trop souvent, alors ce n'était pas un gars tout seul complètement bourré qui allait lui faire peur. Il esquissa même un sourire provocateur lorsqu'Erich l'insulta, menaçant de lui botter les fesses pour le mettre à la porte. Qu'il essaye, il verrait qui allait maîtriser l'autre ! Emmerich n'en avait peut-être pas l'air mais il savait bien se battre, il avait appris à se défendre à force de subir les attaques de mauviettes qui n'avaient pas les couilles de l'affronter seul à seul.

Prêt à répondre à Erich lorsqu'il aurait fini de déblatérer ses idioties, Emmerich sentit son sourire disparaître lorsqu'Engel prit la parole. Il ne s'attendait pas à ce que son ancien amant s'interpose dans la conversation. Par réflexe, il fit même un pas de côté, surveillant de prêt l'échange. Personne ne semblait réagir, comme si aucun de leurs amis n'osait choisir un camp. Ils pouvaient critiquer, dire que la bande d'Emmerich était ridicule à s'insulter mais visiblement ils n'étaient pas mieux. Par contre, il n'allait pas les laisser se faire du mal, pas à cause de lui.

Il jeta un bref coup d'oeil à Anna qui s'enfonçait toujours plus dans le canapé, elle ne savait plus où se mettre. Les larmes aux yeux, elle semblait réaliser la connerie qu'elle avait commise en venant ici en terrain ennemi. Il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir, il n'était pas toujours du genre à faire les bons choix dans sa vie. Au contraire, il était même le roi pour prendre le mauvais chemin, enchaînant encore et toujours les erreurs. Et comme pour ne pas manquer à son devoir, il s'approcha d'Engel et Erich, prêt à les séparer, avant de se prendre un violent coup de coude en pleine figure. Sous le choc, il lâcha sa bière qui roula au sol en déversant une petite partie de son contenu.

« - Putain ! », S'exclama-t-il en même temps qu'Anna poussait un cri. Il ne vit pas la jeune fille plaquer une main contre sa bouche avant de tenter de le lever pour venir le voir mais elle échoua bien vite en retombant dans le canapé, les jambes flageolantes. Il avait fait quelque pas en arrière, une main sous son nez, entre ses doigts quelques gouttes rougeâtres s'échappaient pour rejoindre la boisson qu'il avait fait tomber.

Quelle soirée !

Finalement il allait vraiment regretter de ne pas avoir laissé Engel se débrouiller avec Anna. Là il aurait pu être en compagnie de Christian plutôt que de se faire insulter et frapper par un connard. En vrai, il ne devait rien à ces deux-là. Sa pote était assez grande pour faire décider toute seule si elle se laisser baiser par un mec qui n'avait rien à faire d'elle ou non. Et son ancien amant avait déjà eu des excuses, alors pourquoi se sentait-il redevable ? Mais au lieu de laisser la colère monter au point de répliquer à Erich, Emmerich attrapa Engel par le bras de sa main libre et l'entraîna hors de la pièce. Ce n'était pas le moment de laisser un mec bourré gâcher toute la soirée, un blessé c'était déjà bien suffisant. Il l'obligea à l'accompagner un peu avant de le lâcher pour rentrer dans la salle de bain lorsqu'il eut trouvé le chemin. Emmerich se pencha au dessus du lavabo pour laisser le sang couler sans risquer de ruiner le parquet ou le carrelage.

« - Fuck », Souffla-t-il en essayant une partie du sang avant de compresser sa narine. C'était assez douloureux mais il avait connu pire. Il n'avait rien de casser, c'était déjà ça. Alors pas plus concerné que ça par son état, il sortit son téléphone de sa poche et le déverrouilla plus ou moins facilement avec sa main droite. Ce n'était pas évident en le tenant hors de portée des gouttes de sang qui perlaient de son menton. Incapable d'écrire un message pour expliquer la situation, Emmerich composa le numéro de Magda, la seule personne qui pourrait leur venir en aide dans cette situation.

« - Em', tu veux quoi mon salaud ? »

Ce fut presque un soulagement d'entendre cette salutation un peu spéciale mais typique de la demoiselle. Elle n'avait jamais vraiment montré une attention particulière au blondinet mais depuis son coming out, elle semblait l'apprécier un peu plus. Elle lui avait même avoué qu'elle avait couché avec des filles, se fichant éperdument du sexe de la personne tant qu'elle prenait son pied. Elle appréciait avoir quelqu'un avec qui parler ouvertement sans être jugée.

« - Anna a besoin de toi », Dit-il en constatant que ce n'était pas si simple de s'exprimer avec une main collée contre son visage mais celle-ci était essentielle pour calmer le saignement.

« - Et toi ? Ça va ? »

Magda donnait l'impression d'être une fille détachée de tout mais c'était l'une des plus observatrices qu'Emmerich n'avait jamais connu. Elle remarquait le moindre détail, arrivant ainsi à voir quand quelqu'un n'était pas au mieux de sa forme. Personne ne pouvait la tromper. Même si dans ce cas-là  ce n'était pas bien difficile de voir qu'il y avait quelque chose qui clochait, Emmerich n'appelait jamais la jeune fille, c'était toujours elle qui prenait les devants.

« - Envoie un message à Anna et viens la récupérer, ok ? »

Emmerich sentit la jeune fille hésiter avant d'accepter. Elle lui promit de revenir vers lui quand elle en aurait fini avec Anna puis elle raccrocha, permettant à son ami de reposer le téléphone pour s'occuper de son nez.

Dès lors que tu avais décidé d'intervenir, les choses s'étaient passées assez vite. Entre toi et ton caractère, ne pouvant t'empêcher de faire des reproches à ton meilleur ami, parce que cette fois il fallait l'avouer, il l'avait bien mérité, et Erich, qui après avoir bu plus que de raison, partait au quart de tour, au point de te menacer de t'en coller une, ça faisait un très beau tableau tout ça. Mais t'étais d'autant plus agacé par le manque de réaction de vos amis respectif. Ils étaient vraiment prêts à vous laisser vous en prendre l'un à l'autre, juste pour ne donner raison à aucun de vous deux ? Ahhh c'était beau ! Au point que ce fut Emmerich qui se décida à intervenir. Et malheureusement pour lui, il en paillait le prix.
Connaissant le genre de Erich, il y avait fort à parier qu'en voyant le blond approcher d'un peu trop près, il avait trouvé très intelligent et très bien calculé de lui foutre le coude en pleine figure, sans ménagement bien évidemment. "Erich, mais ça va pas ou quoi ?" "Ohhh ça va toi, il l'a pas volé ! Tu ne vas pas le défendre en plus ?" Tu voulais répliquer quelque chose, pour lui clouer le bec une bonne fois pour toutes, parce que tu perdais sincèrement patience. Mais tu n'en eus pas le temps. Em' venait de te saisir le bras, et te tira plus loin, pour éviter que ta petite confrontation avec ton meilleur ami ne dégénère pour de bon.

Le plus jeune t'abandonna en cours de route, et Minna qui avait assisté à la scène avec horreur se précipita vers toi, encore toute retournée. "Engel, tu vas bien ? Je suis navrée, je ne sais pas ce qu'il lui a pris, je..." "C'est bon Minna, t'as pas besoin de t'excuser pour lui, et puis c'est pas moi qu'il a frappé au final, c'est pas à moi qu'il faut demander comment je vais. Va dans la cuisine mettre des glaçons dans un chiffon. Si j'y vais, Erich va vouloir me tomber dessus. S'il te plaît." La demoiselle s'exécuta sans réfléchir, attrapa le premier torchon venu, ouvrit le congélateur, et mit maladroitement des glaçons dans le bout de tissus, en fit un baluchon comme elle put, avant d'aller te le donner. "Merci, tu devrais aller voir Erich, y'a que toi qui saura le calmer. T'occupe pas de moi."

Tu laissas la brune en plan, celle-ci se tâtant si c'était une bonne idée d'aller parler à son cousin vu son état. Mais elle n’eut pas le temps de te demander ton avis, puisque tu t'étais déjà engouffré dans la salle de bain. Emmerih était pendu au-dessus du lavabo, pissant le sang. Les saignements de nez de ce genre étaient toujours impressionnants à cause de la quantité de sang qui s'écoulait, mais c'était rarement bien grave. Tu tirais un tabouret qu'étais dans un coin de la pièce, et le mit juste à côté du blessé. Le désignant de l'index, tu déclarais alors, l'air concerné par son état. "Assied toi un peu, on s'en branle du carrelage si jamais ça t'inquiète." Ton regard est insistant. En aucun cas tu ne tenais à le commander ou quoi que ce soit. S’asseoir était plutôt pas mal, pour essayer de se détendre et se calmer, de façon à faire redescendre le rythme cardiaque, et faciliter l'arrêt de l'écoulement de sang. Donc c'était dans son intérêt. Tu attends qu'il daigne s’exécuter, avant de t'accroupir pour être à son niveau, et lui tendre la poche de glace faite maison. "Je me suis dit que ça pourrait aider pour faire passer la douleur..." Tu préfères qu'il gère le baluchon lui-même, pour lui éviter du mal inutile et maladroit, et parce qu'il ne serait peut-être pas pour que tu le fasses toi-même.

T'hésites un instant à quoi dire, alors que tu semblais embarrassé. "Em'... Je suis vraiment désolé... Je t'assure, je ne voulais pas que ça finisse comme ça. Je me suis dit que si j'intervenais, ça éviterait que ça te retombe dessus. Mais c'est raté..." Tu te mords la lèvre, visiblement très embêté. T'oses pas vraiment le regarder dans les yeux, parce que tu sais que c'est ta faute. On n’en serait pas là si tu apprenais un peu à fermer ta grande gueule. "La prochaine fois, je te jure, je me débrouille tout seul, et je ne gâcherais pas ta soirée. C’était carrément débile de ma part de te demander de venir dans un premier temps. J'aurais dû savoir que ça ne finirait pas bien... Je suis le roi des cons, je sais. Je suis vraiment désolé..." Tu soupires, avant d'enfin croiser son regard. "La question peut sembler stupide, mais... Comment tu te sens ? Ça te fait encore mal ?" Tu avais toi-même fait ta propre expérience de la chose à plusieurs reprises, tu n'as certainement pas passé ta vie intacte de toute bagarre qui se termine mal, mais tout le monde ne réagit pas de la même façon à la chose. Et tu n'étais pas sans savoir que Emmerich avait un rapport particulier à ce genre de choses.

Seul dans la salle de bain, Emmerich espérait que le saignement allait bientôt cesser pour lui laisser une chance de rentrer chez lui avant qu'Erich ne lui refasse réellement le portrait. Il avait assez pris pour la soirée, surtout qu'il était juste venu donner un coup de main. Heureusement Magda allait prendre la relève pour s'occuper d'Anna, elle était bien la seule qui arriverait à s'en sortir sans empirer la situation. La jeune fille n'était presque jamais présente quand il y avait des problèmes avec le groupe d'Engel, elle essayait de rester le plus loin possible des disputes, il y avait donc peu de chance que quelqu'un tente de l'insulter ou de la menacer.

« - Assied toi un peu, on s'en branle du carrelage si jamais ça t'inquiète. »

La voix de son ancien amant le surprit, Emmerich ne pensait pas le voir arriver à ses côtés. En faisant ça, Engel risquait de s'attirer encore plus les foudres d'Erich. Le blondinet l'avait entraîné à sa suite pour calmer le jeu, pas pour l'obliger à s'occuper de lui, mais sur le coup il se laissa faire, prenant place sur le tabouret. Il accepta même le torchon et les glaçons en silence, les fixant un instant avant de venir appliquer le tissu contre son nez pour faire passer la douleur. Il grimaça légèrement au contact du froid avant de reprendre un air plus neutre, comme s'il ne ressentait rien. Il mentirait en disant qu'il n'avait pas l'habitude de s'en prendre plein la figure, même s'il était loin d'avoir développer une résistance à la douleur. Il utilisait juste d'autres méthodes pour la faire passer, comme la drogue ou l'alcool.

« - Mer- », Commença-t-il à prononcer avant de s'interrompre lorsqu'Engel prit à nouveau la parole. S'il avait été stupéfié par l'arrivée du plus âgé dans la salle de bain, il l'était encore plus par son discours et ses excuses. Il avait peut-être mal géré la situation en l'invitant à venir récupérer Anna alors que tous ses potes ne pouvaient pas le blairer mais ça ne faisait pas de lui un roi des cons comme il le disait. Le blondinet était prêt à tendre sa main libre pour essayer de le couper en douceur dans sa tirade mais il renonça à son geste en voyant ses doigts couverts de sang. Il en avait mis partout, inutile de salir encore plus en touchant Engel. De toute façon il semblait avoir fini, ponctuant ses paroles de deux questions.

« - Comment tu te sens ? Ça te fait encore mal ? »

Pour Engel elles paraissaient peut-être stupides mais pour Emmerich c'était l'inverse. Il avait sentit son cœur se serrer, sa gorge se nouer en notant la pointe d'inquiétude dans la voix de son ex amant. Combien de fois avait-il espérer entendre ces questions de la part de sa mère ? Elle n'avait jamais proposé de l'aider à se soigner ou tenté de lui apporter quelque chose, elle l'avait toujours laissé se débrouiller seul puisqu'elle considérait que c'était sa faute s'il finissait dans cet état. Et vu qu'il n'avait pas de père et qu'il faisait de son mieux pour ne pas impliquer sa fratrie dans sa vie chaotique, il avait appris à ne plus compter sur personne. À tel point qu'il ne savait pas comment réagir face à Engel qui prenait le temps de l'aider et qui lui demandait sincèrement comment il allait, même si ça pouvait paraître maladroit.

« - J'ai connu pire », Souffla-t-il après un léger blanc. Il ne mentait pas puisqu'il avait vraiment vécu bien pire comme blessure au cours de ces dernières années. Ça passerait rapidement et une fois que le saignement serait arrêté ce serait plus qu'un mauvais souvenir.  Par contre l'ambiance venait de prendre une tournure qu'il appréciait guère puisqu'il commençait à se sentir un peu trop vulnérable, comme si Engel allait percevoir à quel point ses actions le touchaient alors qu'elles pouvaient paraître banales aux yeux des autres.

« - Oh tu sais, ma soirée aurait peut-être été bien pire si je n'étais pas venu ici. Qui sait, tu m'as peut-être sauvé des bras d'un tueur en série ! »

Ce fut qu'une fois qu'il eut prononcé les derniers mots qu'Emmerich se rendit compte qu'il venait de dire qu'il aurait pu être dans le lit d'un de ses nombreux coups d'un soir au lieu d'être sur ce tabouret. Il ne savait pas pourquoi mais devant Engel il n'assumait plus autant ses choix, alors qu'il clamait haut et fort qu'être célibataire et se faire plaisir lui convenaient parfaitement. Pouvait-il réellement faire comme si de rien n'était ? Noyer le poisson tant qu'il était encore temps ?

« - Et puis, niveau mauvais choix, je peux pas vraiment t'en vouloir, je suis plutôt bien classé parmi les cons. »

Tu n'avais pas manqué la grimace que Emmerich avait faite lorsqu'il avait posé la poche de glace contre son nez endolori. T'espérais au moins qu'avec ça, la douleur s'estomperait un peu. Le nez restait selon toi un endroit assez sensible et prompt à la douleur. Et à peine le jeune homme avait-il amorcé de te remercier que tu te confondais en excuses pour ce qui venait de se produire. Vraiment tu t'en voulais beaucoup. Ce n'était pas supposé arriver. Et sous ton propre toit en plus, t'avais pas été foutu d'empêcher que ça ne dégénère, tu te sentais naze. T'avais même la sensation d'avoir empiré la situation alors qu'à l'origine, tu voulais éviter que ça ne finisse mal. Décidément tu faisais tout de travers ce soir.

Mais bien vite, les excuses laissent place à des interrogations et des inquiétudes. Évidemment, tu te doutais bien que le concerné n'allait pas répondre qu'il pétait la forme, qu'il n'avait pas mal du tout et se sentait d'attaque pour une rumba ! Mais la question, aussi stupide qu'elle pouvait paraître, te semblait importante quand même. "J'ai connu pire" qu'il te répond. Ça te soulageait un peu, mais pas totalement non plus. Ça restait un peu vague, parce que pire à quel point, ça restait à savoir. Mais il ne semblait pas non plus à l'agonie ou au bord de l'évanouissement, et était encore parfaitement en mesure de te tenir une conversation somme toute normale. Donc c'était plutôt bon signe.

Tu en viens à te demander combien de fois au juste, son nez a fini esquinté comme ça. Combien de poings se sont abattus volontairement dessus. Tu ne voulais pas que Em' associe ta bande, et ce qui venait de se passer à toutes les fois que des homophobes lui sont tombés dessus. Parce que certes tes amis pouvaient être cons comme pas permis, mais ils avaient l'avantage d'être tolérants. Et puis ils n'étaient même pas au curant des penchants du blond, alors... Tu ne souhaitais juste pas que ça ravive trop de mauvais souvenirs... Tu penches alors un peu la tête sur le côté en pinçant tes lèvres et en lâchant un soupir. Puis tu finis par dire, comme pour dédramatiser un peu la situation : "Si jamais t'as besoin, je te paierais la chirurgie !"

Et le voilà finalement parti à commenter ce qu'aurait pu être sa soirée. Et là tu comprends à quel point tu l'as dérangé. Tu comprends ce que tu as interrompu, et pourquoi Emmerich semblait au début si réticent à l'idée de venir, lorsque vous étiez au téléphone. Il était en bonne compagnie. Enfin bonne, ça tu pouvais pas trop le savoir, mais en compagnie en tout cas. Et t'as comme le sentiment que Em' a une légère gêne de t'avoir dit ça. Alors tu ne peux t'empêcher de repenser à votre dernière conversation, dans le parc, et au discours que tu lui as sorti. À l'avis que tu lui as donné à propos de tous ses coups d'un soir. C'était sûrement ça qui devait le gêner. "Alors soit je t'ai réellement sauvé et dans ce cas-là cette soirée n'est pas si mal, en plus de faire de moi un héros, ou alors j'ai vraiment bien gâché ta soirée, et je suis un gros looser et t'as le droit de le dire !" Tu te dis que répondre ça avec un large sourire est plutôt pas mal pour détendre l'atmosphère et lui faire comprendre que peut importe ses choix, tu ne souhaite pas le jugé, même si t'as pas la même vision des choses. Et le tout sans le dire ouvertement pour éviter de rendre la situation plus gênante.

"Enfin quoi que... Est-ce qu'il était grand, pas trop baraqué, croquait la vie à pleines dents, avait les yeux bleus et un accent tout en parlant bien anglais ? Parce que si c'est pas le cas, ta soirée aurait pas été aussi chouette. Au moins ici je t'ai vendu un peu de rêve !" Tu souris comme un con en lui faisant un clin d’œil, et ponctuant le tout d'une petite tape amicale sur l'épaule, fier de toi. Bah, tu pouvais bien le charrier là-dessus un petit peu ! Il s'était pas gêné, lui, plus tôt. Tu finis par te relever en ouvrant l'armoire à pharmacie.. "Tu veux prendre un cachet contre la douleur ?" Pour ta part, entre l'alcool et tout ce qui venait de se passer, tu avais mal au crâne, alors tu décidais de prendre de l'aspirine. "Je devrais prendre comme résolution de plus jamais boire d'alcool, et de ne plus jamais organiser de fête chez moi. T'en penses quoi ? Enfi y'a quand même de grandes chances que je ne tienne que la deuxième, mais c'est déjà ça... Toute façon à chaque fois qu'on fait la teuf chez moi, y'a toujours un truc qui se passe mal. Y'a eu la fois où Will' s'est foulé la cheville en trébuchant sur le tapi, la fois où Lorenz a gerbé sur mon pieu, la fois où Gaspard à balancé mes baskets par la fenêtre et elles se sont accrochées au fil électrique, je les ai ensuite jamais revus, et la dernière fois, Lorenz a défoncé mon trépied à quatre cents boules, j'ai du en racheter un. Et aujourd’hui, bah je te raconte pas. Ouais vraiment, plus de fête chez moi. Ils se démerdent !" Bon, l'épisode racontage de vie c'était fini, mais le fait est qu'à chaque fois que la soirée se passait chez toi, ça ne finissait jamais bien.

L'envie de quitter la pièce pour faire mine d'aller chercher à boire le titilla, malheureusement il ne pouvait pas sortir sans risquer de croiser Erich et d'empirer la situation. Emmerich était donc coincé ici, à devoir assumer ses paroles. Autant le dire maintenant, ce n'était pas évident surtout quand son ancien amant s'amusait à en rajouter ! C'était de bonne guerre, vu que le plus jeune avait dit tout à l'heure mais c'était quand même pas cool de profiter de son état de faiblesse. Il n'eut d'autre choix que de se mordre la lèvre discrètement et de subir l'humiliation lorsqu'Engel s'amusa à lui rappeler l'homme idéal à ses yeux. Mais au final l'ambiance sembla devenir plus légère et Emmerich n'hésita pas à répondre, préférant assumer ses conneries. S'il ne voulait pas qu'Engel lui ressorte ça il aurait pu se taire, c'était lui qui avait décidé de dire la vérité.

« - On va pas se mentir, il remplit sûrement moins de critères que toi par rapport à cette liste. Déjà il a les yeux verts. »

Après vu le peu de temps qu'il avait passé avec Christian et l'alcool qu'il avait bu, il n'avait pas trop fait attention. Il l'avait juste trouvé sympa, le courant était bien passé entre eux, mais maintenant qu'il était loin de lui, Emmerich ne ressentait pas vraiment le besoin de le contacter pour poursuivre ce qu'ils avaient commencé. Pourtant il avait son numéro et il suffisait qu'il lui envoie un message pour relancer les festivités.

Lorsqu'Engel lui proposa un cachet contre la douleur, Emmerich refusa. Il avait rapidement remarqué que les médicaments ne lui faisaient plus vraiment d'effet, il privilégiait donc l'alcool et la drogue lorsqu'il voulait anesthésier son cerveau et ses réactions aux blessures qu'il subissait. Ce n'était pas la meilleure idée mais au moins elle avait le mérite d'être efficace. Et jusqu'ici il n'avait eu aucun souci alors pourquoi s'arrêter ? Mais il se voyait mal réclamer un verre de Vodka ou sortir un joint de sa poche pour le fumer chez Engel. Il avait besoin de toutes ses capacités mentales et physiques pour pouvoir rentrer chez lui, il allait donc devoir attendre un peu avant de s'abrutir.

« - Oh ? », Fit-il lorsque le plus âgé lui avoua ses nouvelles résolutions, comme pour l'encourager à développer. Mais il semblerait qu'Engel n'avait pas eu besoin de ça pour poursuivre. Il esquissa un vague sourire amusé en l'écoutant raconter sa vie et tous les soucis qu'il avait pu avoir durant les soirées organisées dans son appartement. Lorsque l'alcool et la drogue étaient au rendez-vous il y avait peu de chances que la soirée se termine bien pour tout le monde. Emmerich se souvenait de pas mal d'incidents puisqu'il était souvent là pour surveiller les plus bourrés, il avait toujours fait attention à ne pas trop boire ou fumer pour éviter de parler de ses secrets. Mais maintenant qu'il n'avait plus rien à cacher, Emmerich avait décidé de se laisser aller et profiter pleinement des soirées, quitte à aller rouler des pelles à un bel inconnu. C'était souvent Magda qui le charriait en lui reprochant de garder les plus beaux gars pour lui.

« - Tu veux vraiment mon avis sur la question ? », Dit-il finalement en laissant un peu de répit à son nez endoloris, de toute façon il en avait marre de tenir le tissu rempli de glaçons, « Ce n'est pas moi qui vais te conseiller d'arrêter de boire. Je suis loin d'être le plus sage de ce côté là, même si ça me retombe souvent dessus quand il faut s'occuper des plus bourrés ! »

Emmerich était toujours là pour ses amis. La preuve, il venait de sacrifier une chance de passer une nuit passionnée avec un bel inconnu pour aller s'occuper d'Anna qui était dans un état pas possible. Il eut une petite pensée pour son amie, espérant que Magda arriverait bientôt pour l'embarquer avec elle. C'était bien la mieux placée pour s'en sortir sans empirer la situation.

« - Après pour ce qui est d'éviter les soirées dans ton appart', je comprends totalement ! Y en a toujours un pour foutre la merde … Mais bon, si les prochaines ne se déroulent pas chez toi, tu ne pourras plus m'inviter », Finit-il par dire, marquant une très courte pause, « Et dans ce cas, qui viendra récupérer Anna qui vous fait tous chier ? Parce que parti comme c'est ton pote va pas être satisfait ce soir donc il va sûrement vouloir l'inviter à nouveau. »

Ce soir Emmerich semblait d'humeur taquine, malgré les événements. Et c'était bien uniquement parce qu'Engel savait le mettre à l'aise. Ils avaient réussi à passer outre les conneries du plus jeune, leur permettant de renouer un peu. Ils n'allaient probablement pas devenir de très grands amis mais au moins, le blondinet avait l'impression qu'il pouvait rattraper quelques unes de ses erreurs avant de se faire complètement avaler et de finir par tout perdre.

Tu n'avais pas spécialement voulu le mettre dans un réel embarras, plutôt le taquiner un peu dans le but de rendre la situation moins dramatique qu'elle ne l'était. Et puis Emmerich ne semblait pas le prendre si mal que ça, puisqu'il ne se gênât pas pour te répondre et t'avouer qu'effectivement, l'autre homme avec qui il était plus tôt était un peu moins sa définition de l'homme idéal. Ce qui te tira un nouveau sourire. "Les yeux verts, hein ? Moi e trouve ça joli, les yeux verts. On en voit moins souvent que du marron ou du bleu. Ouais, j'aime bien les yeux verts." Que tu lui avouais tout en le regardant. Et à cet instant, tu ne pus t'empêcher de repenser à la toute première fois où vous vous étiez vu dans ce bar. Au début, tout était passé dans le regard, et le sien à ce moment, tu t'en rappelles comme si c'était hier. Et ses deux prunelles vertes, tu les avais dévorés des yeux toute la soirée. Il y avait tant de choses, tant d'émotions qui s'y véhiculaient, tant de sensations que tu ne t'étais pas lassé de lire. 

Tu secoues un peu la tête pour te sortir cette idée de là. C'était ridicule de repenser à ça maintenant. Ce n’était pas le moment d'être dans la lune. T'espérais simplement que Em' n'ait pas réellement remarqué que tu t'étais mis à fixer un point dans le vide durant quelques secondes.

Après ça, le blondinet avait écouté ta petite tirade à propos des innombrables galères qui te sont arrivées à chacune des soirées qui avaient eu lieu chez toi. "Tu veux vraiment mon avis sur la question ?" Que le plus jeune te demande. Tu hoches brièvement la tête en guise de réponse. "Je sais pertinemment que je continuerais de boire en soirée. Ça, c'est comme la clope, quand je dis que j'arrête, ça dure une semaine et c'est reparti. Pas faute d'essayer, mais j'y arrive pas."

Ahhh ça oui, t'aimerais beaucoup t'en débarrasser de tes clopes. Mais le fait était que ça te stressait à mort quand tu tentais de décrocher, alors la solution de facilité était toujours de reprendre. Alors à ce rythme t'étais pas prêt de t'en sortir. Encore heureux que tu ne fumais que du tabac.

" Après pour ce qui est d'éviter les soirées dans ton appart', je comprends totalement ! Y en a toujours un pour foutre la merde … Mais bon, si les prochaines ne se déroulent pas chez toi, tu ne pourras plus m'inviter" Ce à quoi tu renchéris en riant : "Ahhh j'avoue que je n'avais pas vu ça sous cet angle. C'est vrai que ça peut être pratique de faire ça ici quand même !" M'enfin, tu venais de lui promettre de ne plus l'appeler pour venir chercher Anna de toute façon, alors...

"Je ne sais pas si ta pote est consciente qu'il n'y a que ses fesses qui intéressent Erich. Parce que si elle ne le sait pas, elle va vite être déçue quand il aura enfin eu ce qu'il veut. C'est mon meilleur ami, je l'adore, mais franchement avec les nanas, c'est un gros con. C'est limite s'il leur crache pas dessus une fois que l'affaire est faite... On peut vraiment pas le défendre là dessus. Des fois je me demande comment on fait pour se supporter lui et moi." Tu lâches un soupir. Ouais, en vrai, Erich et toi étiez relativement différents. À la base, rien ne semblait vous destiner à vous fréquenter. Et si vous vous êtes longtemps perdu de vous, peut-être bien que vos divergences n'ont pas aidé. À un moment, ça a fait une rupture. Et encore maintenant, t'as parfois du mal à aller dans son sens, comme ce soir.

"Enfin bref, mes amis sont particuliers, et pour la plupart très gênants. Surtout Minna. D'ailleurs je suis désolé, j'ai bien vu qu'elle t'a mis mal à l'aise tout à l'heure. Elle est pas toujours très subtile, mais quand elle a un peu bu... Mais en vrai, elle est sympa. Et elle adore les gays ! Genre vraiment beaucoup. À mon grand désarroi !" Enfin, tu disais ça, mais dans le fond, Minna c'était ta princesse, tu l'aimais beaucoup trop. Mais tu réalises que depuis tout à l'heure t'es un vrai moulin à parole et que t'arrêtes pas de déballer ta vie. L'alcool te réussissait ! "Dis-le-moi si je parle trop et que je te gonfle ! Je dois être chiant."

Sur le coup, Emmerich pensa simplement qu'Engel avait des goûts différents et que c'était tout à fait naturel. Mais lorsque leurs regards se croisèrent pour ne plus se lâcher pendant quelques précieuses secondes, le blondinet se rappela qu'il avait aussi les yeux verts. Oh bordel ! Il se mordit discrètement la lèvre inférieure, priant pour ne pas rougir bêtement alors que son cerveau se rappelait le premier soir où ils s'étaient croisés. C'était les yeux bleus d'Engel qui l'avaient captivé. Il ne l'avait pas lâché de la soirée, se laissant emporter par ce regard si intense et si pénétrant à la fois. Mais ce soir, il lâcha prise rapidement pour baisser ses yeux vers la poche de glace qu'il tenait entre ses doigts. Il ne pouvait pas laisser son esprit divaguer sur le passé, c'était une époque révolue qu'il avait foutue en l'air en fuyant comme un lâche.

Heureusement le sujet changea rapidement et le blondinet en profita pour ne pas répondre à Engel. Il préférait ne pas plus s'aventurer sur un terrain aussi dangereux, surtout avec son ancien amant si proche et qui le fixait presque comme le soir de leur première rencontre. Mais là encore il était sûr qu'il avait mal interpréter les choses. Après tout, il avait bu un peu avant d'arriver et s'était pris un méchant coup en plein figure, ça avait de quoi détraquer le cerveau, non ?

Par contre, contrairement à Engel, Emmerich était persuadé qu'il pouvait arrêter de fumer quand il le voulait. Il ne se rendait pas compte à quel point il était dépendant des joints qu'il consommait régulièrement pour se détendre et oublier. Il en avait besoin et c'était pareil avec l'alcool. Il minimisait son addiction, pensant que dès que ça irait mieux il pourrait lâcher l'affaire. Alors pour le moment il était persuadé qu'il n'avait aucun problème, en dehors de ceux qu'il essayait de résoudre depuis des années. Et ce n'était pas avec la perte de son meilleur ami que les choses s'étaient arrangées. Au fond, Hänsel lui manquait et il était dégoûté d'avoir découvert le côté homophobe de celui qu'il considérait comme un frère.

« - La clope t'arrêtera bien quand t'en auras vraiment envie », Dit-il en passant sa langue sur ses lèvres avant de grimacer lorsqu'il sentit le goût du sang, « Ou alors t'as pas encore trouvé le bon truc pour remplacer les effets de la nicotine. »

Il pouvait parler, il n'avait pas trouvé de remplacement à ses propres addictions. Même le sexe ne semblait pas le satisfaire suffisamment pour se calmer niveau drogue et alcool.

Un sourire orna les lèvres du blondinet alors qu'Engel réagissait à sa dernière remarque. Ils n'étaient pas censés se revoir. Ils avaient mis les points sur les i et pourtant l'un comme l'autre semblait vouloir passer du temps ensemble. C'était plus fort qu'eux et là même Anna devenait une excuse parfaite pour tenter leur chance de se voir un peu. Mais son ancien amant sembla retrouver son sérieux alors qu'il enchaînait sur une nouvelle tirade. Emmerich ne se souvenait pas de l'avoir vu aussi bavard mais peut-être qu'en trois ans il avait occulté certains passages de leur très courte relation. Après tout, il ne lui avait pas vraiment laissé une place dans sa vie, coupant les ponts sans même finir le premier rendez-vous.

« - Je doute qu'elle cherche l'amour auprès d'Erich », Souffla finalement Emmerich après le soupir d'Engel. Le blondinet n'était pas vraiment sûr de ce que la jeune fille cherchait en tournant autour de ce type. Ils avaient arrêté de s'adresser la parole depuis qu'elle avait appris qu'il n'en avait rien à faire d'elle et surtout depuis que ça avait dégénéré avec la bande lorsqu'il avait avoué aimer les hommes. Mais elle semblait plus vouloir se faire plaisir, appréciant avoir un peu d'attention de la part d'un garçon.

Emmerich avait légèrement décroché pendant quelques secondes, le temps de repenser à tout ce merdier qui composait sa vie, avant de relever le regard vers Engel, surpris de l'entendre lui présenter des excuses. Il sentit ses joues s'empourprer légèrement en repensant à la scène avec Minna. Non, il s'en fichait de ce qui s'était passé avec la jeune fille. Il avait rapidement oublié sa gêne vu ce qu'il avait osé faire juste après en parlant de son faible pour les gars avec un accent, surtout un accent anglais.

« - Oh, non... T'en fais pas pour ça. Limite je préfère subir tes longs discours et les paroles gênantes de Minna que de faire à nouveau face à Elrich. Mon nez a assez souffert pour la soirée ... »

Quelle bonne idée de noyer le poisson. Emmerich préférait ramener la conversation vers sa blessure que de laisser la moindre chance à Engel de parler de ses aveux. Après tout, ils n'avaient pas eu le temps de discuter de ça puisque le blondinet avait filé vers Anna avant de se faire attaquer par Elrich. Bon sang, qu'est-ce qu'il n'avait pas été dire !

« - Enfin ça va hein », Dit-il avant de s'interrompre en sentant son portable vibrer dans sa poche. Il l'attrapa et décrocha après avoir vérifié le nom.

« - Hey … Oh, cool ! T'as été rapide. … Comment tu as fait pour la faire descendre ? », Lança-t-il surpris d'entendre Magda lui dire qu'elle avait récupéré Anna à l'instant et qu'elles allaient partir. La jeune fille lui proposa de venir le récupérer aussi, sentant bien qu'il n'était pas au mieux de sa forme. Mais Emmerich préféra la laisser s'occuper de la brunette, c'était elle la priorité, et il doutait qu'Elrich reviendrait à la charge pour le moment. Il espérait même pouvoir sortir sans se faire cogner à nouveau, quitte à camper dans la salle de bain jusqu'au départ de son agresseur.

« - Non t'en fais pas, tout va bien. … Ouais, occupe-toi bien d'elle. On reparle de tout ça une autre fois. … Oh ta gueule ! », Lâcha-t-il en riant légèrement, rassurant au passage la demoiselle au téléphone, avant de raccrocher. Il reprit bien vite son sérieux, passant une nouvelle fois sa langue sur ses lèvres alors qu'il rangeait son portable dans la poche de son sweat, cherchant en même temps ses mots pour la suite de la conversation.

« - C'était Magda, elle a récupéré Anna. Elle a réussi à la faire descendre sans avoir à passer la porte de ton appart' donc comme ça, y a pas eu de blessés en plus. »

Tu ne peux pas t'empêcher de glousser quand Em' t'assure que tu pourras arrêter quand tu le voudras vraiment. S'il savait. C'était vraiment pas l'envie qui te manquait. Non, c'était juste un peu plus complexe que ta simple volonté. Pourtant ça t'enlèverait une épine du pied de ne plus fumer. "Ou alors t'as pas encore trouvé le bon truc pour remplacer les effets de la nicotine." Tu médites un instant là-dessus. Peut-être qu'il a raison, qu'il te faudrait trouver quelque chose qui rende la clope moins primordiale ? "Peut-être que tu as raison, j'ai pas encore dû trouver."
Puis on vient à parler de Anna. Tu hausses les épaules. "Bah j'espère pour elle. Parce que c'est clairement pas la femme de sa vie." T'avais compris qu'à la base, Anna était plutôt branchée sur Emmerich, mais elle avait dû se rendre à l'évidence, il n'y avait pas moyen. Au début, t'aurais pu croire que c'était pour rendre jaloux le blond, mais certainement qu’entre-temps, avec le coming-out de Em', les enjeux avaient changé.

Vu la réponse du plus jeune lorsque tu te rends compte que tu n'arrêtes plus de parler, tu comprends que même lui a bien vu que tu te montrais plus bavard qu'à l'accoutumée. Bien que tu ne sois pas vraiment du genre silencieux d'habitude pour autant. "Ouais, je parle quand même trop, t'as le droit de le dire !" que tu lui lances avec un ton qui se veut humoristique.
Mais bien vite vous êtes coupés par le téléphone portable du blondinet. Tu captes brièvement ce qu'il se passe au vu des réponses de ton vis-à-vis. Et lorsque celui-ci vient à raccrocher, il appuie ce que tu pensais. "Ok, c'est bien comme ça. On n’avait pas besoin de plus de drama pour ce soir." La soirée avait déjà assez dégénéré comme ça. Y'avait plus qu'à attendre que ça se tasse. T'ignores quel genre d'ambiance règne exactement dans la pièce principale. Mais il y avait fort à croire que pour le moment, toi ou Emmerich, par votre simple présence, pourriez déclencher de nouveau les foudres de Erich. "Bon, la salle de bain c'est pas l'endroit le plus confort de l'appart. Ma chambre est juste en face, donc normalement y'a aucun risque qu'on nous tombe dessus en sortant. Quitte à rester cachés jusqu'à la fin de la fête... Allez, viens !" Parce que très franchement, t'avais juste aucune envie de t’asseoir sur le carrelage. Et certainement qu'à la longue, le tabouret ne devait pas être non plus des plus confortable. De plus, le nez de Em semblait aller un peu mieux, et n'était plus une fontaine de sang, donc vous pouviez vous le permettre.

Une fois ton interlocuteur convaincu, vous ne mettez que quelques secondes pour passer d'une pièce à une autre. "Bienvenue dans mon monde. Fais comme chez toi !" Dis-tu avant de t'affaler sur u pouf situé non loin du lit. T'avais pas mal changé de style niveau déco en trois ans, bien qu'à l'époque, Em' n'avait sûrement pas trop fait attention à ça. Du coup, t'étais passé d'un style assez vintage à quelque chose de plus moderne. Dans un genre un peu industriel. Un grand lit posé sur une armature de bois vieillit apparent, armoire et commodes en ferraille, similaires à des casiers à l'américaine un peu anciens, une lampe minimaliste elle aussi en ferraille comme la plupart de la déco, avec des tons assez clairs, grâce à une imitation de vieux métal abîmé, dans un tout très harmonieux.
Mais l'élément le plus frappant dans la décoration de ta chambre c'était bien le nombre incalculable de photos qui recouvraient la quasi-totalité des murs imitations pierres. L'ensemble qui servait presque de nouveau papier peint personnalisé. Ces murs, preuve de longues années de travail, d'acharnement, de progrès dans une passion qui te tient tellement à cœur. Une grande partie de ces photos narrent des événements plus ou moins marquants de ta vie, comme un puzzle géant à assembler, et qui évolue avec le temps. Évidemment tout ton travail n'est pas exposé ici, malgré le nombre colossal de clichés. Les autres, qui te plaisaient moins, qui seraient en disharmonie avec l'ensemble de la pièce, ou encore certains souvenirs dont tu voulais te détacher étaient pourtant bel et bien conservés précieusement ailleurs, à l’abri des regards. Parce que jamais tu ne pourrais te résoudre à te débarrasser de la moindre photo que tu as pu prendre dans ta vie.
D'ailleurs, si trois ans plus tôt, Emmerich n'avait pas été un si mauvais souvenir, sans nul doute qu'il figurerait lui aussi quelque part par là. Mais t'avais plutôt préféré le laisser derrière toi, parce qu'après tout il n'y avait rien eu de vraiment concret. Rien qui ne méritait de voir sa tête tous les jours en te levant. Tu ignorais si Em' se souvenait que tu l'as pris en photo durant la sortie au Zoo. Peut-être avait-il oublié. M'enfin ça n'avait pas grande importance. Il n'y avait pas de raison que ça ressorte dans la discussion après tout. N'est-ce pas ? "Avoue, c'est quand même un peu plus cosy pour squatter que la salle de bain !"

La situation venait de prendre une tournure plus agréable maintenant qu'Anna était partie de l'appartement et ce sans créer en plus de problèmes. Magda avait toujours réussi à s'en sortir, elle donnait l'impression d'être assez farouche, je m'en foutiste mais en réalité elle était très forte pour observer les gens et trouver les mots justes pour les faire bouger. Combien de fois avait-elle réussi à faire tomber Emmerich dans son piège ? Il se souvenait encore de quelques plans bien foireux même si au final il s'était toujours plus ou moins bien amusé avec son amie. Elle était simple comme fille et puis elle était loin d'être une chieuse de service comme Anna. Parfois Magda lui faisait penser à un garçon manqué mais qui savait parfaitement porté de belles robes quand elle le voulait. « Je pense qu'on a eu notre dose, en effet » Confirma Emmerich en réponse à la réplique d'Engel avant que celui-ci propose de migrer vers sa chambre. S'ils pouvaient ne pas retrouver Elrich en route et être dans des conditions plus confortables, le blondinet n'allait pas se faire prier. Son nez avait arrêté de saigner et à priori il ne risquait pas de recommencer à moins de se prendre un nouveau coup. « Bonne idée. Je te suis. »

Ce n'était pas la première fois qu'il voyait la chambre d'Engel mais c'était la première fois où il allait faire attention à la décoration. Pour être honnête, lorsqu'ils avaient passé leur première nuit ensemble, le plus jeune avait autre chose en tête que d'admirer la pièce. Mais cette fois, ils y allaient pour avoir un peu plus de confort et non pour remettre le couvert. Même si Emmerich avait fait plusieurs sous-entendus dans la soirée, il n'avait pas encore émis l'idée qu'ils pourraient recommencer un jour. Pour lui, ce n'était que du jeu, rien de plus. « Merci », Dit-il presque timidement alors qu'il avançait dans la pièce pour détailler les nombreuses photo aux murs. C'était la chose qui l'avait frappée en entrant. Il savait que l'hôte de la soirée avait une passion pour la photo, il l'avait déjà vu avec un appareil entre les doigts, mais il ne pensait pas qu'il en prenait autant. C'était bluffant ! En plus, plus il détaillait les clichés, plus il prenait conscience du niveau d'Engel. « Ouais plus cosy », Répondit-il d'un air distrait alors qu'il était incapable de lâcher du regard les photos affichées « Et puis y a vachement plus de choses à faire ! J'ai l'impression de pouvoir retracer toute ta vie rien qu'en regardant tes photos ! » Ou presque toute sa vie. Emmerich doutait retrouver son visage dans les clichés sous ses yeux et d'un côté, il était bien content. Il détestait être pris en photo. Les seuls moments où il postait une photo de lui sur son Instagram c'était parce qu'il était complètement bourré ou parce qu'il faisait le con dessus. C'était bien plus simple que de s'aimer soi-même. Il donnait probablement l'impression d'être bien dans sa peau mais il était régulièrement confronté à des insomnies où il se demandait qu'est-ce qui pourrait le rendre intéressant. Il n'avait aucune passion et il faisait qu'enchaîner les échecs. C'était à se demander comment il faisait pour garder des amis à ses côtés... Et surtout si ses enseignants et sa mère n'avaient pas raison en disant qu'il était un cas désespéré.

« Est-ce que tu me laisses deviner ou tu veux bien me raconter quelques histoires ? » Emmerich préféra lancer un sujet au hasard, forcément à force de regarder les photos il avait automatiquement pensé à ça. Et puis s'il laissait ses pensées divaguer sur ses problèmes, il allait plomber l'ambiance. Ils étaient coincés là alors autant faire en sorte que tout se passe bien, non ?